Cybèle - Une séductrice en désir d'être
Par Clara Dévi
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Aperçu du livre
Cybèle - Une séductrice en désir d'être - Clara Dévi
Cybèle Une séductrice en désir d’être
Clara Dévi
Cybèle Une séductrice en désir d’être
LES ÉDITIONS DU NET
22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
Du même auteur :
L’hirondelle de Bevegem
Biotem 1998 – (Edition originale)
Le Scribe 2000 – (Réédition)
L’accord parfait - Le Scribe 2000
Saveurs d’enfance – Le Scribe 2001
Le cœur à la lettre – Le Scribe 2003
Les psaumes – Essai de Calligraphie
Le Scribe 2003
Gladys – Le Scribe 2005
Filles de mai – (Ouvrage collectif)
Bord de L’Eau 2004
Enfance meurtrie – Le Manuscrit 2006
À mots ouverts – Le Manuscrit 2006
Mes maux en mots – Le Manuscrit 2007
Mots doux et amers – Le Manuscrit 2008
Soliloques intimes – Le Manuscrit 2009
Age tendre – Le Manuscrit 2009
Stella – Le Manuscrit 2011
© Les Éditions du Net, 2013
ISBN : 978-2-312-01121-9
BEAUTÉ DES FEMMES…
Beauté des femmes, leur faiblesse, et ces mains pales
Qui font souvent le bien et peuvent tout le mal,
Et ces yeux, où plus rien ne reste d’animal
Que juste assez pour dire : « assez » aux fureurs mâles !
Paul Verlaine (Sagesse 1881)
Avant-propos
Ce livre raconte des fragments de vie de Cybèle et de sa famille : son bel époux Julien, de douze ans son cadet, ses deux enfants : Louis et Julie, son frère Grégoire et sa sœur Hélène, pour ne parler que de ses proches. On découvre aussi ses domestiques, son psychanalyste, et enfin ses amours clandestines et son secret : une blessure de jeunesse...
Le lecteur voyage entre narrations de l’auteur, correspondances et extraits des grimoires des héros.
Cybèle vit à Paris dans le seizième arrondissement. Elle habite un hôtel particulier situé dans le quartier des ambassades.
Très proche de sa sœur Hélène, qui elle, demeure en province dans le manoir familial et de son frère Grégoire, gentleman-farmer vigneron, qui partage sa vie avec Nathan, un architecte de renom.
Cette femme que l’on admire, est une de ces mondaines qui semble traverser l’existence sur un nuage. Cultivée, paraissant à l’aise partout, discrète et pourtant, elle ne passe jamais inaperçue.
On l’envie même, on a l’impression qu’elle possède le monde, que rien ne lui résiste. Les rumeurs vont bon train à son sujet, surtout chez les femmes de cinquante ans et plus :
« Elle a de la chance, elle, à qui tout semble sourire. Elle a dû être très belle étant jeune. D’où lui vient cette vitalité, ce « punch », cette envie de croquer la vie à pleines dents ? »
Plus aimée que détestée, jeunes et moins jeunes, tous voudraient la connaître, s'en faire une amie, récolter quelques miettes de ce qu’elle possède en abondance, sa richesse matérielle et culturelle...
Aristocrate, originaire du terroir languedocien, une enfance passée à la campagne, elle aime autant la nature - les jardins médiévaux, les fleurs, les chevaux- que la ville et les réceptions mondaines.
Au pays de son enfance, jouissant d’une liberté sauvage, Cybèle parcourt les champs et les vignes, à pied, à bicyclette ou en chevauchant son Frison avec qui elle fait corps.
Aussi élégante en jean avec ses bottes en caoutchouc crottées, qu’en robe du soir.
Pourtant, toujours glamour, elle n’est pas heureuse. Cacherait-elle une détresse, un mal de vivre ?
Pour répondre à cette question, l’auteur retrace une période de quelques années de sa vie au cours de laquelle Cybèle se libère en transgressant toutes les limites.
Une aventure amoureuse inopinée déclenche chez elle l’audace de s’adonner à ses désirs et ses passions les plus insensés. A-t-elle perdu la raison ? Elle se révèle alors telle qu’elle est vraiment.
À ce propos, les extraits de son Journal Intime sont d’une grande sincérité, sans concession aucune et sans pudeur.
Pourtant, une révélation inattendue et brutale à laquelle elle ne s’attendait guère, va changer le cours de son existence…
I
Cybèle évolue dans son microcosme catholique parisien et bien-pensant.
Elle est parfaitement consciente de jouer un personnage. Elle pense qu’il s’impose à elle, que son existence est une suite de jeux de rôles. Aussi, les assume-t-elle avec brio, tout en préservant son jardin secret.
La fin de l’année approche. Cybèle est sollicitée pour participer aux animations paroissiales. Elle n’y tient pas spécialement, mais en tant qu’épouse catholique et dame d’œuvres, elle se doit de faire preuve de bonne volonté et de magnanimité.
Cybèle est une femme sophistiquée qui porte en elle une vraie détresse, celle de n'être pas aimée.
Quelques lettres extraites de son répertoire de correspondances permettent de faire plus ample connaissance avec elle et de mieux cerner sa personnalité ambivalente.
Lettre de Cybèle à sa sœur Hélène
Paris le 20 novembre 1999.
Ma chère Hélène,
Finalement, je prends ma plume car j'ai essayé de te joindre à maintes reprises sans succès ! J'espère que tu vas bien et que tu prends soin de mes fleurs, enfin de « nos » fleurs, puisqu'elles poussent dans le jardin de notre enfance. Jusqu’ici, d’après la météo, le temps est encore clément dans le sud-ouest. J’ai hâte de revoir toutes nos belles vivaces comme l’hellébore, les mimosas d’hiver, les camélias, les hortensias et la bruyère… Le manoir me manque et les terres de notre enfance aussi.
Et comment vont Sidney et Blacky nos chers Frisons ? N’ont-ils pas trop froid ? Il faudra peut-être envisager de chauffer leur écurie ?
Tu sais, Noël approche à grands pas et cela ne m’enchante pas spécialement !
Je suis déprimée en ce moment et bien que je me rende régulièrement chez mon analyste, je pense que je ne l'intéresse plus. Je suis un peu trop vieille maintenant, tu comprends ? Il semble se foutre complètement de ce qui m'arrive.
Heureusement, j'ai la visite quotidienne de mon kinésithérapeute, si attentionné, toujours disposé à m'écouter et à me dire un mot de réconfort. Il masse remarquablement et il me détend.
J'en ai bien besoin ma pauvre Hélène, d'être détendue, car à la maison ce n'est rose tous les jours.
Julien est très occupé. Lorsqu'il rentre tard et que nous n'avons pas de réception à l'extérieur ou d'amis à dîner, la maison est vide et sinistre. Et lui, ne me fait plus rire du tout. Pourtant, j'en suis toujours amoureuse et je l’admire : il est mon œuvre.
Cependant, je ne dois pas me plaindre, je vis à Paris, dans l’opulence avec un mari jeune et intelligent, que toutes mes amies m'envient.
Parfois je pense à Grégoire, notre frère, qui s’occupe de nos terres et qui sauvegarde notre patrimoine familial. Il doit faire face à tous les problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs en ce moment. Et pourtant il est toujours souriant et avenant.
Pardon de me plaindre encore. Je me sens si lasse parfois... si seule.
Figure-toi que ces temps-ci, Julien m'a délaissée complètement au profit de son ordinateur. Je ne sais ce qu'il peut faire pendant des heures, enfermé dans son bureau devant cette machine !
Auparavant, ce n'est pas que nous avions grand-chose à nous dire ! Au moins, nous regardions la télévision ensemble et souvent l'un ou l'autre d'entre nous donnait un avis ou faisait une remarque sur le programme. Aujourd'hui, c'est à peine s'il prend le temps de dîner avec moi. Il va s'enfermer et je reste seule devant la télévision avec Hermès, notre chat.
Je déteste son « Mac » comme il l'appelle. D'ailleurs, Julie aussi en a un. Les gens sont fous avec ces machines ! Je ne sais pas si moi-même j’apprendrai à manier de tels engins. Ils semblent être la cause de bien des discordes dans les ménages.
Oh, ça n’a pas l’air bien compliqué, je serai tout à fait capable de m’en servir aussi, je présume ! Bah, ces machines détruisent les liens entre les gens et surtout les rendent bêtes. Bientôt plus personne ne sera capable de parler et d’écrire le français correctement.
Tu sais, ces internautes comme on les appelle, ont un langage à eux. Et il évolue sans cesse. Tous les jours, des mots nouveaux apparaissent pendant que d’autres disparaissent. Avant, on s’amusait à parler verlan. Mais eux s’expriment par des sigles, des codes, des abréviations, des mots inventés ou du franglais ! En plus dans une écriture phonétique !
Mon mari s’y est mis aussi. Figure-toi qu’il ne me dit plus « au revoir ma chérie » le matin quand il s’en va, ou « au revoir Cybèle » comme il le disait si joliment avant, il me dit « à plus ! » Tu te rends compte Hélène ! La première fois qu’il me l’a dit, je suis restée bouche bée. Je lui ai demandé s’il avait oublié un « plus », un dossier « plus », ou quelque chose comme ça. Alors, il a éclaté de rire et m’a dit que je devenais vraiment ringarde. Le salaud !
Tu sais parfois je t’envie, toi, dans ta province....
Quant à Julie, elle déserte de plus en plus la maison. Elle a quelqu'un je crois. Elle refuse d’en parler. Quand j'oriente la conversation sur son ami mystérieux, elle se met en colère. Alors, tu vois, même avec ma fille je ne communique pour ainsi dire plus, sauf pour dire des banalités.
Tout de même... une petite lueur dans cette journée : j'ai reçu un coup de téléphone des Etats-Unis. Louis viendra passer les fêtes avec nous ! Une occasion de nous réunir tous au manoir cette année.
Je suis tout de même angoissée à l’idée de revoir mon fils.
En attendant, je te laisse, car l'heure tourne, je ne suis pas coiffée et j'ai peur que Julien rentre et me trouve en négligé.
Je t'embrasse.
Cybèle.
Lettre de Cybèle à son amie Yolande.
Paris, le 22 novembre 1999.
Chère Yolande,
J’ai appelé chez toi. Tu étais sortie ! Aussi, je te fais porter ce mot.
J’ai été contactée par le Père Gérald pour participer aux festivités paroissiales organisées pour les personnes sans domicile fixe et autres nécessiteux.
Mon Dieu, j’ai peine à croire que la misère est si grande. Soit ! Nous autres qui tout de même ne manquons de rien, je veux dire matériellement,- car moralement, notre détresse peut être immense et personne n’aura pitié de nous ma chère !- il nous faut bien faire une petite bonne action en cette période qui précède Noël et que par principe je n’aime pas !
Je ferai donc préparer par ma cuisinière six tartes aux fruits, trois quiches et trois terrines de saumon.
Comme je sais que c’est toi qui coordonnes cette manifestation, je te demande de me faire savoir si c’est suffisant.
Le prêtre vient de m’appeler pour m’inviter à une réunion préparatoire jeudi prochain. La fête aura lieu avant Noël, c’est parfait. D'habitude, nous ne sommes pas en France à cette époque.
Cette année, exceptionnellement, nous passerons Noël et Nouvel An dans notre maison familiale car j’attends l’arrivée de notre fils Louis.
En ce qui concerne la paroisse, je n’étais que tièdement motivée pour participer à une telle manifestation : je suis fatiguée et ne pourrai guère aider ou rester debout. Je l’ai dit au prêtre d’ailleurs.
Il a bien compris et m’a proposé de faire l’accueil.
Appelle-moi sans faute à l’heure du thé.
Amicalement,
Cybèle d’Albye
Lettre de Cybèle à Yolande, écrite après la réunion paroissiale.
Ce jeudi.
Chère Yolande,
Ce petit mot à l’issue de notre réunion – bien sympathique – d’ailleurs ! Mon Dieu ce jeune prêtre, il est si plein de fougue ! Enfin, me voilà engagée avec vous dans cette action de solidarité du samedi 20 décembre ! Ciel, c’est dans trois semaines déjà !
J’en ai parlé avec Julien qui est assez sceptique. Lui n’a pas la foi et la religion fait partie de sa vie sociale quand ça l’arrange ! Il est vrai qu’il a gardé des liens avec ses amis scouts, et qu’entre eux subsiste une solide camaraderie. Je dirai presque que c’est une petite « maçonnerie » !
Tu sais, moi non plus, je n’ai pas cette croyance en Dieu et cette pratique religieuse que tu sembles avoir, ainsi que toutes les autres dames du groupe paroissial.
Je t’avoue que je ne sais même pas si je crois, et en quoi d’ailleurs ? Je ne sais plus. Quand j’étais enfant, bien sûr j’avais peur du Diable et du bon Dieu. Maintenant, tu sais, à mon âge...
Enfin, Julien m’a fait toute une théorie sur le danger d’attraper des virus et des microbes dans ces milieux pauvres et il m’a donné un tas de conseils ! C’est tout juste si je ne dois pas partir masquée et gantée de latex ! Lui les pauvres ça ne l’intéresse pas !
Rendez-vous donc samedi 20 décembre pour cette petite fête et comme convenu, je ferai porter les différents plats à la paroisse en début d’après-midi .À bientôt ma chère,
Je t’embrasse
Cybèle d’Albye
P.S. J’adresse aussi un petit mot au Père pour lui confirmer mon accord.
Lettre de Cybèle au Père Gérald.
Le … novembre 1999.
Mon Père,
Je vous remercie de m’avoir invitée à votre réunion où j’ai rencontré quelques amies de la paroisse.
J’avoue être un peu inquiète à l’idée de participer à votre fête de charité.
D’après les témoignages que j’ai entendus cette après-midi, il y a vraiment un problème à Paris avec tous ces gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté comme vous dites, une expression à la mode qui ne m’interpelle pas spécialement !
Je ne puis vous garantir que je continuerai par la suite à apporter ma collaboration et ma présence à votre équipe. Je suis de santé fragile et la misère me fait peur ! Toutefois, comme vous le savez bien, mon soutien matériel vous est acquis.
Je n’ai pas votre foi, ni celle d’Yolande, Odette et Jacqueline et les autres dames. Néanmoins, pour vous être agréable, je vous le promets, vous pouvez compter sur moi, tout au moins samedi.
J’espère vous avoir à dîner prochainement pour fêter l’entrée dans le troisième millénaire. Faites-moi connaître vos dates !
Julien se joint à moi pour vous exprimer toute notre sympathie et nos respectueuses salutations.
Cybèle d’Albye
Lettre de Cybèle à sa sœur Hélène.
Paris, le dimanche 21 décembre
Ma chère Hélène
Je suis rentrée exténuée, à l’issu de la fête paroissiale du samedi 20 décembre ! C’était la première fois que je pénétrais dans cet univers, que je ne connais pas et que je ne souhaite pas fréquenter. Faire un chèque de temps en temps, c’est plus dans mes cordes ! Toutes mes amies, Yolande en tête ont l’air de nager comme poisson dans l’eau dans ce monde.
Ce qui m’a surtout choquée, c’est l’odeur ! Oui, vraiment « la pauvreté a une odeur », et par bonheur j’avais un petit flacon de parfum dans mon sac