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Grand-mère: Roman
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Livre électronique133 pages1 heure

Grand-mère: Roman

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À propos de ce livre électronique

En 1948 trois jeunes garçons Raphaël Groboutou, 18 ans ; Célestin Belyenyen, 18 ans ; Romuald Malvini, 19 ans, dévalisèrent la villa de la famille Grobec, propriétaires d’une plantation de cannes à sucre en Martinique. Raphael et Romuald, arrêtés sur les lieux par la police, purgèrent une peine de prison. Célestin s’étant enfui ne fut jamais inquiété.
Mais voilà que trois ans plus tard, quand Célestin apprend la libération de ses amis, il entreprend une fuite effrénée en Europe. Il élit domicile en Roumanie où un jour, il croise la route de Raphaël. Célestin doit reprendre sa cavale.
Comment échappera-t-il aux foudres de son complice ?
Et pourquoi Éloïse, grand-mère de 80 ans, raconte-t-elle la vie de Célestin à ses arrière-petits-enfants, Cédric et Thomas ?
Cette histoire surprenante, relatée avec humour et tendresse, transforme l’existence de Célestin en une émouvante leçon d’humanisme.
LangueFrançais
Date de sortie8 oct. 2018
ISBN9782312062273
Grand-mère: Roman

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    Aperçu du livre

    Grand-mère - Chistine Lucige

    978-2-312-06227-3

    Chapitre 1

    Éloïse Livimal se leva le matin au « pipiri di jou{1} » et jeta un regard au-dehors. La nuit épaisse ne laissait pas filtrer les rayons de la lune qui s’apprêtait à se coucher. Les bruissements des insectes nocturnes continuaient avec la même intensité qu’au début de la nuit. La vieille dame s’agenouilla au pied de son lit et se mit à prier. Elle demanda pardon à Dieu pour avoir trompé son entourage. Des larmes s’échappaient de ses yeux tristes et s’écoulaient dans les sillons des rides de son visage. Elle scandait la même prière chaque matin en pleurant. Elle se disait qu’il n’y avait que la mort qui pourrait la délivrer de ce terrible secret qu’elle portait depuis ses vingt-et-un ans.

    Éloïse vivait à Fonds Saint-Jacques dans une maison spacieuse de type coloniale entourée d’un petit jardin fleuri. Au début avec Colette, son unique fille, puis avec sa petite-fille et ses deux arrière-petits-fils. Quartier d’une cinquantaine d’âmes, Fonds Saint-Jacques, petite localité de Martinique, porte bien son nom, car on n’y trouve aucun terrain plat. L’unique rue qui traverse la localité, ravinée par les pluies tropicales, se transforme plusieurs fois par an en chemin de terre battue et les habitants accèdent à leur domicile par de nombreux petits sentiers à flanc de colline.

    Femme de taille moyenne, Éloïse portait ses quatre-vingts ans avec une certaine fierté. Elle entourait ses cheveux blancs filandreux tombant sur ses épaules avec un carré de madras aux teintes rouge et jaune, ses couleurs préférées. Ses grands yeux gris avaient gardé l’éclat d’un regard perçant. Des pommettes saillantes surmontaient ses joues creuses et ses fines lèvres accentuaient les traits de son visage anguleux. Elle marchait à petits pas s’aidant de la canne en noyer que lui avait offerte sa fille. Voûtée par le poids des ans, Éloïse marmonnait continuellement ; nul ne pouvait décrypter ses élucubrations.

    Sa vie tumultueuse l’avait entraînée dans un tourbillon d’événements, l’obligeant à changer continuellement de domicile durant sa jeunesse.

    Depuis plusieurs mois Éloïse, pensait à ses derniers jours sur terre. Toujours le même rêve chaque soir. Ses parents l’entraînent dans les profondeurs de l’océan. Elle suffoque, sent sa vie la quitter et dans un ultime souffle… se réveille. Le besoin de raconter le déroulement de son existence à qui voulait bien l’écouter devenait jour après jour une idée obsédante. Le secret qu’elle portait depuis son adolescence pesait davantage encore maintenant qu’elle était au crépuscule de sa vie. Elle pensait pouvoir accéder au paradis si elle déchargeait sa conscience de ce fardeau. Surtout, elle voulait donner à sa petite-fille un semblant d’explication sur le désert familial qui l’entourait. Montrer que tout être humain détient une part de mystère qui ne peut représenter une raison suffisante pour le rejeter. Que la différence donne à tout individu sa dimension d’être humain tout simplement. Jeune, Éloïse plaisait aux garçons, mais aucun n’avait trouvé grâce à ses yeux.

    Son passe-temps favori était de fumer sa pipe, assise dans sa berceuse sur la terrasse, guettant les premières lueurs du crépuscule et s’extasiant, depuis sa plus tendre enfance, devant la végétation luxuriante de son quartier. En rentrant de l’école, les enfants des environs se réunissaient autour d’elle et tout en admirant son visage creusé de rides et ses petits yeux rieurs, ils attendaient la fin de l’histoire commencée la veille ou le début d’une nouvelle histoire fantastique. La curiosité et la vitalité des enfants agissaient sur elle comme un élixir de jouvence et son visage rayonnait de bonheur dès qu’elle les apercevait au sommet du morne qui surplombait sa maison.

    Chapitre 2

    Ce mercredi 14 octobre 2009, elle décida de raconter à ses petits-enfants l’histoire particulière d’un jeune cambrioleur prénommé Célestin. Les souvenirs se bousculaient dans sa tête et l’émotion la submergeait. Autour d’elle se trouvaient ses deux arrière-petits-fils avec lesquels une grande complicité s’était établie au fil des années.

    Cédric, l’aîné âgé de 9 ans, constamment en mouvement, trouvait sa sérénité sur les genoux de sa grand-mère. Captivé par chacun des mots qu’elle prononçait, il vivait sa propre aventure au fur et à mesure que l’histoire prenait forme. Thomas, le cadet âgé de 7 ans, est un petit garçon timide et studieux. Il posait des questions pertinentes qui gênaient Éloïse. Mais elle souriait fièrement en se disant : « Ils sont intelligents, mes petits-enfants. »

    Les garçons qui attendaient depuis quelques secondes, car Éloïse tardait à commencer, se mirent à crier en chœur :

     Grand-mère, tu nous la racontes, cette histoire !

    Alors la vieille dame commença d’une voix traînante :

    Trois jeunes garçons, amis depuis leur enfance :

    – Romuald Malvini, 19 ans, était le plus âgé des trois. Grand et mince, sa peau noire brillait sous le soleil. Un sourire narquois toujours affiché sur sa bouche aux lèvres charnues lui donnait un air moqueur et ses grands yeux noisette pétillaient davantage dans son visage fin quand il se préparait à commettre un larcin.

    – D’origine indienne, Raphaël Groboutou, 18 ans, aussi maigre que Romuald, portait des cheveux bruns mi-longs tombant sur un regard mélancolique. Son visage rond était en inadéquation avec son caractère belliqueux. Tête pensante du groupe, aucun objet n’échappait à ses mains expertes. Sa rapidité d’exécution lui permettait de dévaliser tout citoyen respectable avec une habileté déconcertante.

    – Célestin Belyenyen, 18 ans, mulâtre de taille moyenne aux yeux gris et au visage famélique, était le plus peureux des trois. Il réfléchissait longuement avant de prendre une décision et ses camarades l’avaient surnommé « La Demoiselle » ! Célestin détestait ce surnom qui, dès qu’il était prononcé, déclenchait chez lui un état de rage incontrôlable.

    Un jeudi après-midi de l’année 1948, nos trois amis quittèrent ensemble leurs maisonnettes en bois du quartier Fonds Saint-Jacques et se rendirent à Sainte-Marie. Voulant tester leur invincibilité, ils décidèrent de cambrioler la villa des Grobec, propriétaires d’une exploitation de canne à sucre et premiers esclavagistes du pays selon les dires des autochtones.

    Alors, sous une pluie battante et avec moult précautions, ils s’approchèrent du domaine, Célestin portant un petit sac à dos plié sous le bras. Après s’être faufilé entre les barbelés, puis avoir escaladé le haut mur d’enceinte, le petit groupe arriva sur le palier d’une maison bourgeoise à trois étages. Romuald frappa fermement à la porte.

    Une domestique vint ouvrir la porte. Célestin et Raphaël qui se tenaient de part et d’autre se jetèrent sur la pauvre femme et Romuald la bâillonna.

    – Ta patronne est là, demanda-t-il.

    La femme secoua négativement la tête, se débattant pour essayer d’échapper à ses agresseurs.

    – Et ton patron ? continua Raphaël.

    Elle secoua à nouveau la tête.

    Célestin fixait les yeux de la domestique dilatés par la peur comme s’il s’attendait à voir les globes s’échapper de leurs orbites.

    – Le coffre ? cria-t-il.

    Un son étouffé s’échappa de la bouche bâillonnée. Romuald relâcha son étreinte en prévenant la servante de ce qui l’attendait si elle tentait de crier ou de s’échapper.

    – Là-haut, hoqueta-t-elle avec un signe de tête en direction de l’étage.

    La petite troupe grimpa le grand escalier qui menait au premier étage en poussant la servante devant eux. Impressionnés par l’imposante demeure et l’immensité des pièces, ils ne cessèrent de pousser des petits sifflements. Tout ce luxe leur donnait le vertige.

    – Vous avez vu ça ! soufflèrent-ils en chœur.

    Ils s’extasièrent devant la débauche de soierie et la qualité des meubles. Bijoux et bibelots remplissaient chaque espace. Les tiroirs furent vidés de leur contenu et notre trio ramassa une cargaison d’objets précieux. Le coffre fut forcé en un éclair par Raphaël. Mais l’arrivée inopinée du maître des lieux interrompit leur collecte. Célestin qui avait engouffré une large partie du butin dans son sac à dos s’en alla en catimini par la fenêtre et se sauva comme un bandit poursuivi par les gendarmes. Mais ses camarades, mis en joug par le propriétaire, ne purent que se rendre !

    Si les gendarmes de Célestin étaient imaginaires, les policiers qui se présentèrent chez la famille Grobec étaient bien réels. Ils s’emparèrent de Romuald et Raphaël qui avaient encore en main certains bijoux dérobés dans le coffre dont les portes béantes laissaient paraître mille éclats de pierres précieuses.

    Réprimandés et ficelés, nos deux complices partirent au poste de police dans une fourgonnette rouillée, cahotante sur la route défoncée, pour un interrogatoire musclé dont ils se souviendront toute leur vie ! Nos deux compères jurèrent qu’ils n’étaient que tous les deux. Mais, confondus par le propriétaire, ils jurèrent ne pas connaître le vrai nom de leur complice et ignorer où il habitait. Et pour être plus crédibles, ils affirmèrent qu’ils avaient été eux aussi roulés par ce dernier… ce qui n’était pas complètement faux !

    Nos deux amis purgèrent une peine de trois années de prison, refusant de dénoncer leurs complices malgré toutes les propositions faites par la justice. Les bijoux furent recherchés sans enthousiasme par les policiers qui estimaient que ces jeunes cambrioleurs n’avaient fait que venger le peuple exploité par ces békés sans scrupules.

    Parmi les bijoux il y avait un peu de pacotille et beaucoup d’objets de valeur. Le regard de Célestin

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