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Le reflet de l'autre
Le reflet de l'autre
Le reflet de l'autre
Livre électronique312 pages4 heures

Le reflet de l'autre

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À propos de ce livre électronique

Résumé:

Que feriez-vous si vous faisiez soudainement un bel héritage provenant d’une personne que vous ne connaissiez pas ?
La vie de Gabrielle en est bouleversée. Cela déclenche la rupture de son couple et son déménagement dans la maison héritée, en Suisse. Une nouvelle vie, de nouveaux amis, tout pourrait être parfait s’il n’y avait pas ce mystère autour du défunt et toutes ces surprises concoctées.
Installez-vous confortablement pour passer un moment plein de suspens, de surprises, d’émotions et de mystère en lisant cette histoire. Vous ne vous regarderez plus de ma même façon dans un miroir.
LangueFrançais
Date de sortie21 janv. 2015
ISBN9782322007592
Le reflet de l'autre
Auteur

Marielle Lanzalavi

Diététicienne, praticienne en Iridologie et en EFT. Le résultat de son travail est riche d'une expérience de plus de vingt années de pratique en cabinet libéral. Autrice de plusieurs ouvrages en diététique mais aussi de romans.

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    Aperçu du livre

    Le reflet de l'autre - Marielle Lanzalavi

    Epigraphe

    Prologue

    Les deux voitures roulaient à toute allure sur l’étroite route sinueuse du bord de mer. L’orage grondait sans discontinuer depuis trois jours et les torrents de pluie avaient provoqué des éboulis que les deux hommes devaient éviter en effectuant de brusques embardées.

    A leur gauche, la falaise tombait à pic et les vagues se fracassaient sur les rochers qui la bordaient dans un grondement sourd raisonnant dans la nuit noire.

    L’endroit était désert. Seules quelques vaches noires, maigres et déglinguées, erraient invisibles dans la pénombre à la recherche d’un brin d’herbe tendre. Sous la lueur des phares elles apparaissaient parfois, effrayant les conducteurs qui les évitaient de justesse en prenant garde de ne pas s’écraser contre les arbres fantomatiques aux silhouettes déformées par le vent puissant qui soufflait perpétuellement sur cette côte.

    Claude ressentait une excitation malsaine. Sa petite voiture dérapait dangereusement dans certains virages où l’angle et la chaussée glissante ne faisaient pas bon ménage mais le bougre qu’il poursuivait savait tenir un volant. Il grogna. Il avait longuement réfléchi pour essayer de trouver une autre issue mais le plan qu’il avait mis en place ne pouvait en aucun cas être modifié.

    Furieux, il appuya sur l’accélérateur et colla son pare-choc à celui de la voiture qui le précédait quand il vit le véhicule se déporter d’un coup sec. Il sentit perler une goutte de sueur sur son front malgré le froid. Accroché à son volant, il ne pouvait se résoudre à le lâcher, ne serait-ce que le temps de baisser sa vitre. Une demi-seconde pouvait suffire à tout gâcher.

    Il secoua la tête nerveusement. Ce mal le rongeait depuis des années et il devait en finir. Ce projet était le plus fou de sa vie et son obstination à réussir lui mettait le feu au ventre. Sa détermination était alimentée par une puissante rage de vaincre.

    Rien ne pourrait plus l’arrêter…

    Dans la lueur du petit jour, il n’y eut personne aux alentours pour admirer la superbe envolée dans les airs du coupé sport, puis son explosion suivie d’un long brasier brûlant sur les rochers acérés dans le contrebas.

    1

    Gabrielle en avait l’estomac tout retourné. Elle n’avait nullement mesuré l’impact que cette nouvelle provoquerait chez Adrien. Elle en était elle-même si surprise !

    Il l’avait écoutée calmement, puis son teint était devenu livide, son regard s’était assombri et ses lèvres pincées avaient pris une teinte blafarde. Elle avait observé le changement qui s’opérait en lui, tout en ressentant elle-même un profond malaise mais elle s’était tue et avait attendu. Il n’avait rien dit d’autre qu’un : « Tiens ! C’est bizarre ton histoire ! » avant de lui tourner le dos et se diriger vers son bureau.

    Restée seule dans le salon, elle avait allumé la télévision d’un geste automatique et s’était assise dans le canapé sans la regarder, fixée sur ses pensées.

    Au fond d’elle la colère montait. Elle ne pouvait en rester là. Elle en avait assez de ces conflits qui n’éclataient pas et la faisaient culpabiliser pour rien !

    Elle se redressa et d’un pas décidé le rejoignit dans son bureau mais il ignora sa présence. En observant son profil, elle sut qu’il bouillonnait.

    - Adrien, pourquoi réagis-tu ainsi ?

    - De quoi tu parles ? Tout va bien ! Railla-t-il.

    - On ne dirait pas…

    Soudainement il fit pivoter sa chaise et planta ses yeux sur elle, l’air ironique.

    - Comment veux-tu que je réagisse ? Dis-moi ! Tu me racontes une histoire abracadabrante et que voudrais-tu que je trouve à dire ? Super ? Merci ? Bonne nouvelle ? Dis-moi !

    - Mais…? Qu’est-ce que ça signifie ? Je t’ai raconté les faits, rien que les faits !

    - Ne me prends pas pour un imbécile ! Tu comprends très bien ce que je veux dire !

    - Mais tu te trompes carrément ! Tu peux me croire !

    - Attends une seconde (il tendit une main tremblante vers elle, le regard fou).

    - Résumons : un homme te lègue une petite fortune, comme ça ! Sans raison ! Et ça ne doit pas me sembler bizarre ? Et toi ? Ça te parait logique ? As-tu déjà entendu une histoire aussi invraisemblable ? Parce que moi : jamais !

    - Non, je t’ai dit que je n’en revenais pas ! Mais je t’ai tout expliqué tel que je l’ai appris moi-même. Que veux-tu que je te dise de plus ? Même si l’histoire est incroyable, elle est réelle !

    - Et tu me confirmes que tu ne le connaissais pas ?

    - Je te l’ai déjà dit ! C’est vrai, je te le jure… Lui répondit-elle avec lassitude. Du moins pas vraiment…

    - Ah ! PAS VRAIMENT, reprit-il d’une voix haut perché. Et jusqu’à quel point peut-on connaître « pas vraiment » ?

    Adrien s’était levé pour faire les cent pas, nerveusement. Sa lèvre inférieure tressaillait, faisant ressortir la fine cicatrice sur le côté gauche de sa bouche.

    Gabrielle fixa le sol, le temps de reprendre sa respiration et son calme avant de lui répondre.

    - Tu exagères et tu joues sur les mots parce que tu es en colère mais il n’y a pas de quoi.

    - Tu trouves que j’exagère ? Moi je pense que tu me prends pour un imbécile ! Tu n’as pas encore compris que je ne suis pas né de la dernière pluie et que je connais parfaitement la nature humaine ! Particulièrement celles des femmes ...

    Il laissa sa phrase inachevée en faisant un geste des deux mains tournées vers le ciel qui semblait vouloir dire : « Il n’y a que Dieu qui puisse les comprendre», puis il continua :

    - Je sais qu’un homme est capable, à la rigueur, de faire des cadeaux à une femme qu’il veut séduire mais certainement pas de léguer une fortune à celle qu’il n’a pas connue ! Tout ça c’est des foutaises ! Tu me racontes des salades et tu me caches quelque chose, j’en suis certain !

    Elle ne l’avait jamais vu dans cet état. Elle le fixa silencieusement, ne sachant plus ce qu’elle pourrait dire pour le faire revenir à la raison. Adrien n’était pas un homme violent mais ses colères étaient toujours d’une grande intensité. La seule façon d’y échapper était la fuite car rien ne le calmait.

    - Pourquoi ne me fais-tu pas confiance ? Insista-t-elle toutefois.

    - CONFIANCE ?!

    Il eut un petit sourire narquois.

    - Confiance, reprit-il, les femmes sont toutes les mêmes ! Dès qu’un homme fait le joli cœur et agite quelques billets, car celui-ci en avait apparemment, elles ne réfléchissent plus. Elles se fichent pas mal des conséquences !

    - Tu dis n’importe quoi…Tu sais pertinemment que je ne suis pas ainsi.

    - Prouve-le !

    - Comment veux-tu que je te prouve que je n’ai pas connu cet homme ? Et dois-je te prouver encore que je ne fais pas partie de ce genre de femmes que tu décris ?

    Mais il ne l’écoutait plus et suivait son idée.

    - Tu as dit que tu ne le connaissais pas vraiment, explique-toi !

    - Et bien, je lui ai parlé une ou deux fois et lorsque je le croisais en ville, on se disait bonjour. C’est tout. Tu sais bien que c’est petit ici. Tout le monde se connaît sans se connaître vraiment.

    - Une fois ou deux ? Répéta-t-il sans sembler avoir entendu le reste de la phrase. Au départ tu me dis que tu ne le connaissais pas et à présent tu dis lui avoir parlé plusieurs fois… Dans cinq minutes tu me raconteras ta partie de jambes en l’air ! Dit-il en ricanant.

    Il gesticulait et appuyait ses arguments en la montrant de la main. Elle détestait le voir agir ainsi. Il représentait, en ce moment précis, tout ce qu’elle abhorrait : l’arrogance, le manque de tolérance, tant d’orgueil et de bêtise ! Par moment il s’arrêtait et lui tournait le dos en fixant la fenêtre, réfléchissant visiblement à la façon dont il pourrait encore alimenter sa haine et ses doutes envers elle. Elle l’observait en essayant de garder son calme mais tout en elle n’était que rage.

    Elle le connaissait si bien qu’elle le soupçonnait de profiter de cette occasion pour justifier sa mauvaise opinion quant aux femmes, en l’incluant par la même occasion dans le lot. Cette attitude de machiste dégénéré la dégoutait ! Tout en elle haïssait ce personnage qu’elle avait tant aimé.

    Il lui tourna le dos et regarda par la fenêtre, les bras le long du corps, dans une position raide et figée. Sa silhouette athlétique se découpait en contre jour. Brun et mince, Adrien était un homme séduisant. Gabrielle ne pouvait s’empêcher de rester là tout en sachant que la partie était terminée et qu’il ne l’écouterait plus. Une main invisible s’empara de son cœur et le serra jusqu’à ce qu’elle se sente étouffer.

    - Tu es horrible ! Murmura-t-elle la gorge nouée. Tu tournes tout de travers. Tu m’énerves, ça ne sert à rien que je discute avec toi. Tu ne veux rien entendre d’autre que ta propre vérité. C’est insensé ! (Elle se racla la gorge et éleva brusquement le ton en montant dans les aigus plus qu’elle ne l’aurait souhaité). Pourquoi te cacherais-je si j’avais eu une aventure avec cet homme puisqu’il est mort ?

    - Parce que ton aventure a peut-être eu lieu il n’y a pas si longtemps que ça. Peut-être m’as-tu trompé avec lui ? Je ne vois que ça.

    - N’importe quoi ! Tu dis n’importe quoi et je n’ai rien à me reprocher ! Je ne suis pas comme ça et tu le sais au fond de toi mais tu refuses de le voir. Je vais faire un tour, j’en ai assez entendu. Je reviendrai lorsque tu seras calmé !

    - Alors prends ton temps ! Lui lança-t-il, froidement.

    Alors qu’elle s’éloignait, elle entendit un bruit fort et sourd. Elle se doutait bien de ce qu’il avait fait : un coup de poing dans une porte était tout à fait son genre! Elle attrapa ses clés et sortit en claquant la porte, tremblante et en larmes, elle descendit le chemin vers le bord de mer d’un pas vif et décidé. Les mots se bousculaient dans sa tête, les souvenirs revenaient, mauvais.

    Elle avait rencontré Adrien après son divorce et avait espéré vivre enfin l’histoire dont elle rêvait mais en réalité, leur relation ne fonctionnait que parce qu’elle supportait avec patience tout ce qu’il ne lui apportait pas… Arrivée face à la mer, elle inspira profondément une bouffée d’air aux relents iodés. Elle réalisait tant de choses en cet instant précis qu’elle voyait mal comment revenir en arrière. Ce manque d’estime qu’il lui faisait ressentir était devenu insupportable et avait grignoté leur relation déjà fragile.

    Comment pouvait-elle continuer à subir son orgueil, ses colères et son mépris ?

    Peut-être que cette situation inattendue était un signe du destin, la main de Dieu qui la guidait vers autre chose ? Devait-elle se laisser guider vers cette issue de secours qui la menait je-nesais-ou ?

    Elle trouva la maison vide à son retour.

    Elle prit une douche pour se réchauffer, laissant l’eau dégouliner sur sa tête, longuement. Les idées se mirent en place d’elles-mêmes.

    Deux heures plus tard elle quitta les lieux, un sac dans une main et son passeport dans l’autre.

    2

    Le voyage entre la Corse et la Suisse fut long mais Gabrielle était si absorbée dans ses pensées que le monde pouvait bien s’écrouler autour d’elle sans qu’elle ne réagisse. Elle ne se sentait pas responsable de cette histoire absolument incroyable. Par contre, elle en subissait les conséquences. Il aurait dû être heureux pour elle, pour eux deux ! C’était un peu comme si elle avait gagné au Loto ! Sa petite voix intérieure ne cessait de tout ressasser.

    En arrivant au-dessus du lac Léman, elle réalisa dans un bref instant de panique que sa vie ne serait jamais plus comme avant, que c’était une autre chance de trouver le bonheur qui se présentait et qu’elle ne devait plus faire d’erreur. Dorénavant, ma vie ne dépendra que de moi-même, se dit-elle ; je serais libre et heureuse.

    Dans sa petite voiture de location en direction de Lausanne elle ne put s’empêcher de se remémorer comment tout avait commencé : par un simple petit appel téléphonique…

    - Mademoiselle Giusti ?

    - C’est moi-même.

    - Maître Trojani à l’appareil. Je suis désolé de vous déranger mais pourriez-vous passer à mon étude dans les prochains jours pour que nous puissions régler une affaire importante ?

    - De quoi s’agit-il ?

    - Je préfèrerais éviter de vous en parler au téléphone, il serait préférable que nous fixions un rendez-vous.

    En raccrochant, Gabrielle ne se doutait pas le moins du monde de ce que le notaire lui voulait.

    Puis, au fil de ses pensées, elle se souvint d’un jour où elle s’était rendue à son cours de gymnastique quelques mois plus tôt. Cet épisode lui était revenu en mémoire bien après être allée chez le notaire.

    En arrivant, elle avait trouvé, comme à son habitude, les abonnées du club en train de discuter autour d’un café. Elles parlaient d’un accident mortel qui avait eu lieu sur la petite route sinueuse qui longe le bord de mer entre Calvi et Porto. Une côte à la fois magnifique et dangereuse pour les conducteurs imprudents.

    - Il s’était rendu à Galéria pour visiter un hôtel! Disait l’une d’entre elles en prenant un air mystérieux.

    - Oui, j’ai entendu dire que c’était un canadien qui avait des agences immobilières en suisse et ici ! Renchérit une autre, originaire de Marseille à en juger par son intonation chantante.

    - De qui parlez-vous ? Demanda naturellement Gabrielle en s’asseyant.

    - Un café, Gabrielle ? Proposa Carine avant de répondre à sa question. Puis elle pencha la tête vers elle en servant le café et presque en chuchotant lui demanda : As-tu entendu parler de ce terrible accident? Toute la ville ne parle que de ça…

    - Non… Depuis quelques jours je suis coupée du monde ! Je termine tous mes envois de commandes, je suis enfermée chez moi toute la journée, dieu merci c’est sur la fin ! De quoi s’agit-il ?

    - Et bien, te souviens-tu de Claude Senarro ? Un homme qui devait avoir quarante cinq ans environ… Comment te le décrire ? Il était plutôt charmant, pas très grand, brun, assez typé.

    Gabrielle eut l’air de chercher à se représenter cet homme en fronçant les sourcils.

    - Oui, tu le connais certainement… Ajouta Sophie, une petite blonde très mince. Il venait parfois jouer au squash avec Jérôme, celui qui s’occupe de son agence, ici, à l’Ile-Rousse. On les voyait jouer pendant que nous faisions notre cours de Step, ils étaient toujours en compétition ! On les entendait toujours crier pendant notre cours de fitness !

    - Moi je trouvais qu’il avait un petit air d’Andy Garcia, ajouta Sophie.

    - Hum, c’est vrai… Approuva Carine.

    - Je vois… à présent que tu me parles de l’agence immobilière et du squash, je le situe mieux, dit soudainement Gabrielle. Et que lui est-il arrivé ?

    - Oh, c’est une catastrophe pour le pauvre homme! Sa voiture est tombée dans le ravin au milieu des rochers, en pleine nuit.

    - Oh, quel drame ! Comment est-ce arrivé ?

    - Nul ne sait. Les gendarmes pensent qu’il y avait peut-être une vache sur la route comme ça arrive souvent et qu’il a dû essayer de l’éviter.

    Il a raté le tournant et s’est retrouvé de l’autre côté sans pouvoir s’arrêter.

    - Il a embouti le muret qui longe la route ?

    - C’est ce qu’il semblerait…

    - Mais je me demande pourquoi il a pris cette direction et non la route de l’intérieur qui est tout de même moins dangereuse… dit Joséphine en hochant la tête d’un air réprobateur.

    - Pire encore ! Il a détruit le muret et est passé à travers avant de dégringoler de la falaise et se fracasser sur les rochers en bas, au milieu de l’eau ! Ajouta Carine qui répondit auparavant à Joséphine par un signe de tête pour démontrer son incompréhension.

    - Malheur ! Comment l’ont-ils retrouvé ?

    - Et bien on ne l’a pas trouvé de suite…Cela fait plusieurs jours que les employés de l’agence s’inquiètent de ne pas avoir de ses nouvelles.

    Ils ont signalé sa disparition à la gendarmerie et il y a eu de longues recherches sur les deux routes jusqu’à voir la voiture en survolant le bord de mer en hélicoptère. Elle a brûlé! Il ne reste de lui qu’un squelette calciné.

    - Mon dieu, c’est horrible… Souffla une jeune femme.

    Elles en restèrent toutes muettes durant quelques minutes.

    - Avait-il de la famille ? Une femme, des enfants ? Demanda l’une d’entre elles.

    - Il semblerait que non ! Répondit Carine tout en regardant Natacha.

    Celle-ci approuva de la tête avant d’expliquer :

    - J’ai travaillé dans son agence pendant cinq ans… (elle se tut durant quelques secondes avant de reprendre sur un ton monotone): Je me suis arrêtée car j’étais en pleine dépression après la mort de mon époux et je n’ai jamais pu reprendre mon poste, une belle place pourtant. Bref, à l’époque les employés racontaient que le grand chef avait eu une vie peu banale. Il avait été abandonné à la naissance et élevé dans un orphelinat près de Montréal. Il était très doué pour les affaires et à dix-huit ans il fut embauché comme commercial dans une menuiserie. Il est tombé amoureux de la fille du patron et ils se sont mariés mais peu de temps après, elle serait morte dans un accident.

    - Mon Dieu… Chuchota Joséphine.

    - Effondré, continua Natacha, Claude quitta le Canada pour refaire sa vie ailleurs. Son ex-beaupère, qui n’avait pas d’autre enfant lui légua une bonne partie de sa fortune. Il a commencé par ouvrir une agence immobilière en Suisse, puis une deuxième, la troisième étant ici, en Corse. Il était très apprécié, très correct avec tout le monde et n’a jamais eu de problème quelconque…un homme bien, quoi.

    - Quel curieux destin…triste et chanceux à la fois, ajouta Carine dans un soupir.

    Gabrielle s’était souvenue alors qu’elle lui avait parlé une seule fois. Un jour, alors qu’elle cherchait une solution financière pour pouvoir changer de voiture, elle avait songé à vendre son petit terrain et s’était arrêtée dans cette agence dans laquelle elle avait rencontré cet homme.

    Il avait eu une attitude troublante qu’elle n’avait su s’expliquer. Il avait relevé la tête du dossier qu’il était en train de consulter lorsqu’elle était entrée puis s’était raidit et l’avait fixée intensément avec un air contrarié. Elle avait fait mine de ne pas s’en rendre compte et s’était excusée de l’avoir dérangé dans son travail avant de lui parler de son terrain.

    Il s’était un peu détendu au fur et à mesure de leur entretien et lui avait donné l’excellent conseil de ne pas le vendre car avec le recul elle avait pu constater qu’il avait dit vrai et que depuis, sa valeur avait été multipliée.

    Puis elle l’avait croisé, parfois, en faisant son jogging, sport qu’il pratiquait également semblait-il. Et souvent, en effet, elle l’avait remarqué au club de squash. L’Ile-Rousse étant une petite ville et ce club très fréquenté, elle n’avait pas trouvé ceci étrange mais plutôt normal. Ils s’étaient toujours dit bonjour mais avaient rarement échangés plus de trois mots.

    ***

    Le jour commençait à décliner et les panneaux indicateurs laissaient entendre qu’elle n’était plus très loin. Elle jetait de temps à autre un coup d’œil sur son téléphone portable posé à côté d’elle. Un réflexe instinctif, pour voir si le réseau passait bien et si Adrien n’avait pas essayé de la joindre. Mais rien. Depuis le matin, pas un seul appel. S’était-il seulement rendu compte de son départ ? Peut-être pas. Elle sentait la haine croître en elle et essaya de se concentrer sur le paysage vert et dépaysant.

    Avant d’arriver à Lausanne elle tira l’épaisse enveloppe brune de son sac, celle qui lui avait été remise par le notaire et en sortit le plan d’accès à la villa. Lausanne est une ville un peu surprenante par ses nombreuses collines et Gabrielle s’y sentit comme dans un jeu de montagnes russes avant de trouver l’interminable rue qui devait la rapprocher du but. Elle compta quatre embranchements avant de tourner à droite comme le plan l’indiquait. Le quartier résidentiel comportait de superbes demeures aux jardins parfaitement entretenus. Elle serpenta jusqu’au trente-quatre A, chemin de l’Esplanade, avant de se garer. Un coup d’œil à la boite aux lettres lui indiqua qu’elle était arrivée à destination.

    Une grande villa blanche à l’architecture épurée s’imposa devant elle. De grands arbres illuminés par des spots projetaient leur ombre sur la façade en formant des motifs fantomatiques. Nerveuse et curieusement intimidée, elle se dirigea lentement vers la porte d’entrée, l’ouvrit d’une main hésitante avec le sentiment de s’introduire chez un inconnu par effraction. Instinctivement, elle jeta un regard circulaire avec la sensation d’être observée puis resta plantée sur le seuil quelques secondes avec ses affaires à la main, avant d’oser entrer.

    Quand la porte se referma derrière elle dans un bruit sourd, son cœur se figea. Elle prit une profonde inspiration et déglutit. Pourquoi se sentait-elle à ce point stupide ? Il lui semblait qu’un monstre allait surgir d’un coin sombre ! Elle tendit le bras vers le mur à sa droite et tâtonna afin de trouver un interrupteur. Un immense lustre illumina le hall d’entrée et ses pampilles reflétèrent des éclats de diamants sur tous les murs. Tout était si luxueux !

    En avançant elle remarqua son reflet dans un grand miroir baroque, ce n’était pas joyeux ! Elle n’aurait pu mentir à personne sur l’état de son moral, elle avait une bien triste mine !

    Le salon avait une décoration froide et moderne dominée par deux grands canapés en cuir noir montés sur arceaux en aluminium. Au centre et face à une cheminée design, il y avait une table basse en plexiglas sur laquelle étaient posés quelques magazines d’architecture et d’automobiles. Des télécommandes donnaient la première touche vivante à ce lieu. Un immense écran plat leur faisait face. Dans un angle, une lampe aux formes arrondies en papier huilé avait la dimension d’une statue.

    Elle s’autorisa enfin à poser son sac à main, comme si elle avait attendu jusque-là que l’hôte de ces lieux lui en donne l’autorisation puis elle continua sa visite en s’attardant parfois pour regarder un tableau ou un meuble particulier. La touche était masculine et de bon goût. Elle ouvrit les volets en espérant voir où la maison se situait malgré la nuit qui tombait. Le jardin était bordé d’une très haute végétation que l’éclairage nocturne rendait étrange. Au fond, la vue sur la ville et le lac Léman formait un tableau naturel.

    Après avoir fait le tour du rez-de-chaussée, elle entreprit de visiter l’étage et monta avec un peu plus d’appréhension. Elle se doutait bien qu’elle franchissait la frontière entre les pièces communes et les pièces intimes et redoutait un peu de découvrir ces lieux.

    L’étage comportait trois chambres luxueuses avec salles de bains particulières. Une des chambres possédait son propre bureau en mezzanine qui avait été aménagé sous les toits. Elle y découvrit des murs entiers de livres. Cette pièce comportait également tout ce dont elle avait besoin pour travailler : un

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