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Le contrat de travail : aspects théoriques et pratiques
Le contrat de travail : aspects théoriques et pratiques
Le contrat de travail : aspects théoriques et pratiques
Livre électronique1 625 pages21 heures

Le contrat de travail : aspects théoriques et pratiques

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À propos de ce livre électronique

L’ouvrage, conçu comme un manuel juridique du contrat de travail, se veut à la fois théorique et pratique. Théorique, d’abord, parce qu’il analyse de manière systématique l’ensemble des dispositions légales qui règlent la formation, l’exécution et la dissolution du contrat de travail, théorique ensuite parce qu’il examine de manière minutieuse l’application qui en est faite par la jurisprudence, et l’interprétation qui en est donnée par la doctrine.
Pratique, parce qu’il ambitionne d’apporter une réponse juridique aux nombreuses questions qui se posent actuellement dans la vie d’un contrat de travail. Il examine dès lors et notamment les critères d’existence du contrat de travail et des autres relations de travail non salariées au regard de la conception nouvelle du lien de subordination distinguant dans les relations de travail, l’autorité juridique et l’autorité économique. Il s’attache à l’analyse des modalités requises à la formation du contrat, aux règles applicables à la responsabilité professionnelle du travailleur, au transfert d’entreprise, aux différentes causes de suspension du contrat de travail et à leurs régimes de protection spécifiques, enfin aux modes de cessation du contrat de travail réglés par le code civil et la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail.
L’ouvrage s’attache essentiellement à déterminer les règles légales ou jurisprudentielles qui régissent aujourd’hui le contrat de travail, malmené plus que tout autre contrat de droit commun, par les contingences de la vie économique et ses inévitables répercussions sur la vie contractuelle. La référence de plus en plus fréquente aux règles de droit civil, donc au principe de l’autonomie de la volonté, pour le réglementer, et l’adoption régulière de nouvelles législations ou dispositions insérées dans les lois-programmes en vue de restreindre la protection des travailleurs en sont des exemples frappants. La publication de l’ouvrage vient donc à point.
LangueFrançais
ÉditeurBruylant
Date de sortie17 avr. 2013
ISBN9782802741121
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    Aperçu du livre

    Le contrat de travail - Viviane Vannes

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    L’Académie de droit international humanitaire et de droits humains n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les publications de la collection.

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Softwin pour le Groupe De Boeck.

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    Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : www.bruylant.be

    © Groupe De Boeck s.a., 2012

    Éditions Bruylant

    Rue des Minimes, 39 • B-1000 Bruxelles

    Tous droits réservés pour tous pays.

    Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.

    ISBN : 978-2-8027-4112-1

    Avant-propos

    « Chaque Homme est une humanité,

    une histoire universelle »

    Jules Michelet

    La richesse du droit du travail est dans son contenu. Ce droit est à tout moment le reflet de la société, de ses exigences éthiques, économiques et sociales. L’histoire du droit social est celle d’un balancier guidé par les contingences économiques d’un pays.

    La caractéristique essentielle de la matière des contrats de travail est celle de son évolution constante. Elle aussi sa principale difficulté.

    Cette évolution constante, les nouvelles dispositions légales et réglementaires et l’importante jurisprudence rendue depuis la première édition de cet ouvrage ont amené à la rédaction d’une seconde édition.

    Comme dans la première édition, l’objet de l’ouvrage est d’analy-ser de manière scientifique les diverses problématiques liées à la formation du contrat de travail, à son exécution et à sa résiliation. Le lecteur n’y trouvera donc guère des réflexions philosophiques élabo-rées ; mais une analyse de la jurisprudence qui devrait lui permettre de résoudre les problèmes juridiques liés à la vie du contrat de travail.

    L’ouvrage a aussi pour objectif de cerner les principales contro-verses doctrinales et jurisprudentielles de la matière analysée et les solutions juridiques des litiges entourant le contrat de travail. Certaines parties de la matière, en raison de l’intérêt qu’elles portent pour les parties liées par un contrat de travail, sont plus dévelop-pées que d’autres parties.

    Le droit du travail est toujours l’expression, à un moment donné, de la vie de l’homme dans la société professionnelle. Il est en cela porteur d’une richesse infinie ; il est à la frontière entre le droit, la psychologie, la sociologie, l’éthique, l’économie nationale et mon-diale. Plus d’une réflexion est donc requise pour aborder le droit du travail et pour trouver une solution adéquate à ses nombreux litiges.

    Première partie.

    La loi du 3 juillet 1978 et la notion du contrat de travail

    Titre I.

    La nature de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail

    Chapitre I. – Le particularisme du droit individuel du travail

    1. – Le droit du travail présente un caractère original qui le différencie nettement du droit des contrats et lui confère une spécificité propre. Il doit compenser l’inégalité fondamentale existant entre le travailleur et l’employeur.

    Comme l’écrit J. Gillain, « Il n’y a aucune égalité entre « celui qui cherche du travail » ou « qui est obligé d’engager sa force de travail au profit d’un autre » et « celui qui embauche après avoir examiné diverses candidatures », « celui qui donne du travail ». Le premier poussé par des nécessités économiques pouvant être amené à accepter des conditions peu compatibles avec sa dignité, conditions émises souverainement par le second, véritable maître du jeu contractuel, car il dispose du choix. De là, la volonté de rechercher un moyen de compenser cette inégalité par l’imposition de règles strictes destinées à protéger le travailleur »(1).

    Dans le cadre de la relation contractuelle, le travailleur est considéré comme la partie faible qui doit être protégée de certains abus de l’employeur. La loi du 3 juillet 1978 a adopté donc un ensemble de dispositions qui doivent assurer le respect de règles minimales adoptées en faveur du travailleur. Elles sont dites impératives car elles ont pour but d’assurer la protection du travailleur en prévoyant de normes minimales auxquelles l’employeur ne peut déroger.

    Chapitre II. – L’évolution de la portée juridique des lois relatives au contrat de travail

    Section I. – Le droit individuel du travail est d’abord civiliste : la règle de l’autonomie des volontés

    2. – Jusqu’à l’adoption de la loi du 10 mars 1900 sur le contrat de travail et de celle du 7 août 1922 sur le contrat d’emploi, le droit social est réglé par le droit civil et son principe fondamental de base de l’autonomie de la volonté. Il est fixé en des termes forts par l’article 1134 du code civil qui énonce que : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

    Au cours du 20ème siècle, le droit individuel du travail et le droit social dans sa globalité vont progressivement acquérir un sens résolument protecteur de la personne qui fournit le travail à l’encontre de la personne qui donne le travail.

    Le particularisme protecteur de la partie faible, le travailleur, à l’encontre de la partie forte, l’employeur, au contrat de travail distingue le droit social du droit civil.

    La loi du 10 mars 1900 a entendu apporter certaines exceptions au principe de l’autonomie de la volonté ; mais elle est essentiellement civiliste. Elle proclame le principe de l’égalité des deux parties : le patron et l’ouvrier. Elle comprend en règle des dispositions supplétives qui ne valent que lorsque les parties n’ont pas convenu d’autres dispositions contractuelles(2). Si elle prévoit en faveur de l’ouvrier un préavis de 7 jours, cette disposition est simplement supplétive. L’employeur peut l’écarter. Il faudra attendre les lois du 4 mars 1954 et 11 mars 1954, qui ont augmenté les délais des préavis des ouvriers et des employés, pour constater que le législateur leur a donné un caractère d’ordre public ou impératif(3). La loi de 1900 contient seulement quelques dispositions impératives devant assurer la protection de la partie faible au contrat de travail, essentiellement celles concernant la protection de la rémunération.

    La loi du 7 août 1922 sur le contrat d’emploi est également, en principe, supplétive. Elle comprend toutefois substantiellement plus de dispositions impératives que la loi du 10 mars 1900. Elles concernent la protection de la rémunération(4), les clauses relatives à la durée du préavis(5), les absences pour recherche d’emploi pendant la durée du préavis, la suspension du préavis pendant les périodes d’incapacité de travail.

    3. – Ces deux lois de 1900 et 1922 ont été successivement modifiées par d’autres lois qui les ont complétées en renforçant leur caractère impératif ou en excluant la possibilité d’une disposition supplétive.

    P. Horion relevait, à cet égard, que « les dispositions impératives ou prohibitives sont devenues tellement nombreuses que certains prétendent qu’il n’y a plus de place pour le concept contractuel »(6).

    Cette observation doit être précisée.

    Les dispositions impératives fixent des normes minimales de protection des travailleurs. Il en résulte que les parties peuvent convenir d’un salaire supérieur au minimum visé en commission paritaire, d’un horaire de travail inférieur à la durée légale maximum de travail, d’une durée de préavis plus longue que celle fixée par la loi. Le contrat de travail reste un contrat librement négocié mais dans les limites fixées par la loi ou la convention collective de travail.

    Section II. – Le droit individuel du travail est impératif – Il assure la protection de la partie faible

    4. – La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail a un caractère, à notre avis, totalement impératif. L’article 6 sous entend ce caractère impératif en énonçant que : « toute stipulation contraire aux dispositions de la présente loi est nulle pour autant qu’elle vise à restreindre les droits des travailleurs ou à aggraver leurs obligations ».

    L’article est clair. La disposition contractuelle qui contrevient à une mesure minimale de protection est nulle. A contrario, celle qui est plus favorable que la norme minimale de protection est valable. Les termes « pour autant » visés à l’article 6 sont explicites. La nullité de la clause résulte de ce que soit elle restreint les droits des travailleurs soit elle aggrave les obligations.

    Les travaux préparatoires de la loi du 3 juillet 1978 sont d’ailleurs révélateurs de la portée juridique qu’il convient de donner à l’ensemble de la loi. Ils soulignent que « sauf dérogation spécialement prévue dans une disposition déterminée, les dispositions de la présente loi et de ses arrêtés d’exécution ont un caractère impératif(7). Au sens de ce texte, toutes les dispositions de la loi du 3 juillet 1978 sont impératives.

    Chapitre III. – La portée juridique des concepts : ordre public, impératif, supplétif

    5. – La distinction classique entre les notions de lois d’ordre public, impératives, supplétives est importante. Elle entraîne des effets différents sur le contrat de travail.

    Section I. – L’autonomie de la volonté et l’ordre public

    6. – L’origine de la distinction entre les différents concepts émane de la reconaissance du principe de l’autonomie de la volonté. Revendiqué au moment de la Révolution Française de 1789, consacré par le code civil de 1804 par l’article 1134 du code civil qui énonce, que « les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites », il a dominé tout le 19ème siècle. Il implique que les parties sont libres dans l’élaboration de leur contrat et qu’elles le négocient en parfaite égalité. Elles ont le pouvoir de régler elles-mêmes et sans contrainte les conditions et modalités de leur convention.

    Les seules limitations au principe de l’autonomie des volontés contractuelles sont fixées par l’article 6 du code civil qui dispose que : « on ne peut déroger par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ». On ne peut y déroger, et ce même dans un sens plus favorable aux intéressés. Telle est la portée d’une disposition d’ordre public.

    A cette époque, l’ordre public comprenait les lois relatives à l’organisation de l’Etat, les lois fiscales et pénales, les lois réglant la structure de la famille, le régime de la propriété et les lois garantissant les libertés individuelles(8).

    7. – Dès le début du 20ème siècle, le principe de l’autonomie de la volonté contractuelle des parties a été entravé par des considérations économiques et sociales qui ont amené le législateur à adopter des lois protectrices des intérêts privés des citoyens. L’inégalité économique et sociale entre les parties au contrat née du développement du capital privé et de l’avènement d’une nouvelle classe sociale, le prolétariat, expliquent que le législateur ait voulu réglementer d’autorité certains contrats sans possibilité pour les parties d’y déroger par voie de disposition contractuelle contraire(9). A l’époque, les multiples interventions du législateur qui avaient pour objet de pallier aux inégalités entre les citoyens amenèrent certains auteurs à parler de l’avènement d’un « ordre public social de protection » et d’un « ordre économique de direction »(10).

    L’intervention du législateur dans le domaine du droit des contrats s’est poursuivie. Elle se manifeste par l’adoption de dispositions impératives ou d’ordre public qui entravent de manière absolue ou relative le principe de l’autonomie des volontés des parties dans l’élaboration de contrats de nature économique ou sociale. A la différence du siècle dernier, où les interventions du législateur se cantonnaient dans le domaine politique et avaient pour objet la défense de l’intérêt général, les interventions actuelles du législateur pénètrent le domaine économique et social. Elles ont pour objet tantôt la défense de l’intérêt général tantôt la défense de l’intérêt privé.

    La transformation du droit a amené la doctrine à distinguer dans les dispositions impératives, les dispositions impératives d’ordre public protégeant l’intérêt général et les dispositions impératives de protection d’intérêt privé.

    Section II. – La disposition d’ordre public

    8. – Selon la définition de l’ordre public donnée par le procureur général Ganshof van der Meersch, « la disposition d’ordre public interne est celle qui touche aux intérêts essentiels de l’Etat ou de la collectivité ou qui fixe, dans le droit privé, les bases juridiques sur lesquelles repose l’ordre économique ou moral de la société »(11).

    Les lois d’ordre public ont pour objet le respect de l’intérêt général. Elles expriment – au moment où l’on raisonne – l’ensemble des principes écrits ou non écrits, considérés comme fondamentaux(12). Elles reposent sur l’idée capitale, mais abstraite, que l’intérêt général ne peut être compromis par des intérêts particuliers. La caractéristique principale, sinon l’essence de l’ordre public, est celle de son intangibilité. Les dispositions d’ordre public sont de stricte interprétation parce qu’elles protègent un « intérêt général » et non un « intérêt particulier ». Ces lois, de caractère absolu, excluent tout dérogation(13).

    Il découle de ces considérations que les caractéristiques des dispositions d’ordre public sont les suivantes :

    a) la disposition est d’application stricte. Elle s’impose de manière absolue ;

    b) sa violation est frappée de nullité absolue(14). La nullité peut être invoquée par les deux parties et elle doit être soulevée d’office par le juge ;

    c) il ne peut y être dérogé, même dans un sens plus favorable au travailleur(15) ;

    d) elle se prescrit par 30 ans.

    Section III. – La disposition impérative

    9. – Selon la définition de la loi impérative, donnée par le conseiller Meeus, « les lois impératives, soit qu’elles imposent une obligation ou une formalité, soit qu’elles édictent une interdiction, sont celles auxquelles il est interdit de déroger, mais qui ne sont pas d’ordre public parce qu’elles protègent des intérêts principalement privés »(16).

    La loi impérative est celle qui assure la protection des intérêts privés des citoyens et qui en raison de son objet interdit les conventions individuelles dérogatoires(17). Elle ne touche pas aux intérêts essentiels de la collectivité comme les lois d’ordre public mais aux intérêts des particuliers. Elle a pour objet de protéger la partie économiquement et socialement faible contre les abus dont elle pourrait être l’objet en matière économique(18) ou social(19).

    La loi impérative est étrangère à l’ordre public. Elle entend consacrer des intérêts privés entre les citoyens et non des intérêts généraux. La méconnaissance des règles impérative n’entraîne dès lors qu’une nullité relative(20). La différence entre les dispositions d’ordre public et les dispositions impératives réside dans la nature des sanctions et dans les possibilités de dérogations.

    Les caractéristiques de la disposition légale impérative sont les suivantes :

    a) La violation de la disposition impérative est sanctionnée de la nullité relative. La personne protégée par la disposition légale peut, seule, invoquer la nullité de la disposition qui y contrevient. La nullité ne peut être soulevée d’office par le juge ;

    b) la personne protégée peut « confirmer » l’acte nul et renoncer à invoquer la nullité après la cessation de la période pendant laquelle elle est protégée. La confirmation suppose une volonté saine et libre. En conséquence, la personne protégée ne peut renoncer qu’au moment où la partie économiquement forte ne peut plus exercer de pression sur elle soit au moment de la cessation du contrat(21) ;

    c) elle se prescrit par 10 ans.

    Section IV. – La disposition supplétive

    10. – La disposition supplétive est celle qui donne aux situations juridiques des solutions de principe qui suppléent au silence des parties mais auxquelles les parties peuvent déroger.

    Chapitre IV. – La loi du 3 juillet 1978 sous le regard de la Cour de cassation

    11. – Dans différents arrêts, la Cour de cassation a été amenée à statuer sur la portée juridique de la loi du 3 juillet 1978. Dans les arrêts rendus au cours de ces trois décennies, elle a distingué dans cette loi des dispositions impératives, bilatéralement impératives et impératives de par la loi.

    Section I. – Les dispositions impératives

    12. – Dans différents arrêts, la Cour de cassation a été saisie de la question des effets de la violation d’une disposition contenue dans la loi du 3 juillet 1978.

    Elle a relevé qu’en raison du caractère impératif de la disposition, seul, le travailleur pouvait invoquer sa nullité. Elle a statué dans ce sens au sujet des articles qui suivent.

    – l’article 9 relatif à la constatation par écrit du contrat à durée déterminée ou conclu pour un travail nettement défini(22) ;

    – l’article 10, al. 1 concernant la succession des contrats à durée déterminée(23) ;

    – l’article 11bis, concernant la durée hebdomadaire du travail à temps partiel(24) ;

    – l’article 20, 1 portant sur les obligations de l’employeur à l’égard du travailleur(25) ;

    – l’article 36 relatif à la nullité des clauses résolutoires portant sur le mariage, la maternité, la pension légale(26) ;

    – l’article 39, § 1 déterminant l’assiette de l’indemnité de congé(27) ;

    – l’article 41 fixant le droit du travailleur en préavis de s’absenter pour chercher un nouvel emploi(28) ;

    – les articles 65 et 86 concernant les conditions de validité des clauses de non-concurrence(29) ;

    – l’article 101 déterminant l’assiette de l’indemnité d’éviction(30).

    13. – Il peut paraître curieux que, dans certains arrêts, la Cour de cassation ait utilisé le terme, « seul », pour souligner que le travailleur, exclusivement, puisse soulever la nullité d’une clause contraire à une disposition impérative.

    Il nous parait que ce terme accentue le caractère impératif de la norme légale. Il ne peut être entendu comme signifiant qu’une disposition impérative peut sortir ses effets à l’égard de la partie « forte » au contrat de travail ; en l’occurrence, l’employeur.

    Dans la matière du contrat de travail, la Cour de cassation a décidé que, si la disposition légale impérative fait obstacle à ce qu’il y soit dérogé avant que le droit ne soit né, elle cesse d’être impérative lorsque le droit est né.

    En conséquence, après le congé, la disposition de l’article 82 fixant la durée du préavis devient supplétive. Il en résulte qu’après la notification du congé, le travailleur peut conclure toutes conventions dérogeant au droit au préavis(31).

    Section II. – Les dispositions bilatéralement impératives

    14. – Dans différents arrêts, et pendant une période approximative de 30 ans, la Cour de cassation a considéré que l’article 82, § 3 de la loi du 3 juillet 1978 portant sur les conventions en matière de préavis était impérative au profit des deux parties au contrat de travail(32).

    Cet article prévoit que la convention sur préavis qui fixe la durée du préavis de l’employé dit supérieur, parce que sa rémunération est supérieure au montant fixé par la loi en vue de déterminer la durée des préavis des employés, doit être conclue au plus tôt au moment où le congé est donné.

    La question était de savoir si, conformément à la notion de loi impérative, les parties peuvent conclure avant le congé une convention sur préavis plus favorable à celle que le travailleur aurait pu obtenir au moment du congé.

    Ce qui dans le cadre de la notion de loi impérative ne pose guère de problèmes.

    Sous l’approche du concept, créé par la Cour de cassation de loi « bilatéralement impérative », les deux parties au contrat de travail peuvent soulever la nulllité de la convention, même plus favorable au travailleur en ce qu’elle lui octroie un préavis supérieur à celui qui résulterait de la notion de préavis convenable, au seul motif qu’elle a été conclue à un moment où le législateur n’autorise pas la conclusion de ce type de convention.

    L’employeur peut donc invoquer au moment du licenciement du travailleur que la durée du préavis négociée par lui avec le travailleur au moment de l’entrée en service est nulle. La nullité résulte du fait que la clause contenue dans le contrat de travail fixant une durée de préavis supérieure à celle à laquelle le travailleur peut en principe prétendre a été conclue avant le congé.

    15. – Dans un arrêt du 7 avril 2008, la Cour est revenue sur la portée juridique de l’article 82, § 3. Elle a décidé que les dispositions de l’article 82 « qui protègent le travailleur ne sont impératives qu’en sa faveur »(33). Elle a appliqué à la matière la notion classique de loi impérative revenant ainsi sur ce qu’elle avait décidé dans un arrêt du 15 février 1973 en relevant que : « nonobstant les termes généraux de l’article 15, § 2 des lois coordonnées(34) … une convention … prévoyant en faveur de l’employé un délai de préavis supérieur reste valable bien qu’elle soit antérieure au congé »(35).

    Ainsi, et selon cet arrêt du 7 avril 2008, l’article 82, § 3 est impératif pour le seul travailleur.

    L’employeur ne peut donc plus invoquer l’article 82, § 3 pour considérer qu’une clause contenue dans un contrat de travail portant sur la durée du préavis des employés dits supérieurs et plus favorable que la durée du préavis légal est nulle.

    La nullité d’une disposition impérative ne peut, en effet, être invoquée que par la partie protégée par la loi du 3 juillet 1978 ; en l’occurrence le travailleur. Une telle disposition entend assurer une norme minimale à la partie protégée par la loi qui ne peut être transgressée. Elle permet dès lors de lui accorder plus de droits que ceux visés par la disposition légale. Cette approche est celle donnée à la loi du 3 juillet 1978 par le législateur.

    Section III. – Les dispositions impératives « de par la loi »

    16. – L’office du juge, chargé d’appliquer la loi et de dire le droit, est déterminé par la nature de la disposition soumise à son appréciation.

    Dans un arrêt 22 mai 2000(36), la Cour de cassation a mis en exergue le rôle du juge en matière de motif grave. Cet arrêt est important dans la mesure où, pour la première fois, la Cour s’attache à déterminer la nature juridique de l’article 35 de la loi de 1978(37).

    Elle a décidé que : « l’article 35, alinéa 3 et 4, est une disposition impérative en faveur du travailleur et de l’employeur …, partant la cour du travail était tenue d’examiner l’application de cette disposition dans le respect des droits de la défense des parties, même si le demandeur s’était abstenu de faire état de celle-ci dans un premier temps ».

    L’article 35 concerne alors, non les parties au contrat de travail, mais le juge. A son égard, il est impératif « de par la loi », ce qui signifie que « la Cour du travail était tenue d’examiner l’application de cette disposition, dans le respect des droits de la défense des parties, même si le demandeur s’était abstenu de faire état de cette disposition dans un premier temps ».

    Il résulte de ce caractère que le juge doit examiner d’office si les conditions de légalité du congé pour motif grave ont été respectées par la partie qui a rompu le contrat de travail(38).

    Section IV. – Les dispositions dites lois de police et de sureté

    17. – Dans différents arrêts, également, la Cour de cassation a décidé que « les dispositions légales qui organisent la protection des travailleurs et qui ont un caractère impératif sont des lois de police et de sûreté »(39).

    Elle a, aussi, rattaché ces dispositions aux lois d’ordre public international. Elle a relevé que « une loi d’ordre public international est celle dont les dispositions excluent, en raison du caractère essentiel des principes qu’elle contient, l’application en Belgique de tout autre règle de droit étranger même lorsque celle-ci est applicable suivant les règles ordinaires des conflits de loi »(40).

    Les lois de police et de sûreté au sens de l’article 3 du code civil sont les lois de droit privé, d’ordre public ou non et qui régissent les faits juridiques et les activités professionnelles ou qui assurent la protection de la partie faible dans un contrat ; ces faits étant localisés sur le territoire belge, indépendamment de leur origine contractuelle.

    18. – En matière de contrat de travail, toutes les dispositions protectrices des droits du travailleur relèvent donc du statut de lois de police et de sûreté. Elles obligent les employeurs pour les travailleurs qu’ils occupent en Belgique.

    Lorsqu’un contrat de travail présente des éléments d’extranéité et qu’en vertu de la règle de l’autonomie de la volonté, les parties ont choisi de le soumettre à une autre loi que la loi belge ; cette dernière est néanmoins applicable lorsque la loi étrangère est moins protectrice que la disposition impérative belge.

    La Cour de cassation a décidé que :

    – les dispositions relatives au minimum légal du délai de préavis « en tant qu’elle prévoyait ce délai minimum était une disposition de police et de sureté »(41)

    – les articles 39, relatif au paiement de l’indemnité compensatoire de préavis, et 82, relatif à l’évaluation du préavis convenable, de la loi du 3 juillet 1978, en cas de rupture du contrat par l’employeur et au pouvoir du juge de fixer la durée du préavis convenable étaient impératifs :

    (« l’article 82 (…) est impératif tant en ce qu’il détermine les délais de préavis minima qu’en ce qu’il dispose que, lorsque la rémunération annuelle dépasse le montant qu’il indique dans son paragraphe 3, alinéa 1er, les délais de préavis à observer par l’employeur et par l’employé sont fixés par le juge à défaut de convention conclue au plus tôt au moment où le préavis a été donné ; que ces dispositions sont, au sens de l’article 3, alinéa 1er du Code civil, une loi de police et de sureté ; (…) qu’en n’exerçant pas ce pouvoir d’appréciation, la cour du travail a violé les dispositions légales visées au moyen (les articles 39 et 82 de la loi relative aux contrats de travail »(42).

    – l’article 15 de la loi du 3 juillet 1978 relatif à la prescription en matière de contrat de travail est une disposition de police et de sureté(43).

    Au niveau des juridictions du fond, l’article 35 de la même loi a été considéré comme une disposition de police et de sureté(44).

    Il en résulte que si le contrat de travail contient une clause par laquelle les parties conviennent qu’il est régi par un autre droit que le droit belge et que ce droit est moins favorable ; en cas de rupture du contrat de travail sur le territoire belge, le droit belge sera applicable en ses dispositions de loi de police et de sûreté.

    (1) J.

    Gillain

    , Le droit du travail belge, éditions Présence et Action Culturelles, Charleroi, 1979, p. 23.

    (2) P. H

    orion

    , Nouveau précis de droit social belge, faculté de droit de Liège, Ed. Martinus, La Haye, 1965, p. 12.

    (3) Selon la doctrine de l’époque, P. H

    orion

    , Nouveau précis de droit social belge, précité, p. 14.

    (4) F. V

    an

    G

    oethen

    et R. G

    eysen

    , Droit du travail, Bruxelles, éd. Erasme, 1950, p. 128.

    (5) F. V

    an

    G

    oethen

    et R. G

    eysen

    , ibidem, p. 128.

    (6) P.

    Horion

    , ibidem, p. 16.

    (7) Projet de loi relatif aux contrats de travail, Exposé des motifs, Doc. Parl., Sess. Extraordinaire, 1974, n° 381/1, p. 1.

    (8) Voyez not. H.

    De Page

    , Traité élémentaire de droit civil, volume II, et Complément aux tomes II et III, n° 463ter, p. 90 ; J. C

    arbonnier

    , « Droit Civil », tome II-2, pp. 386 et 387 ; L. J

    ulliot de la

    M

    orandiere

    , La notion d’ordre public en droit privé, Cours de droit civil approfondi, 1950-51 ; L’ordre public en droit privé interne et Etudes offertes à Henri Capitant, 1939, p. 381 ; G.

    Baeteman

    , « Les effets des dispositions légales impératives protégeant des intérêts privés », R.C.J.B., 1960, p. 158.

    (9) H.

    De page

    , op. cit., n° 463ter, p. 90.

    (10) J.

    Carbonnier

    , op. cit., t. II-2, p. 388 ; R.

    Savatier

    , Les métamorphoses économiques et sociales du droit privé d’aujourd’hui, t. II, nos 123 et s., p. 19 ; cités par J.

    Baeteman

    , op. cit., p. 161.

    (11) Conclusions précédant Cass. 25 juin 1971, Pas. 1971, I, 1029. Cette définition était celle donnée par

    De Page

    . Traité T, I, éd. 1962, n° 91.

    (12) N. W

    atte

    , note sous Cass. 27 février 1986, « Quelques remarques sur la notion de l’ordre public en droit international privé », R.C.J.B., 1989, p. 56.

    (13) G. B

    aeteman

    , « Les effets des dispositions légales impératives protégeant les intérêts privés », R.C.J.B., 1960, p. 56 ; voyez aussi P. V

    an

    o

    mmeslaghe

    , « Chronique jurisprudence 1974-82 », R.C.J.B., 1986, p. 95 spécialement « l’objet de la cause illicite : l’ordre public et les bonnes mœurs – les lois impératives », n° 37, X.

    Dieux

    , « Le contrat : instrument et objet de dirigisme ? », in Les obligations contractuelles, éd. Jeune Barreau, 1984, p. 259, nos 4 et s. ; A.

    Meeus

    , note sous Cass. 17 mars 1986, « La notion de la loi impérative et son incidence sur la procédure en cassation et sur l’office du juge », R.C.J.B., 1988, pp. 497 et s.

    (14)

    Ganshof van der Meersch

    , précité, p.1029 ; G. B

    aeteman

    , précité, spécial pp. 161 à 163 ; J. D

    abin

    , « Autonomie de la volonté et lois impératives d’ordre public et bonnes mœurs, sanction de la dérogation interne », Annales Droit sc. Pol., VIII, 1939-40, p. 190, spéc p. 198.

    (15) T.T. Verviers, 28 novembre 1979, J.T.T., 1981, p. 93.

    (16) A. M

    eeus

    , op. cit., p. 497.

    (17) Cass., 15 mars 1968, J.T.T., 1968, 289. Voir également Cass., 3ème chambre, 17 mars 1986 avec note sous Cass., A. M

    eeus

    , « La notion de loi impérative et sans incidence sur la procédure en cassation et sur l’office du juge », R.C.J.B., 1988, pp. 495 à 527.

    (18) H. D

    e

    P

    age

    , Traité, t V. nos 162, 164 et 170, pp. 168 et s., qui cite les dispositions relatives au prêt hypothécaire, au prêt à l’intérêt, à la vente et au prêt à tempérament.

    (19) La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, la loi relative à la protection de la rémunération, celle concernant la durée du temps de travail, celle sur les accidents du travail, la loi du 5 décembre 1968 relative aux conventions collectives de travail et commissions paritaires …

    (20) Cass., 12 juin 1953, Pas., I, 797.

    (21) Notamment Cass., 15 novembre 2002, Pas., I, 2183.

    (22) Cass., 22 janvier 2007, Actualités en Bref, n° 6 ; Cass., 22 mai 1978, Bull. et Pas., 1978, I, 1072 ; Cass., 7 décembre 1992, Pas., 1992, 134.

    (23) Cass., 2 décembre 2002, inédit en cause de K.U.L./Schierman, S.02.006-N.

    (24) Cass., 3 novembre 2008, J.T.T., 2009, p. 71.

    (25) Cass., 17 mars 1986, Pas., 1986, 896.

    (26) Cass., 25 juin 1979, Pas., I, p.1234 et J.T.T., 1981, p. 72 prononcé sous l’application de l’article 21bis des lois coordonnées sur le contrat d’emploi, actuellement article 36.

    (27) Cass., 4 janvier 1993, Pas., 1993, 1 et J.T.T., 1993, 328 ; Cass., 17 mars 1986, Pas., 1986, 895.

    (28) Cass., 3 novembre 1976, Pas., 1977, 255.

    (29) Cass., 20 janvier 2003, www.cass.be ; Cass., 2 mai 1988, Pas., 1988, 1036 et J.T.T., 1988, 281.

    (30) Cass., 22 janvier 1985, Pas., 1986, 578 : solution implicite.

    (31) Not. Cass., 3 octobre 1997, J.T.T., 1998, p. 159.

    (32) Voyez infra, Titre V, les conventions sur préavis, nos 1157 et s. ; et notre article « le caractère impératif de l’article 82, § 3 : le retour à la raison ? », C.D.S., 2009, p. 241.

    (33) Cass., 7 avril 2008, C.D.S., 2009, p. 241.

    (34) En l’occurrence, les lois coordonnées du 21 novembre 1969. Ce texte est identique au texte de l’actuel article 82, § 3.

    (35) Cass., 15 février 1973, Pas., I, 574.

    (36) Cass., 22 mai 2000, Pas., I, 943 avec Conclusions de Monsieur le premier avocat général J.F.

    Leclercq

    .

    (37) A ce sujet, V.

    Vannes

    , « Motif grave – conditions de légalité – Principe de proportionnalité et office du juge », R.C.J.B., 2002, p. 201, spéc., p. 209.

    (38) C.T. Mons, 19 octobre 2004, R.G. n° 18233.

    (39) Cass., 27 mars 2006, www.juridat.be ; Cass. 25 juin 1975, Bull. et Pas., 1975, I, 1038, article 3 code civil avant son abrogation par la loi du 16 juillet 2004.

    (40) Cass., 17 décembre 1990, J.T.T., 1990, p. 258.

    (41) Cass., 17 décembre 1990., J.T.T., 1990, p. 258 ; Cass., 25 juin 1975, Pas., I, p. 1038.

    (42) Cass., 9 février 1987, Pas., I, p. 687 ; Cass., 9 juin 1986, J.T.T., 1986, p. 505.

    (43) Cass., 27 mars 2006, précité. Elle a décidé qu’il résulte du caractère impératif de cet article que lorsqu’un contrat de travail résilié en Belgique est soumis au droit congolais, ce droit est applicable sauf en ce qui concerne les dispositions impératives dont les règles de prescriptions. En conséquence, les réclamations du travailleur seront régies par l’article 15 précité.

    (44) C.T. Bruxelles, 24 mai 1983, R.W., 1983-84, col. 254.

    Titre II.

    Les contrats de travail réglés par la loi du 3 juillet 1978

    Chapitre I. – La notion de contrat de travail

    19. – La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail contient différentes définitions du contrat de travail selon qu’elles visent les travailleurs ouvriers, employés, domestiques ou encore les représentants de commerce.

    Ces définitions ont trois éléments en commun : l’engagement d’un travailleur à fournir contre rémunération un travail sous l’autorité d’un employeur. Elles mettent en évidence la caractéristique essentielle du contrat de travail : une personne s’engage à mettre son activité professionnelle au service d’une autre qui la rémunère.

    Des différentes définitions données par le législateur aux différents contrats de travail, le contrat de travail peut être défini comme « le contrat par lequel un travailleur s’engage contre rémunération à fournir un travail sous l’autorité d’un employeur ».

    20. – Les définitions des différents contrats de travail ont été insérées dans la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail sur la base des différentes définitions qui avaient été antérieurement retenues par le législateur, la doctrine et la jurisprudence :

    – l’article 1er de la loi du 10 mars 1900 sur le contrat de travail définissait le contrat de travail d’ouvrier « comme le contrat par lequel un ouvrier s’engage à travailler sous l’autorité, la direction et la surveillance d’un chef d’entreprise ou patron, moyennant une rémunération à fournir par celui-ci et calculée soit à raison de la durée du travail, soit à proportion de la quantité de la qualité ou de la valeur de l’ouvrage accompli, soit d’après toute autre base arrêtée entre parties ».

    – l’article 1er de la loi du 7 août 1922 sur le contrat d’emploi disposait que « l’employé ne peut engager ses services qu’à temps ou une entreprise déterminée ».

    – les lois coordonnées relatives au contrat d’emploi, coordonnées par l’A.R. du 20 juillet 1955 ne définissent pas le contrat d’emploi. A l’époque la doctrine utilisait, pour le contrat d’employé, l’expression de « louage de services ».

    Ces différentes expressions avaient pour but de qualifier cette relation contractuelle particulière née de l’exercice d’un travail, en fonction de sa caractéristique essentielle : l’engagement d’une personne envers une autre en vue d’accomplir une activité professionnelle.

    21. – Avant la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, la doctrine définissait le contrat de travail appelé, à l’époque, le contrat de « louage de service », par référence à ses éléments constitutifs.

    Paul Horion définissait le contrat de louage de services comme « le contrat par lequel une personne s’engage, contre rémunération, à mettre d’une manière continue, ou tout au moins, échelonnée, son activité au service d’une autre personne et à l’exercer sous la direction de celle-ci »(1). En France, Cammerlinck et Lyon-Caen décrivent le louage de service comme « la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place moyennant une rémunération »(2).

    Ces définitions mettent en évidence les trois éléments qui caractérisent le contrat de travail : le travail, la rémunération, la subordination d’une personne envers une autre personne.

    L’expression « contrat de travail » a été adoptée par le législateur dans la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail. Elle remplace l’expression de contrat de « louage de services » ou « louage de travail ». Les travaux préparatoires en précisent les motifs : « l’expression contrat de travail a été retenue parce qu’elle traduit mieux l’évolution sociale et juridique qui tend, d’une part, à rapprocher le travail manuel et intellectuel, et d’autre part, à assurer l’autonomie du droit social à l’égard du droit civil »(3).

    Le contrat de travail est régi par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, mais aussi par les conventions collectives de travail adoptées par les partenaires sociaux au sein des commissions paritaires, des sous-commissions paritaires et du Conseil National du Travail.

    Chapitre II. – Le champ d’application de la loi du 3 juillet 1978

    22. – La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail a été adoptée par le législateur dans le but de coordonner et harmoniser les législations relatives aux ouvriers et employés. Elle règle les contrats d’ouvriers, d’employés, de représentants de commerce et de domestiques.

    Elle s’applique, en principe, à toutes les entreprises du secteur privé. Toutefois, et en application de l’alinéa 2 de l’art. 1er de la loi du 3 juillet 1978, elle s’applique aussi aux travailleurs occupés par l’Etat, les provinces, les agglomérations, les fédérations de communes, les communes, les établissements publics et les établissements libres subventionnés par l’Etat, qui ne sont pas régis par un statut.

    Chapitre III. – Les contrats de travail réglés par la loi du 3 juillet 1978

    23. – Avant l’entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, les législations suivantes réglementaient les contrats de travail suivants :

    – le contrat de travail était régi par la loi du 10 mars 1900 ;

    – le contrat d’emploi, par la loi du 17 août 1922 ;

    – le contrat d’engagement pour la navigation intérieure, par la loi du 1er avril 1936 ;

    – le contrat d’engagement maritime, par la loi du 5 juin 1928.

    – le contrat d’apprentissage, par les lois du 22 germinal, 2 floréal an XI et arrêté royal du13 avril 1959 ;

    – le contrat de travail domestique, par la loi du 24 avril 1970 ;

    – le louage de travail à domicile par la loi du 10 février 1934, les lois coordonnées du 5 avril 1952 et l’arrêté royal du 15 juillet 1935 ;

    – le contrat de formation professionnelle accélérée, par l’arrêté royal du 20 décembre 1963, art. 96 ;

    – le contrat d’étudiant, par la loi du 9 juin relative à l’occupation d’étudiants ;

    – le contrat de représentant de commerce, par la loi du 30 juillet 1963 ;

    – le contrat portuaire par la loi du 8 juin 1972 ;

    – le travail temporaire et intérimaire et la mise de travailleurs à la disposition d’utilisateurs par la loi du 28 juin 1976, Mon., 7 août ;

    – le contrat du travailleur sportif rémunéré, par la loi du 24 février 1978.

    24. – La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail réglemente :

    – le contrat d’ouvrier ;

    – le contrat d’employé ;

    – le contrat de représentant de commerce ;

    – le contrat de travail domestique ;

    – le contrat d’occupation d’étudiant ;

    – le contrat d’occupation de travailleur à domicile.

    Les autres contrats de travail continuent à être réglés par des dispositions spécifiques.

    (1) P. H

    orion

    , Nouveau précis de droit social, Faculté Droit Liège, 1965 ; voyez à ce sujet, M. M

    agrez

    , Droit du travail, op. cit., p. 79.

    (2) Précis de Droit du travail, Paris, Dalloz, 1965, p. 87.

    (3) Exposé des motifs, Ass. Parl. Sénat, sem. 1974, no 381/1, p. 3, cité par M.

    Taquet

    , p. 79.

    Titre III.

    Les différents contrats de travail

    Chapitre I. – Le contrat ouvrier et le contrat employé

    25. – La loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail définit le contrat de travail d’un ouvrier, comme :

    « le contrat par lequel un travailleur, l’ouvrier, s’engage contre rémunération, à fournir un travail, principalement d’ordre manuel sous l’autorité d’un employeur » (art. 2).

    La loi définit le contrat de travail d’un employé comme :

    « le contrat par lequel un travailleur, l’employé, s’engage contre rémunération, à fournir un travail principalement d’ordre intellectuel sous l’autorité d’un employeur » (art. 3).

    Section I. – Le critère de distinction entre les « ouvriers » et les « employés »

    26. – La distinction entre le contrat ouvrier et le contrat employé est fondée sur la nature, intellectuelle ou manuelle, de la fonction exercée. Elle est reprise par la loi dans les termes suivants : l’ouvrier est le travailleur qui s’engage à fournir un travail principalement « manuel », tandis que l’employé est le travailleur qui s’engage à fournir un travail principalement « intellectuel ».

    §1. – La problématique

    27. – A. Depuis l’adoption de la loi du 10 mars 1900 sur le contrat de travail, le critère de distinction entre l’ouvrier et l’employé réside dans le caractère principalement manuel ou intellectuel de la prestation de travail.

    Le travailleur qui exerce principalement des fonctions manuelles est un ouvrier même s’il exerce accessoirement des fonctions intellectuelles. Tandis que le travailleur qui exerce principalement des fonctions intellectuelles est un employé même s’il exerce accessoirement des fonctions manuelles.

    Tout autre critère que la nature des fonctions exercées à titre principal est sans effet(1) ; ce ne sont pas les titres, les diplômes, le passé professionnel ou encore le fait que le travailleur ait bénéficié de certains avantages sociaux d’une catégorie professionnelle à laquelle il n’appartient pas qui déterminent le statut « manuel » ou « intellectuel » du travailleur : seule entre en considération la nature des fonctions exercées.

    Il ne peut toutefois être contesté que toute activité manuelle suppose une certaine activité intellectuelle et que toute activité intellectuelle suppose une certaine activité manuelle. Ainsi que l’écrit M. Jamoulle, « la ballerine est une employée quels que soient les efforts physiques nécessités par son art »(2), tandis que le travailleur amené à effectuer un travail pénible ou salissant, en contact avec des instruments de production, machines ou outils est un ouvrier quelles que soient les qualités d’esprit ou de raisonnement auquel il devra faire face dans l’exercice de son activité professionnelle.

    B. Un nouveau critère de distinction entre l’« ouvrier » et l’« employé » se dégage peu à peu de la jurisprudence ; celui de la « qualité » de jugement du travailleur. Le critère classique de distinction entre ouvriers et employés serait, selon une certaine doctrine, devenu « désuet » car, il reposerait sur des éléments économiques et sociaux qui ne seraient plus d’actualité(3).

    La constitutionnalité de cette distinction a été soumise à la Cour constitutionnelle(4).

    En 1992, elle a été saisie de trois questions préjudicielles(5) dont deux portent sur la problématique de la distinction entre le statut des ouvriers et des employés ; la troisième sur celle de la différence entre les préavis des employés dits supérieurs et ceux dits inférieurs. Les questions soumises à la Cour étaient de savoir si ces distinctions sont conformes aux principes d’égalité et de non-discrimination des belges devant la loi.

    Dans la première affaire un employeur, condamné à payer une indemnité de rupture à un représentant de commerce, faisait valoir que l’article 82, § 3 de la loi du 3 juillet 1978 contenait une discrimination dans la mesure où il fixe une indemnité de préavis plus élevée en faveur des employés dits « supérieurs » qu’en faveur des employés dits « inférieurs » (art. 82, § 2) et des ouvriers (art. 59). Dans la seconde affaire, une ouvrière, licenciée pour motif grave, réclamait l’indemnité de préavis et le pécule de vacances accordés par les dispositions légales relatives aux employés. Dans la troisième affaire, une « aide familiale » ayant le statut d’ouvrière réclamait à l’employeur l’indemnité de rupture déterminée dans le régime des employés.

    Ces trois affaires ont été jointes.

    Dans un arrêt du 8 juillet 1993, la Cour d’arbitrage a, d’abord rappelé que les principes de l’égalité des belges devant la loi et de non-discrimination n’excluent pas qu’une différence de traitement soit établie pour certaines catégories de personnes lorsque le critère de différenciation est susceptible de justification objective et raisonnable ; que cette justification doit s’apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause ; que le principe d’égalité des belges devant la loi est violé lorsqu’il est établi qu’il n’existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et les buts visés.

    Après avoir constaté qu’il y avait une différence de traitement entre les ouvriers et les employés, la Cour a examiné si la différence opérée par la loi entre les préavis des ouvriers et des employés et entre les préavis des employés supérieurs et inférieurs est conforme aux principes constitutionnels. Cette approche implique d’examiner le but de la loi et le rapport raisonnable de proportionnalité entre les buts et les moyens.

    A. – La différenciation des préavis des ouvriers et des employés

    28. – A. La Cour constitutionnelle a rendu deux arrêts portant sur la problématique de la différence de préavis entre les ouvriers et les employés.

    Le premier du 8 juillet 1993 dans lequel elle a examiné si le critère de différenciation entre les préavis des ouvriers et des employés est susceptible de justification objective et raisonnable. Elle a relevé que(6) : « … la distinction entre ouvriers et employés concernant les délais de préavis à respecter lors de la résiliation du contrat de travail n’a pas été introduite par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, mais était présente dans la législation antérieure. L’origine de celle-ci remonte au début de ce siècle. … La distinction doit donc s’apprécier, non en tenant compte de l’objectif qu’avait poursuivi jadis le législateur lorsqu’il l’a instauré mais en prenant en considération l’objectif dont s’inspire la loi du 3 juillet 1978….

    Lorsqu’elle a été instituée, la distinction susdite a pu trouver sa justification, compte tenu des mentalités régnant alors, dans les situations économiques et sociales nettement différentes qui caractérisaient les catégories respectives des ouvriers et des employés et qui pouvaient avoir une incidence sur les possibilités de retrouver, après licenciement, un emploi équivalent».

    La Cour a donc constaté que le critère de différenciation entre les préavis fixés pour les ouvriers et les employés découle du système général de l’organisation sociale belge qui assure différemment en droit du travail la stabilité d’emploi et la sécurité sociale des ouvriers et des employés.

    Examinant si le but et les effets des dispositions légales autorisent la différenciation dénoncée entre les ouvriers et les employés, la Cour a relevé, que :

    « … le fait qu’il serait injustifié d’instituer aujourd’hui une telle distinction ne suffit pas pour justifier sa brusque abolition … Le législateur a donc pris une mesure qui est conforme à son objectif de rapprochement des statuts des ouvriers et des employés en préférant une harmonisation progressive de ceux-ci à une brusque suppression de la distinction de ces catégories professionnelles, spécialement dans une matière où les normes peuvent évoluer grâce à la négociation collective. Cette considération démontre également que le maintien de la distinction n’est pas manifestement disproportionné à un objectif qui ne peut être atteint que par étapes successives ».

    Elle a conclue que le moyen utilisé par le législateur pour assurer, en droit du travail et en droit de la sécurité sociale, un système de stabilité d’emploi différent entre les ouvriers et les employés n’est pas disproportionné. En droit du travail, la durée plus importante des préavis des employés est compensée par l’obligation de l’employeur de motiver le licenciement des ouvriers et la sanction du paiement d’une indemnité de six mois de rémunération en cas de licenciement non valablement motivé. En droit de la sécurité sociale, c’est dans sa globalité que le système entre ouvriers et employés est différent qu’il s’agisse du montant des cotisations de sécurité sociale que de la redistribution des prestations sociales.

    La Cour a donc décidé que la distinction entre les employés et les ouvriers n’est pas contraire au principe de l’égalité des belges devant la loi.

    B. Le 7 juillet 2011, la Cour constitutionnelle a rendu un second arrêt sur la question de l’éventuelle discrimination résultant de la différence de durée des préavis des ouvriers et des employés et, en conséquence, sur la comptabilité des articles 59 et 82 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail avec les articles 10 et 11 de la constitution.

    Dans son arrêt du 7 juillet 2011, la Cour constitutionnelle a d’abord rappelé l’observation formée dans l’arrêt, précité du 8 juillet 1993, en ces termes :

    « en fondant la distinction entre ouvriers et employés sur la nature principalement manuelle ou intellectuelle de leur travail, le législateur a établi des différences de traitement en fonction d’un critère qui pourrait difficilement justifier de manière objective et raisonnable qu’elle fut instaurée à ce moment (B.6.2.1) ».

    Elle a répété cette observation en relevant que « il en va a fortiori de même aujourd’hui, notamment pour les différences de traitement qui sont contestées en l’espèce en matière de durée de préavis ou de jour de carence. Ces différences de traitement sont dès lors contraires aux articles 10 et 11 de la Constitution ».

    Sur la base de ces observations, la Cour a donc logiquement décidé que : « le temps dont peut disposer le législateur pour remédier à une situation jugée inconstitutionnelle n’est cependant pas illimité. L’objectif d’une harmonisation progressive des statuts des ouvriers et des employés jugée préférable par le législateur à une brusque suppression de la distinction de ces catégories professionnelles, spécialement dans une matière où les normes peuvent évoluer grâce à la négociation collective, ne justifie plus, dix- huit ans après que la Cour eut constaté que le critère de distinction en cause ne pouvait plus être considéré comme pertinent, que certaines différences de traitement, comme celles qui sont invoquées devant le juge a quo, puissent encore être longtemps maintenues, perpétuant ainsi une situation d’inconstitutionnalité manifeste (B.4.3) ».

    Dans son arrêt du 7 juillet 2011, la Cour constitutionnelle a donc décidé que la différence de préavis entre les ouvriers et les employés n’étaient plus justifiée au regard du principe de l’égalité des belges. Elle a invité l’Etat Belge à modifier la législation dans ce sens dès lors invité l’Etat belge à mettre la loi du 3 juillet 1978 en conformité avec celui-ci.

    B. – La différenciation des préavis des employés inférieurs et supérieurs

    29. – Sur la question de l’éventuelle discrimination entre la durée plus importante des préavis des employés supérieurs que ceux des employés inférieurs(7), la Cour d’arbitrage a relevé que :

    « … il est généralement admis qu’une catégorie déterminée de travailleurs portant au sein de l’entreprise des responsabilités plus lourdes et qui retrouvera plus difficilement un emploi équivalent du point de vue des conditions de travail et de la rémunération peut prétendre à une meilleure protection de la stabilité d’emploi ».

    Elle a ensuite décidé que la distinction entre les préavis des employés supérieurs et inférieurs repose sur le fait que les difficultés de reclassement professionnel, des employés « supérieurs » sont plus importantes que celles des employés « inférieurs ». Elle a conclu de cet élément que : « Compte tenu du but et des effets de la norme critiquée, la distinction entre les différentes catégories d’employés, selon que leur rémunération annuelle dépasse ou non le montant fixé de 650 000 F., n’est pas dépourvue de justification objective et raisonnable ».

    En conséquence, la différence légale dans l’évaluation des préavis des employés inférieurs et supérieurs n’est pas contraire au principe de l’égalité des belges devant la loi parce qu’elle repose sur un critère objectif et raisonnable.

    §2. – La jurisprudence

    30. – Le critère classique déterminant si le travailleur doit être considéré comme un travailleur manuel ou intellectuel est celui de la « quantité » des tâches accomplies.

    A. Appliquant ce critère, le statut d’ouvrier a été reconnu aux travailleurs suivants :

    – au chef de cuisine dont le travail d’une organisation de cuisine est manuel et concret(8) ;

    – est un ouvrier, et non un co-pilote lié au capitaine, l’assistant à la conduite d’un bateau, surtout lorsque le capitaine en a référé à l’armateur avant l’engagement(9) ;

    – la personne qui travaille exclusivement avec le tracteur et le matériel de l’entreprise ; qui est payé par quinzaine sur factures établies par la firme sur base des heures prestées, même si ces prestations sont temporaires et si l’employeur n’exerce pas sur son activité une surveillance effective et permanente. L’affiliation ou la non affiliation à l’O.N.S.S. n’est pas un critère permettant de déterminer la nature exacte du contrat(10) ;

    – les fonctions d’un garde-chasse sont principalement d’ordre manuel ; il a le statut d’un ouvrier et ce nonobstant le fait qu’il est assermenté ou qu’il a exercé des fonctions intellectuelles, ponctuelles et limitées (jalonnage, paiement des indemnités aux traqueurs de battue ou aux fermiers victimes des dégâts de gibier, entretien des enclaves)(11) ;

    – le concierge d’un hôtel(12) ;

    – un travailleur engagé comme « employé » d’une boucherie « discount », dont la tâche consiste à prendre les commandes, à peser le poids voulu, à lire le prix par kilo et à le taper sur la balance, à coller l’étiquette de prix sur le sac et à remettre ensuite le sac au client(13) ;

    – le travailleur engagé, sous contrat de travail d’ouvrier pour accomplir des tâches de gardiennage et d’entretien du matériel technique ; et ce malgré le fait qu’au cours de l’exécution du contrat, il a apporté son concours aux régisseurs qui l’ont autorisé à assurer sous leur supervision des prestations de sonorisation(14) ;

    – le travailleur qui fournit de la crème glacée à des clients comme livreur de porte à porte avec un véhicule de livraison de l’employeur(15) ;

    B. Appliquant le même critère du caractère prépondérant des fonctions exercées, le statut d’employé a été reconnu aux travailleurs suivants :

    – au maître nageur et au moniteur de natation(16) ;

    – les ouvreuses ont la qualité d’ouvrières et les caissières celle d’employées dans l’organisation de l’entreprise. En cas de cumul d’activités ; les fonctions de caissières remplies régulièrement, même occasionnellement, doivent être considérées comme principales, car elles entraînent une plus grande responsabilité dans le chef de celles qui les exercent(17) ;

    – le travailleur chargé du développement automatisé de photographies est un employé(18) ;

    – le salarié qui fournit en atelier un travail d’opticien est un employé. L’aspect manuel des prestations n’est pas contradictoire avec la reconnaissance d’un travail d’ordre intellectuel(19) ;

    31. – Une nouvelle tendance se dessine dans la jurisprudence actuelle ; celui du critère « qualitatif » des fonctions exercées ce n’est plus l’importance quantitative des tâches accomplies qui déterminent la nature du contrat mais le caractère qualitativement prédominant de la fonction exercée. L’aspect compréhension, raisonnement, logique de la tâche à accomplir est actuellement pris en considération pour déterminer le statut du travailleur.

    Selon la Cour de cassation :

    « l’arrêt qui constate que le travailleur, comme moniteur, effectuait pendant la plus grande partie de son temps plutôt… un travail manuel simple’ mais que ce travail n’était pas, en tant que tel, essentiel et que l’essentiel de sa fonction concernait la direction, l’accompagnement et l’éducation de handicapés, peut légalement déduire de ces constatations que ce travailleur doit être considéré comme employé »(20). La Cour retient ici un critère « qualitatif » des fonctions exercées ; critère qui peut s’expliquer par l’évolution du monde du travail et la disparition progressive de certaines fonctions exclusivement manuelles.

    De nombreuses fonctions, en apparence manuelle, ne peuvent être accomplies que par le recours à une activité intellectuelle préalable. Tel est le cas de dentistes ou de chirurgiens. Cette évolution ne peut faire perdre de vue que tout travail, à moins qu’il ne soit machinal, demande réflexion, ce dernier élément ne signifie donc pas que le travail puisse automatiquement être considéré comme « intellectuel »(21). Dans les fonctions, qui requièrent une activité intellectuelle, il faut distinguer celles qui sont de nature « ouvrières » et celles qui sont de nature « employées » en raison du caractère manuel ou intellectuel dominant. Lorsque des prestations d’apparence manuelle requièrent une connaissance théorique approfondie, de la réflexion, de l’imagination, de l’art de faire, et de la responsabilité plutôt que de la force, de la résistance physique, de l’exécution répétitive, du respect aveugle d’instructions données, le travailleur doit être considéré comme un employé(22).

    Il en est ainsi du salarié qui accomplit en atelier un travail d’opticien ; l’aspect manuel des prestations n’est pas contradictoire avec la reconnaissance d’un travail d’ordre intellectuel(23).

    Section II. – La qualification conventionnelle du statut du travailleur

    §1. – La qualification erronée

    32. – Le critère qui distingue le statut « ouvrier » ou « employé » d’un travailleur, est celui de la nature des fonctions exercées. En conséquence, la qualification d’ouvrier ou d’employé convenue par les parties au contrat de travail n’est pas déterminante.

    Dans un arrêt du 10 mars 1980, la Cour de cassation a décidé que : « la nature des fonctions exercées par un travailleur est déterminée par les fonctions qu’il exerce réellement et non par la dénomination qui leur est donnée … A cet égard, la nature des fonctions peut être établie sur la base de présomptions de fait »(24).

    Si, et selon la jurisprudence, c’est exclusivement la nature des tâches accomplies par le travailleur qui détermine son statut d’ouvrier ou d’employé ; la qualification donnée par les parties au contrat(25) est alors inopérante.

    Il en découle que si, un travailleur invoque son statut d’« ouvrier » visée au contrat de travail, afin de prétendre à l’indemnité de licenciement abusif fixée par l’article 63 de la loi du 3 juillet 1978 en faveur des ouvriers, mais que l’employeur conteste ce statut soulevant le caractère principalement intellectuel des fonctions exercées, le juge devra rejeter cette demande lorsque l’employeur démontre la réalité des fonctions intellectuelles exercées par le travailleur.

    Dans la pratique, le problème de la qualification conventionnelle se pose comme suit : l’employeur accorde le statut d’ouvrier à un travailleur qui exerce des fonctions d’employé. Dès que ce dernier établit la nature intellectuelle prépondérante des fonctions exercées, il pourra prétendre à l’application du statut légal des employés.

    §2. – L’octroi conventionnel du statut d’employé

    33. – La question est différente lorsque les parties décident d’accorder à un salarié un statut plus favorable que celui qui découle de la nature des fonctions exercées. Dans cette hypothèse, ce n’est pas le statut du travailleur qui est en cause mais la possibilité conventionnelle offerte aux parties d’appliquer à un ouvrier le statut légal des employés.

    Si, la nature du travail exécuté détermine la nature du contrat, un employeur peut en effet légalement faire bénéficier un ouvrier du statut d’employé dans la mesure où ce statut est plus avantageux que celui d’ouvrier(26).

    Toutefois, lorsque le statut d’employé est accordé, par convention, à un ouvrier ; l’article 6 de la loi sur les contrats de travail s’oppose à ce qu’à côté des avantages que cette situation entraîne, des désavantages soient également conférés au travailleur(27).

    34. – La convention octroyant le statut « conventionnel » d’employé à un ouvrier peut être de nature individuelle ou collective.

    A. Les organisations représentatives des employeurs et des travailleurs peuvent conclure, au sein des commissions paritaires, des conventions collectives de travail qui accordent le statut d’employé à des catégories de travailleurs qui remplissent, en fait, des tâches principalement d’ordre manuel(28).

    Dans cette hypothèse, c’est la C.C.T. qui accorde « conventionnellement » le statut d’employé à un travailleur qui exerce, en réalité, une activité à caractère manuel prépondérant.

    B. La convention qui octroie le statut d’employé à un travailleur ouvrier peut aussi être le contrat de travail conclu entre l’employeur et le travailleur. Dans ce cas, la convention qui accorde « conventionnellement » le statut d’employé à un travailleur qui exerce, en réalité, une activité à caractère manuel prépondérant est une convention individuelle.

    §3. – La preuve de la fonction exercée

    35. – Il appartient au travailleur d’apporter la preuve de la nature intellectuelle ou manuelle de la fonction exercée par le travailleur. Cette preuve peut être apportée par toutes voies de droit, dont les présomptions de fait : le formulaire C4, les lettres de l’employeur faisant état de ses fonctions. Par ailleurs, la preuve par témoins de la nature réelle des fonctions peut être apportée contre le contenu de l’écrit(29).

    En cas de contestation sur la nature du contrat, le juge doit nonobstant la qualification et les termes utilisés dans celui-ci en déterminer la nature réelle c’est-à-dire au regard des fonctions réellement exercées(30).

    Chapitre II. – Le contrat de représentant de commerce

    Section I. – La définition

    36. – L’article 4 de la loi du 3 juillet 1978 définit le contrat de travail de représentant de commerce comme :

    « le contrat par lequel un travailleur, le représentant de commerce, s’engage contre rémunération à prospecter et visiter une clientèle en vue de la négociation ou la conclusion d’affaires, hormis les assurances, sous l’autorité, pour le compte et au nom d’un ou de plusieurs commettants.

    Nonobstant toute stipulation expresse du contrat ou en son silence, le contrat conclu entre commettant et intermédiaire, quelle qu’en soit la dénomination, est réputé jusqu’à preuve du contraire un contrat de travail de représentant de commerce.

    Ne sont pas des représentants de commerce aux termes de la présente loi : le commissionnaire, le courtier, le concessionnaire de vente exclusive, l’intermédiaire libre de remettre ses commandes à qui bon lui semble et, en général, l’agent commercial lié à son commettant par un contrat

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