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Dark Bone Tome 1: Un nouveau h(z)éros: La découverte
Dark Bone Tome 1: Un nouveau h(z)éros: La découverte
Dark Bone Tome 1: Un nouveau h(z)éros: La découverte
Livre électronique328 pages4 heures

Dark Bone Tome 1: Un nouveau h(z)éros: La découverte

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À propos de ce livre électronique

Un adolescent continuellement harcelé découvre un objet extraterrestre qui lui donne des capacités surnaturelles. Contrairement à une majorité de personnes qui profiterait de ces pouvoirs pour tenter de sauver le monde, Antonin, rempli d’amertume et de ressentiments, décide de les utiliser pour d’autres raisons : se venger de ses agresseurs et s’enrichir. Jusqu’au jour où il crée un bouleversement épouvantable qui met la terre entière en danger d’extermination. Un risque de massacre que lui seul peut contrecarrer.

Un roman fantastique autour d’une réalité très… actuelle.
LangueFrançais
Date de sortie13 août 2020
ISBN9782897753566
Dark Bone Tome 1: Un nouveau h(z)éros: La découverte

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    Aperçu du livre

    Dark Bone Tome 1 - Daniel Leduc

    Christiane.

    1

    Après une dure journée d’école, blasé, Antonin rentre chez lui. À peine a-t-il posé son sac à dos que son père l’interpelle.

    — C’est toi, Tonin ? Viens m’rejoindre au salon, j’ai une bonne nouvelle à t’annoncer.

    Dans le salon, Yorgy est installé dans son fauteuil favori. Antonin, qui affiche un style vestimentaire du genre emo, prend place sur le divan.

    — J’ai quelque chose qui va te t’faire triper, Tonin. Nous déménageons à Champdagne en juin prochain, dans la maison d’mon père.

    — Quoi ? Trop nul ! J’veux pas déménager là-bas, sérieux ! C’est trop loin. J’suis bien ici, j’veux rester dans notre appart.

    Yorgy ne s’attendait pas à une réaction aussi vive de son fils. Il croyait que, comme lui, il serait enchanté d’aller vivre dans ce coin bucolique.

    — Désolé d’te décevoir, Tonin, mais on déménage. Ça fait déjà trop longtemps qu’on vit dans c’taudis. Ta mère et moi, on veut quitter c’quartier mal famé depuis toujours, voilà enfin l’occasion.

    — Tellement poche ! Auxertown est la ville où j’ai grandi. Ici, c’est ma rue. J’vais perdre tous mes amis.

    — Tu t’en f’ras d’nouveaux, Tonin. Une nouvelle vie…

    — Zéro intérêt ! J’suis bien dans la grande ville, moi. J’veux pas vivre en campagne.

    — De toute façon, mis à part l’école, tu fous rien d’tes journées. Dans c’logement ou ailleurs, quelle différence ça peut bien faire ? La ferme de ton grand-père est parfaite pour nous.

    — C’est sûr, elle te coûte rien ! T’en as hérité parce que grand-p’pa vient d’mourir. Si t’avais une vraie job, on aurait déjà une maison, ici, à Auxertown.

    — Un peu d’respect, garçon, j’suis ton père. Mon travail est peut-être pas l’plus valorisant, mais ça met d’la bouffe dans l’frigo, au moins.

    Un bref silence coupe momentanément le débat. Yorgy réfléchit.

    — T’auras une plus grande chambre, Tonin.

    — Zéro cool ! J’l’aime ma chambre. Et c’est pas vrai que j’fous rien.

    — De toute façon, ça rien à voir. On déménagera quand tu termineras l’école. Fin d’la discussion.

    Frustré, Antonin regarde son père, prêt à l’injurier. Mais il se ravise et retourne dans l’entrée où il récupère son sac à dos.

    Un sac noir, rehaussé d’imprimés de têtes de mort blanches, et agrémenté de breloques similaires. Elles pendent à chacune des languettes de fermetures éclair. Antonin jette un dernier regard désapprobateur à son père, puis se rend à sa chambre en bougonnant. Yorgy se lève, crispé de rage.

    — Fais attention à tes paroles, fiston. Tu prétends l’aimer, ta chambre, si tu continues, tu vas y rester un bon moment, j’te l’jure.

    — Ben sûr !

    Et il claque sa porte. Rouge de colère, Yorgy s’apprête à le rejoindre.

    — ANTONIN STRAUSKY !

    Attirée par les cris, Isabelle arrête son mari et place tendrement ses mains sur son torse musclé.

    — Non, Yorgy ! Il voudra rien comprendre tant il est furieux. Tout comme toi, d’ailleurs.

    — J’te préviens, Isabelle, c’est pas un ado d’quatorze ans qui va m’dire c’que j’dois faire.

    — Évidemment, chéri. Il est encore jeune, il saisit pas tout.

    Isabelle pose un baiser sur la joue de son conjoint grincheux. Yorgy la dévisage, exaspéré. Puis, il retourne s’asseoir au salon, les poings serrés.

    Allongé sur son lit jamais fait, Antonin texte William, son best friend depuis le primaire, afin de lui annoncer la mauvaise nouvelle.

    — Mes vieux veulent déménager.

    — Pourquoi ?

    — Y veulent habiter chez mon grand-père.

    — Quand ?

    — Juin. J’te rappelle plus tard.

    — Pas cool ! OK, A+.

    Ennuyée, Isabelle se dirige vers la chambre de son fils. La petite dame ronde frappe et entre. Elle connaît bien ce lieu bordélique. Elle a en elle-même peint les murs en rouge et en noir. Elle s’assoit près de lui.

    — J’suis désolée qu’ça t’contrarie, mon chéri. Nous avons enfin la chance d’avoir une maison bien à nous. Ça t’plaisait bien d’aller chez grand-père avant, non ?

    Il se lève à ses côtés, gesticulant à tout vent.

    — Sérieux, m’man ? Zéro pareil ! On y allait une seule journée, en visite. On rev’nait chez nous après. C’est à l’autre bout du monde, dans un trou perdu où on connaît personne. J’aurai plus mes amis, mon école, le dep. du coin.

    Isabelle le regarde, impuissante. Elle comprend son désarroi.

    — J’l’aimais beaucoup, grand-p’pa, mais ça m’intéresse pas d’vivre chez lui, maintenant qu’il est plus là.

    — Mon pauvre chéri, on va repeindre la maison, remplacer l’mobilier, refaire la déco à notre goût. Elle sera plus celle de grand-père, mais bien la nôtre.

    — Ça change tellement rien, m’man.

    — Donne-nous une chance. En plus, tu t’plains toujours d’harcèlement à l’école, peut-être qu’tu seras mieux à celle de Champdagne ?

    — Ils ont une école secondaire dans c’trou-là, sérieux ?

    — Bien sûr ! Bestway, la même où ton père est allé à ton âge. Tu y seras bien.

    — Zéro cool ! Le p’tit nouveau est tellement bien accueilli !

    — Là, t’es d’mauvaise foi, Tonin.

    — On s’en reparlera en septembre. De toute façon, j’ai pas l’impression qu’mon opinion compte vraiment pour vous deux.

    Antonin replace ses écouteurs et se laisse tomber sur le dos dans son lit. Silencieuse, Isabelle lui tapote le genou pour l’approuver, avant de sortir et de retourner au salon. Elle n’a pas le temps d’ouvrir la bouche que son mari l’interpelle.

    — J’te préviens, Isabelle ! J’me fous pas mal de c’qu’il dit. Il suivra, c’est tout.

    Elle s’assoit près de son homme et pose à nouveau sa main sur son torse afin de l’amadouer.

    — Calme-toi un peu. Il a bien compris, même si ça fait pas son affaire. Il a pas l’choix. Mais pour lui, changer d’ville et d’école, tu comprends ? Sa vie est bousculée. Il perd ses repères, ses amis de toujours.

    — Il s’en trouvera d’autres, c’est tout. De toute façon, il est toujours enfermé dans sa chambre, branché sur ses jeux.

    Isabelle abandonne. Elle se blottit contre son époux, en espérant que tout s’arrangera avec le temps.

    Plus tard, en soirée, Antonin se branche sur Skype avec William. À l’écran, on peut voir un garçon au visage rond, aux cheveux roux et frisottés. Le départ prochain de son ami d’enfance affecte William. Il a des sanglots de déception dans la gorge.

    — Vous déménagerez en juin, tu disais ? C’est nul, puissance moins un million tout ça.

    — Tellement ! À fin d’l’année scolaire, qu’il a dit, mon vieux.

    Malgré la morosité de la situation, ils poursuivent leurs devoirs, comme ils le font chaque soir. Le lendemain, les écouteurs aux oreilles et vêtu d’allure ténébreuse, Antonin est en route pour l’école. Comme ses parents n’acceptent pas l’idée qu’il s’exhibe avec piercings et tatouages, afin de correspondre à son look rebelle sans contrevenir à leur conviction, ce n’est qu’après avoir quitté le domicile familial qu’il s’installe un faux piercing : un anneau pincé à la lèvre inférieure. Le coup d’œil est suffisamment trompeur.

    En chemin, William le rejoint. De petite taille et légèrement enrobé, pour les mêmes raisons que son ami, il arbore un faux piercing qu’il porte au nez.

    Écrasés de déception, les garçons poursuivent leur trajet. Leur silence est inhabituel.

    La polyvalente Marguerite-de-Lajoie qu’ils fréquentent est une institution publique où l’on offre les cinq niveaux du secondaire et certaines formations professionnelles spécialisées. Dans cette population de plus de mille cinq cents élèves, mis à part les différentes ethnies et religions, on peut voir de nombreux styles vestimentaires et musicaux qui départagent les élèves.

    Les plus répandues et populaires sont appelées casuals ou fashions. Majoritairement très à la mode, c’est de ce groupe que font partie les grands sportifs et leurs supporteurs. À ne pas oublier, les éternels nerds et leur habillement du genre gamers. On trouve aussi les indémodables punks, que l’on reconnaît à leur incroyable coupe de cheveux aux couleurs variées. Puis, il y a les gothiques et les emos, tous deux dérivés du punk. Leur allure est plus sombre, mais plus esthétique. Viennent ensuite les métalleux, aussi nommés les metalheads ou headbangers. Peu dérangeants, ils ont une apparence vestimentaire moins soignée, ce qui leur donne un air plus dur.

    L’environnement de la polyvalente est à l’image du niveau social de la communauté avoisinante. Les casiers sont maculés de graffitis faits au crayon-feutre ou sculptés à la pointe d’un couteau, et ce, même si les élèves n’ont pas le droit d’en posséder un à l’intérieur des murs de l’établissement.

    Une fois passés à leur case, Antonin et William se dirigent vers le local du premier cours de la matinée. Malheureusement, malgré leur image qui se veut rebelle, ils sont perpétuellement harcelés. Soudain, chacun reçoit une claque derrière la tête.

    — Salut les dongs !

    — Sérieux, pas lui !

    Lui ? C’est Frédéric Bastion, un persécuteur de première qui affiche le look populaire. Un garçon de forte stature, plus âgé. Aujourd’hui en cinquième secondaire, il a doublé trois années et profite de l’avantage physique correspondant.

    Les dongs ? Il s’agit d’un péjoratif de la création de Bastion. Personne n’en connaît la provenance. Au début c’était les dings dongs. Puis, c’est devenu les dongs, simplement.

    — Hey, j’vous parle, les dongs ! Vous pourriez m’répondre !

    — C’est peut-être qu’on a pas envie de t’parler, Fred, sérieux ! réplique bravement Antonin.

    Outré, Frédéric frappe les livres qu’Antonin tenait à la main, puisque, dans un geste de paresse, il n’a pas pris le temps de les placer dans son sac à dos.

    — Tu veux faire le comique, Dongsky ? Ramasse-les donc, tes bouquins.

    Frédéric en rajoute et donne un coup de pied sur les livres, en gloussant très fort. Le persécuteur est fier et s’éloigne, supporté par un trop grand nombre d’élèves qui trouvent ce geste amusant. En colère, Antonin agrippe son plus gros manuel à deux mains et s’élance en direction de Frédéric.

    — Non, Tonin, trop nul ! Fais pas ça, murmure William, qui tente vainement de dissuader son ami, sans alerter le harceleur.

    Antonin le cogne solidement sur le côté de la tête et Frédéric se heurte contre un casier. À demi étourdi, les poings fermés de rage, le colosse désire visiblement se venger. Au moment de se retourner, il aperçoit monsieur Bernier, professeur de mathématiques du troisième secondaire. Il s’approche, attiré par ce grabuge.

    — Que se passe-t-il ici, Frédéric ?

    — Strausky m’a tapé la tête.

    — Fred a foutu tous mes livres par terre.

    — Ce n’est pas une raison pour le cogner aussi violemment, Antonin, lui reproche l’enseignant. Tous les deux, suivez-moi chez le directeur Godbout.

    — Pourquoi moi ? C’est lui qui m’a frappé, s’indigne Frédéric.

    Haussant les sourcils, l’enseignant répond pour lui-même : Toi, fais pas l’innocent, regarde les livres d’Antonin.

    — J’peux ramasser mes livres avant, Monsieur ?

    — Bien sûr. Rejoins-nous immédiatement après, Antonin.

    — Sans problème, merci.

    Quelques minutes plus tard, près du bureau de Godbout, Antonin écoute à la porte. C’est avec satisfaction qu’il entend les remontrances du directeur à Frédéric. Après lui avoir rappelé ses précédents échecs, il lui recommande de cesser de harceler ses camarades. Il lui mentionne la possibilité qu’il a de réussir l’année en cours et d’avoir finalement sa place au Centre professionnel Samson : on y enseigne la conduite de machineries lourdes. Le directeur le convie tout de même à une période de retenue après les cours.

    Si j’déménageais pas, j’aurais enfin été débarrassé d’lui, pense Antonin.

    Au moment où Frédéric quitte le bureau du directeur, Antonin fait mine d’entrer. Frédéric lui lance un regard hargneux et accusateur. Il prétend qu’il lui a fait mériter une punition sans raison.

    — C’est toi qui as commencé, Fred. T’as jeté mes livres par terre.

    — Très bien, Messieurs, intervient le directeur, resté à son bureau. La discussion est terminée ! Dois-je vous rappeler mes recommandations, Monsieur Frédéric ? Allez, retournez en classe immédiatement. Quant à vous, Monsieur Antonin, entrez vite.

    Il obéit sans attendre et referme la porte derrière lui. Le local est exigu, le mobilier de métal gris donne un air de cauchemar à la pièce. Le directeur a le visage aussi sévère que son crâne est dégarni. Il invite Antonin à prendre place sur une des chaises droites et inconfortables placées devant son bureau.

    — Monsieur Antonin. Bien que je comprenne en partie les motivations qui vous ont poussé à cette action ridicule, une telle brutalité ne saurait être tolérée en nos murs. De plus, cette attitude ne vous attirera que des ennuis.

    — J’en ai déjà plein avec lui et ses chums. Personne fout rien pour les arrêter.

    — Je peux concevoir votre indignation. Mais je dois tout de même sévir et vous infliger un blâme. Il n’y aura pas de retenue pour vous, cette fois. Mais je vous recommande fortement, même si l’envie vous démange, de ne pas répondre à la violence par la violence.

    Un billet en main et à demi satisfait de ce qu’il a entendu sur Frédéric, Antonin retourne en classe. Il a une bonne nouvelle pour William. Entre deux cours, il s’empresse de la lui annoncer.

    — Trop cool, ça, Tonin ! Puissance mille millions.

    — Pour toi, mais en fait, c’est nul, Will. Juste comme on apprend que Fred fout l’camp l’an prochain, mon vieux décide de déménager dans un trou perdu.

    — T’exagères pas un peu, Tonin ? T’es grave puissance deux cent mille quand tu veux.

    — Sérieux ? T’aimerais ça, toi ?

    — Trop poche, Tonin. J’aime trop la ville. Mais vois les bons côtés.

    — Quels bons côtés ? C’est la campagne et c’est plate, c’est tout. Y a rien à faire dans ce coin-là, genre. J’y suis allé souvent chez mon grand-père. Probablement qu’y a même pas d’Internet, sérieux !

    William en reste là, puisque le différend semble sans issue. Avant qu’ils se rendent au local suivant, la rage de Frédéric se refait sentir. Il frappe Antonin derrière la tête, comme il aime si bien le faire.

    — Il t’a dit quoi, l’dirlo, Dongsky ?

    Antonin se tourne en se frottant la nuque, l’air moqueur.

    — T’aimeras pas, Fred. J’ai pas eu d’punition, moi. Pas d’retenue, ce soir.

    — T’es juste une pourriture, Dongsky ! T’as fait exprès, avoue.

    Frédéric le bouscule dans un coin et le retient par les épaules.

    — C’est toi qui as foutu mes livres par terre !

    — Mais tu m’as cogné par-derrière, Dongsky.

    Dans l’action, personne ne remarque monsieur Duquet, l’enseignant d’éducation physique.

    — Qu’est-ce qui ne va pas ici, Messieurs ? Vous savez que les bagarres ne sont pas tolérées ?

    — C’est pas une bagarre, Monsieur, le rassure Antonin. C’est Fred, il voulait m’embrasser.      Frédéric s’affole en entendant les rires des élèves.

    — Quoi ? Va t’faire voir, Dongsky, j’suis pas une foutue pédale !

    — Oh, est-ce que j’entends des propos homophobes en plus de vos injures, Monsieur Frédéric ?

    — Non, c’est…

    Frédéric hésite à poursuivre. Il jette un œil sévère à Antonin et comprend qu’il l’a mis dans une situation compromettante, quoi qu’il dise.

    — Tu vas me l’payer, Dongsky.

    — Tu ajoutes des menaces à la liste, Frédéric ? J’crois qu’une visite chez le directeur s’impose.

    Antonin est tout sourire, mais Frédéric l’assassine du regard.

    — T’es malade puissance deux cent mille, Tonin, lance William. Il voulait m’embrasser. Vraiment ? Tu penses survivre jusqu’à la fin de l’année avec ça ?

    — J’en sais rien, Will. Mais c’est tellement bon d’le voir s’planter tout seul !

    Antonin regarde Frédéric s’éloigner. William fixe son ami, découragé. Il comprend qu’il ne pourra en aucune façon le faire changer d’idée ni même de conduite.

    De retour à la maison, et après avoir évité une vaine discussion avec ses parents, Antonin contacte William pour leurs travaux scolaires quotidiens. Pour ne pas provoquer un affrontement inutile, il aborde immédiatement les leçons du lendemain.

    La réplique d’Antonin a fortement irrité Frédéric. William le savait. Une fois encore, il avait vu juste. Les jours suivants sont donc très difficiles pour son ami. Il subit sans cesse les frasques de Frédéric et de ses comparses. La fin d’année paraîtra interminable au jeune homme.

    Les jours avancent et Yorgy prend une semaine de vacances, car ils comptent en profiter pour se rendre à leur nouveau domicile afin d’y effectuer l’inventaire des biens du grand-père : ceux qu’ils conserveront et ceux dont ils se départiront. Ils veulent aussi entreprendre quelques travaux de rénovation. Les parents Strausky savent que leur fils est suffisamment mature et décident de le laisser seul quelques jours. Par mesure de précaution, ils ont demandé à la voisine du bas de garder l’œil ouvert sur ses allées et venues.

    Pour Isabelle, ce sera l’occasion de s’occuper de l’admission d’Antonin à l’école Bestway. Le lundi suivant, elle a rendez-vous au secrétariat de l’établissement. La femme qui l’accueille est grande et mince. Son tailleur pantalon d’un rouge vif et ses longs cheveux noirs impeccables parlent déjà de sa personnalité. Elle m’a l’air stricte, celle-là, remarque Isabelle.

    La dame lui fait part des options qui s’offrent à son fils. Isabelle le connaît bien, comme il n’a pas trop d’aptitudes pour les sports, elle choisit formation générale. Cela, même si sport-étude est privilégié par le directeur de l’établissement. Par la suite, Madame De-Guimond, la directrice du service des inscriptions, lui parle du Code de vie et tenue vestimentaire de Bestway.

    — Nous savons que certaines institutions de la grande ville ont une inappréciable tolérance sur ces points. Ici, à Bestway, nous avons à cœur d’enseigner les bonnes manières à nos jeunes : le respect d’eux-mêmes et d’autrui ainsi que la bienséance. Ce Code définit le comportement attendu sur mille et un aspects de la vie, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’établissement. Je vous conseille fortement de le lire et d’en faire part à votre fils.

    Elle brandit grossièrement un fascicule au nez de la maman. Ses dernières paroles semblent relever de l’ordre plutôt que d’une recommandation. Indignée, Isabelle attrape le fameux code et fronce les sourcils en réponse au geste déplacé de la dame.

    — J’vais lui en parler.

    De retour à la maison de champagne, Isabelle relate l’histoire à un Yorgy surpris.

    — Ils ont changé depuis mon époque. Mais notre garçon sera mieux encadré ici. Rien à voir avec la trop grande liberté d’la polyvalente où il va en c’moment.

    — Ils me paraissent inutilement sévères sur certains points.

    — Jamais trop, Isa.

    Yorgy tape fortement du bout du doigt sur la table.

    — Jamais trop sévère, j’te dis.

    — Mais ce sont qu’des enfants !

    — Des enfants ? Ils fument et boivent en cachette, ils forniquent. Non, jamais trop sévères. Si j’le pouvais, j’le changerais d’école immédiatement.

    Isabelle lève les yeux et hausse les épaules sans rien ajouter. Elle sait qu’elle ne parviendra pas à lui faire entendre raison.

    2

    Antonin est d’humeur radieuse. Il écoute sa musique favorite en traversant la ville au volant d’un énorme camion. Sur le boulevard, il admire les boutiques et les restaurants. Il se sent fort, dans ce mastodonte qu’il conduit, et salue les gens au passage. Un voyage de rêve, trop beau pour durer.

    — ANTONIN STRAUSKY, CESSE DE RÊVASSER ET VIENS NOUS AIDER !

    — OUI, P’PA, J’ARRIVE. Ah, arrête de t’énerver !

    Le garçon laisse tomber son périple imaginaire et descend de la cabine du camion de déménagement qu’a loué son père. Il rejoint Yorgy et deux de ses amis qui chargent le véhicule, déjà presque plein de boîtes et de mobilier.

    Antonin s’occupe très lentement de ses cartons. Comme toujours, il en fait le moins possible. Après quelques heures, le logement est vide, le fourgon rempli, de même que certaines voitures qui le suivront. Yorgy conduit le poids lourd, et sur le siège passager, Antonin est totalement déprimé de voir s’éloigner son quartier d’enfance.

    — Arrête de faire la tête, Tonin. Tu vas t’faire une nouvelle vie.

    — Tellement !

    L’adolescent se cale sur le siège et observe sa ville, une dernière fois.

    — J’ai grandi là-bas, et regarde-moi, aujourd’hui.

    — Ben oui, cool !

    Sur place, ses parents ont repeint la maison et le vieux mobilier est remplacé, en bonne partie. Bien qu’Antonin l’ait visitée à plusieurs reprises au moment où son grand-père l’habitait, la demeure lui paraît maintenant différente. Elle est très grande : le salon et la salle à manger s’étendent sur les deux tiers du rez-de-chaussée, auxquels s’ajoutent la cuisine, ainsi que les salles d’eau et de lavage. À l’étage, on trouve une immense salle de bains avec douche et bain à remous, en plus des six chambres.

    Les parents occuperont la pièce la plus grande, naturellement. Ils autorisent Antonin à en employer deux. C’est pour eux, une façon détournée de le charmer. Malheureusement, cela ne change en rien son opinion, mais il approuve tout de même l’idée. Il utilisera comme chambre, celle dont la fenêtre donne sur la terre, derrière la maison. La deuxième, avec vue sur le stationnement de l’entrée, lui servira de boudoir où il pourra installer sa télé et ses jeux vidéo. Une des trois pièces restantes deviendra le bureau à Yorgy, une autre serra le débarras et la dernière est réservée aux invités.

    Une fois bien organisé, Antonin s’enferme dans ses appartements en guise de rébellion. Il ne sort que pour les repas.

    Deux jours s’écoulent avant que les connexions électroniques soient prêtes. Télévision, téléphone et surtout Internet. Antonin peut enfin contacter son copain sur Skype.

    — Comment s’passe ton cauchemar, Tonin ?

    — Je gère. Comme tu vois, y a Internet au moins. Pour l’reste, j’végète dans ma chambre. J’en ai deux, en passant. Mes vieux pensaient m’avoir avec ça, sérieux ! Ils se sont plantés dur. Même qu’un ami d’mon vieux m’a donné un futon. Trop nice, j’suis super confos pour gamer.

    — Cool ! Dommage que t’avais pas ça ici. T’as visité l’coin ?

    — Trop poche, Will, pas question d’sortir.

    — Vraiment ? Qu’est-ce t’as foutu ? T’es en pénitence, genre ?

    — Tellement pas ! C’est mon choix. Ils sont v’nus dans c’trou sans s’occuper d’mon avis, alors voilà !

    — Franchement ? C’est puissance moins dix mille, ton idée. Tes vieux vont pas rev’nir à Auxertown pour ça.

    — Pas important, j’fais comme j’veux.

    Pour l’anniversaire de leur fils, huit jours après le déménagement, les parents ont invité William. Ils espéraient qu’il puisse convaincre Antonin de sortir de sa chambre.

    Mais le jour venu, le jeune n’a fait qu’à sa tête. Les garçons sont demeurés confinés et se sont amusés à leurs jeux.

    Cela fait maintenant un peu plus de deux semaines qu’Antonin manifeste son désaccord. Son père est exaspéré.

    — J’peux pas croire qu’il reste enfermé comme ça, Isa. J’vais lui couper Internet et lui retirer ses conneries d’jeux.

    — Non, fais pas ça, chéri. Il s’enragera davantage, voilà tout.

    — Et après ? C’est pas normal pour un jeune de son âge de s’isoler entre quatre murs toute la journée. Il a quinze ans ! Il devrait prendre son vélo et aller en ville. Il pourrait s’faire de nouveaux amis, s’amuser.

    — Laisse-lui l’temps d’s’adapter, pauvre petit. Ça fera rien d’bon si on l’bouscule.

    — Tu l’couvres un peu trop, Isa. Faudrait lui botter l’cul d’temps à autre. J’lui donne encore une semaine. Après, j’le débranche.

    Tolérante, Isabelle acquiesce et lève les yeux, comme si elle voyait son fils à travers le plafond.

    Les communications par texto se maintiennent entre les amis d’enfance. Mais les discussions sur Skype se font de plus en plus rares. Bien qu’il soit peiné d’avoir perdu son meilleur copain, William n’a pas mis sa vie entière de côté comme Antonin. Il a plutôt consolidé les liens avec des camarades du quartier.

    Seul dans son petit monde, Antonin surfe sur le Net et fait une découverte des plus intéressantes. À l’ouverture d’une page où s’affichent diverses nouvelles futiles, un fait divers l’attire : en Allemagne, une femme aurait déniché pour plus de

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