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Des Campagnes de communication réussies, Tome 2: 42 études de cas primés
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Des Campagnes de communication réussies, Tome 2: 42 études de cas primés
Livre électronique776 pages4 heures

Des Campagnes de communication réussies, Tome 2: 42 études de cas primés

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À propos de ce livre électronique

Depuis la parution du tome 1, consacré à l’analyse de campagnes de communication diffusées de 1988 à 2001, le monde des organisations, et donc de leurs communications, s’est complexifié. La consommation des médias – de masse, traditionnels ou émergents – a considérablement évolué. Elle s’est également intensifiée avec la montée du journalisme en direct, l’influence des résultats de sondages de plus en plus fréquents et l’omniprésence des technologies de l’information. _x000D_
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Ce deuxième tome du livre Des campagnes de communication réussies arrive ainsi à point nommé. Passant au crible des théories des relations publiques des campagnes canadiennes de 2003 à 2007, il veut inspirer les praticiens dans la résolution de problèmes et aider les étudiants à concrétiser des notions théoriques. Chaque campagne est décrite, puis analysée en fonction des publics visés, du type de relation, des choix de réseaux, du modèle de communication, des contextes modifiés par les campagnes et de l’utilisation du storytelling. De la gestion des enjeux à la communication de crise, en passant par les campagnes de santé publique, l’organisation d’événements et les campagnes de lancement de produits, l’ouvrage pose un regard à la fois pragmatique et critique sur la pratique récente de la communication organisationnelle. _x000D_
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Comme le souligne, dans la préface, Marcel Barthe, vice-président stratégie d’entreprise de Cossette : « Bien comprendre et intégrer le contenu de ce livre pourrait, j’en suis convaincu, amener une bonification de notre travail. »_x000D_
LangueFrançais
Date de sortie23 nov. 2010
ISBN9782760529878
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    Aperçu du livre

    Des Campagnes de communication réussies, Tome 2 - Marianne Kugler

    storytelling

    INTRODUCTION

    Après un premier livre de présentation et d’analyse de 43 campagnes de communication datant de 1988 à 2001 (Kugler, 2004), il était intéressant de recommencer l’exercice quelques années plus tard, et ce, pour plusieurs raisons. Durant ces années, la recherche en relations publiques et en communication des organisations a considérablement avancé aussi bien en Amérique du Nord qu’en Europe. Les travaux tant empiriques que théoriques se sont multipliés, de même que les cadres de référence et les théories d’appui (Botan et Hazleton, 2006, p. 528; Bouillon, Bourdin et Loneux, 2008, p. 3–9; Carayol, 2004; Ihlen et Ruler, 2007, p. 243–248; Ihlen, van Ruler et Fredriksson, 2009, p. 376).

    Le monde des organisations et donc de leurs communications s’est complexifié (d’Almeida et Andonova, 2006, p. 129–143; Libaert, 2008, p. 229). La consommation des médias, de masse, traditionnels ou émergents, a considérablement évolué (Centre d’études sur les médias et Consortium canadien de recherche sur les médias, 2010, p. 131; Zamaria et Fletcher, 2008, p. 371).

    L’accélération s’est aussi poursuivie avec la montée du journalisme en direct, l’influence des résultats de sondages de plus en plus fréquents et des technologies de l’information omniprésentes: le rythme est souvent difficile à suivre (Aubert, 2003).

    Alors que le cadre spatial de l’action ne cesse de s’élargir, le cadre temporel se réduit, l’impératif de réactivité conduisant à une logique prégnante de l’urgence, à un état de crise permanent qui nécessite une fluidité maximale des informations et des échanges (d’Almeida et Andonova, 2006, p. 139).

    Faut-il tenir le rythme, au risque d’oublier de réfléchir, ou plutôt essayer de ralentir, maintenir la vision à plus long terme et prendre le temps de respirer, comme le présente Thierry Libaert en prônant le «slow PR» à l’instar du slow food ¹ et du slow design ² (Libaert, 2010, p. 4)?

    Parallèlement à cette évolution de la pratique, les programmes de communication, communication marketing et relations publiques se développent dans les collèges et les universités, à tous les cycles. Et ils attirent de plus en plus de candidats. Le milieu des communicateurs au Québec et au Canada a poursuivi sa professionnalisation et si, il y a dix ans encore, de nombreux professionnels et cadres responsables de la fonction communication venaient d’autres formations, c’est moins le cas en 2008. Une étude de la Chaire en relations publiques menée en 2004 (Maisonneuve, Tremblay et Lafrance, 2004, p. 14) indique que 43% des professionnels en relations publiques déclarent avoir un diplôme dans cette discipline. Une autre étude publiée en 2007 et commanditée par le Conseil de l’industrie des communications du Québec mentionne la scolarité particulièrement élevée des professionnels en relations publiques (El Mezem et Deniger, 2007, p. 46).

    En considérant la structure même de l’industrie au Québec, toujours selon l’étude du Conseil de l’industrie des communications du Québec, il faut conclure qu’il s’agit d’un secteur de l’économie en expansion, d’une profession qui rajeunit en rassemblant des professionnels diplômés et spécialisés, de même que d’un marché de niche qui a peu de marge de manœuvre à cause de la forte compétitivité et du fait que la majorité des contrats sont relativement petits. Il nous paraît dès lors essentiel que les campagnes proposées soient de plus en plus pointues et solidement appuyées sur des bases théoriques. L’industrie ne peut plus se permettre de «copier-coller» ou de reproduire à quelques nuances près les mêmes campagnes pour des clients différents. Connaître les théories accroît la créativité, ouvre des portes jusque-là fermées et fait découvrir des chemins moins fréquentés.

    Les matériaux de base de ce livre, les dossiers de présentation aux prix d’excellence et les études de cas des candidats à l’agrément de la Société canadienne des relations publiques (SCRP) proviennent du fonds spécial de la bibliothèque du Mount-Royal College de Calgary ³ Les dossiers présentés à la Société québécoise des professionnels des relations publiques (SQPRP) ont été fournis par les candidats eux-mêmes puisque la Société, au moment de la collecte des données pour ce livre, ne gardait pas copie de ces documents.

    Ces dossiers qui ont obtenu des prix peuvent être vus comme autant de normes, de campagnes exemplaires, évaluées par les pairs à un moment donné et en comparaison avec d’autres campagnes candidates pour les mêmes concours la même année.

    Cependant, les dossiers comme les campagnes décrites sont affectés par de nombreux biais. D’abord, l’ensemble des dossiers pour une année donnée n’est en aucun cas représentatif de la production totale de cette année. Les entreprises, organisations et personnes qui présentent des dossiers le font selon leur propre agenda, que ce soit pour obtenir un avancement dans les cas de dossiers d’accréditation ou en raison d’un besoin de visibilité dans le cas des prix d’excellence. Certaines organisations n’ont tout simplement ni les ressources humaines ni le temps de préparer des dossiers de présentation. D’autres choisissent de se présenter sur d’autres tribunes, la mondialisation ayant comme effet que les campagnes et leurs auteurs doivent être connus en dehors des frontières nationales pour recruter de nouveaux clients. Un bon nombre de campagnes innovatrices et intéressantes ne se trouvent donc pas dans le corpus utilisé pour ce livre.

    Chaque dossier de candidature a été monté une fois la campagne terminée, selon le format demandé par l’une ou l’autre des sociétés pour le prix convoité. Des éléments peuvent avoir été passés sous silence ou au contraire mis en évidence. Les formats, plus ou moins contraignants, imposés pour la soumission des dossiers induisent ces omissions.

    Mais, tout cela pris en considération, ces campagnes de communication demeurent autant d’exemples de façons de faire qui peuvent inspirer les praticiens devant un problème à résoudre ou les étudiants, qui s’en serviront pour concrétiser des notions qui, autrement, resteraient vagues et «théoriques».

    L’ouvrage présente et analyse 42 dossiers soumis et primés au cours des années 2001 à 2007, 9 dossiers d’agrément et 33 dossiers de prix d’excellence de la SCRP ou de la SQPRP.

    Comme pour le livre précédent (Kugler, 2004), il n’est pas question dans ces pages de porter un jugement de valeur sur ces dossiers ni sur les campagnes qu’ils présentent, mais plutôt de les faire connaître en leur donnant comme valeur ajoutée les supports théoriques implicites.

    Chaque dossier est résumé schématiquement, puis analysé en fonction d’un cadre qui s’appuie sur des travaux théoriques. Les résumés ont été faits par l’auteure pour le livre en respectant au mieux les textes originaux des dossiers de présentation. Ils en utilisent le plus possible le vocabulaire, le ton ainsi que l’ordre de présentation des différents éléments.

    Le premier chapitre de l’ouvrage expose le cadre d’analyse. Ce cadre puise dans des textes théoriques des outils pour «déconstruire» les démarches utilisées par les praticiens et ainsi pouvoir les comparer entre elles. Par ailleurs, cette confrontation de la théorie et de la pratique oblige à pousser plus loin la réflexion dans l’espoir d’être utile aussi bien au praticien qu’à l’enseignant ou à l’étudiant.

    Les chapitres 2 à 6 sont consacrés aux résumés et analyses des campagnes. Celles-ci sont regroupées par catégories: la gestion d’enjeux (chapitre 2), la communication de crise (chapitre 3), les campagnes de santé publique (chapitre 4), les événements (chapitre 5) et les campagnes de lancement de produits (chapitre 6). La conclusion propose des pistes de réflexion et de recherche.

    Ces chapitres sont construits de la même façon. Ils commencent par des considérations générales sur ce secteur d’activité des relations publiques, puis suivent les descriptions et les analyses des campagnes par ordre chronologique. Les chapitres se terminent par une synthèse qui tente de mettre en évidence des caractéristiques communes aux stratégies de communication choisies, propose des explications pour comprendre les divergences ou encore dégage des démarches types.

    TABLEAU I.1

    Liste des cas

    ¹<www.slowfood.com/>.

    ²<www.sfowdesign.org/sfowdesign.htm>.

    ³<library.mtroyal.ca/cprs.php>.

    CHAPITRE

    1

    LE CADRE D’ANALYSE

    Un outil de décryptage

    La présentation des dossiers selon la séquence linéaire et opérationnelle de la formule professionnelle RACE (acronyme pour Recherche, Analyse, Communication et Évaluation) est fortement encouragée par la Société canadienne des relations publiques et explicitement imposée par le format contraignant de la grille de présentation des dossiers de la Société québécoise des professionnels des relations publiques (SQPRP). Pour pouvoir comparer les campagnes de communication entre elles, il faut donc prendre du recul par rapport au texte des dossiers. Il importe d’en caractériser les composantes, puis ensuite, en quelque sorte, de les «déconstruire».

    En 2004, nous nous appuyions sur trois approches théoriques (Kugler, 2004, p. 283), mais, dans ce livre-ci, il sera question de six approches. La pratique et la théorie évoluent, les technologies de l’information densifient les façons de faire, l’évolution de la société et des comportements organisationnels modifie les conditions de pratique. Les trois théories ajoutées tenteront de tenir compte de ces changements. En plus des réseaux utilisés en communication organisationnelle, que propose Lavigne (2002, p. 154–173), des quatre modèles de communication de Grunig et ses collaborateurs (1992, p. 666) et des contextes de communication développés par Mucchielli (2000, p. 176), nous utiliserons dans ce livre-ci des indicateurs de travaux théoriques récents: ceux de la théorie situationnelle des publics tels que revus par Hallahan (2000a, p. 463–480; 2000b, p. 499–515; 2001, p. 27–59), de la théorie de la gestion des relations (Ledingham, 2003, p. 181–198; Ledingham et Bruning, 1998, p. 55–65), et le storytelling (Salmon, 2007; Woodside et Sood, 2008, p. 97–145) ou narratif ou encore l’«historiage».

    La théorie situationnelle des publics considère les niveaux de connaissance d’un enjeu ou d’une cause et le niveau d’implication des publics. Hallahan insiste beaucoup sur la nécessité de prendre en compte les non-publics, ceux qui, sans connaissance et sans implication, échappent volontairement ou involontairement à toutes les initiatives prises pour les atteindre. Or, en relations publiques, cette question des inatteignables, des exclus ou des décrocheurs est cruciale puisque leur nombre augmente.

    La théorie de la gestion des relations publiques (Public Relations Management Theory) se penche sur les caractéristiques et l’évolution en qualité des relations organisation-publics. L’établissement et le renforcement de ces relations sont, d’une part, de plus en plus réalisés au moyen des technologies de l’information (Web 2.0, réseaux sociaux, etc.) et, d’autre part, de plus en plus nécessaires, puisque les publics veulent que les organisations soient transparentes et se comportent en «bonnes citoyennes».

    Le storytelling est utilisé de plus en plus souvent, s’appuyant sur le fait que les histoires ajoutent un contenu émotif à la communication, la renforcent et facilitent l’intégration du message. Mais est-ce seulement un phénomène de mode ou est-ce une voie d’avenir? Peu importe la réponse, il était difficile de laisser cette dimension narrative de côté.

    Ces six approches théoriques sont complémentaires, elles permettent de caractériser différents éléments d’une campagne. En effet, les actions de communication sont pensées en fonction de publics définis qui font partie d’organisations ou de réseaux d’individus. Les actions et le contenu de la communication suivront des canaux orientés dans un sens donné – communication verticale de haut en bas ou de bas en haut, communication horizontale, symétrique ou non, etc. – en tenant compte ou non de la qualité de l’information, des réactions des publics visés ou touchés, directement ou indirectement, et de la qualité de la relation organisation-publics. Réseaux et actions de communication sont bien évidemment inscrits dans des environnements multiples et modifiables (les contextes de communication), et peuvent être enrobés dans une ou des histoires.

    1.1. LES PUBLICS

    Dans la vision des relations publiques privilégiée par ce livre, ce sont les relations qui priment. Mais il ne pourrait y avoir de relations sans public. Depuis quelques années, les relations publiques ne sont plus seules à s’y intéresser: les spécialistes du marketing mettent moins l’accent sur le produit que sur le public, qui devient une cible, un client, voire un partenaire. Dans la littérature et la pratique du marketing, par opposition à celles des relations publiques, la différence entre publics et marchés est très ténue (David, 2004, p. 185–211). Comme le souligne le sociologue Sennett (2006, p. 157), la transaction remplace la relation dans le marketing. Le concept de client est un rétrécissement de celui de public. Quand le marketing considère les relations publiques comme faisant partie de la communication intégrée, une grande partie des publics sont ignorés parce qu’ils ne sont pas actifs dans les transactions.

    […] the opportunistic marriage between public relations and marketing has the potential of leading to a narrow emphasis of consumers at the expense of a broader public, which can be derimental to an organization (David, 2004, p. 186).

    La théorie situationnelle des publics (Aldoory, 2001, p. 163–185; Grunig et Repper, 1992, p. 117–158; Hallahan, 2000a, p. 463–480), élaborée en ayant à l’esprit surtout les publics circonstanciels, divise les publics en cinq catégories basées sur leur connaissance d’une question et leur niveau d’implication envers celle-ci. Cette classification peut être schématisée comme l’illustre le tableau 1.1.

    TABLEAU 1.1

    Classification des publics en fonction des enjeux

    (traduit de Hallahan, 2001, p. 27–59)

    La cinquième catégorie, les non-publics, rassemble des gens qui sont à la fois ignorants de l’enjeu considéré et indifférents à toute action de communication, alors que ceux des quatre autres catégories sont tous passés par une première étape: la reconnaissance de l’existence de l’enjeu. Que ce soit en raison de la croissance de l’individualisme dans la société (exclusion) ou de la surcharge informationnelle (décrochage), ces non-publics semblent de plus en plus fréquents, et c’est très souvent à eux que doivent s’adresser les relationnistes.

    Conceptualisée pour la première fois par Freeman (1984), la théorie des stakeholders, traduite par «théorie des parties prenantes», est utilisée abondamment depuis les années 2000 par les chercheurs en management, puis, par mimétisme, par des chercheurs en relations publiques et par de nombreux praticiens, surtout anglophones. Ce terme – partie prenante ou stakeholder – englobe tout individu ou groupe d’individus qui peut exercer une influence sur les activités d’une organisation ou être concerné par elles. Pour Maillet (2006, p. 234) ces stakeholders, interlocuteurs privilégiés, sont au nombre de quatre: clients, salariés, fournisseurs et actionnaires. Nicole d’Almeida (2007, p. 253) souligne que

    […] on assigne ainsi insensiblement à autrui des positions actantielles favorables ou positives. Ce qui est visé dans l’utilisation du terme – de partie prenante –, c’est la création de scénarios de conjonction ou de conciliation, ce qui est écarté est l’opposition et la contrariété.

    Et elle poursuit: «C’est une manière de nommer ses publics en présupposant leur intérêt et leur entrée en communauté, sorte de sens commun économique.»

    Mais les relations publiques doivent aller au-delà des parties prenantes, vers ceux que l’on cherche à mobiliser. Ce qui n’est peut-être que l’utilisation d’un mot à la mode – partie prenante – est en fait l’oubli ou l’exclusion de publics (Hallahan, 2000b, p. 499–515).

    1.2. LES RÉSEAUX EN COMMUNICATION ORGANISATIONNELLE

    Les premiers modèles présentant des réseaux de communication datent des années 1980 au moment où Rogers (1986, cité dans Windhal, Signitzer et Olson, 1993, p. 411) définissait un réseau de communication comme «des individus interreliés qui sont unis par une communication organisée».

    Les modèles «classiques» et linéaires de communication de type «qui dit quoi, à qui, avec quel effet, etc.» (Lasswell, 1948, p. 37–51) ou encore «source-message-canal-récepteur» (Weaver et Shannon, 1975; Willett 1992, p. 170), tout en étant encore utiles pour schématiser très rapidement une opération ponctuelle de communication, sont très largement dépassés et remplacés par des visions plus larges et systémiques des processus de communication.

    Lavigne (2002, p. 154–173) reprend ce concept, l’élargit et l’enrichit des avancées faites ces dernières années dans le secteur des sciences sociales (Lemieux, 1998; 1999; 2000). Il le développe avec l’objectif de mieux modéliser la communication des organisations. Il en vient à caractériser, dans ce contexte, trois grands types de réseaux: les réseaux de liens, les réseaux de contrôles et ceux de transactions, qui seraient présents à la fois dans les environnements interne et externe de l’organisation.

    Les réseaux de liens, réseaux naturels ou réseaux primaires, font appel à la sociabilité inhérente de l’être humain (Proulx, 1995). Ils sont caractérisés par des liaisons plus ou moins denses, des échanges essentiellement sociaux et des moyens de communication informels et conviviaux.

    Les réseaux de contrôles ou réseaux fonctionnels ont une nature très structurée, officielle et formelle et sont caractérisés par un échange de nature économique. Ils ne sont pas à proprement parler des réseaux de relations publiques mais davantage des réseaux de gestion des organisations.

    Les réseaux de transactions ou réseaux utilitaires se présentent comme des voies relationnelles privilégiées, construites sur la base de mobiles particuliers et de cibles tacites (Lemieux, 1998). Ils sont caractérisés par des échanges sociaux, des pratiques d’entraide et des communications surtout informelles.

    TABLEAU 1.2

    Les principales caractéristiques des six types de réseaux de la communication des organisations

    (adapté de Lavigne, 2002, p. 154–173)

    Les médias sociaux, qui sont en pleine croissance, reflètent-ils les caractéristiques des réseaux sociaux? Est-ce qu’une théorie établie en étudiant des réseaux traditionnels de la vie réelle peut expliquer un tant soit peu ces réseaux virtuels dont les usages ne sont pas stabilisés? Avoir une page Facebook individuelle relève du lien qui, selon la fréquence des échanges, sera qualifié de faible ou de fort.

    Mais qu’en est-il des pages des groupes? Ces pages peuvent être montées à des fins commerciales autant qu’associatives ou «advocatives». Dans le cas de Facebook et de Twitter, il est difficile d’évaluer ce que font les «abonnés suiveurs». Certains sont actifs virtuellement, d’autres non: ces derniers lisent les interventions comme ils liraient un média traditionnel, mais cette simple activité peut quand même renforcer le lien. Une invitation placée sur Facebook par un groupe ou une personne mènera peut-être à une rencontre réelle et à un renforcement du lien, alors que rien ne paraîtra dans le virtuel.

    La frontière entre relations publiques, marketing tout court et marketing social devient de plus en plus floue. Selon une étude de 2009 (Bigmouthmedia, 2009), les deux tiers des entreprises consultées croient que les médias sociaux ont comme bénéfices une plus grande fidélité des clients, un accroissement de la réputation de la marque et une meilleure communication avec les influenceurs clés. Cependant, les dirigeants de ces entreprises se posent la question: comment évaluer sur les médias sociaux l’engagement des clients et la réputation de l’organisation? De plus, 59% des personnes interrogées disent ne pas vouloir investir les médias sociaux par manque de connaissance et de compréhension de ces outils (Wright et Hinson, 2008).

    1.3. LES RELATIONS ORGANISATION-PUBLICS

    Cela semble évident de dire que les relations publiques sont affaire de relations. Pourtant, ce n’est que depuis la fin des années 1990 que la gestion des relations (relationship management) en tant que théorie générale des relations publiques a pris forme (Ledingham et Bruning, 1998, p. 55–65). Selon ce courant de recherche, une relation peut se caractériser par cinq indicateurs: la fiabilité (level of trust), la transparence (openness), l’implication (involvement), l’investissement (investment) et l’engagement à long terme (commitment). De façon plus précise: fiabilité signifie que l’organisation fait ce qu’elle a dit qu’elle ferait; transparence, qu’elle partage avec les publics ses projets d’avenir; implication, qu’elle participe au bien-être de sa communauté d’implantation; investissement, qu’elle y participe financièrement; enfin, engagement veut dire que l’organisation participe activement à l’amélioration du bien-être de sa communauté dans une perspective de long terme. Les stratégies pour maintenir ces relations comprennent l’accès à l’information, une attitude positive, l’ouverture, l’assurance, le réseautage et le partage des tâches. De telles stratégies doivent entraîner des résultats (outcomes) en termes de contrôle réciproque, de confiance, de satisfaction et d’engagement des publics envers l’organisation (Hon et Grunig, 1999) et, de ce fait, en améliorer la performance (Hall, 2006, p. 1–21).

    Penser une campagne de communication en termes de gestion des relations ne se limite donc pas à un ensemble de stratégies et de moyens. En effet, il ne s’agit plus de repenser seulement les interactions entre l’organisation et ses publics. Il faut aussi repenser celles entre l’organisation et d’autres organisations et celles des publics envers d’autres publics dans une perspective coorientation en fonction de buts communs et de compréhension dans les moyen et long termes.

    1.4. LES QUATRE MODÈLES DE RELATIONS PUBLIQUES

    Poursuivant un travail commencé il y a fort longtemps dans le cadre de sa thèse de doctorat, Grunig a construit avec son équipe une typologie des façons de faire des organisations. Ils ont analysé, de façon quantitative, entre autres par analyse factorielle, de nombreuses entrevues portant sur les activités de relations publiques de plus de 300 entreprises états-uniennes, canadiennes et anglaises. Les facteurs qui ont été mis en évidence sont fortement reliés à deux variables: la direction des actions de communication et leur symétrie. Partant de ces deux facteurs prédominants, les chercheurs ont construit quatre modèles et longuement développé leur réflexion théorique par la suite (Grunig, Grunig et Dozier, 2002, p. 654).

    TABLEAU 1.3

    Les caractéristiques des quatre modèles de relations publiques de Grunig

    (adapté de Windhal et al., 1993)

    Dans les deux premiers modèles, l’information circule à sens unique, verticalement de haut en bas de la structure hiérarchique à l’interne ou de l’organisation vers ses publics à l’externe. La différence entre les deux modèles tient à la nature de la présentation de l’information. Nous nous trouvons ici soit en présence de promotion, voire de propagande, avec un contenu volontairement biaisé, soit devant une communication purement informative. Il s’agit toutefois dans les deux cas d’un monologue de l’organisation.

    Dans les deux autres modèles, l’information circule dans les deux sens, de l’organisation vers ses publics et réciproquement; il y a donc dialogue. La différence entre les deux modèles dépendra des objectifs de l’organisation. Dans le modèle asymétrique, l’organisation n’a pas l’intention de changer, mais elle espère que ses publics changeront à son égard. Tandis que dans le modèle symétrique, d’une part, la communication est équilibrée, ajustant la relation entre l’organisation et ses publics, et, d’autre part, l’organisation accepte de changer. Comme Grunig l’écrit, «seul le modèle bidirectionnel symétrique représente une rupture par rapport aux préjugés dominants qui veulent que les relations publiques ne soient que des moyens de manipuler les publics au profit des organisations» (Grunig et Grunig, 1992, p. 285–325). Dans un texte de 2001, Grunig précise que le terme «symétrie» est utilisé en se référant au processus plutôt qu’au résultat.

    Chercher un équilibre entre ses intérêts propres et ceux des autres est un processus de donnant-donnant entre le plaidoyer – advocacy – et la collaboration ou entre ce que d’autres ont appelé le plaidoyer collaboratif et l’antagonisme coopératif (Grunig, 2001, p. 11–30; traduction libre).

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