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L’héritier de « Charlemagne »: Roman
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L’héritier de « Charlemagne »: Roman
Livre électronique180 pages4 heures

L’héritier de « Charlemagne »: Roman

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À propos de ce livre électronique

Traumatisé par la disparition de son père engagé dans les rangs nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale, Daniel, tout jeune journaliste, est envoyé au Paraguay. Il y rencontre un universitaire de renom qui soutient une théorie fabuleuse sur l’influence des Vikings dans les civilisations d’Amérique du Sud. Réalité ou invention ? Voilà ce que devra trouver Daniel, en se plongeant dans l’histoire de Svear et de Guillaume lancés sur les mers inconnues. Mais ce sont d’autres secrets qu’il mettra au jour en découvrant l’histoire fabuleuse de ces Vikings partis au bout du monde, des secrets plus contemporains et dangereux, noyés dans l’ombre d’un père. Une intrigue autant qu’une saga qui permettra, à celui qui osera mettre le pied sur le pont des drakkars, de connaître la vérité sur l’héritier de Charlemagne.

EXTRAIT

— Regardez, ici, dans le coin de l’enveloppe.
— Vous avez de bons yeux. On ne voit pas grand-chose.
— Je les ai recopiés, tenez. Il est écrit « Danzig », et aussi le début d’un autre nom, « Wildfl . . . » Et puis après, un autre fragment : « plutôt mort que… », avec encore le mot « méfiance » à côté. Je vous avoue ne rien y comprendre.
— Donnez-moi cela.
Le ton est devenu soudainement ferme, presque agressif. Le visage blême, la vieille femme se saisit de la feuille d’une main qui tremble. Avec une attention extrême, elle lit et relit plusieurs fois les mots, puis sa main retombe d’un coup sur la table.
— Non, ce n’est pas possible ! dit-elle dans un murmure.
— Que se passe-t-il ? Ces noms vous sont familiers ?
— Ils font tous référence à un passé que je croyais enfoui, définitivement. À son père.

À PROPOS DE L'AUTEUR

D’abord enseignant puis archéologue médiéviste, pour finir conseiller municipal de sa ville, Jean-Denis Clabaut est auteur d’ouvrages historiques et de romans. Cette passion de l’écriture, qui est née dans la librairie de son enfance, l’a amené à fonder l’Association des Auteurs Du Nord qui a pour but la promotion de la lecture et de l’écriture dans les prisons.
LangueFrançais
Date de sortie20 nov. 2019
ISBN9791037701916
L’héritier de « Charlemagne »: Roman

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    Aperçu du livre

    L’héritier de « Charlemagne » - Jean-Denis Clabaut

    Un aller simple

    Atlantique sud, 23 000 pieds, 14 février 1961

    La maison est secouée par des explosions qui éclairent violemment la chambre, recouvrant le sol de gravats tombés du plafond dangereusement lézardé. Daniel enfouit la tête sous son oreiller, terrorisé. Ne plus voir, ne plus entendre. Mais les bombes larguées inlassablement par les avions anglais explosent partout.

    Quand la porte s’ouvre, Daniel se jette dans les bras de celui qui vient d’entrer.

    Les bras protecteurs se referment sur lui et le petit garçon s’y réfugie, rassuré. Mais la pression devient progressivement plus forte et il se sent oppressé, puis lentement étouffé. Il lève la tête, tente d’appeler. Pas moyen, ses poumons sont privés d’oxygène. Horrifié, il regarde le visage de son père se transformer lentement. Une petite moustache noire apparaît, puis une mèche qui lui barre le front sous la casquette qui porte l’infâme sigle des divisions SS, avec la tête de mort affublée d’un horrible rictus qui s’apparente à un sourire. Le petit garçon entend, avec un frisson glacial, une voix criarde lui hurler à l’oreille : « fils de salaud, tu vas payer ! ».

    D’un bond, Daniel ouvre les yeux, hagard, le front en sueur.

    Le visage de l’hôtesse est légèrement tendu, les sourcils un peu froncés. Son indéfectible sourire, crispé maintenant, se transforme en moue d’inquiétude. Penchée au-dessus du jeune homme assoupi, elle lui a posé une main sur l’épaule, autant pour le sortir de son sommeil agité que pour le rassurer.

    Sa voisine le foudroie du regard.

    « Souhaitez-vous un rafraîchissement ? Cela vous ferait certainement du bien », coupe l’hôtesse en fusillant du regard la dame aux cheveux gris, coupés très courts. Ils encadrent un visage aux traits durs, où un duvet jamais débroussaillé en dessous du nez achève de lui donner un air masculin. Cette dernière regarde son voisin avec un mépris sans limites. L’hôtesse enchaîne sans tenir compte du regard noir qui la foudroie à son tour. « Si vous le voulez, vous pouvez faire quelques pas pour vous détendre, et enlever votre ceinture. Elle n’est pas nécessaire en vol ».

    Daniel la remercie et se lève en trébuchant, accompagné par les grommellements de sa voisine qui plonge son regard à travers le hublot avec un haussement d’épaules significatif. Seuls les mots de « minable » et de « mauviette » parviennent à l’oreille de Daniel et se mêlent à des soupirs de lassitude. 

    Le jeune homme se dirige vers l’arrière, se tenant à chacun des sièges tant il a l’impression de tanguer. Il a néanmoins le temps de jeter un regard appuyé sur l’hôtesse, et de l’évaluer rapidement. Pas mal, vraiment bien. Malgré cette vision agréable, il ne peut réprimer un frisson. Non, vraiment, il n’aime pas se retrouver perché au-dessus des nuages. Le vrombissement des quatre moteurs du super-constellation lui rappelle des images funestes, celle de l’enfant terrorisé qu’il était alors. Arrivé aux toilettes, Daniel prend le temps de se rafraîchir le visage, essayant d’oublier ce voyage éprouvant dans des gestes simples d’ablution quotidienne. Rien n’y fait cependant. Dans le petit miroir au-dessus du lavabo, il croise le regard d’un visage pâle aux traits creusés, et entreprend de le raisonner dans un mono dialogue à voix basse.

    Daniel sourit au reflet dont les joues reprennent des couleurs. Il lui adresse un petit signe de la main avant de sortir, auquel le miroir répond avec politesse. Dans la coursive de l’avion, Daniel croise à nouveau l’hôtesse qui sourit toujours, alors que ses yeux interrogateurs trahissent une légère inquiétude.

    Se serrant le long des sièges afin de la laisser passer, Daniel frôle dans un geste involontaire la hanche de la jeune femme qui se retourne, toujours souriante. Le regard du jeune homme s’attarde sur la jupe qui moule si bien les jolies fesses de l’hôtesse, et descend le long des jambes jusqu’aux mollets galbés en suivant la ligne des collants. De retour à sa place, il a l’esprit accaparé par une nouvelle question. Bas ou collants ? Son imagination vagabonde avec indiscrétion sous les replis de la jupe, survolant les cuisses qu’il imagine ferme, dans un voyage autrement plus agréable que celui qu’il subit. Un phantasme banal, celui de l’hôtesse de l’air. Certainement risible. Mais Daniel en a bien d’autres.

    Le reflet du miroir a raison. Avoir réussi à se faire embaucher dans ce grand quotidien national trois ans plus tôt, c’était alors une vraie chance. Après la guerre, l’école avait été son refuge et ses brillants résultats, jumelés à son appétit insatiable de lecture et d’information, l’avaient logiquement amené à intégrer l’école de journalisme. C’était pour lui une juste compensation. Et puis, il voulait tellement faire plaisir à sa mère ! Il était le dernier, le seul et l’unique comme elle disait, celui qui lui restait. Son frère et sa sœur étaient morts à cause du bombardement et… voilà qu’il y repense.

    Ah ! Ces moteurs ! Leur ronronnement régulier devrait l’apaiser, comme ceux de son chat. Chaque fois que le jeune homme s’installe pour lire dans son fauteuil, le soir, l’animal surgit sur l’accoudoir, lui chatouille le visage de sa queue, tourne un peu avant de trouver la position idéale, et s’installe sur ses genoux, les yeux mi-clos de plaisir douillet. Il caresse alors l’animal qui se cambre légèrement sous sa main, et ressent la vibration de plénitude de la boule de poils noirs, identique à celle qu’il perçoit maintenant en posant la main sur l’accoudoir. Avec son chat, il se sent gagné par le calme et l’apaisement.

    Pas ici. Au-dessus des nuages, entre l’océan et l’espace, ça ne marche pas. Il n’y peut rien. Lui est un terrien, absolument pas fait pour se balader au milieu du ciel. Il n’a rien d’un ange. Eux n’ont pas de sexe, alors que lui, les femmes, c’est sa faiblesse.

    Malgré son effort pour se concentrer sur les jambes de l’hôtesse, le bruit régulier des moteurs replonge Daniel dans cette nuit de terreur, quand une des bombes égarées, il y en eut tant, percuta le sol quelque part à gauche de la maison. Le bruit fut terrible, effrayant. Les vitres volèrent en éclats, puis il y eut de la fumée, partout, et cette odeur particulière de soufre et de feu, pendant que l’ossature de la maison tentait de résister à l’effroyable souffle. L’impact n’était pas suffisamment proche et la bâtisse a tenu le coup. Enfin, en partie. Son frère et sa sœur ont néanmoins été tués, écrasés sous un morceau du plafond qui a cédé en entraînant la lourde armoire de l’étage supérieur, celle de la chambre des parents.

    Non. De la chambre de sa mère.

    Son père n’était plus là depuis près d’un an, parti pour un endroit qui avait été tenu secret. Cependant, il avait bien remarqué que depuis ce départ, les gens étaient hostiles dans la rue. Avec sa mère d’abord, mais également avec lui. Surtout les autres, à l’école. Ils l’appelaient « le fils du salaud », mais il avait beau interroger sa mère, la supplier, elle ne lui avait rien dit. Alors, il s’était réfugié dans les livres et le travail. Finalement, sa réussite scolaire, il la devait à Hitler.

    Tout bien pesé, s’il n’avait pas déclenché la guerre, s’il n’avait pas recruté des troupes dans les pays conquis, s’il n’avait pas lancé sa légion de volontaires issus des milieux d’extrême droite, il n’aurait pas été brimé et rejeté, lui, Daniel, le fils du salaud, et il ne serait pas à cet instant en train d’attacher sa ceinture avant l’arrivée à Rio de Janeiro, dernière escale avant Asunción, capitale du Paraguay.

    Le sourire est penché au-dessus de lui et ce qu’il voit avant tout, ce sont quelques centimètres carrés de peau, juste un petit coin entre deux boutons de chemisier qui laissent entrevoir la fragilité d’une dentelle voilant le galbe d’un sein duveteux, soyeux à souhait. Une perfection.

    Elle lui sourit à nouveau, sans équivoque. Daniel lui est gré de son charme et de sa silhouette qu’il regarde remonter l’allée en direction de la cabine de l’avion. Ronchonnements et désapprobations à sa gauche.

    Les yeux fermés, Daniel refuse d’entendre la fin du couplet. Il se concentre sur du positif, de l’agréable, et l’image de l’hôtesse l’est assurément. Ses seins doivent être joliment arrondis, fermes, pas trop, juste un peu, comme il les aime. Il sourit. Sa mère lui a dit une fois : « Les femmes te perdront ». C’est vrai qu’il ne peut pas s’en passer, et s’il n’a pas encore mis la bague au doigt de l’une d’entre elles, c’est qu’une seule ne lui suffit pas. Pourquoi toujours la même ? Alors qu’il y en a tant, toutes plus attirantes, comme cette jolie hôtesse dont il n’est certainement pas amoureux, mais qu’il aimerait « tester », comme il dit souvent.

    En fait, il n’est jamais tombé amoureux. Rien ne le prédispose à ce qu’il considère comme une faiblesse, un déni de sa liberté, premier pas dans la servilité du couple et de ses chaînes. Si un psy l’entendait ! Il aurait fait son bonheur, sans aucun doute, et le praticien aurait pris plaisir à chercher dans l’enfance de Daniel les raisons de cette sécheresse de cœur, comme lui a dit celle qu’il a quittée sans aucun scrupule le matin même.

    Son enfance, c’est sans doute la clef. Son père surtout. Il en conserve un souvenir très diffus, embrumé par les années, et son visage ne lui est plus clairement perceptible. Il se souvient de moments de jeu à la maison, de sa joie lors du retour de son père après la débâcle. Quelques scènes encore s’accrochent à sa mémoire, là-haut, dans son Nord natal où ils vivaient sans doute heureux, avant la guerre. Il ne se souvient pas de ce temps-là. Né en 1937, il a grandi dans la guerre, avec elle, comme un fait acquis, une normalité. « C’est la guerre », disaient les grands avec un regard triste, et lui ne comprenait pas. « C’est comment, quand ce n’est pas la guerre ? », avait-il demandé un jour à sa mère qui avait fondu en larmes. Ce sont les premières lignes de l’évangile de Saint-Jean qui lui avaient donné la meilleure définition de ce qu’il ressentait alors : « Au début était le verbe et le verbe était Dieu ». Voilà, c’est exactement cela qu’il avait ressenti enfant. « Au début était la guerre et la guerre était Dieu ». Un tout, indissoluble, permanent, qui gouvernait la vie des hommes, qui mangeait les pères. Un champ d’atrocités et de difficultés quotidiennes, tellement normales, banales. La vie, quoi !

    Et puis la guerre était partie, son monde s’était écroulé. Il avait dû apprendre à vivre autrement et il avait trouvé cela bizarre, étrange. Tout était calme, lent, presque fade. La vie qu’il connaissait avait disparu, comme son père qui n’était pas revenu cette fois-là. Daniel était pourtant resté « le fils du salaud » et à l’école, les autres l’évitaient toujours. Cela au moins n’avait pas changé, une bribe de sa vie d’avant, le chaînon qui lui permettait de relier ses deux vies.

    Il avait fini par savoir. Sa mère lui avait montré des photos, lui avait parlé. D’autres également, mais sur un ton tellement plus agressif. Son père s’était engagé dans la division Charlemagne, au service du troisième Reich, à la solde d’Hitler. Il s’était trompé de camp et c’est à lui, le petit garçon, qu’on avait reproché l’engagement paternel, comme s’il en était responsable. Ce choix funeste l’avait souillé, sali. Et les autres, au lieu de l’aider à enlever cette tâche, n’avaient fait que l’étaler. Voilà pourquoi Daniel n’aime pas le monde, pourquoi il ne peut pas aimer une femme, mais seulement aimer les femmes.

    Le super constellation cahote en se posant sur la piste, tirant des gouttes de sueur froide à Daniel qui inaugure son premier atterrissage. Non, décidément, il n’aime pas l’avion et il songe avec déplaisir au trajet de retour qu’il aura à faire.

    Il se mord la lèvre d’avoir parlé sans réfléchir et se retient pour ne pas gifler la harpie moustachue qui a contribué à lui rendre le voyage si désagréable. Enfin, il est arrivé et il lui tarde de descendre. En théorie, quelqu’un de l’université d’histoire et d’archéologie doit l’attendre, afin de l’emmener directement à la rencontre du professeur Anselin pour lequel il est venu jusqu’ici. Quelle opportunité pour lui ! À 24 ans, c’est son premier grand reportage à l’étranger, et il le doit à la grippe, cette bonne vieille maladie qui lui donne une chance inespérée. Son rédacteur en chef l’a appelé la veille.

    Quelques instants plus tard, il frappait à la porte en même temps qu’il l’ouvrait, un peu essoufflé par le sprint qu’il avait piqué depuis les étages inférieurs, pressentant une bonne nouvelle.

    Un second choix donc. Une roue de secours. Voilà ce qu’il était encore, mais Daniel savait qu’une pareille aubaine ne se présenterait pas deux fois. Il devait saisir cette occasion pour montrer ce dont il était capable, pour que la prochaine fois on pense à lui en premier. Ne plus être un remplaçant.

    Voilà. À part quelques éléments et détails techniques, Daniel n’en sait pas beaucoup plus. Quand il a cherché à savoir d’où provenait l’information, le rédacteur en chef lui a simplement répondu : « J’ai mes sources », sans plus, fin de l’entretien, rideau, au travail.

    Daniel a souri en entendant le nom d’Hubert. C’est mon prénom, et je suis son chef direct. « Aussi gentil que gros, et tu es vraiment très gentil », m’a dit Daniel l’autre jour. J’ai pris cette réflexion pour une gentillesse, parce que venant de lui, c’en était une. Une gentille facétie. Dès son arrivée au journal, Daniel s’est attaché à moi, sans doute rassuré par mon apparence bonhomme et mon caractère calme, discret parfois, presque timide. Il s’est même confié, racontant son père et son enfance, comme ça, spontanément. Je l’ai écouté avec attention, conscient de recueillir des confidences précieuses. Depuis, je me suis largement investi dans mon rôle de mentor, parce que ce jeune homme me rappelle mes propres débuts et que je l’aime bien.

    L’esprit accaparé par son voyage, Daniel n’a pas été un amant extraordinaire la nuit précédant son départ. C’est plutôt par habitude, par routine mécanique et physique, pour répondre aux pulsions de son corps qui réclame quotidiennement sa dose, qu’il est allé chez cette fille. Ils se connaissent depuis quelques semaines, et déjà la voilà qui parle engagement et vie commune. Bientôt, le refrain sur le mariage et les enfants. Il l’a quittée un peu sèchement à l’aube, et elle a dû pleurer. C’est pourtant si simple de satisfaire uniquement ses besoins sexuels, sans gâcher tout cela par l’obsession du mariage, le syndrome de la robe

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