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Adélaïde au couvent: de Québec à Lamèque
Adélaïde au couvent: de Québec à Lamèque
Adélaïde au couvent: de Québec à Lamèque
Livre électronique178 pages2 heures

Adélaïde au couvent: de Québec à Lamèque

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À propos de ce livre électronique

Après avoir embauché trois gouvernantes, le père d’Adélaïde, notaire à Québec, n’en peut plus : Adélaïde ira pensionnaire au couvent de Lamèque. Pour une jeune fille qui a habité toute sa vie dans une grande ville, le village de Lamèque, c’est le bout du monde ! C’est tellement loin que le train ne s’y rend même pas. À son arrivée, les pensionnaires la boudent. Qui était Eugénie Losier, la pensionnaire qui a occupé le lit d’Adélaïde ? Comment est-elle morte ? Pourquoi apparait-elle dans les rêves d’Adélaïde ? Heureusement qu’il y a la musique et les vacances qui approchent...
LangueFrançais
Date de sortie27 sept. 2022
ISBN9782897502898
Adélaïde au couvent: de Québec à Lamèque
Auteur

Chantal Duguay Mallet

La rumeur voudrait que Chantal Duguay Mallet, native de Lamèque, soit une enseignante de petite enfance hors pair. Des preuves à l’appui ? Plusieurs prix d’excellence : ministère de l’Éducation du NB, Association des enseignants de langue française du NB, et un prix national pour l’enseignement au primaire. On murmure aussi en coulisses que c’est une femme de théâtre. Là aussi, des preuves : elle a rédigé et/ou mis en scène plus d’une cinquantaine de textes dramatiques pour la jeunesse. Pour ceux et celles qui n’ont pas la chance de se retrouver dans sa salle de classe, il faudra savourer Sous mon lit, son premier album illustré pour la petite enfance, publié en 2013 chez Bouton d’or Acadie.

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    Aperçu du livre

    Adélaïde au couvent - Chantal Duguay Mallet

    Illustration en couleurs : Un carnet rouge.

    Prologue

    En regardant au loin, elle aperçoit la maison de ses parents. Comme elle aimerait y être. La chaleur du poêle à bois, le craquement de la chaise berceuse de mémère et la douceur de sa mère lui manquent terriblement.

    Il fait tellement froid. Elle n’arrive plus à se réchauffer. Depuis combien de temps est-elle enfermée ?

    Son journal lui glisse des mains et tombe par terre.

    Elle essuie les larmes sur ses joues. Elle sent le froid engourdir ses mains et ses pieds.

    Elle a vraiment sommeil.

    Une dernière fois, elle tire sur la poignée de la trappe : rien ne bouge.

    Épuisée, elle s’enroule dans un vieux rideau en velours rouge, se recroqueville à même le sol et ferme les yeux.

    Mai 1942

    Le départ d’Édouard

    Les lilas en fleur embaumaient les jardins. Un soleil radieux réchauffait la ville de Québec. Les enfants jouaient dans les ruelles pendant que leurs mères jasaient sur les balcons. En cette belle journée de printemps 1942, on pouvait presque oublier que la guerre faisait rage en Europe.

    Adélaïde salua son amie Violette avant de s’élancer vers sa maison, son étui à violon à la main. Elle avait tellement hâte d’annoncer à sa mère qu’elle avait été choisie pour jouer au récital de l’Action de grâce de son école. Adélaïde jouait du violon depuis l’âge de six ans. En plus des leçons qu’elle avait chez les Ursulines, elle s’exerçait chaque jour à la maison, car elle adorait jouer du violon.

    En entrant en trombe, elle lâcha la porte, qui claqua.

    – Zut, s’exclama-t-elle. Saperlipopette de porte qui claque tout le temps ! Je vais encore me faire gronder.

    S’arrêtant près de la porte, elle prit une grande inspiration en redoutant la remontrance, qui ne vint pas. Mais où était sa mère ? Ce n’était pas dans son habitude de ne pas être là à son retour de l’école. Elle l’accueillait toujours avec un large sourire en la serrant très fort, sauf les jours où la porte claquait. Intriguée, Adélaïde prit son violon et avança lentement dans l’entrée. La demeure de la Grande Allée était étrangement silencieuse. Trop silencieuse !

    Soudain, elle entendit quelqu’un pleurer. Elle alla discrètement s’assoir en haut de l’escalier pour voir ce qui se passait dans le salon. Sa mère, assise dans son fauteuil près de la cheminée, sanglotait pendant que son père, le grand maitre Carrier, faisait les cent pas. Il semblait très en colère.

    – Il est hors de question que tu quittes cette maison. Tu vas retirer cet uniforme immédiatement et retourner à l’université.

    Adélaïde ne pouvait pas voir son grand frère, mais elle l’entendit répondre :

    – Personne ne me fera changer d’avis. Même pas vous, Père, malgré tout le respect que je vous porte. J’ai signé tous les documents aujourd’hui, et comme je suis majeur, vous ne pouvez pas m’en empêcher. Je partirai dès demain pour rejoindre mon régiment, un point c’est tout !

    Adélaïde retint son souffle. Les battements de son cœur résonnaient dans ses tympans. Elle avait sans doute mal entendu. Ce n’était pas possible. Il ne pouvait pas les quitter.

    Elle se leva et courut se réfugier dans la chambre de son frère. Après avoir déposé son étui à violon sur le lit, elle agrippa Napoléon, le vieil ourson brun d’Édouard. Quelques minutes plus tard, des pas s’arrêtèrent devant la porte. Levant la tête, Adélaïde vit son grand frère vêtu d’un uniforme bleu. Elle ne bougea pas et attendit qu’il s’assoie au bord du lit avant de laisser éclater sa colère et sa peine.

    – Pourquoi veux-tu nous quitter ?

    – Je ne veux pas vous quitter, petite sœur. Si j’avais le choix, je resterais ici avec toi.

    – Mais tu as le choix ! sanglota-t-elle.

    Édouard sortit son mouchoir et lui essuya les yeux avant d’expliquer calmement :

    – Tu sais, il y a plein de jeunes hommes comme moi qui partent pour le front.

    – Oui, mais toi, t’es mon frère, ce n’est pas pareil.

    – Je veux défendre notre pays. Tu dois comprendre et me laisser partir. Tiens, je te donne Napoléon. Comme il ne sait pas lire, tu lui feras la lecture de toutes les lettres que je vais t’écrire.

    – Mais, si tu...

    – Chut ! chut ! J’ai bien l’intention de revenir jouer au baseball et faire du bateau sur le fleuve avec toi, affirma Édouard en lui déposant un petit baiser sur le front.

    – C’est vrai, ça ?

    – Je te l’assure, juré, craché !

    En imitant le geste de cracher par terre, Édouard réussit à la faire sourire. Adélaïde sécha ses larmes et se blottit dans ses bras, un peu rassurée par la confiance du jeune pilote. Après un moment, il l’éloigna de lui.

    – Dis, sœurette, est-ce que tu voudrais me jouer une pièce au violon ? J’aime tellement t’entendre jouer.

    Même si elle avait le cœur brisé, Adélaïde sortit son violon de l’étui et l’installa sous son menton. Doucement, très doucement, elle commença à jouer la Lettre à Élise, de Beethoven. Elle savait que c’était la pièce préférée d’Édouard. Bientôt, une douce mélodie remplit la pièce. Monsieur et madame Carrier vinrent les rejoindre pour écouter leur petite fille jouer du violon pour leur fils qui les quittait dès le lendemain.

    Juillet 1942

    Le départ de madame Carrier

    Deux mois s’étaient écoulés depuis le départ de son frère, et Adélaïde avait déjà reçu de lui dix lettres qu’elle gardait précieusement dans une petite boite en bois. Cette fois, il lui écrivait que son régiment quitterait bientôt l’Angleterre pour la France et qu’il avait bien hâte d’être au centre de l’action.

    – Oh, Édouard ! C’est ici, à la maison, qu’il y a eu de l’action depuis ton départ, murmura Adélaïde en terminant la lecture de sa dernière lettre.

    Il y avait eu la mort de Fannie, la chienne de la famille. La belle golden retriever âgée de quinze ans était très attachée à Édouard. Adélaïde était certaine qu’elle était morte d’ennui.

    Puis, leur mère s’était mise à tousser. La toux était devenue de plus en plus tenace. Malgré les médicaments et le repos, le diagnostic était tombé au mois de juin : tuberculose. La maladie qui faisait tellement peur. Même avec tous les bons soins, il semblait à Adélaïde que l’état de santé de sa mère continuait de se détériorer. Une élève de sa classe avait succombé à cette terrible maladie au cours de l’hiver. Adélaïde avait eu beaucoup de peine. Elle ne voulait pas que sa mère connaisse le même sort. Chaque jour, elle priait pour que sa maman guérisse vite.

    Finalement, le docteur Pigeon leur avait annoncé que madame Carrier devait entrer au sanatorium.

    – Au sanatorium ! s’était écriée Adélaïde en apprenant la nouvelle. Vous ne pouvez pas laisser faire ça. Le sanatorium, c’est un hôpital rempli de gens malades qui toussent et qui crachent. Maman ne peut pas aller là. Nous pouvons la soigner à la maison.

    – Tu sais que ce n’est pas possible. Ta mère a besoin de soins spéciaux et de beaucoup de repos. Souviens-toi de ton oncle Marcel : il est revenu guéri. Aie confiance ! lui avait répondu son père.

    Adélaïde rangea la lettre dans le petit coffre de bois avant de descendre rejoindre ses parents pour le diner. Dans l’escalier, elle s’arrêta brusquement. La valise de sa mère était près de la porte d’entrée. Impossible d’échapper à la réalité. Demain, son père et elle iraient conduire sa mère au sanatorium de Trois-Rivières.

    La maison de la Grande Allée allait être tellement grande. Pour la consoler, son père lui avait promis qu’ils iraient à Trois-Rivières tous les dimanches et qu’elle pourrait téléphoner à sa mère deux fois par semaine.

    Aout 1942

    Les gouvernantes

    Maitre Carrier avait tenu parole. Depuis un mois, Adélaïde rendait visite à sa mère chaque semaine et elle devait admettre que celle-ci semblait se porter un peu mieux. Cette constatation rendait la séparation un peu moins difficile, même si Adélaïde s’ennuyait beaucoup de sa maman.

    Son père travaillait beaucoup et madame Bilodeau, la cuisinière, n’avait pas le temps de s’occuper d’une enfant turbulente de onze ans. À la rentrée des classes, en septembre, maitre Carrier décida d’engager une gouvernante.

    – Mais, Père, s’écria Adélaïde en apprenant la nouvelle, je ne veux pas d’une gouvernante. J’ai onze ans, je peux me garder toute seule.

    – Adélaïde, tu dois faire ta part. Je comprends que tu ne sois pas enchantée à l’idée, mais beaucoup de tes amies ont des gouvernantes et s’en trouvent très bien. Elle pourra te tenir compagnie et t’aider à faire tes devoirs.

    – Une gouvernante ! C’est payer une inconnue pour jouer le rôle de maman, et une maman, j’en ai une. Je ne veux pas de gouvernante !

    – Tu n’as pas le choix. J’ai déjà trouvé une personne fiable qui a de bonnes références pour s’occuper de toi.

    Adélaïde quitta la pièce en courant. Elle ne voulait pas de gouvernante. Elle voulait sa maman et sa vie d’avant la guerre même si elle savait bien que ce n’était pas possible. Trop de choses avaient changé.

    Mademoiselle Ernestine, la gouvernante, arriva le lendemain matin.

    – Mademoiselle Adélaïde, faites ceci ; Mademoiselle Adélaïde, faites cela !

    Grande, sèche comme un balai, mademoiselle Ernestine hérita du surnom de la Poule, car la gouvernante avait le bec pincé et ne l’ouvrait que pour critiquer tout ce que faisait Adélaïde. De plus, elle ne se gênait pas pour exagérer les faits lorsqu’elle en faisait le récit à maitre Carrier.

    Un jour, n’en pouvant plus, Adélaïde se glissa dans la chambre de la Poule et déposa un tout petit crapaud sur son lit. La Poule ne la trouva pas drôle, mais pas drôle du tout. Elle émit un petit caquètement avant de refaire ses valises et de quitter les lieux en claquant la porte bien fort.

    Débarrassée de sa gouvernante, Adélaïde courut dehors en riant pour aller jouer avec ses amis.

    – Au revoir, Mademoiselle Ernestine. Votre maman ne vous a donc jamais dit qu’il ne faut pas claquer les portes ? lança Adélaïde en la regardant s’éloigner.

    Ce soir-là, lorsqu’il rentra à la maison, son père n’avait pas du tout le gout de rire en apprenant le départ de la gouvernante.

    – Tu dois te comporter en jeune fille respectable, sinon je devrai prendre les grands moyens et je ne veux pas en arriver là.

    – Qu’est-ce qui peut être pire qu’une vieille gouvernante qui me crie après tout le temps ?

    – Je vais trouver une nouvelle gouvernante. Je t’avertis, ma patience a des limites ! trancha son père.

    Mademoiselle Dolorès s’installa dans la maison quelques jours plus tard. Elle était mielleuse et collante. Chaque jour, elle attendait l’arrivée d’Adélaïde pour l’heure du thé. La gouvernante dégustait des petits gâteaux et des biscuits puis se léchait les doigts en faisant du bruit. Après dix jours, n’en pouvant plus, Adélaïde remplaça le sucre dans le sucrier par une toute petite couleuvre verte. Surprise et affolée, mademoiselle Dolorès tomba à la renverse. Le lendemain, elle quittait les lieux en claquant la porte.

    – Vous devriez apprendre à ne pas claquer les portes, la gronda Adélaïde en la regardant s’éloigner par la fenêtre. Maman n’aurait pas été contente, c’est certain.

    Adélaïde prit son violon et joua en dansant dans le salon.

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