Le temps passé avec vous fut bref mais tordant
Par Robert McBryde
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À propos de ce livre électronique
À propos de l'auteur... et du livre
Récompensé à perpétuité par sa progéniture par le prix du vêtement d'hiver le plus embarrassant, ainsi que par une médaille d'or pour l'accent le plus bizarre dans une langue étrangère, Robert McBryde s'est tourné vers la création d'histoires pour trouver du réconfort. S'inspirant de récits personnels préparés pour un auditoire de radio, Le temps passé avec vous fut bref mais tordant est imprégné d'un humour frénétique teinté de nostalgie et de tristesse à vif. Dans une série de vignettes couvrant deux continents et sept décennies, l'auteur présente aux lecteurs une troupe de personnages de la vie quotidienne, dont les emblématiques Pesticide Pete et Barbecue Billy, ainsi qu'une série d'incidents décalés, à la fois hilarants et déboussolants. Parfois comparé à David Sedaris pour sa satire autobiographique acerbe, Robert McBryde est avant tout un maître maniaque de l'autodérision dont les récits provoqueront des fous rires, et peut-être quelques larmes.
Robert McBryde
A geezer launching his first book, tossed like a message in a bottle into an uncharted turbulent sea, Robert McBryde is a professional translator with a master's degree in English literature and a passion for the arts of the stage. A product of Toronto, Ontario, educated in both Canada and Switzerland, he taught literature and theatre at the junior college level in Quebec City for 35 years and worked as a writer/ broadcaster for CBC radio for 10 years, honing his storytelling skills through a weekly recounting of absurd yet poignant tales of everyday life, which a number of listeners urged him to publish. Crafted in his current home in Dijon, France, My Time With You Has Been Short But Very Funny is a belated response to those requests, and includes an array of other humorous and quirky sketches besides. Awarded the Most Embarrassing Winter Garb Award in perpetuity by his offspring, along with a gold medal for the weirdest accent in a foreign language, Robert McBryde has turned to storytelling for solace. He hopes that his two sons, who figure prominently in these narratives, will not find his tales to be flat seltzer.
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Aperçu du livre
Le temps passé avec vous fut bref mais tordant - Robert McBryde
Copyright © 2024 by Robert McBryde
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Tellwell Talent
www.tellwell.ca
ISBN
978-1-77941-705-3 (Hardcover)
978-1-77941-703-9 (Paperback)
978-1-77941-704-6 (eBook)
Pour Anne, Dan et David, avec tout mon amour et ma gratitude
Tout est drôle; le plus grand sérieux est drôle; même la tragédie est drôle.Et je pense que ce que j’essaie de faire lorsque j’écris, c’est de saisir l’absurdité de nos actes, de notre comportement et de nos paroles dans toute leur réalité. –Harold Pinter
Table des matières
Bref mais tordant
Radio-activité
Les Russes sont à nos portes
Le miracle permanent
Je suis ton Père
Je vais aller en enfer… Je te le jure!
Les figures familiales mythiques
Les chiens ne font pas des chats
Les fous du volant
Les larmes de Noël
Être seul avec papa
Intimider et être intimidé
Fourre-le en dessous de ton kilt
Un club exclusif
Vision excrémentielle
Promesses brisées, rêves brisés, cœurs brisés
Voisins bruyants
Excuse my French
Écran de fumer
Virage viral
Perturbations et mouvements sociaux
Nous sommes désolés Oncle Albert
Remerciements
À propos de l’auteur…et du livre
La fin est au début
Bref mais tordant
Avant même que mon beau-père slovaque n’atteigne mon âge, il répétait avec une régularité rituelle : « Dans peu de temps, je serai mort » (« Za krátky čas budem mŕtvy. »)
Son refrain a pris un sens particulier pour moi au cours des trois dernières années, et notamment depuis que j’ai atteint l’âge de 70 ans. La dystopie surréaliste qui a soudainement émergé des profondeurs d’un royaume de cauchemar préternaturel en mars 2020 a servi à mettre en évidence la fragilité et l’évanescence persistantes de la vie elle-même.
Aujourd’hui, chaque fois que j’écoute un de mes airs préférés, que je revois un film aimé ou que je relis un livre ou un article qui me tient à cœur, je suis profondément conscient que c’est peut-être la dernière fois. Une expérience bizarre et troublante, à la fois profonde et étrangement banale.
Les souvenirs sont bien sûr consciemment déclenchés par une sorte de bouton de rembobinage mental, ou arrivent d’eux-mêmes, stimulés par des images, des sons ou des odeurs. Le rembobinage des souvenirs fait partie de mon dernier tour de piste ritualisé.
J’ai eu une fois un étudiant qui m’a écrit à la fin du trimestre : « Le temps passé avec vous fut bref mais tordant ». Une épitaphe appropriée pour moi à partager avec vous.
Dijon, novembre 2023
Radio-activité
Le coup de téléphone est tombé comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu en ce lundi après-midi glacial de mars 1987. Le producteur de l’émission de l’après-midi du réseau anglais communautaire de Radio Canada à Québec m’a appelé pour savoir si j’aurais envie de faire une chronique hebdomadaire des arts et du cinéma. « Ce sera plus un aperçu qu’une mise à jour », m’a-t-il expliqué, limpide comme un sphinx, tout en m’informant que le chroniqueur précédent avait « séché », souffrant de l’équivalent en ondes d’un trac en phase terminale. Le producteur avait entendu quelques interviews que j’avais réalisées sur les productions théâtrales de Québec et avait décidé de me lancer dans la brèche de la programmation.
Et c’est ainsi que débuta une décennie d’amour avec la radio en tant que narrateur.
Quelques jours plus tard, j’ai rencontré le producteur, un fumeur à la chaîne, agité, au nom prédestiné de Martin Stringer, dans les studios de la CBC, qui se trouvaient à l’époque au sous-sol de l’Hôtel des Gouverneurs, dans le centre-ville de Québec. Les locaux de cette auguste succursale du radiodiffuseur national du Canada étaient un endroit malodorant, enfumé et encombré, où les employés pressés tournaient en rond dans les cabines, l’air fourbu lorsqu’ils émergeaient de la fumée de tabac qui enveloppait leur royaume souterrain. Pensif, tirant sur son perpétuel clou de cercueil, Martin s’est immédiatement excusé pour la puanteur miasmatique – autre que la fumée de cigarette – qui imprégnait le lieu de travail, affirmant que des odeurs nauséabondes non identifiées s’étaient infiltrées dans les studios depuis l’hôtel situé en haut. « Mais nous nous en occupons, a-t-il ajouté avec assurance. La direction de la CBC nous a demandé de tenir un registre des odeurs ».
Après des explications détaillées sur l’odeur qui régnait, Martin s’est penché sur le sujet qui nous occupait. « Nous couvrons toute la province du Québec, à l’exception de Montréal, alors chaque vendredi après-midi, tu vas parler de toutes les grandes expositions de musée, les pièces de théâtre et les films que l’on peut voir sur l’ensemble de notre réseau ». Il m’a ensuite remis un classeur rempli de numéros de téléphone et de communiqués de presse et m’a précisé que je devais choisir les événements les plus attrayants, contacter les sources par téléphone et rédiger mon propre scénario, avec des questions pour l’animateur de l’émission, sur ces blocs de papier jaune doublés de papier carbone pour faire des photocopies.
Je me suis vite rendu compte que pour fournir des « mises à jour » divertissantes et informatives, l’invention et la ruse étaient à l’ordre du jour. En m’inspirant des premiers diffuseurs mythiques de matchs de base-ball, qui concoctaient des comptes rendus « en direct » à partir de bulletins d’information, je décrivais des productions et des expositions dans des lieux éloignés comme si j’y avais assisté, ébloui et enthousiaste. Mon premier complice dans ce subterfuge de pointe fut un animateur et écrivain-radiodiffuseur à l’esprit merveilleux, à qui je confiai mon impossible mission de mise à jour. « Pas de souci, déclara-t-il. Il suffit d’allumer le bazooka à foutaise et de le programmer pour qu’il se transforme en brume fine ».
Comme Leonard Cohen l’a dit un jour à propos de la poésie de Federico Garcia Lorca, « C’était un univers que je comprenais parfaitement et je me suis mis à le poursuivre ».
Les jeunes chercheurs et écrivains-radiodiffuseurs avec lesquels je travaillais avaient toutes sortes de tâches hétérodoxes. Peu de temps après que j’ai commencé à produire des mises à jour, le brillant animateur et écrivain-radiodiffuseur Bill Brown et son collègue incisif et intelligent Marcel Calfat ont été chargés de s’occuper du chien décédé du producteur exécutif, Muggins, dont ils ont transporté le cadavre jusqu’à la communauté de la rive sud de Charny, malgré les rigueurs de la rigidité cadavérique, pour le faire fondre dans la fabrique de savon de cette ville charnier.
En raison de la polyvalence exigée par la station, j’ai fini par devenir animateur remplaçant, prenant un plaisir particulier à pimenter les bulletins boursiers (qui ont rapidement été supprimés) et surtout les prévisions météorologiques. « Le croc glacial et les chicaneries du vent d’hiver mordront et souffleront sur la communauté de Sept-Îles », disais-je en plagiant sans vergogne Shakespeare… jusqu’à ce que les grands manitous de la CBC me disent d’arrêter les conneries.
Au cours de sa trop brève saison estivale, la province de Québec accueille un vaste éventail de festivals. Avec un producteur aimable, doux et patient, Glenn Wanamaker, j’ai sillonné le vaste territoire du réseau communautaire, interviewant des dramaturges et des artistes, avant de me concentrer sur le festival d’été de Québec, au cours duquel nous avons interviewé un large assortiment d’artistes hippies gériatriques et de rock and rollers drogués. La ville de Québec a toujours été le dernier refuge du rétro.
J’ai dû apprendre à mener des interviews affables et, plus difficile encore, à couper et à raccorder des bandes magnétiques, condensant des conversations de 45 minutes en une série de reportages de 5 minutes et d’extraits sonores de 30 secondes. À l’époque, le montage des émissions se faisait à l’aide d’une lame de rasoir et de ruban adhésif, et j’ai la petite capacité musculaire d’un gorille de 400 livres. Mais le technicien du son de la CBC de l’époque, Alain Gariépy, un gars jovial et expansif qui ne manquait pas de confiance en lui, n’avait guère de pitié pour mes luttes herculéennes avec ce précurseur primitif du copier-coller. « Tout s’apprend, Bobby, a-t-il affirmé. – Même l’humilité, Alain »? a répondu une collègue à la langue bien pendue, Patricia Field, qui a été témoin de mes tribulations sanglantes en matière de découpage de doigts.
J’ai fini par trouver ma place à la radio... ou, plus exactement, on me l’a imposée. En tant qu’animateur remplaçant, je racontais parfois des anecdotes sur ma famille et les absurdités de notre vie dans une banlieue de Québec. Une productrice, Hardeep Dhaliwal, a suggéré de transformer ce récit ad hoc en une chronique hebdomadaire, ce que son successeur, l’impertinente Jill Walker, a approuvé et encouragé. C’est ainsi que j’ai eu l’immense privilège de travailler avec l’animatrice de Breakaway de l’après-midi, l’irrépressible Jacquie Czernin, qui me présentait comme « Breakaway Bob » et lisait les questions scénarisées que j’avais préparées pour elle comme si elles avaient surgi spontanément et intégralement de sa propre tête. Pour citer à nouveau Leonard Cohen, Jacquie « est née avec le don d’une voix d’or » et elle utilisait cet atout liquide pour séduire tout et tout le monde : enfants, animaux domestiques, objets inanimés, personnes de tous âges, formes, tailles et sexes; tout le spectre des auditeurs, y compris les plus invasifs et les plus bizarres, étaient bel et bien conquis.
Mon histoire préférée à propos de Jacquie a été racontée par Bill Brown, un témoin oculaire. L’émission avait l’habitude de distribuer régulièrement des billets, comme le font souvent les stations de radio, et les heureux gagnants venaient au studio pour récupérer leur précieux butin. L’un de ces auditeurs chanceux a été accueilli par Jacquie, qui s’est immédiatement mise à gazouiller mélodieusement, partageant avec le visiteur les menus détails de sa journée. « Je n’ai pas réussi à me raser les jambes aujourd’hui, mais j’ai pris le café et les croissants les plus succulents et j’ai écouté ce magnifique morceau écrit par mon bel ami, M. le compositeur... a-telle chantonné, tandis que le lauréat, tout rouge, vacillait misérablement devant la porte de son bureau. Il y eut une longue pause.