Le dernier Noël

C’est un petit homme de 77 ans, chétif, effacé, solitaire.

Une solitude qu’il supporte de moins en moins, au fil des années qui s’écoulent avec lenteur. Ses journées se ressemblent, monotones, sans attrait, sans distractions, sans contact avec quiconque.

Il s’appelle Pierre Delmas et il n’a plus envie de vivre.

Catherine, la femme de Pierre, s’est éteinte cinq ans plus tôt. Un 25 décembre. Depuis cette triste journée où tout le monde se préparait à la fête, se réjouissait alentour, Pierre n’a cessé de dépérir.

Catherine était toute sa vie, son double, son unique amour. Il l’avait connue à 16 ans, était aussitôt tombé amoureux d’elle et ne l’avait plus jamais quittée.

Ils avaient vécu ensemble chaque instant de leur existence. Ils avaient affronté ensemble les nombreux obstacles qui s’étaient dressés devant eux. Ils avaient combattu ensemble la misère, la cruauté, la guerre. Ils avaient surmonté ensemble les désillusions, la maladie.

Jusqu’à ce mois de décembre où le corps de Catherine n’avait plus eu la force de lutter…

Désormais, rien n’attache plus Pierre à la vie.

Alors que Noël approche, Pierre Delmas touche le fond. Il n’a pas le moindre sou en poche, ne s’est pas nourri depuis deux jours et souhaite quitter son petit appartement sans âme et sans confort.

Le fuir définitivement. Mourir.

Sans Catherine, il n’existe plus.

Il n’est qu’une sorte de zombie agissant par automatisme. Il ne réfléchit plus, n’éprouve même plus de sentiments. Il est devenu un mort-vivant et préfère maintenant supprimer le mot « vivant » de ce terme. Si Catherine était encore là, tout serait différent. Sa présence suffirait à le stimuler. Elle saurait lui donner la force de se battre. Mais seul, sans elle, à quoi bon? Se battre pour quoi? Pour qui?

Pour gagner un peu d’argent, se nourrir, continuer d’exister ? Justement il n’a plus envie de repousser cette issue fatale promise à tous. Il l’attend au contraire avec quiétude. Il l’espère.

Sa maigre retraite lui permet juste de payer le