Les Prisonniers du Temps
Par Fabien Delorme
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À propos de ce livre électronique
Le Temps. Allant toujours de l'avant. Éternel. Nous menant, toujours, sans même le savoir, à la mort. La nôtre. Celle de nos proches.
Le Temps. Nous rappelant nos erreurs passées. Celles sur lesquelles on ne revient pas. Nous faisant imaginer des futurs que nous ne connaîtrons pas.
Un jour, cinq hommes et femmes du quotidien interrompent la course du Temps. En prennent le contrôle. En modifient le cours. Deviennent riches. Retrouvent des proches. Parents, amis, ou amours perdus.
Mais méfiance… Le Temps finit toujours par nous rattraper.
« Les Prisonniers du Temps » est un recueil de 5 nouvelles aux univers différents, mêlant fantastique et science-fiction, pour tous les amateurs d'émotions fortes et tous ceux qui aimeraient changer le cours de leur destin.
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Les Prisonniers du Temps - Fabien Delorme
LES PRISONNIERS DU TEMPS
FABIEN DELORME
FREYJA ÉDITIONS
Copyright © 2022 by Fabien Delorme
Illustration: 1970754590 | Zef Art | shutterstock.com
TABLE DES MATIÈRES
Introduction
Deuxième chance
La Messagère des étoiles
Faudrait pas que ça grandisse
Théo
Au Café des Halles
À propos de l’auteur
Du même auteur
TABLE DES MATIÈRES
Introduction
Deuxième chance
La Messagère des étoiles
Faudrait pas que ça grandisse
Théo
Au Café des Halles
À propos de l’auteur
Du même auteur
INTRODUCTION
Il y a quelques siècles, à l’époque de la Révolution Française, il fallait une journée pour traverser un département. Évidemment, à l’époque, le seul moyen de transport disponible, c’était le cheval.
Depuis, les temps ont changé, les moyens de transport ont évolué, le train est apparu, puis l’automobile, l’avion… De nos jours, il est possible de traverser la France entière en quelques heures, et, en moins de vingt-quatre heures, il est presque possible de faire le tour de la planète en avion.
Oui, les progrès en matière de déplacement ont été fulgurants au cours des derniers siècles, et même des dernières décennies.
Et pourtant…
Pourtant, d’après les théories d’Einstein révélées au cours du siècle dernier, l’univers est constitué de quatre dimensions. Et il y a une dimension sur laquelle nous n’avons aucun contrôle, pas plus que nos ancêtres les plus éloignés n’en avaient : celle du temps.
Nous nous déplaçons dans le temps, certes, mais toujours dans le même sens, du passé vers le futur, et toujours à la même vitesse d’une seconde par seconde. Impossible d’avancer plus vite. Impossible d’aller plus lentement. Impossible de s’arrêter, ou de reculer.
Nous avançons tous, inexorablement, à la même vitesse, vers une destination que nous connaissons tous : notre propre mort. Eh oui, pas joyeux, je sais.
Et c’est pourquoi, tous, à un moment ou à un autre de notre existence, nous avons été pris du désir d’avoir une emprise sur le déroulement du temps.
Car qui n’a jamais rêvé de revenir dans le passé, pour annuler une erreur commise quelques minutes (ou bien quelques années) plus tôt ?
Qui n’a jamais rêvé de connaître le futur, par simple esprit de curiosité, ou plus trivialement, pour s’enrichir en pariant gros sur un événement improbable mais qui, on le sait, finira inéluctablement par se produire ?
Qui ne s’est jamais dit, alors qu’il vivait un moment agréable, qu’il aimerait que cet instant dure à tout jamais ?
Qui n’a jamais regretté de ne pas avoir eu le temps de dire adieu à un proche disparu trop tôt ?
Qui n’a jamais rêvé de changer le cours de l’Histoire ? Ou de vivre dans une époque révolue, en se disant que c’était mieux avant ? Ou simplement de la visiter, comme on visite un pays étranger ?
Bref : qui n’a jamais rêvé de pouvoir changer le cours du temps ?
Évidemment, nous autres, auteurs de fictions, créateurs et raconteurs d’histoires, nous nous intéressons depuis bien longtemps sur le sujet, et apportons nos propres réponses à tous ces questionnements.
Et d’ailleurs, qu’on ne s’y méprenne pas. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le sujet n’est pas réservé aux amateurs de science-fiction pure et dure, avec savants fous, trous noirs et autres machines à remonter le temps.
C’est un sujet qui est extrêmement ancien dans la littérature. On en retrouve des traces dans des contes datant de l’Antiquité, à travers le monde entier. Par exemple, dans beaucoup de cultures, on raconte des histoires d’individus qui, après un bref voyage ou une simple sieste, découvrent que plusieurs siècles se sont écoulés et qu’ils ne vivent plus dans l’époque qui était la leur.
On retrouve même des épisodes de ce genre dans les textes sacrés chrétiens ou islamiques, ainsi évidemment que dans la mythologie grecque.
Quant au cinéma, il n’est évidemment pas en reste. Demandez à quelqu’un de vous citer un film parlant de voyage dans le temps, et il pensera certainement à l’extraordinaire trilogie « Retour vers le futur », où l’on retrouve tous les clichés de la science-fiction, avec son savant fou, sa machine à voyager dans le temps et ses paradoxes temporels à foison.
Mais au cinéma non plus, le sujet n’intéresse pas que amateurs de science-fiction. Les fans de comédies romantiques ne sont pas en reste. Un film comme « Un jour sans fin », où le personnage de Bill Murray revit, en boucle, la même journée, encore et encore, sans savoir pourquoi ni comment, jusqu’à ce qu’il trouve enfin l’amour, relève clairement de la thématique.
Dans ce recueil, je vous propose cinq nouvelles racontant les histoires d’hommes et de femmes qui, au hasard d’une rencontre, ont l’occasion, pour une fois dans leur vie, d’avoir un peu de contrôle sur le temps qui passe.
Mais attention : n’oubliez pas que si ces histoires vous plaisent, ce que je souhaite, vous relèverez la tête en vous disant : « hé, je n’ai pas vu le temps passer ».
Eh oui, en fin de compte, ça aussi, c’est une manière de voyager dans le temps.
DEUXIÈME CHANCE
Nicolas Faubert avait la bouche pâteuse ce matin-là. Une douleur intense lui vrillait le crâne. La langue lourde, l’haleine chargée. De légères nausées. Lendemain de cuite typique. Il n’aurait pas dû boire autant, la veille au soir.
Et il n’aurait pas dû se lever aussi tôt. Il aurait mieux fait de rester dormir un peu plus longtemps. Mais il était tellement pressé de se rendre à l’adresse que l’homme lui avait donnée…
Et pourtant, maintenant qu’il était arrivé à destination, maintenant qu’il avait traversé presque toute la ville pour venir ici, dans ce quartier isolé et silencieux, maintenant qu’il avait tant marché qu’il ne sentait plus ses pieds dans ses vieux souliers de cuir qui couinaient à chacun de ses pas, il commençait vraiment à douter.
Tout en plissant les yeux pour se protéger du soleil qui brillait avec insistance en ce début de mois d’août, il tira de sa poche le bout de papier froissé sur lequel il avait noté l’adresse. Il était bien inscrit « 5, rue des Géraniums ». Et il était bien arrivé dans la rue des Géraniums.
Mais c’était une vieille ruelle laissée à l’abandon. Plus personne n’habitait là, c’était certain. Il n’y avait plus devant lui que de vieux immeubles en brique fatigués, alignés les uns en face des autres. Les carreaux des fenêtres étaient presque tous cassés. Les herbes folles avaient peu à peu craquelé le trottoir. Certaines commençaient même à grimper le long des murs fissurés.
Pas âme qui vive, pas même un vieux chien errant qui boiterait ou un vieux chat malade qui se lécherait à s’en arracher les poils. Pas une voiture garée, si l’on exceptait la carcasse sans roue d’une vieille guimbarde toute rouillée qui devait dater de la seconde guerre mondiale.
Et pas un bruit. C’en était presque angoissant. À peine le souffle d’une brise légère et bienvenue qui le rafraîchissait enfin. Il faisait déjà chaud, alors qu’il était pourtant encore tôt, et ça n’irait pas en s’arrangeant, avaient-ils dit à la météo. La rue sentait un mélange de terre humide et de moisi.
L’espace d’un instant, il fut bien décidé à faire demi-tour. Ce n’était pas la bonne adresse, ce n’était pas possible autrement. Il y avait forcément une erreur.
Et si c’était un piège ? Si ce type avec sa cicatrice au milieu du visage, celui qui lui avait filé le tuyau, la veille, au beau milieu de la nuit, alors qu’il était déjà complètement ivre, tentant en vain de noyer son chagrin dans l’alcool en compagnie des pires ivrognes de la ville, l’avait envoyé ici pour lui tendre un piège ? Le dépouiller ? Le tuer, peut-être ?
Non, c’était absurde. Si l’homme à la cicatrice avait voulu lui faire du mal, il l’aurait fait pendant la nuit, à l’extérieur du bar, à l’abri des regards, alors que Nicolas était complètement ivre, incapable de se défendre, à la merci de n’importe quel agresseur. Il ne lui aurait pas donné rendez-vous le lendemain, en pleine journée, en pleine lumière, sans même savoir si Nicolas pointerait oui ou non le bout de son nez.
Par contre, peut-être que le type s’était moqué de lui. Oui, c’était ça. Il lui avait raconté des âneries. Et lui, saoul comme un cochon, il avait avalé les pires bobards. Ah, le type devait bien rigoler maintenant.
Nicolas revoyait très bien la scène.
Près de trois heures du matin. Il était accoudé au comptoir de ce vieux bar miteux qui sentait la sueur. Le seul établissement qui servait encore les gens alcoolisés comme lui à une heure aussi tardive. Un bar à la déco vieillotte, qui diffusait de la country ringarde à plein volume. Tous les clients étaient aussi saouls et pathétiques que lui. L’atmosphère était moite, presque étouffante.
Les deux seuls dans la salle qui avaient l’air à peu près nets, c’était le patron, un gros moustachu pas aimable pour un sou, et ce type, là. Un homme qui avait une cicatrice au milieu du visage, et qui portait une vieille veste en cuir fatiguée. Il s’était approché de Nicolas alors qu’il s’apprêtait à s’envoyer son quatrième verre d’affilée de ce bourbon bon marché, et lui avait demandé :
— Vous ne croyez pas que vous avez un peu trop bu ?
— Et alors, lui avait répondu Nicolas d’une voix pâteuse et hésitante, ça vous regarde ? Non, ça me regarde que moi, et le patron, là.
L’homme avait souri et, en désignant le barman d’un geste de la tête, avait répondu :
— Vous en faites pas pour lui. Lui, il s’en fiche de vous, vous savez. Il vit du malheur des autres. Plus vous allez mal, plus vous buvez. Plus vous buvez, plus il est heureux. Vos ennuis, il s’en moque complètement.
— Ah, parce que vous, ça vous intéresse peut-être ?
— Oui, ça m’intéresse.
Une pause, puis l’homme avait ajouté :
— C’est quoi, vos malheurs à vous ?
Nicolas avait hésité. Il n’avait pas vraiment l’intention de raconter sa vie à un inconnu qui venait l’importuner comme ça. Il n’avait pas du tout envie de lui dire qu’il avait touché le fond depuis que Clarisse, sa Clarisse, l’avait quitté. Qu’elle était partie parce qu’il n’avait pas su la retenir. Qu’il n’avait pas sur lui dire les mots qu’elle avait eu besoin d’entendre. Et c’était une fois qu’il avait été trop tard qu’il s’était rendu compte de ce qu’il avait perdu. Pas seulement elle, non. Travail, maison, argent. Toute sa vie.
Non, pas question de parler de cela à un inconnu. De toute façon, ça aurait servi à quoi ? Il n’allait pas la faire revenir. Il n’allait pas lui rendre son travail.
Nicolas venait tout juste de prendre son verre et de le porter à sa bouche, quand le type lui demanda :
— Problème d’argent ? Problème de cœur ? Les deux, peut-être. Elle vous a quitté, c’est ça ?
Nicolas s’était retourné vers lui. Il y avait quelque chose de tellement bienveillant dans son regard. De tellement bon et pur, malgré la cicatrice qui lui barrait le visage et lui donnait des airs de malfrats… Nicolas avait haussé les épaules et dit :
— Ouais, et alors ?
Et il avait bu son verre d’une traite.
Pendant ce temps, le type