Viens, on part !: Roman
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À propos de ce livre électronique
Vénus et Rafaella n’auraient jamais songé voyager jusqu’en Italie sans leurs parents. Ces vacances, elles les imaginaient pour quatre. Mais après leur disparition tragique et alors qu'elles n'ont plus aucune famille, elles découvrent l’itinéraire préparé avec soin par leur père, une liste d’hôtels réservés et quatre enveloppes correspondant aux quatre étapes du voyage. Une surprise, sans doute, qu’il leur réservait. Il n’en faut pas davantage pour convaincre les jumelles complices de prendre la route.
Leur périple prend l’allure d’un road-movie : elles rencontrent Michel et Liliane, deux motards bien trop vieux pour se rouler des pelles mais qui ne perdent aucune occasion de se donner en spectacle, ainsi que Victor, quadragénaire dépressif qui tente de se suicider en se jetant sous leurs roues. Ce pot-de-colle égoïste et encombrant ne les quittera plus.
Les révélations tombent au rythme des enveloppes jusqu'à ce que les deux jeunes filles aient reconstitué un puzzle inattendu.
Découvrez ce roman road-movie sur les traces des parents de Vénus et Rafaella qui les mènera de surprises en surprises !
EXTRAIT
Nos parents ne possédaient pas grand-chose, mais lorsque nous avons vidé l’épicerie, nous avons trouvé un petit coffre sous le comptoir. Il contenait la recette d’une quinzaine. Nous avons convenu d’utiliser cet argent à des fins futiles et purement égoïstes. Nous nous sommes installées à même le sol, devant le coffre, et nous avons dressé une liste sur le vieux carnet de maman. Chacune a proposé une idée. Saut en parachute, week-end shopping, soirée Cirque du Soleil, tournée des festivals en été, après-midi thalasso, notre liste comprenait une dizaine d’envies. À partager entre sœurs et à consommer sans modération. Puis, Vénus a proposé un voyage à Barcelone. « Nous avons déjà prévu un voyage, tu te souviens ? » lui ai-je rétorqué. « Tu crois qu’on pourrait le faire sans eux ? ». La question est restée suspendue entre nous jusqu’à ce que je prenne la main de ma sœur, « Oui, je crois que nous devons partir pour l’Italie ».
À PROPOS DE L'AUTEUR
Marie-Pierre Garet - J'aime les histoires, celles qui font vibrer et s'entêtent à nous poursuivre, même quand la dernière page est tournée. Cela me vient sans doute de ma grand-mère, sourde-muette, qui inventait des histoires et nous les racontait avec ses mains. Cela durait des heures, c'est du moins le souvenir que j'en conserve, et nécessitait que ma sœur et moi nous laissions aspirer et plonger sans réserve dans d'autres mondes ou d'autres vies. J'ai perdu l'usage des mains pour raconter, je me contente donc des mots.
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Avis sur Viens, on part !
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Aperçu du livre
Viens, on part ! - Marie-Pierre Garet
Viens, on part !
Marie-Pierre Garet
Viens, on part !
Roman
LE-LYS-BLEU-logo-revisité.png© Lys Bleu Éditions – M. P. Garet
ISBN : 978-2-37877-340-3
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Angie rêvait d’une nouvelle valise. La sienne gisait dans son grenier, sous un voile de poussière qui ternissait son rouge vermeil. Un pur produit des années 70 flétri par l’abandon.
Dans son sommeil, elle était apparue aux portes de la Toscane, sa valise rouge à la main, sa jolie robe fleurie flottant au vent. Le matin avait repoussé les clichés et l’avait rendue à la raison. Tandis qu’elle servait son café à Paolo, elle s’interrogeait. La valise n’était-elle pas trop usagée, passée de mode ? Comme elle, à la veille de son quarante-quatrième anniversaire. Elle s’était découvert un premier cheveu blanc quelques jours plus tôt.
Paolo s’inquiéta de son silence inhabituel. Angie se levait toujours d’un bond, débordante d’énergie, commentait dès l’aube les informations des journaux, la météo ou son programme de la journée. Rares étaient les jours d’humeur maussade. « Tu veux que nous allions au cinéma ce soir ? ». Elle déclina. « Que nous invitions les filles à dîner ? ». « Non, pas aujourd’hui ». Angie se sentait fatiguée, elle avait mal dormi. Paolo l’embrassa, il devait partir travailler. Sur le pas de la porte, il hésita. « Tu veux que je reste ? ». Elle se reprit. Le sourire d’Angie éclairait son visage et marquait ses pattes-d’oie qu’il trouvait si charmantes. « Ne sois pas ridicule, tout va bien ! Allez, ouste ! ». Elle le balaya des mains, l’enjoignant à quitter les lieux.
Une fois seule dans la maison, elle monta au dernier étage, emprunta l’escalier de bois dont les marches menaçaient à tout moment de céder et siffla pour faire fuir les souris. Tout au fond, sous la pente de toiture, elle se pencha sur la relique. Le cadenas était ouvert. Elle s’en félicita, elle ignorait où se trouvait la clé. À l’intérieur de la valise, Angie retrouva les vieilles nappes qu’elle avait cherchées en vain à l’occasion de la communion de Vénus et Rafaella. À l’époque, elle avait fini par les considérer perdues.
La valise fit l’objet d’un nettoyage de printemps, mais le cuir, même lustré, marquait toujours son âge. Elle paraissait si petite, déposée sur la table de la cuisine. Jamais Angie ne parviendrait à y glisser les tenues nécessaires à deux semaines de vacances en Italie. Et les vêtements de Paolo ? Où pourrait-elle donc les ranger ? Angie soupira.
Ils avaient tergiversé longtemps avant de proposer le voyage aux jumelles. Un premier périple familial alors que Vénus et Rafaella venaient de fêter leurs 24 ans. Un événement qui risquait d’être unique. Déjà, elles avaient quitté le nid et démarraient leur vie d’adulte. Une chance qu’elles aient accepté de les accompagner. Angie s’en réjouissait et Paolo n’avait pas tardé à préparer l’itinéraire avec précision. Chaque soir, il le relisait et le complétait.
Angie rangea la vieille valise dans un coin de la pièce et décida d’éplucher les pommes de terre. Cuisiner l’apaisait toujours. Au fil des pelures qui tombaient de son économe et se répandaient sur la nappe lustrée, elle jetait des regards dédaigneux sur la valise. Décidément non, elle ne l’emmènerait pas en Italie.
En fin de journée, lorsque Paolo rentra de l’épicerie, il s’installa à la table de la cuisine et elle lui présenta son café, accompagné d’une publicité Auchan. En page quatre, un set de trois valises à roulettes, légères mais solides, bleu azur, chics et pratiques, pour un prix modique. Angie laissa son mari observer les détails de l’annonce et lui glissa, alors qu’elle prenait place à ses côtés : « Il y a des promos, ce serait bien d’en profiter ». Paolo ne se fit pas prier. « Si c’est tout ce qu’il te faut pour retrouver le sourire, nous irons vendredi ! ». Angie posa la tête sur l’épaule de Paolo et pressa le bras de son mari. Il se dégagea pour mieux enlacer sa femme.
Le vendredi, sur la route d’Auchan, Angie jouait avec son alliance. Paolo avait choisi les nationales pour se rendre au Centre Commercial. Le soleil se dévoilait et se reflétait dans les flaques d’eau que l’averse de la nuit avait laissées. De temps en temps, Paolo prenait la main de son épouse. « Ne t’inquiète pas, ce voyage sera parfait ».
Angie rêvait de sa valise, de ses vacances avec ses filles et son mari, rien ne devait lui gâcher son plaisir. Si ce n’était un camion, une route glissante et un chauffeur pressé. Le bruit du choc résonna longtemps contre les parois des bâtiments voisins. La foule s’attroupa autour de la carcasse pliée. Le lendemain, un article complet fut consacré à l’accident. Cette route était réputée dangereuse et chacun déplora que le nombre de décès annuel fût encore augmenté.
Blog de Vénus/Rubrique Voyage/dimanche 5 juin
Jour J-1. Il était temps, c’était annoncé, l’arrivée de juin rimait avec l’ouverture de cette nouvelle rubrique sur mon blog : Voyage en Italie. Je ne pensais pas inaugurer cette page avec autant d’émotions, une certaine peur au ventre, aussi.
Demain, le grand départ ! Chers lecteurs, amis, voisins, vous pourrez suivre chaque étape de ce périple que j’entreprends avec Rafaella. Vous vous en doutez, nous dormirons mal cette nuit. Ce voyage à quatre, c’était le projet de nos parents, leur rêve. Nous le ferons à deux… Nous essaierons d’être à la hauteur et d’en pro-fi-ter ! Pas question de larmoyer. Les routes n’ont qu’à bien se tenir !
Rafie maîtrise notre itinéraire, je suis en charge de tout vous raconter. J’étais toute désignée pour cette tâche, vous connaissez mon addiction aux écrans, mon portable est mon meilleur ami et grâce à mes talents de narratrice (que je tenterai d’élever au rang de mon humilité), cette rubrique sera alimentée ultra régulièrement, heure par heure, que dis-je, voyons grand, voyons loin : minute par minute !
Le véhicule de Rafie nous a lâchées, il y a deux jours. Nous nous sommes rabattues sur ma Fiat 500 rouge et blanche. Elle est tip-top lookée pour notre aventure. Un peu petite toutefois pour accueillir ma grosse valise, ma seconde valise, mon sac de voyage et le sac à dos de ma sœur. Je lis dans vos pensées… non, je n’ai pas pris ma garde-robe, à peine la moitié de mon dressing et j’ai dû renoncer à trois paires de chaussures, mes valises les régurgitaient ! Le sac à dos de Rafie a atterri sur le siège arrière…
Ce soir, nous dormons ensemble, dans la maison de nos parents, point de départ sur le carnet de bord de notre père. Je vous poste une photo de la Fiat débordante. Elle est bien rangée dans le garage, n’attend que nous pour démarrer.
Papa, Maman, nous penserons à vous à chaque kilomètre !
À nous l’Italie !
Raffaella
La salle de bains est un peu vieillotte. Petite aussi. Comme la maison d’ailleurs. Une maison de rangée avec garage, un must pourtant dans le quartier. Sans doute le seul luxe de l’habitation. Mes parents en étaient fiers. Nous devrions nous décider à la vendre. Mais Vénus et moi ne nous résignons pas encore. On a déjà liquidé l’épicerie, rien que ça, ça nous a épuisé. Alors, pour la maison, on verra plus tard. Après le voyage.
Nous avons dormi dans notre chambre d’adolescentes. Nos lits étaient faits. Maman ne supportait pas de voir les matelas dépouillés. Vénus et moi avons discuté tard dans la nuit, de tout et de rien. De rien surtout, de longs silences ont ponctué nos bavardages. Ma sœur dort encore, je me suis faufilée dans la salle de bains. Le dos contre la porte, je redécouvre les lieux. Mes parents avaient choisi un carrelage bleu clair pour recouvrir les murs. Même à la fin des années 90, ce n’était plus tendance. Mais de ce que j’en sais, c’était de la récup’, un reste qu’un copain de mon père lui avait filé contre des courses gratuites à l’épicerie. Je n’avais que six ans, mais je me souviens parfaitement des mains de papa qui se frottaient d’aise devant les caisses de carrelage empilées.
Je ne le voyais pas lorsque je vivais ici. Mais aujourd’hui, en ouvrant la porte de la salle de bains, c’est une évidence. Cette pièce ressemble à une boîte, juste éclairée d’une petite lucarne. Une boîte bleu clair qui me donne envie de retourner vite fait dans mes draps encore chauds. Avant, la salle de bains, c’était le travail de mon père. Il avait placé les carrelages, un à un, pendant deux jours. Ensuite, il y avait eu l’inauguration, un bain moussant pour Vénus et moi, et une photo pour le souvenir. J’avais plaqué deux mèches de cheveux sur mes seins inexistants parce que ça ne regardait personne, surtout pas le cliché qui allait les immortaliser. Aujourd’hui, tout me revient. Mais rien n’a la même saveur. Un trait de moisissure s’est insinué le long de l’évier. La pièce me paraît fatiguée et défraîchie, comme une vieille amie qu’on n’a plus vue depuis des lustres.
J’ouvre l’armoire, mon shampoing est resté dans mon sac, déjà prêt à partir et planqué dans la Fiat de Vénus. Je voudrais me laver les cheveux, pour être certaine d’être bien réveillée. L’armoire m’offre l’embarras du choix. Savons senteur muguet, lavande ou rose, shampoings aux huiles d’argan ou d’olive, gel-douches odeur marine ou musc, le tout disposé en rangées, par genre. Dans un coin, un fond de gel-douche coco dénote, j’ai dû l’abandonner lorsque j’ai quitté la maison. Ces piles de serviettes repassées, pliées au carré, les gants de toilette assortis, classés par couleurs, les coupe-ongles, ciseaux, autres ustensiles, dans une boîte, les vernis, rouges à lèvres, fard à paupières, dans une autre, la jumelle de la première, le tout positionné avec une exactitude d’horloger, tout ça, cette armoire et son contenu, c’est mon père.
Paolo Marcoli, inventeur de l’ordre et de la rigueur.
Dans son épicerie, les conserves s’alignaient, placées au millimètre près. Les fromages s’exposaient tranchés, cœurs appétissants tournés vers les clients et les légumes brillaient d’avoir été lustrés un à un, à l’aide d’une peau de chamois uniquement dédiée à cet usage. Il se levait à cinq heures, relevait le volet du magasin, réceptionnait les marchandises et les rangeait une à une, chaque jour de chaque semaine, hormis le dimanche. Il était parti de rien et comptait sur ses conserves pour arriver quelque part. Elles ont fini aux bonnes œuvres, lorsqu’il a fallu vendre l’épicerie. Ça n’a pas allégé notre chagrin.
J’ai arrêté de pleurer depuis quelques semaines. Il était temps. Je commençais à m’assécher, des rides se sont formées autour de mes yeux. L’eau s’est écoulée de mon corps jusqu’à ce que ma peau ressemble à un désert aride. Mes cheveux ont suivi le mouvement, mes mains courent sur les longueurs filasse. Ma tignasse bouclée, c’est ce qui a retenu les yeux de David. Je devrais la soigner. À force de fréquenter une morte-vivante, il finira par filer avec une enjôleuse. Ou simplement une fille drôle et sympa. Comme je l’étais, il y a six mois. Il ne m’aura pas connue longtemps insouciante, un mois après notre rencontre, je perdais mes parents. Avait-on seulement eu le temps de s’accrocher l’un à l’autre ? J’ignore pourquoi il est toujours dans les parages. Nous nous voyons presque quotidiennement.
Je devrais lui téléphoner, il attend sans doute mon appel. À cette heure, il monte dans le métro, direction l’école et ses étudiants. David enseigne l’anglais à des gamines de 17 ans qui boivent ses paroles. Dans dix minutes, il quittera la rame et se dirigera vers l’entrée du bâtiment scolaire. Il passera le porche à 8 heures précises, comme tous les matins. Ma montre indique qu’il me reste un peu plus de quinze minutes. Si je l’appelle, je n’aurai plus assez de temps pour ma douche et ce dont j’ai besoin, là, tout de suite, c’est de l’eau chaude qui coule sur mes cheveux et le long de mon dos. J’empoigne le fond de gel-douche coco. Ça me rappellera des souvenirs. Bizarrement, lorsque j’ai quitté la maison, j’ai changé de marque. L’odeur Coco signifiait « plage et soleil », pas « je suis grande et je m’assume ». Je ferais mieux de m’activer. Ensuite, je réveillerai Vénus qui dort dans les bras de Morphée et qui aurait pu s’appeler comme ça d’ailleurs. Morphée ou Vénus, on n’est pas à une divinité près.
Blog de Vénus – Rubrique Presque un journal intime
Histoires de prénoms
Certains d’entre vous m’ont déjà questionnée à ce sujet, d’autres se sont toujours abstenus, mais en meurent d’envie. Il est temps pour moi de vous révéler l’impensable : oui, je l’avoue, j’ai toujours détesté mon prénom. Qui me blâmerait ? Vénus pour la Vénus de Milo ou la Vénus de Botticelli (Vénus Williams n’a rien à voir là-dedans, ma mère ignorait son existence). Peu importe, même à 24 ans, c’est toujours aussi lourd et encombrant. Maman prétendait que c’était le plus beau prénom au monde (avec Rafaella évidemment). Facile quand on s’appelle Arcangela et que tout le monde vous surnomme Angie. En vérité, maman adorait les artistes florentins et rêvait de revoir la Galerie des Offices. Un jour, elle m’aurait emmenée et j’aurais compris. Des années à me le promettre. Mais quitter l’épicerie ne se faisait pas du jour au lendemain. Un jour de fermeture et les clients auraient pu s’échapper, il fallait les garder à l’œil, les dorloter. La visite de la Galerie des Offices s’en est trouvée reportée d’année en année et entre-temps, j’ai dû composer avec un prénom que je déteste. Compatissez, chers amis, compatissez.
Vénus et Rafaella, ça, c’est pour la version officielle. Viennent ensuite