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Dark Bone Tome 3: Le retour
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Dark Bone Tome 3: Le retour
Livre électronique369 pages5 heures

Dark Bone Tome 3: Le retour

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À propos de ce livre électronique

Surpris de son rêve, Antonin cherche à comprendre ce qui lui est arrivé, mais finit par accepter l’inexplicable.

Après avoir repris une vie presque normale, il fait la découverte d’une nouvelle arme magique qui l’entraîne dans de nouvelles mésaventures. Au cours de celles-ci, il retrouve sa dulcinée qui le reçoit avec tout l’amour qu’elle lui a toujours porté. Mais dans ses bras, une surprise particulière l’attend.

S’ensuivent d’autres difficultés qui s’entremêlent avec les nouvelles péripéties d’Antonin et compliquent doublement sa vie.

Si sa crédulité nous fait encore sourire, son innocence juvénile lui fera à nouveau prendre de mauvaises décisions.

Antonin, dit Dark Bone, participera à des engagements étourdissants. Il fera des rencontres traumatisantes et vivra des événements… désastreux. S’en remettra-t-il ?
LangueFrançais
Date de sortie20 août 2021
ISBN9782897755126
Dark Bone Tome 3: Le retour

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    Aperçu du livre

    Dark Bone Tome 3 - Daniel Leduc

    1

    Auparavant… (Tome 2)

    Yorgy n’essaie pas de comprendre ce fils qu’il croit mentalement irrécupérable. Aussi brisé qu’étourdi, Antonin regarde son père retourner à la maison. Il profite de ce moment pour écarter son pantalon afin de voir si le tatouage en forme de cœur est toujours sur son bas-ventre. Mais non, rien. Devient-il fou ? Cela lui avait paru tellement réel. A-t-il rêvé tout ça ? « Taboire, Élie, pourquoi ? Pourquoi qu’c’est pas vrai ? J’t’aime Élie… JE… T’AIME ! » hurle-t-il de désespoir.

    Yorgy l’entend et se retourne un instant. Il voit son fils en pleurs, agenouillé près du trou. Il secoue la tête et reprend son chemin. Les yeux clos, Antonin sanglote quelques instants. « Tout ça, c’était qu’un foutu rêve ? Non, non, c’pas vrai, j’veux pas y croire. J’peux pas y croire. » Il prend la boîte et l’examine un instant. « Pas d’brassards, ça veut dire que j’pique pas la caisse de l’épicerie et que j’vais pas Chez Margo. Donc, j’mange pas avec ma belle Élie… Thompson, lui, y va être content : son beau terrain pis sa bagnole vont pas être démolis. Ah taboire ! Mike et sa gang. J’les ai pas démolis, eux. J’vais les avoir su’l’dos lundi. Mais le pire du pire… j’ai pas d’Élie. J’l’aimais tellement dans c’foutu rêve ! Pourquoi qu’c’était pas vrai ? Au moins, elle est pas morte elle non plus. »

    De désespoir, Antonin balance la boîte dans le trou d’où elle provient. Il se souvient tout de même d’avoir creusé pour la sortir de là. « Trop nul ! C’était tellement réel, tout ça, taboire ! On dirait que j’ressens encore la force des kulombdnels. La guerre des Célestrisiens et des Voldariens, j’m’en tape. Mais Élie ? J’l’aime tellement. Elle est belle, elle est parfaite. Et elle… elle était juste un foutu rêve ? Trop poche ! J’aurais dû m’douter qu’une fille comme ça pouvait pas aimer un gars comme moi. Zéro cool, taboire ! »

    Antonin cesse de pleurer, mais même au loin, on pourrait entendre son immense soupir de détresse. « Au moins, mon vieux, j’veux dire mon père, y est pas mort. Mais y a pas changé. Dans mon rêve, y était devenu un peu moins con… Y m’aimait, même. J’aurais dû m’douter qu’ça s’pouvait pas. J’m’en fous de c’qui dit. Mais… minute, là ! Éliane existe, elle est pas morte dans vraie vie, taboire, elle est dans ma classe ! J’vais la revoir à l’école. Et j’vais finir par sortir avec elle un jour. Ça s’passera pas comme dans mon rêve, mais j’vais y arriver pareil. Pis juste pour elle… Ah, pis pour moi-même aussi, taboire ! J’vais plus jamais m’faire écœurer par ces tarés d’Bestway. Ni par personne d’autre. J’suis pas un moins que rien après tout ! Si j’continue à m’laisser tabasser, j’m’en sortirai jamais. »

    Il se relève et secoue ses vêtements. Il empoigne le détecteur de métaux et son précieux sac à dos en parfaite condition qu’il installe à son épaule. Il agrippe son seul butin de la journée, un sac de vieilles cannettes de bière. Il rentre à la maison.

    Taboire ! J’peux pas croire qu’c’était juste un foutu rêve tout ça. Trop poche !

    ***

    Antonin se rend au garage pour y déposer son sac de cannettes vides. Il inspecte les lieux dans le but de trouver un indice de la présence des hommes qu’il y avait attachés. Malheureusement, la corde utilisée est à sa place, et le désordre de son père n’a pas changé. À la maison, il jette un œil au manteau de foyer avec l’espoir d’y voir la fusée rouge que, dans son rêve, il a rapporté du brocanteur pour son père. Bien sûr, elle y est. Un soupçon d’espoir monte en lui et… Ah, non ! Ça… ça j’lai acheté à p’pa la première fois que j’suis allé chez Joe Brocante. Eh taboire !

    Il laisse entendre un long soupir et retire sa veste de cuir. Du coup, il remarque un bracelet à son poignet droit. Il est large et semble fait de cuir noir avec un imprimé de tête de mort. De faux diamants prennent la place des yeux. C’est quoi, c’te foutu bracelet ? J’me rappelle pas d’ça. Évidemment, il n’est pas con au point de ne pas sentir ce qu’il porte. Sauf que, avec sa veste, il ne se rendait pas compte de sa présence. Y est cool par exemple ! Sans plus de question, la mine basse, il se rend à la cuisine et prend finalement place à la table pour le repas. Isabelle, malgré les grognements du père, lui réchauffe son assiette et le sert.

    — Ça va, mon chéri ? T’es plus rouge qu’un homard. On croirait que t’es sur l’point de t’effondrer.

    — Laisse-le, Isa. Monsieur a dormi tout l’après-midi au gros soleil, et y a fait un rêve tellement réel… que monsieur pourra pas s’en remettre.

    — Ben là, p’pa !

    — Mon pauvre chéri. Raconte à maman. C’est quoi, c’te rêve qui t’dérange comme ça ?

    — J’en ai pas envie, m’man. Pis comme d’hab, p’pa va encore s’moquer. J’ai pas l’goût d’subir ça.

    — Ben non, chéri. Papa s’moquera pas. Hein, Yorgy ?

    Ce dernier joue du regard comme s’il voulait demander : c’est quoi, l’rapport ? Elle lui répond de la même manière. Sa grimace semble dire : ben là, tu t’acharnes tout l’temps dessus !

    — Allez, mon cœur, raconte-nous c’qui t’est arrivé dans c’terrible rêve. T’as l’air tellement traumatisé, mon pauvre chéri.

    Antonin garde le silence. Il craint trop les moqueries de son père. Justement…

    — Monsieur pense qu’on est des extraterrestres, Isa. T’imagines ça ?

    Isabelle le fusille du regard. Ce qui n’empêche pas Yorgy de poursuivre.

    — Y croyait même qu’j’étais mort. Probablement un de ses souhaits cachés, p’tit con.

    — Yorgy, franchement ! Ton fils t’a cru mort ? Pas pour rien qu’il est aussi traumatisé.

    — Une autre raison de s’faire plaindre, oui ! Et ça, y peut compter sur toi pour s’faire dorloter.

    — Arrête, Yorgy ! Y a rien d’drôle là-dedans. Et c’est quoi, c’t’affaire d’extraterrestres ?

    Yorgy ignore la question. Il ne veut pas aborder le sujet maintenant. Intriguée et tenace, Isabelle se prépare à réinterroger son mari, mais Antonin coupe son élan en montrant son bras droit.

    — Euh ! vous… vous savez d’où m’vient c’bracelet ? Il est cool, mais j’me souviens pas d’ça.

    — Quoi ? Tu nous as fait chier PENDANT des mois pour avoir c’t’e bracelet d’merde et tu t’souviens pas !

    — Yorgy, arrête. Le p’tit est bouleversé.

    — Au point d’perdre la tête, Isa ? C’est vrai qu’il en a jamais vraiment eu…

    Isabelle se lève d’un coup sec et fait glisser sa chaise qui se renverse dans un vacarme saisissant.

    — YORGY STRAUSKY ! C’T’ASSEZ, T’EXAGÈRES CETTE FOIS. C’EST TON FILS AUTANT QU’LE MIEN. ALORS, ARRÊTE D’LE DIMINUER COMME ÇA.

    Antonin et son père sont sidérés de voir Isabelle s’emporter de la sorte. Elle, toujours si douce ! Ce n’est pourtant pas la première fois que Yorgy humilie son fils, mais jamais elle ne s’est opposée de la sorte.

    — ET J’TE LAISSERAI PAS L’RIDICULISER COMME ÇA TOUT L’TEMPS. J’EN AI ASSEZ. IL EST TRÈS INTELLIGENT. IL A DE BONNES NOTES À L’ÉCOLE ET IL EST VOUÉ À UN BEL AVENIR. ARRÊTE D’LE DÉMOLIR TOUT L’TEMPS PARCE QU’IL N’A PAS TA FORCE ET TON COURAGE STRAUSKIE… DE STRAUSKY.

    — Désolé, Isa. J’voulais pas…

    — FERME-LA, YORGY STRAUSKY. J’AI POPOTÉ TOUT L’APRÈS-MIDI. J’VOUS AI FAIT DES P’TITS PLATS À VOTRE GOÛT. DÉJÀ QU’C’EST TOUT FROID ET QU’Y FAUT LE MICRO-ONDER, J’AIMERAIS QU’POUR UNE FOIS DANS NOTRE VIE, QU’ON MANGE EN PAIX. EST-CE POSSIBLE, MESSIEURS STRAUSKY ?

    Stupéfaits, le père et le fils la fixent un instant. Mal à l’aise, ils baissent les yeux sur leur assiette. Le garçon réfléchit à ce qui vient de se passer, et un sourire se dessine sur son visage. Pour une fois, la situation tourne en sa faveur ! Les larmes aux yeux, Isabelle récupère sa chaise et la replace avec force, puis se rassoit. Dans la petite cuisine rustique équipée d’électroménagers qui détonnent parce qu’ils sont trop modernes, pour la première fois depuis des années, on n’entend que le bruit irritant des ustensiles qui frottent le fond des assiettes.

    Après son repas, qu’il a avalé en trois bouchées, Antonin s’excuse et, sans attendre, monte dans son boudoir. Il s’installe à la fenêtre, le regard rivé sur les terres à l’arrière de la maison. Pourquoi ? Ça avait l’air si réel. Tellement ! J’ressens encore l’amour d’Éliane. Vraiment trop intense, c’te rêve. Ça m’travaille les tripes dans tous les sens. Taboire ! C’trop nul ! J’vis un genre de peine d’amour pour un amour qu’y était même pas vrai. Zéro cool !

    À la cuisine, Yorgy s’excuse d’abord à sa femme. Pour une fois, il admet qu’il ne se comporte pas toujours en bon père. Pas tout à fait calmée, Isabelle l’interroge.

    — En quel honneur tu lui as dit ça ? Et sans m’en parler, en plus !

    — Non, non. J’ai rien dit. Antonin sait pas que j’suis un extraterrestre. J’comprends pas où il a pu apprendre ça. Personne peut lui en parler avant qu’il ait vingt-cinq ans terrestres.

    — Comment il l’a appris alors ?

    — J’en sais rien, Isa. J’en sais rien et ça m’intrigue.

    — Alors, va lui parler. Essaie d’savoir d’où y tient ça, au lieu d’rire de lui.

    — Tu crois vraiment qu’y voudra m’parler ?

    — T’as qu’à être un vrai père, pour une fois, Yorgy Strausky. Parle-lui paisiblement sans l’humilier ou l’insulter parce qu’il ne pense pas comme toi. T’as qu’à l’écouter. Sais-tu comment on fait ?

    Yorgy lui jette un regard niais. Il a compris le sarcasme.

    — De toute façon, remonté comme il est, j’pense pas qu’y voudra m’dire quoi qu’ce soit.

    — Tu m’dis toujours ça, Yorgy. On dirait qu’tu veux pas assumer ton rôle de père. Qu’tu le veuilles ou pas, TU ES SON PÈRE. Agis comme tel et parle avec lui. Une vraie discussion père-fils, c’que t’as jamais osé faire.

    Isabelle se rebiffe vraiment. Étonné de ce brusque changement, Yorgy accepte.

    — J’peux terminer mon repas avant ?

    — Évidemment, gros malin.

    Dans son boudoir, la sonnerie de son ordinateur portable dérange Antonin. C’est son copain William. Il tente de le joindre sur Skype. D’abord, il ne répond pas. Après quelques minutes, devant l’insistance de son ami…

    — Salut, Will !

    — Woh, Tonin ! Qu’est-ce qui t’arrive ? T’es rouge comme un homard. Pis t’as l’air démoli puissance deux milliards.

    — Je… j’ai passé une foutue journée d’con, Will. Trop nul. Zéro cool, super grave.

    — Woh ! À c’point ?

    — Tu m’excuses, mais j’ai même pas envie d’en parler. J’ai la tête en bouillie. J’te raconte ça plus tard.

    — OK ! Puissance très court comme échange.

    — J’sais, Will. J’te l’dis, j’suis même pas certain de c’qui m’est arrivé. Désolé, j’t’en reparle un autre jour.

    Sans attendre, Antonin met fin à la communication. Plusieurs minutes passent. Il reste assis à son bureau, l’air plus songeur que jamais. Un coup discret à la porte du boudoir le tire de ses pensées. Ça doit être ma mère qui veut encore me consoler. Sa surprise et son étonnement sont grands lorsqu’il voit entrer son père. Il affiche un calme qu’Antonin ne lui a jamais vu. Il montre le futon, et son fils lui fait signe qu’il peut s’y asseoir. Taboire, j’aurais peut-être pas dû… y va s’moquer d’mon rêve ou quoi qu’je dise, encore !

    — Hey, mon gars ! J’m’excuse d’avoir ridiculisé ton rêve, tantôt.

    Antonin ne sait comment réagir devant cet homme étrangement trop doux. Il ne lui connaît pas cette tendresse. Lui qui l’insulte vertement depuis des années.

    — T’es sûr que c’pas toi qui prends d’la drogue, p’pa ?

    — Non, non, voyons ! Où tu vas chercher ça ?

    — OK ! C’est m’man qui t’envoie ?

    — J’avoue. Mais elle a pas eu à discuter très fort pour m’convaincre. J’sais qu’ça va t’paraître bizarre, Tonin, mais j’réalise qu’après toutes ces années, j’t’ai mal jugé, mon gars. Et… aussi surprenant que ça puisse paraître, j’aimerais savoir c’qui s’est passé dans ton rêve pour te faire croire qu’on est des extraterrestres, et surtout qu’j’étais mort.

    — Pourquoi tu m’fais ça, p’pa ?

    — J’te fais quoi ?

    — Tu t’moques de moi ? Jamais tu t’intéresses à ma vie. Pourquoi tu m’fais ça, là ?

    — T’as raison. J’suis pas… comment tu dis ? Cool ! Mais là, j’veux vraiment savoir, Tonin. J’suis curieux, et très sérieux.

    — Pourquoi ? C’est juste un rêve.

    — J’sais. Mais tu m’as cru mort, Tonin. Et malgré toutes les fois où j’t’ai traité d’tous les noms, quand tu t’es réveillé tantôt, tu m’as sauté dans les bras. T’étais content d’me voir vivant. T’auras p’t-être d’la misère à m’croire, mais ça m’touche vraiment.

    — Ça paraissait pas trop, là-bas, dans l’champ.

    — J’sais. J’ai un peu d’mal à montrer mes émotions.

    — T’as pas trop d’misère, quand c’est pour m’tomber d’sus.

    — Non, ça, on dirait qu’ça sort tout seul. C’est con, j’sais. Et j’m’excuse, mon grand.

    Muet d’incompréhension, Antonin fixe son père. Isabelle arrive et observe ses deux hommes. Pour une fois, ils ne se disputent pas. De plus en plus intrigué, Antonin regarde ses parents tour à tour.

    — Vous m’niaisez, vous deux. C’t’un coup monté, ça.

    — Non, non, chéri. Écoute ton père. C’est tellement rare qu’y s’occupe de c’qu’y t’arrive. J’sais qu’ça t’paraît bizarre, mais y est vraiment sincère. Vas-y, raconte-nous c’est quoi c’te rêve qui t’bouleverse autant.

    Hébété, Antonin réfléchit. Curieusement, Yorgy ne le bouscule pas. Bof ! D’toute façon, j’ai rien à perdre, j’suis habitué qu’y m’niaise. J’vais voir si ma mère est aussi conne que lui. J’espère que non. Sinon, j’m’en sortirai jamais. Puis, il dévisage à nouveau ses parents.

    — Vous m’promettez d’pas vous moquer ?

    — Promis, mon gars !

    Isabelle confirme d’un hochement de tête.

    — Pis tu dis qu’le soleil m’a trop tapé sur la tête, p’pa ? J’dirais qu’c’est vous autres qui êtes bizarres, là. Vous avez fumé du gazon magique ?

    Isabelle ferme les yeux et fait non de la tête. Le silence de ses parents confirme leur sérieux. Le jeune homme, même s’il n’est pas certain d’y croire, leur fait confiance. Une confiance maintes fois trahie par son père, dans un passé pas si loin. Il se lance et raconte tout, depuis le début : les recherches dans le champ, l’écrimose, la fameuse boîte qui contenait les kulombdnels, les vols sur le grand boulevard qui font sourciller Isabelle, la destruction à la maison du directeur, la bagarre à l’école qui a mené à son expulsion de l’école et de sa maison. Il continue. Sa roulotte, Éliane, sa grossesse, la venue de Voldatron et la rencontre avec Voldatrump.

    Dès qu’Antonin parle des Voldariens, Yorgy dévore ses mots comme si son fils était un Dieu qui lui adresse personnellement la parole. Mais le jeune poursuit avec les fissures dans le bouclier et la guerre avec les Célestrisiens. Il raconte tout, jusqu’à la grande bataille sur Terre où sa douce et son père ont péri. Il n’oublie aucun détail, même les plus croustillants. Ses parents sont sidérés. Ils se regardent l’un et l’autre puis fixent leur fils.

    — D’où t’viennent tous ces noms, Tonin ? Et ces machins, les kulomchose, t’as entendu ça où ?

    — Ben… ça vient d’mon rêve, p’pa. J’avais jamais entendu ça avant.

    — C’est vraiment incroyable ton histoire, mon gars. Tu pourrais écrire un livre avec ça.

    — Yorgy, franchement. Un peu d’sérieux, lance Isabelle qui lui jette sa pantoufle.

    — J’savais qu’tu m’croirais pas, p’pa.

    — Non, non, au contraire, mon gars. J’te crois. Même si tout ça paraît invraisemblable…

    Antonin fronce les sourcils et fixe son père, étonné. Il n’ajoute rien, surpris que Yorgy ne cherche pas à démolir son histoire.

    — J’te crois, mon Tonin. C’est juste que c’est… c’est vrai qu’ça peut être traumatisant d’voir ton père mourir sous tes yeux, et ta copine aussi, même si elle existe pas vraiment.

    — En fait, elle existe, p’pa. Mais… j’suis pas certain qu’elle ait un faible pour moi. Dans vraie vie, j’veux dire.

    Isabelle s’approche et prend place auprès de son mari.

    — T’en fais pas, mon chéri. Ça va passer. On est là pour t’aider.

    — Ta mère a raison, mon gars. Tu peux compter sur nous.

    Abasourdi, Antonin les regarde tour à tour. Il ne comprend pas ce changement radical. Surtout venant de son père.

    — J’comprends qu’tu sois aussi bouleversé, mon bébé.

    — Franchement, Isa. Arrête de l’traiter comme un enfant. C’t’un ado après tout.

    — Oh ! oui. J’suis navrée qu’ce soit qu’un rêve, mon chéri. Ta copine avait l’air formidable.

    — Elle l’était, m’man. Mais elle existe dans l’vrai monde. Elle est dans ma classe. J’vais la revoir et, un jour, j’vais sortir avec elle.

    — C’est bien ça, mon homme. Garde espoir.

    Antonin est de plus en plus hébété : son père qui l’encourage ! Il le fixe intensément.

    — Quoi ? J’ai dit quelque chose de travers ?

    — Non, p’pa. C’est justement ça qui m’surprend. Tu y as parlé, m’man ?

    — J’lui ai passé un sacré savon, mon grand, j’te l’dis.

    Antonin réprime un sourire. Il comprend mieux pourquoi son père ne lui tombe pas dessus comme il le fait depuis des années.

    Après quelques paroles de réconfort toutes faites, Isabelle et Yorgy le laissent seul avec sa peine. Antonin retourne à la fenêtre et fixe la terre, là où se trouvait sa roulotte. Il se remémore les bons moments qu’il y a passés avec Éliane.

    Au salon, Yorgy est abasourdi par les détails dont son fils lui a fait part.

    — J’vais aller voir le Grand Conseil demain, Isa. C’est trop bizarre tout c’qu’il a raconté. Y a trop d’choses qui coïncident pour que ce soit qu’un foutu rêve.

    — Tu… tu crois qu’c’est arrivé pour vrai.

    — J’en sais rien, Isa. Où qu’il aurait pu trouver tous les noms qu’il a nommés, les places qu’il a décrites… Il a parfaitement décrit Voldatrump. J’l’ai juste vu en photo, moi. Mais Tonin connaissait sa personnalité et il l’a parfaitement présentée. J’vais en avoir le cœur net demain. Y a certainement une explication à tout ça. J’ai toujours dit qu’le p’tit racontait qu’des conneries. Mais là, y a trop d’affaires qui matchent avec une réalité qu’y connaît même pas.

    Dans son lit, Antonin tente de trouver le sommeil. Son seul réconfort est que demain, dimanche, est le jour où, dans son rêve, il a rencontré Éliane au casse-croûte Chez Margo. Il se promet de s’y rendre afin de la revoir. Pour vrai. On sait pas ! Si elle avait déjà un œil sur moi, p’t-être que ça pourrait marcher pareil !

    2

    Le lendemain, toujours en suivant l’ordre chronologique de son rêve, il avait dévalisé l’épicerie en avant-midi. Puis, en guise de gratification, il s’était payé un succulent gueuleton Chez Margo : une récompense méritée, après un mauvais coup bien exécuté, qu’il se disait alors. Antonin se rend donc en ville avec l’espoir de faire du charme à Éliane. Il s’arrête devant la boutique de Joe Brocante. La vitrine est différente de ce à quoi il s’attendait, même si ses premiers rendez-vous ici datent de bien avant la découverte de la boîte qui contenait les brassards. Taboire que j’suis mêlé, là !

    La vitrine laisse voir une large tapisserie de laine devant laquelle est suspendue la reproduction d’une toile représentant Marie-Antoinette. Elle est accrochée au-dessus d’un énorme secrétaire en acajou, sur lequel repose un vieux ventilateur en métal gris ainsi qu’une lampe sur pied du même style.

    Sur l’espace de travail se trouve une dactylo d’époque. Sur la chaise assortie, tournée vers l’extérieur, prennent place de vieilles poupées de porcelaine vêtues de robes de soirée généreusement garnies de dentelle. Au sol, de nombreuses porcelaines et jouets d’antan en tout genre complètent le décor. Taboire ! Me semble qu’c’était pas comme ça ! Y est où l’bateau d’Fiodor ?

    Antonin est désorienté, mais il poursuit sa route en direction du resto afin d’être à l’heure pour son importante rencontre. Sur place, quelle n’est pas sa surprise ! Il n’y a aucun casse-croûte. Il voit plutôt un magnifique parc garni d’arbres gigantesques et d’arrangement floraux, tous partiellement dégarnis puisque la saison d’automne a débuté. L’endroit est serpenté d’une allée de pierres sur laquelle se trouvent des bancs de bois vieillis par le temps. Qu’est-ce que… ? Y est où l’resto ?

    Assis sur son vélo, Antonin essaie de comprendre. De toute évidence, ce parc est ancien, les arbres sont très gros et les arbustes prennent beaucoup d’espace. Ils donnent l’impression d’être là depuis fort longtemps. Taboire ! C’resto existait juste dans mon rêve ? Anéanti, il n’abandonne pourtant pas.

    Il se souvient bien de la maison d’Éliane et de son adresse. Il s’y rend directement. Une fois de plus, une mauvaise surprise l’attend. Visiblement, la famille qui habite cette demeure n’est pas celle d’Éliane. Il s’agit de personnes de couleur avec de très jeunes enfants. Qu’est-ce qui s’passe ? Elle est où, Éliane ? Plus loin sur la même rue, il voit Josiane, l’amie d’Éliane. Elle est toujours aussi belle. Elle ramasse les feuilles qui ont commencé à tomber. Elle voudra jamais m’parler. J’tente ma chance pareil. J’dois savoir où est Élie. Craintif, il s’approche, sans avoir idée des surprises qui l’attendent.

    — Bonjour, Antonin ! Quel bon vent t’amène dans ce secteur de la ville ?

    — Se… Salut, Josiane ! J’hallucine ou quoi ? Elle me parle normalement, elle est presque gentille. Je cherche Éliane, elle habite plus ici ?

    — Qui ça, Éliane ?

    — Ta best, Éliane Bressler, celle avec qui tu t’tiens toujours à l’école.

    — J’vois pas de qui tu parles, Antonin. La seule Éliane que je connais à notre école, c’est Éliane Mirandelle. Et elle est trop jeune pour être mon amie. Elle est en première secondaire.

    — Ben, là ! Vous êtes pratiquement toujours ensemble à l’école.

    — Ah non ! Celle avec qui je suis, c’est Miryame, Miryame Gasthéaure. Je ne connais pas ton Éliane. Tu es certain qu’elle vient à notre école ?

    — Ben, là, oui ! Tu l’as grondée encore vendredi parce qu’elle voulait m’aider quand Mike et ses chums m’agressaient.

    — Je n’ai grondé personne vendredi. Franchement, ce n’est pas mon genre. Et qui est-ce, ce Mike ? Je sais vraiment pas de qui tu parles, Antonin. Si je te savais pas dans la même classe que moi, je croirais que nous n’allons pas à la même école. Même s’il n’y a qu’une seule école secondaire à Champdagne.

    — Ben voyons, Josiane. Mike Burgun et ses chums, Gordon et Jeff. Y passent leur temps à m’agresser.

    — Là, mon cher, ce n’est pas gentil de te moquer d’un handicapé. Tout le monde ici connaît Mike Burgun et sa malheureuse histoire. Il est devenu handicapé mental à la suite d’un accident d’auto avec ses parents. Il aurait reçu un coup sévère à la tête, il paraît. Tu ne devrais pas te moquer de lui. Il est un peu bêta, mais jamais il n’agresserait qui que ce soit.

    — On parle pas du même Mike, j’pense.

    — Je suis navrée, mais il n’y a qu’un seul Mike Burgun à Champdagne, que je sache. Et il ne vient pas à notre école. Pauvre garçon.

    — Je… j’suis complètement mêlé, là, moi.

    — Je vois ça. Je sais pas ce que tu prends ou fumes, Antonin Strausky, mais tu devrais arrêter. Ça me paraît très nocif.

    — Hein ? Non, non, j’prends rien. Taboire ! mon père pense pareil.

    — Alors si c’est naturel, il faut te faire soigner, Antonin. Tu t’inventes des histoires et tu te crois. Ça peut aller tant que tu mêles personne d’autre à tes élucubrations sordides. Bon, désolée. J’ai des tâches à faire si je veux pas me faire gronder. Passe ta route, Antonin. On se voit à l’école, demain.

    — Euh… oui, à l’école, demain. Pardonne-moi de t’avoir dérangée, salut ! Élucubration ! on croirait entendre Élie.

    Antonin reprend son vélo et roule vers le centre-ville. Merde ! Est-ce que tout ça faisait partie de mon rêve ? J’croyais que c’rêve avait commencé avec la fameuse boîte. Les harcèlements de Mike et ses deux trous-duc, c’était avant, me semble. J’suis perdu, là. Et Éliane qui m’a jeté c’regard de pitié, j’l’ai pas rêvé, ça. C’était avant la boîte. Oui ? Non ?

    À l’approche de l’épicerie, Antonin se remémore sa bagarre avec Bill, et le meurtre de celui-ci. Ça, ça faisait partie d’mon rêve, j’en suis certain. Donc, il est pas mort, Bill. Ça, c’est bien. Il arrête pour s’acheter de la gomme à mâcher. À l’intérieur, derrière le comptoir, un homme d’âge mûr le reçoit.

    — Bonjour, Antonin. Comment puis-je t’aider aujourd’hui ?

    — Euh, bonjour, Monsieur. Vous… vous connaissez mon nom ?

    — Évidemment ! Tu m’as apporté des pleins sacs de cannettes vides tout l’été.

    — Oh ! C’est à vous que… Taboire ! J’comprends plus rien de rien. Euh, y est où Bill ?

    — Bill ? Comment se fait-il que tu connaisses mon Bill, jeune homme ? Tu n’habites dans la région que depuis l’été dernier. Pourtant, mon fils est déménagé en Angleterre depuis plus de trois ans maintenant.

    Estomaqué, Antonin fixe le vieil homme. Taboire ! J’suis vraiment perdu là. Au moins, il est pas mort. Mais c’est pourtant lui qui m’remboursait toutes mes canettes, pas c’vieux… j’veux dire, c’monsieur. Ah, taboire ! j’ai oublié mon sac d’hier dans l’garage. Pas grave. Ça m’fout un sacré mal de tête, c’t’histoire. Rien ne concorde avec mes souvenirs d’avant c’te foutue boîte. Comment ça s’fait ?

    — Antonin ! Tu es toujours avec moi, garçon ? Qui t’a parlé de Bill ?

    — Euh, oui ! C’est… c’est mon père qui m’a parlé d’lui. J’croyais qu’y était encore ici.

    — Ton père ? Yorgy ? Pourquoi ?

    Un autre client entre et coupe court au questionnement.

    — Bonjour, Monsieur Carlsaure, comment puis-je vous aider aujourd’hui ?

    Antonin s’éloigne et examine l’étagère près de l’entrée. Bill m’a tiré dessus deux fois. Mais j’avais juste un trou dans mon pull. Il jette un œil afin de voir s’il ne trouverait pas de trace de balle. Mais rien. Par contre, monsieur Brenan le remarque.

    — Oh ! Donnez-moi un instant, Monsieur Carlsaure, j’vous reviens dans une seconde. Alors, mon garçon, tu as besoin de quelque chose ?

    — Oui ! juste d’la gomme et… et une slush à la cerise, s’il vous plaît.

    Stupéfait, Antonin quitte l’épicerie et prend place sur le banc. Sa tête bourdonne. Il se rappelle la petite discussion qu’il avait eue avec Éliane à cet endroit. Elle dégustait une slush. Taboire ! Y a-tu d’quoi à comprendre ? Songeur, il reste là quelques instants.

    Pendant ce temps, Yorgy se rend voir le Grand Conseil. Il désire leur faire part des détails trop précis que lui a décrits Antonin, au sujet d’un peuple dont il ne devrait même pas connaître l’existence, ainsi que des objets que Yorgy n’a jamais vus lui-même.

    — Des choses que je n’ai vues que sur des photos, M’sieur l’Maire. Photos que je n’ai pas retrouvées dans les effets de Dimitraï quand j’ai vidé la maison après en avoir hérité.

    — Il nous les a remises. Il craignait qu’elles ne soient trouvées par quelqu’un qui ne doit pas savoir.

    — Ben là ! J’aurais pu m’charger d’les sécuriser.

    — Dimitraï avait peur que tu ne veuilles revenir à Champdagne et donc, que la maison se retrouve entre les mains d’étrangers. Mais revenons à ton fils, Yorgy. Comment peut-il connaître l’existence des kulombdnels ? Et de la cornhupoussante ?

    — J’en sais rien, M’sieur l’Maire. Il dit l’avoir rêvé.

    — Quel genre de rêve a-t-il pu faire ? s’étonne le médecin.

    — Et notre ville ? intervient le chef de police. C’est toi qui lui as dit qu’elle est holographique ?

    — Non, jamais. J’respecte l’entente. J’prévois rien lui dire avant sa majorité.

    — Alors… comment a-t-il pu savoir ?

    — C’est exactement pourquoi j’suis venu vous en parler, chef Carlson. Ça m’paraît vraiment bizarre. Et la description que mon gars a faite de Voldatrump… ben elle est vraiment trop précise pour qu’il l’ait imaginée.

    — Que veux-tu que je fasse, Yorgy ? Contacter le maître et lui demander s’il comprend pourquoi un jeune Strauskien a rêvé à son existence ?

    — J’comprends votre point, M’sieur l’Maire. Mais avouez qu’ça fait beaucoup d’coïncidences. Et dans un simple rêve, en plus.

    — Effectivement, tout ça paraît très anormal. Je devrais peut-être

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