Actualités en droit de la famille
Par Nathalie Baugniet, Marie Dechamps, Julie Mary et
()
À propos de ce livre électronique
Cet ouvrage contient les exposés approfondis présentés lors de l’après-midi d’étude organisé sous l’égide de la Conférence du jeune barreau du Brabant wallon le 11 décembre 2015. Chacun des acteurs présents apportant son éclairage sur des questions de pratique quotidienne.
Les questions choisies seront abordées sous un angle tant scientifique que pratique afin d’atteindre ce but.
À côté des sujets relevant du droit des personnes (les incapacités) et du droit patrimonial de la famille (la procédure de liquidation-partage), seront abordées deux autres thématiques (la protection internationale des enfants et les aliments) sous l’angle du droit international privé, ce qui devient nécessaire au vu des éléments d’extranéité qui assortissent régulièrement les affaires familiales.
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Aperçu du livre
Actualités en droit de la famille - Nathalie Baugniet
Pour toute information sur nos fonds et nos nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez nos sites web via www.larciergroup.com.
© Groupe Larcier s.a., 2016
Éditions Larcier
Espace Jacqmotte
Rue Haute, 139 - Loft 6 - 1000 Bruxelles
Tous droits réservés pour tous pays.
Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
EAN 978-2-8044-8788-1
« Il n’y a pas plus grande arme que la connaissance, ni de plus grande source de connaissance que l’écrit »
(Malala Yousafzai)
Afin que tous puissent profiter de la connaissance, la Conférence du jeune barreau de Nivelles (Brabant wallon) vous propose la présente collection, réalisée en collaboration avec le Groupe Larcier, reprenant les contributions écrites des thèmes abordés lors de nos colloques.
En effet, dans le cadre de la formation permanente des avocats, notre ASBL a, entre autres, pour objectif l’organisation d’activités scientifiques et notamment de colloques abordant tout sujet juridique d’actualité.
Dans la même collection :
Droit de la responsabilité. De la détermination des responsabilités à l’évaluation du dommage, un parcours interdisciplinaire, sous la coordination d’Isabelle Reusens, 2015
Sommaire
1. La protection judiciaire des incapables majeurs, une analyse pratique après un an d’application
Eléonore Westerlinck et Claudine Vroonen
Introduction
Section I
L’esprit de la loi du 17 mars 2013
Section II
Le régime de l’assistance versus le régime de la représentation
Section III
Le sort des actes accomplis par la personne protégée seule
Section IV
La requête introductive de protection judiciaire et la problématique du certificat médical
Section V
La personne de confiance
Section VI
Questions choisies en matière de protection judiciaire à la personne
Section VII
Les changements prévus dans la rédaction des rapports de l’administrateur
Section VIII
Les honoraires
Conclusions
2. Questions pratiques en matière de liquidation-partage
Nathalie Baugniet et Jean-Marc Thiery
Partie 1 : L’application de l’article 19 alinéa 3 du Code judiciaire dans la procédure de liquidation-partage : à la recherche du temps perdu
Introduction
Section I
La réforme du Code judiciaire de 2007
Section II
L’article 19 alinéa 3 du Code judiciaire à l’aune des dispositions relatives à la liquidation-partage
Conclusion
Partie 2: le règlement liminaire des contestations en matière de liquidation-partage : quelle utilité ?
Section I
L’identification des contestations préalables
Section II
Une valse du juge au notaire et du notaire au juge : quel rôle pour l’avocat ?
Conclusion
Conclusion générale
3. L’articulation des différents instruments de droit international privé ou comment « jongler » en matière d’autorité parentale
Julie Mary
Introduction
Section I
Cas pratique et présentation des instruments
Section II
Règles de compétence internationale
Section III
Règles de conflit de lois et règles sur l’efficacité des décisions étrangères
Conclusion
4. Le règlement des litiges transfrontières relatifs aux obligations alimentaires
Marie Dechamps
Introduction
Section I
L’obtention d’une décision condamnant au paiement d’une contribution alimentaire
Section II
La reconnaissance, la force exécutoire et l’exécution des décisions portant sur les aliments
Section III
Le recouvrement des aliments : La coopération administrative et l’accès à la justice
Conclusion
1
La protection judiciaire des incapables majeurs, une analyse pratique après un an d’application
Eléonore
Westerlinck
Avocat au barreau du Brabant wallon et administrateur de biens
et
Claudine
Vroonen
Avocat au barreau du Brabant wallon, administrateur de biens et syndic des administrateurs de biens du barreau du Brabant wallon
Introduction
Section I
L’esprit de la loi du 17 mars 2013
Section II
Le régime de l’assistance versus le régime de la représentation
Section III
Le sort des actes accomplis par la personne protégée seule
Section IV
La requête introductive de protection judiciaire et la problématique du certificat médical
Section V
La personne de confiance
Section VI
Questions choisies en matière de protection judiciaire à la personne
Section VII
Les changements prévus dans la rédaction des rapports de l’administrateur
Section VIII
Les honoraires
Conclusions
Introduction
Le législateur, en votant la loi du 17 mars 2013, a voulu répondre à deux objectifs : celui d’uniformiser les anciens régimes d’incapacité¹ et de se conformer aux règles internationales²³. Les principes adoptés dans la réglementation internationale sont ceux de la nécessité, la proportionnalité et la subsidiarité de la mesure de protection⁴.
Dans la droite ligne de la loi du 18 juillet 1991 et de ses modifications législatives subséquentes, le nouveau régime se focalise encore plus sur la place à donner à la personne protégée, sur l’amélioration de son sort. L’objectif est une réelle humanisation du régime de protection. Telle est la volonté du législateur.
La loi du 17 mars 2013 tente de créer un juste équilibre entre la mise sous protection et le respect des droits de la personne incapable. Elle doit rester un acteur à part entière de la vie économique et sociale. En conséquence, elle doit pouvoir conserver un maximum de droits et obligations.
Il ne peut être nié que le fait d’être flanqué d’un régime d’incapacité, peut être difficile à supporter et à comprendre lorsque la personne n’a pas conscience de ses difficultés ou ne les acceptent pas (personne influençable, difficultés de mémoire, inexistence d’handicap moteur mais existence d’amoindrissements des capacités physiques, maladie mentale ou de troubles de personnalités non reconnus).
Cette volonté du législateur de mettre en place un système de protection qui doit se calquer à l’incapacité de la personne pour déboucher à la solution la plus adaptée, oblige l’administrateur à accomplir sa mission en fonction de cette idée. Les mesures de protection devraient être les moins intrusives/contraignantes possibles pour maintenir la plus grande autonomie.
Tout cela est louable, mais est-ce réalisable ? Est-ce raisonnable en termes d’efficacité de la protection ?
Cette contribution tente de faire une première analyse de la mise en pratique de la Loi par rapport aux vœux du législateur.
I. L’esprit de la loi du 17 mars 2013
L’administrateur n’est plus dénommé administrateur provisoire. Il est administrateur à la personne ou aux biens ou les deux en fonction de la mission qui lui est confiée.
La mission de l’administrateur dépend étroitement de l’ordonnance du juge de paix puisqu’il doit fixer la mesure en fonction du besoin de protection de la personne. En principe, l’esprit de la nouvelle loi est d’éviter de fixer des missions générales de manière systématique.
Si dans le cadre de l’ancienne législation, la mission de l’administrateur provisoire était aussi liée à l’ordonnance de désignation, cette mission pouvait être large voire générale (incapacité totale aux biens) ou simplement spéciale (c.à.d. pour un acte spécifique). L’ancienne loi permettait déjà cette personnalisation qui a, en fin de compte, était peu pratiquée. Aujourd’hui, le juge de paix est censé créer une protection personnelle fonction de la personne, en sorte que l’administrateur (que ce soient aux biens et/ou à la personne) devra y être particulièrement attentif. N’était-ce pas déjà le cas pour la plupart des administrateurs dits professionnels ?
Le choix du législateur est d’éviter au maximum d’atteindre à la capacité de la personne.
Alors que ce n’était pas le cas dans le cadre de l’ancienne législation, la capacité redevient la règle et l’incapacité l’exception⁵.
Si le respect de la personne correspond au choix de nos sociétés, il faut reconnaître que la manière dont le législateur a voulu mettre en pratique ce respect, pourrait conduire à ce qu’en réalité, ce vœu ne reste qu’un vœu pieu. En effet, les contraintes matérielles et la réalité quotidienne ne le permettent pas. Par exemple, aucun administrateur ne pourra empêcher le démarchage, les achats par internet dans les boutiques proposées à la télévision. Que faire lorsque la personne protégée souscrit un abonnement GSM inadapté, un contrat de fourniture électricité trop coûteux ?
N’est-ce pas la personne âgée, désorientée vivant dans une maison de repos qui est, concrètement, la moins vulnérable socio-économiquement alors que c’est elle qui, et ce logiquement sur le plan des principes, se verra flanquée d’un régime de protection plus large ?
N’est-ce pas la personne qui parvient à mener une vie la plus autonome possible qui est la plus vulnérable et la meilleure proie pour le chat ? Nous pensons, par exemple, aux personnes atteintes de troubles de personnalité ou psychiatriques qui doivent suivre une médication régulière mais qui ne sont pas à l’abri de périodes de décompensation.
Il faut être réaliste, l’administrateur n’a pas les moyens d’accompagner la personne protégée ou lui apprendre à ne pas être pris au piège par ses difficultés. Nous considérons qu’il n’en a pas la vocation. Son rôle n’est pas d’éduquer mais de protéger en mettant en place tous les moyens possibles, principalement juridiques, pour éviter l’accomplissement de certains actes et pour les annuler ou à tout le moins les rendre sans effet.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 1991, l’administrateur provisoire a été confronté à la difficulté de respecter au mieux la personne, de tenir compte de son histoire, alors même que la mesure ne portait que sur les biens. L’administrateur provisoire gérait des biens, oui, mais les biens d’une personne.
La volonté de respecter au mieux l’autonomie de la personne se trouvait dans la manière dont le juge de paix modalisait la mission de l’administrateur et surtout, dans la manière dont l’administrateur provisoire concevait sa mission avec le concours de la personne protégée.
II. Le régime de l’assistance versus le régime de la représentation
L’art. 488/1 nouveau du Code civil énonce que « le majeur, qui en raison de son état de santé, est totalement ou partiellement hors d’état d’assumer lui-même, comme il se doit⁶, sans assistance ou autre mesure de protection, fût-ce temporairement la gestion de ses intérêts patrimoniaux ou non patrimoniaux, peut être placé sous protection si et dans la mesure où la protection de ses intérêts le nécessite ».
Le législateur a choisi de faire primer le régime d’assistance sur le régime de représentation : « En l’absence d’indication contraire dans l’ordonnance, la personne protégée est seulement assistée dans l’accomplissement des actes pour lesquels elle a été déclarée incapable »⁷. C’est une des applications du principe de nécessité prévu par le droit international⁸.
Jusqu’à cette nouvelle législation, l’administrateur provisoire avait pour mission de gérer les biens d’une personne ou d’assister cette personne dans cette gestion⁹. Le régime d’assistance pouvait être choisi, il ressort de la pratique que le régime de représentation était préféré. L’incapacité était la règle qu’elle soit totale ou partielle. Le régime de représentation était devenu la préférence même si le législateur avait clairement indiqué que la personne protégée pouvait être assistée.
Dans la plupart des cas, les juges de paix confiaient une mission de représentation pour le patrimoine de la personne protégée alors que, lors de l’entrée en vigueur de la loi de 1991, beaucoup d’auteurs et de praticiens ont insisté sur le fait que le régime de protection de l’administration provisoire permettait de moduler l’incapacité en fonction des besoins de la personne et donc de ne pas hésiter à recourir au régime d’assistance. Il faut pourtant bien constater que la majeure partie des ordonnances ont bien vite fixé une mission de représentation générale et qu’il a été peu recouru au régime de l’assistance et de mission de représentation partielle.
L’article 492/1, § 1er, al. 3, nouveau du Code civil (pour ce qui est de la protection de la personne) et l’article 492/1, § 2, al. 3, nouveau du Code civil (pour ce qui est de la protection aux biens) énoncent clairement le prisme au travers duquel l’administrateur devra comprendre sa mission : la capacité est la règle et l’incapacité l’exception¹⁰¹¹.
Le juge de paix doit au moins se prononcer quant à la capacité de la personne à poser une série d’actes énoncés dans ces dispositions¹². Ceci devrait permettre au juge de paix de modaliser la mission de l’administrateur et de respecter au mieux la capacité de la personne.
Dès lors, en dehors des actes ou catégorie d’actes en rapport avec les biens ou la personne pour lesquels le juge de paix s’est prononcé, la personne protégée est capable et reste capable.
Ceci signifie que le degré de protection dépendra plus que jamais de la liste des actes suivant laquelle le juge de paix considère que la personne est devenue incapable de poser. La mission de l’administrateur serait d’autant plus précise.
Les lois en matière de régime d’incapacité sont de stricte interprétation. La mission de l’administrateur ne sera générale que lorsque le juge de paix aura considéré que la personne est devenue incapable de poser tous les actes énoncés par la loi dont, particulièrement, les actes appelés de gestion journalière.
Il est apparu évident pour les praticiens que la mission de l’administrateur sera plus difficile lorsque les actes de gestion quotidienne, acte visés dans la liste, ne seront pas visés.
II.1. L’assistance judiciaire
L’assistance judiciaire, qui constitue donc le droit commun de la protection judiciaire, veut que l’administrateur soit présent lors de la passation d’un acte puisque sa mission sera de vérifier la valeur et l’utilité de l’acte pour l’incapable. Il agira soit en ayant donné son accord préalable soit en co-signant l’acte juridique.
L’administrateur ne sera donc plus initiateur d’un acte juridique nécessaire au patrimoine de la personne protégée. Il ne pourra agir qu’à la demande de celle-ci.
La pratique montre que le régime d’assistance est difficilement voire inapplicable pour les administrateurs professionnels. L’assistance suppose une réelle présence quotidienne que nous ne pouvons fournir. En outre, bien des prestataires de services, les banques et les assurances, ne disposent pas d’un système permettant d’organiser le régime de l’assistance comme le législateur l’a imaginé.
Nous prendrons deux exemples.
• Un administrateur a été désigné pour assurer la gestion des biens, dans le cadre d’un régime d’assistance, d’une personne âgée pratiquement aveugle, très malentendante et ne pouvant plus se déplacer seule même en chaise en roulante. Le juge de paix considérant que cette personne disposait encore de toutes ses facultés mentales, a estimé que le régime de l’assistance était le plus respectueux pour cette personne. Or, comment l’administrateur peut effectuer sa mission qui consiste à marquer son accord sur un acte que la personne doit ou souhaite effectuer alors que cette personne est physiquement incapable de le faire. Nous pensons à un simple paiement bancaire¹³.
• Les institutions financières sont, à ce jour, incapables de distinguer les régimes d’assistance ou de représentation, lorsque la mission est générale. Selon celles-ci, dès qu’une mesure de protection est prononcée, la personne devient totalement incapable. Ainsi, la personne sous régime d’assistance est considérée comme incapable. La nouvelle législation tend à conserver une autonomie de la personne et les institutions financière continuent à appliquer l’ancien régime.
Le régime de l’assistance suppose l’accompagnement de la personne, la possibilité de communiquer facilement avec elle, l’administrateur disposera-t-il de tous les outils pour ce faire ? Les intervenants sociaux, psycho-sociaux et la personne de confiance seront plus que jamais une aide précieuse.
II.2. La représentation
Le recours au régime de la représentation est envisagé de manière subsidiaire et uniquement pour des actes pour lesquels l’assistance ne suffirait pas.
Le régime de représentation suppose l’interdiction pour l’incapable de poser personnellement certains actes ou tous les actes concernant son patrimoine et/ou sa personne. Il est vrai que ce régime ne suppose pas une collaboration étroite avec la personne protégée mais la loi actuelle comme l’ancienne loi, la loi exige que l’administrateur associe la personne protégée à l’exercice de sa mission soit en la consultant soit en l’informant.
Par opposition à l’assistance, ce régime de représentation permet à l’administrateur d’être initiateur d’actes de gestion patrimoniale.
L’efficacité de ce régime est plus grande. Nous sommes convaincues qu’il n’empêche pas le respect de la personne protégée. Il suffit de se conformer à l’obligation légale d’accomplir sa mission en associant la personne protégée, qui, en outre, peut être accompagnée d’une personne de confiance.
On comprendra vite que si le législateur a voulu respecter au mieux l’humanité de la personne en mettant en place le régime de l’assistance, ce régime pourrait ne pas être la meilleure des solutions sur le plan concret.
Avant l’entrée en vigueur, nous pensions déjà qu’il existerait un risque que les juges de paix rédigent des missions extrêmement larges accompagnées d’un régime de représentation pour permettre à l’administrateur de mener sa mission de manière efficace¹⁴. Ce sera pourtant contraire aux vœux de la loi et en tant praticiennes, nous nous en réjouissons.
II.3. La modification de mission
Il existe un risque certain que l’administrateur soit régulièrement demandeur de voir sa mission élargie parce qu’il s’avèrera que certains actes doivent être posés dans l’intérêt de la personne protégée alors qu’elle n’est pas collaborante ou qu’elle n’a pas conscience de sa nécessité.
Si les juges de paix veulent respecter à la lettre le prescrit de la loi, ils devraient limiter le mandat de l’administrateur en fonction de ce qu’ils auront pu comprendre et