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L'Idéal et la Cause 2 - Eveil
L'Idéal et la Cause 2 - Eveil
L'Idéal et la Cause 2 - Eveil
Livre électronique390 pages4 heures

L'Idéal et la Cause 2 - Eveil

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À propos de ce livre électronique

Dans Pénombre, nous avons assisité à l’accession au pouvoir de Pedro. Dans « Eveil » Pedro se heurte à des difficultés, certes inhérentes à son poste, mais aussi dues aux règles de la communauté. Pedro veut continuer à organiser la Cause et opère des constructions. Autour de lui un groupe se forme, se presse et s’affaire bien décidé à faire aboutir ses projets. Il y a la vaillante Fina au cœur si tendre, le dévoué Miguel, le fougueux Luciano, le fidèle et courageux Carlos, le rigoureux Enrico, le sage Mateo et le sincère Diego en qui Pedro semble se reconnaitre. A ces amis s’ajouteront d’autres surprenants autant attachés aux valeurs de la Cause que conquis par les projets économiques de Pedro. L’initiation de Pedro continue. Par de nombreux rebondissements celui-ci, sans cesse confronté à des épreuves, doit les surmonter pour réussir l’instauration des concepts de la Cause. Pedro découvre ainsi que les vrais ennemis de la communauté se trouvent en son sein. En effet, alimenté par la haine et la jalousie, l’idéal révolutionnaire, que Ramon semble défendre, sert uniquement à satisfaire son inextinguible soif de pouvoir. Aussi, nombreux sont les procédés qui lui permettent, sous des apparences anecdotiques, d’amener autrui à se soumettre pour son profit exclusif. L’action de Pedro est contestée. Son comportement mesuré est-il bien adapté ? Ne pèche-t-il pas par excès de confiance ? Les exactions opérées par Ramon et sa bande doivent être démontées. Les agressions et les actes de barbarie se multiplient. Pedro doit réagir. Les agissements et les comportements de chacun des personnages sont authentiques. Ceux-ci campés et brossés sont reconnaissables, depuis celui qui veut le pouvoir ; entouré de ses fidèles qui le soutiennent par intérêt, par crédulité ou par peur ; jusqu’à ceux qui tentent de s’opposer. Dans un rythme épique les scènes poignantes se succèdent, les sentiments évoluent et se déchirent, emportés dans la quête haletante d’un monde meilleur.
LangueFrançais
Date de sortie18 déc. 2013
ISBN9782312019598
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    Aperçu du livre

    L'Idéal et la Cause 2 - Eveil - Yvon-Pierre Delaporte

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    L’Idéal et la Cause

    Yvon Pierre Delaporte

    L’Idéal et la Cause

    LES ÉDITIONS DU NET

    22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-01959-8

    Avant-Propos

    Ce roman met en jeu, immergés dans un récit palpitant, deux entités d’un contexte commun. La Cause est, tout à la fois, un concept idéalisé et une réalité communautaire qu’il faut faire vivre, protéger et gérer…

    Le premier tome « Pénombre » décrivait l’antagonisme entre Pedro et le Chef Ramon, ce dernier ne respectant pas les règles de la communauté. Pedro avait été emprisonné puis avait fui. Arrêté par les gouvernementaux, lors de sa détention il avait rencontré le Président Juan, que la Cause tient pour le dictateur du pays, avec lequel il avait eu des échanges très vifs.

    Le retour de Pedro et son installation à la tête de la Cause devaient mettre un point final à l’opposition de Ramon. Malheureusement la rancœur jamais oubliée ; due à l’écartement du pouvoir et à la perte des intérêts matériels auxquels s’ajoute le sentiment de trahison ; fait son œuvre.

    L’initiation de Pedro continue. Ses amis le mettent en garde et le conseillent. Ils lui font découvrir que les vrais ennemis de la Cause se trouvent à l’intérieur de celle-ci. Ainsi Pedro prend conscience que, bien que prétendant se rebeller contre les exactions du Gouvernement du pays, certains membres de la fraternité ne font que reprendre, à leur compte, les procédés rejetés.

    Fascinant et profondément déplaisant, Ramon Tortoro revient au-devant de la scène. Ce personnage se révèle cynique et cupide, grand manipulateur ; usant des principes fraternels de la Cause pour justifier ; sans état d'âme ; violences, meurtres, viols, destructions, pillages et rackets dont il est l’instigateur.

    L’action de Pedro est contestée. Son comportement mesuré est-il bien adapté ? Ne pèche-t-il pas par excès de confiance ?

    Les agressions et les actes de barbarie se multiplient. Pedro doit réagir.

    Porté par la Cause, toujours vivante de « l’idéal » perpétuellement lié à son indéfectible antagoniste « la réalité », ce roman poignant est parsemé de surprises affectives étonnantes.

    Fête Tragique

    Pedro et Fina sont immergés dans leur bonheur.

    Et la fête continue…

    1 – ANGOISSE

    Soudain, dans un fracas de cavalcade et de mitraille, pistolet au poing un cavalier apparut au milieu de la piste. Sur un couac la musique cessa tandis que des hommes à cheval se postèrent autour de la place qui était devenue silencieuse.

    Pedro se leva. – Viens Ramon, viens avec nous, – s’écria t’il heureux de faire partager son bonheur.

    Ne l’écoutant pas, Ramon s’adressa à l’assistance. – J’accuse Pedro d’avoir trahi la Cause. Il est à la solde d’Aljusto, il l’a revu plusieurs fois. En ce moment, il tue la Cause. Vous êtes tous en train de vous soumettre à Aljusto. Comme le peuple vous serez des cochons grillés, vous serez pieds et poings liés entre les mains de ce dictateur. Va z-yPedro, dis le contraire. Dis que tu n’as pas rencontré Aljusto. 

    La foule attendait, silencieuse, la réponse de Pedro.

    – Oui c’est vrai, je l’ai vu. J’étais en prison et il m’a fait transférer en train. 

    – Alors tu l’as vu et tu ne l’as pas tué ? 

    Un murmure réprobateur montait.

    – Qui te dit que je n’ai pas tenté ? J’étais enchaîné et, de toutes façons, je me suis échappé, – répondit Pedro.

    – Tiens donc. Tu étais enchaîné et tu es encore vivant. Il aurait pu te faire fusiller. 

    – Pour toi, je suis un traître. Pourtant j’ai combattu les troupes d’Aljusto et j’ai fait fortifier la ville, – répliqua Pedro qui, ignorant la nature des informations détenues par Ramon, jouait la prudence.

    – Si on avait fait cela avant, on serait plus nombreux et on n’aurait pas eu d’attaque comme la dernière, – hurla Mateo qui intervenait à son tour.

    – Vous vous endormez. Il vous endort. Ne vous laissez pas enfermer. Reprenez le combat, sinon vous allez avoir le même avenir que le reste du peuple. 

    – Le peuple est comme nous, il veut la paix. Nous la voulons aussi mais avec la liberté. Nous nous sommes battus pour elle et nous nous battrons encore s’il le faut. Par contre nous ne nous battrons plus jamais comme des bêtes, mais seulement organisés et prêts pour la victoire, – hurla Mateo qui prouvait ainsi qu’il avait retenu le sens des discours de Pedro.

    Ramon jugea bon de couper court à toute discussion, il vociféra. – Je t’ai fait ce que tu es. Tu nous as trahis, je te prends la vie. – Puis il tira en direction de Pedro.

    Il y eut un grand cri puis plusieurs autres coups de feu. Tortoro tomba de son cheval. Sa chute fut suivie d’une fusillade pendant laquelle quelques-uns de ses comparses, mordirent la poussière. Des chevaux étaient touchés et agitaient leurs pattes en l’air. Les cavaliers roulaient sur le sol et étaient immédiatement maîtrisés par les hommes de Carlos qui avaient investi la place. Le pistolet encore fumant à la main, Julio s’approcha du Chef.

    Tortoro bougea, Luciano voulut l’achever mais Pedro l’en empêcha. Les yeux grands ouverts, le chef déchu semblait chercher à parler. Pedro approcha son visage au plus près de sa bouche. Ramon murmura.

    – Prends garde ! Ils te trahiront Pedro… ils te trahiront. 

    – C’est toi qui voulait me tuer et personne d’autre. 

    – Maintenant je vais mourir et je sais ce que tu vas connaître. 

    – Tu n’as jamais eu confiance en personne, parce que, toi même, tu n’es pas fiable, – lui hurla Mateo.

    – J’ai eu confiance en Pedro et il m’a trahi. 

    – Non je ne t’ai pas trahi. Je veux seulement comprendre par moi-même, mais toi tu veux que l’on copie ta haine pour les autres sans autre explication que celle que tu donnes. 

    – Méfie-toi Pedro, souviens-toi de ce que je t’ai dit. Il n’y a que la guerre qui les rassemble, sinon ils se battront entre eux et même contre toi… 

    Ramon allait continuer mais, ayant fait signe que l’on s’occupe de lui, Pedro le laissa là. Les hommes et les femmes s’étaient regroupés dans le fond de la place. Tout le monde attendait quelque chose.

    ***

    Plus loin, Miguel était penché sur sa fille. Allongée sur la piste, Fina soufflait doucement. Elle avait vu le geste de Tortoro et s’était interposée faisant un rempart de son corps. Dans le premier instant, ne s’étant pas effondrée, personne n’avait pu croire qu’elle était touchée, Pedro s’était donc précipité sur Ramon. Maintenant, désespéré, il la découvrait, sur le sol, affrontant la mort.

    – Je vais mourir, mais je suis heureuse parce que c’est pour toi. 

    Pedro était consterné. – Ne dis rien ! – lui conseilla-t-il. – Je t’aime et tu ne mourras pas, sinon moi aussi je te le jure. 

    Pourtant Pedro savait qu’il ne savait rien. Il n’y avait qu’un médecin dans la ville. Seul Miguel connaissait le pouvoir des plantes et possédait l’art du chirurgien. Malheureusement, celui-ci paraissait désemparé. Aurait-il le courage d’opérer sa propre fille ?

    Carlos entraîna Miguel à l’écart. Le prenant par les épaules, il le colla contre un mur. Miguel dodelinait de la tête, effondré. Carlos le secoua puis, sans un mot, le fixa droit dans les yeux. Miguel comprit le message. Il hocha du menton puis, brusquement, se détachant de l’empoignade amicale, il commanda. – Qu’on l’emmène vite chez moi. 

    Aussitôt Pedro la prit dans ses bras et l’emporta presque en courant. Heureusement, le fardeau était léger car la demeure était éloignée. Ce fut un groupe d’hommes essoufflés qui parvint dans la grande pièce de la maison de Miguel.

    – Plus vite Pepa, – hurla Miguel depuis le pas de la porte.

    Pepa suivait comme elle pouvait, soutenue par la femme d’Enrico. Sous l’injonction, elle sentit son esprit se tétaniser et son corps se découvrit des ailes. Elle se sépara prestement de Maria et courut vers son compagnon. Fina fut étendue sur l’immense table de la salle à manger. Dans la cuvette, que sa femme lui tendit, Miguel se lava les mains. Depuis son face à face avec Carlos, sa résolution avait été prise. Jusqu’au bout, sans émotion inutile, il opérera la blessée en oubliant ses sentiments. Ce sera avec un regard impénétrable et une attention soutenue, qu’il examinera la blessure.

    Ayant saisi les instruments, qu’il avait lui-même fabriqués, il passa et repassa une tige de ferraille à la flamme de la cheminée. Après avoir suffisamment attendu afin qu’elle se refroidisse, il entreprit de sonder la plaie.

    – Pepa apporte de la charpie. 

    Un linge fraîchement mouillé fut appliqué sur le front brûlant de la blessée. Le dos dégagé et bien nettoyé, la plaie apparaissait sous l’épaule.

    Bien que les jambes soient maintenues par Carlos, le visage enfoui dans la poitrine de Pedro, Fina se contorsionnait au plus fort de la douleur. Une bourre de charpie fut placée entre ses dents. Malgré cela, la jeune fille s’interdisait de crier et ce n’était que de simples geignements que l’on entendait à chacun des contacts d’un point sensible par la sonde.

    Après un long moment d’examen minutieux, Miguel se redressa l’air détendu. La balle avait transpercé l’omoplate. Freinée, elle s’était arrêté quelques centimètres en dessous, effleurant à peine la plèvre du poumon.

    Après avoir lentement fait lécher une longue et fine pince et un scalpel par la flamme, Miguel attendit un instant. Il en profita pour, par gestes, faire comprendre que le moment était venu de serrer très fort. Pedro s’exécuta juste à temps avant que, les instruments commençant à frôler l’orifice, plusieurs plaintes sourdes retentissent. Simultanément, le brave Carlos s’effondra sur les fesses qui commençaient à s’élever dangereusement.

    Suivant, avec précision, la trajectoire que lui avait révélée la sonde ; ce fut rapidement que, devant une assistance soulagée mais à demi rassurée, Miguel exhiba le projectile au bout de l’instrument.

    – Bon c’est presque fini, – dit Miguel en lançant un clin d’œil à tous pour montrer qu’il fallait encore tenir ferme.

    Il saisit une fiole et la sonde que lui tendait Pepa, puis il versa dans la plaie quelques gouttes de couleur marron. Avec l’aide de la tige métallique il fouilla un peu permettant au liquide de s’enfoncer jusqu’au fond du conduit. L’opération fut effectuée accompagnée par les grognements de Fina. Miguel saisit une aiguille et un fil immergés dans un récipient plein d’alcool. Rapprochant les lèvres de la plaie, il entreprit de les recoudre. L’intervention terminée, il extrait d’un pot des feuilles et des pétales qu’il avait fait macérer. Il les posa sur la ligne de suture et les protégea d’un voile de charpie.

    – Pepa, tu oublies tes compresses. 

    Le danger semblait passé, la pauvre femme était pétrifiée. Doucement Miguel lui prit le plateau des mains, le posa sur la table et la serra dans ses bras. Carlos ne bougeait plus. Hébété il tenait toujours les jambes de la jeune fille à bras le corps. Laissant Pepa effondrée sur la chaise, Miguel vint le délivrer et tous deux se serrèrent l’un contre l’autre. Pedro couvrait de baisers, le visage et les épaules de Fina. Seule la surface recouverte de feuilles fut épargnée. Carlos ne lâchait pas Miguel et l’entraînant vers la porte qu’il ouvrit toute grande, il cria les larmes aux yeux.

    – Elle est sauvée ! Il l’a sauvée ! 

    Dehors c’était la cohue, tout le monde était là présent dans l’attente des nouvelles. La foule, vaincue par un trop long temps d’attente et d’émotion contenue, laissa jaillir un grand cri. Des femmes pleuraient. Des hommes réclamaient Pedro. Pepa apparut et fut immédiatement entourée de Maria et Enrico. Quant à Pedro, il ne voulut pas quitter Fina. Ce fut Carlos qui, de sa haute stature, imposa le silence et demanda la dispersion. Usant de l’emprise de leurs uniformes, ses hommes présents l’aidèrent à repousser doucement les badauds.

    2 – FÉLICITÉ

    Les jours qui suivirent, les travaux de rénovation de la ville se firent sans Pedro. La blessée ne pouvait pas trouver meilleur infirmier que celui-ci. Toujours prêt à se déplacer pour l’aider et changer ses compresses, il la couvrait de baisers. Seule Pepa parvenait à le chasser au moment de la toilette. Miguel avait bien dit que la fièvre serait forte durant les premiers jours. Pendant ce temps-là tout se jouerait car elle devrait se battre pour surmonter l’infection. Aussi, il revenait souvent voir sa fille et, au moindre signe d’amélioration, il ne manquait pas de rassurer Pepa et Pedro. La première nuit se passa en grognements et étouffements. Le lendemain elle respirait mieux mais le troisième soir, Fina avait toujours la fièvre. Régulièrement, Pedro l’aidait à boire les décoctions que Miguel avait composées. Le quatrième matin, Pedro se leva de son siège étonné du calme étrange qui régnait dans la pièce. Il s’approcha et frôlant de sa main le front de Fina il le découvrit sans sueur. Elle dormait profondément avec une respiration régulière et douce. Il se pencha et déposa un baiser sur sa joue puis sa bouche. Elle tressaillit puis ouvrit les yeux. Devant ce visage de madone, les jambes de Pedro tremblèrent et ce fut à genoux que Miguel et Pepa le découvrirent.

    – Pedro ! Mon chéri – dit-elle, lui passant la main dans les cheveux.

    Il approcha son visage et l’embrassa tendrement. Ils n’avaient pas entendu la porte s’entrouvrir. Une dernière fois Miguel et Pepa observèrent la scène. Se serrant l’un contre l’autre, ils refermèrent doucement la porte. Fina et Pedro étaient, de nouveau, seuls au monde.

    ***

    Le jour suivant, ses amis étaient tous venus prendre des nouvelles de Fina. Après les avoir remercié, Pedro les interrogea. Il voulait savoir où en étaient les travaux. Il parla de son retour au P. C. Il ressentait une certaine culpabilité devant son absence. Mais Miguel trouvait que Fina était encore trop fragile. En souriant, Diego dit qu’il ne voulait pas que Pedro le surveille. Carlos grommela qu’il était trop dans ses pattes. Enrico ne dit rien mais lui tourna le dos et s’en alla l’air réprobateur prétextant qu’il devait rejoindre sa femme. Pepa assura Pedro que sa présence était souhaitée pour le moral de Fina, qu’une place lui était réservée dans la maison et que les affaires personnelles qu’il jugeait utiles lui seraient amenées. Tenté par la proposition, Pedro était partagé. Il allait réagir mais, devant la pression générale, il ne voulut pas entamer de débat et décida de remettre sa décision à la semaine suivante.

    Il est vrai que Pedro ne pouvait longtemps se jouer la comédie. L’état de santé de Fina était, pour lui, plus préoccupant que tout le reste au monde. Il la rejoignit donc dans la chambre. Encouragée par cette présence amoureuse, Fina reprenait chaque jour plus de force. Les progrès étaient tels que le dimanche, Enrico ayant fait fabriquer un siège confortable ressemblant à un divan, tous deux purent continuer à roucouler blottis l’un contre l’autre devant la maison.

    Les jours passaient et Pedro oubliait sa résolution de revenir aux activités. Ses amis se relayaient pour le mettre au courant, lui demander son avis, un conseil ou pour le rassurer sur l’évolution des travaux et surtout pour l’encourager à rester avec sa fiancée. Assurément la personne de Fina était devenue d’une importance capitale pour Pedro. Intérieurement, ce dernier ressentait des remords. Il se souvenait maintenant de cette petite fille qui tournait autour de lui. Guérillero à peine éprouvé alors, il ne l’avait pas remarquée. De même il n’avait osé s’approcher de la jeune fille qui, aidant son père, se penchait sur les blessés revenus des batailles.

    ***

    La blessure ne faisait plus très mal et c’est, sans appréhension, que Pedro pouvait prendre Fina dans ses bras. En d’autres temps elle aurait, depuis longtemps, dû reprendre ses activités, mais elle était tellement heureuse de se laisser dorloter par son Pedro et celui-ci était tellement fou d’elle, qu’ils ne pouvaient plus se quitter.

    Souvent de loin, on entendait les fous rires qui les embrasaient tous les deux. Combien de fois, passant par ces moments de bonheur sublime, se rappelèrent-ils leur duo burlesque lorsqu’il s’était effondré sur elle, saoul d’alcool et surtout de douleur ?

    Un soir, ils s’esquivèrent de la maison. On aurait pu les retrouver devant les remparts. Ils purent constater que les choses avaient encore beaucoup changé dans Libertad. On voyait bien que Diego avait parfaitement su diriger les équipes. Le camp avait vraiment pris toutes les apparences d’une grande ville.

    Ceux qui les croisaient leurs souriaient avec amabilité. De même les hommes en uniforme les saluaient militairement et les sentinelles rectifiaient leurs positions. De ceci Pedro et Fina n’en étaient toujours pas habitués. Ils partirent d’un éclat de rire qui fit se retourner les passants.

    La tour centrale culminait au-dessus du tertre confortant la sécurité tandis que les vastes réservoirs d’eau souterrains que Diego avait fait installer, renforçaient l’assurance de survie. La surveillance générale exercée était dissuasive. Aucun cavalier ne parcourait plus la ville pour terroriser ou créer la panique. Le calme, une sorte de sereine douceur, régnaient sur la ville. La construction et l’agriculture occupaient la majorité des hommes et leur prenait suffisamment d’énergie. Les autres, ceux qui avaient un trop plein d’agressivité étaient restés dans les forces armées avec Carlos qui savait les occuper efficacement. Bref, chacun avait sa tâche et sa responsabilité. Rassurées, les femmes avaient afflué et un certain nombre de couples s’étaient constitués ce qui contribuait à calmer les hommes et à les fixer.

    Cependant, loin de toutes ces réflexions, Pedro était trop occupé par sa Fina qui captait toute son attention. Bien que la ville manque de lieux de distractions, tous deux trouvaient mille et une façons pour ne pas s’ennuyer.

    Le mariage eut lieu dans le mois qui suivit. Selon le vœu de Fina et, malgré les réticences de Pedro, un prêtre vint bénir leur union. La cérémonie se déroula empreinte d’une grande profondeur. La chapelle était noire de monde. Les habitants de la ville et les paysans des environs avaient tenu à être présents. Dehors un attroupement s’était formé. Diego lut un passage de la bible. Pepa ne put réprimer un sanglot lors de l’acquiescement de sa fille. Rapidement, Miguel détourna la tête et, furtivement, leva la main pour essuyer une larme.

    Le moment le plus poignant fut lorsque Mateo récita le poème qu’il avait conçu pour la cérémonie. Il l’énonça lentement comme pour exprimer un souhait, une espérance, un engagement…

    Tu l’as choisi, symbole de tes désirs séduits,

    Tel sera le futur corps de ton bonheur.

    Vous avez choisi, signe d’espoir en la vie,

    L’union sacrée pour relier vos cœurs.

    Que l’avenir, au-dessus de l’amour des sens,

    Vous donne l’amour des cœurs avec son ivresse,

    Et les relie du lien indestructible sans sens,

    Que l’on nomme de ce doux mot « tendresse ».

    Si l’aventure de la vie vous entraîne dans des conflits,

    Que votre amour vous garde complices plutôt qu’adversaires.

    Et, évitant l’indifférent mépris, vous tienne solidaires,

    Dans la vie toujours pleine d’embûches et de défis.

    Si par la suite, votre bonheur grandit,

    Que vous soyez plus grands avec des plus petits,

    Pensez que cette union sacrée qui vous honore,

    Était faite pour eux, d’abord et encore.

    Dans les loisirs, soyez donc ensemble,

    Offrez-vous au jeu comme un présent,

    Cultivez les passions qui vous rassemblent,

    Et ne vous laissent pas de l’autre indifférent.

    La vie est une roue qui roule,

    Élancée par les sentiments qui s’y enroulent.

    Un cœur seul s’y épuise et se mine,

    À plusieurs, ils s’entraînent et le bonheur l’anime.

    Après cette élocution, incitant les mariés ainsi que l’assistance à méditer sur ces paroles, le Padre invita l’assemblée à respecter un moment de silence. Alors un violon solitaire caressa l’atmosphère de notes sublimes.

    En fin de cérémonie, une garde d’honneur conduite par Pablo les attendait à la sortie de la chapelle. Tandis que roulaient les tambours et sonnaient les trompettes, les mariés durent passer sous une haie de sabres tendus au-dessus de leurs têtes. Pedro et Fina étaient couverts de fleurs lancées par la foule. Ils traversèrent la ville sur le même cheval suivant un périple impressionnant. Partout ce n’était que cris de joie et fleurs qui abondaient sur leur passage. Les enfants les suivaient en piaillant et les hommes agitaient leurs chapeaux. Ils furent accueillis par Mateo dans la salle du conseil transformée en salle de fête. Celui-ci leur fit un discours extrêmement court qui les amena à la table d’honneur. La ville et les paysans des environs avaient tenu à montrer leur sympathie. Les cadeaux étaient nombreux et les amis aussi. Les festivités se prolongèrent toute la nuit.

    Cependant, le souvenir des incidents de la fête précédente était resté gravé dans les mémoires. Depuis l’attentat, postés un peu partout dans la ville, des hommes armés en uniforme assuraient la surveillance. De plus, une grande attention était portée sur les activités des amis de Ramon.

    Tumultes

    Une journée pas comme les autres…

    3 – CONJURATION

    Un lundi, Diego avait gagné le bureau de bonne heure. Il fut surpris d’y découvrir Pedro déjà studieusement installé, plans et dossiers étalés sur la table, l’air préoccupé et peu souriant. Quelques instants plus tard, Carlos, Enrico, Luciano et Miguel les ayant rejoints, le chef s’exprima sentencieusement.

    – Je ne vous reproche rien et je vous félicite même de tout ce vous avez réalisé, mais maintenant je ne veux plus que quelque chose se fasse sans mon accord. 

    – Mais !… – tenta Diego dans l’espoir de le calmer.

    – C’était Dimanche, – intervint Carlos le doigt levé et oscillant.

    – Je ne parle pas de cela. 

    – Il fallait bien que tu te reposes, – insinua Miguel.

    – Je ne veux pas parler de tout ceci, mais bien plutôt de toutes ces choses que j’avais interdites de faire tout de suite, par exemple… de cette maison… 

    – Cette résidence ! Ta résidence, – reprit Carlos.

    – Résidence… de ce bureau que je ne reconnais plus, de ces mille inutilités alors que l’on aurait pu effectuer d’autres travaux plus urgents. Est-ce que j’avais besoin de ce décor ? Comment voulez-vous que je parle de priorité et d’économie au reste de la population si, pour moi-même, je ne les respecte pas ? 

    – C’est ça, – répliqua Enrico. – On fait toujours passer le cœur après l’utilité, résultat on se met en tristesse. 

    Toujours technique, Diego insinua. – Oui c’est bien de parler pour toi tout seul, mais pour que nous puissions travailler et nous concerter, où aurions-nous pu nous réunir ? 

    – Tu comprends, il faut que l’on puisse se rencontrer, – appuya Carlos.

    – Bon d’accord pour le bureau mais pourquoi avoir refait complètement ma maison ? 

    – Tant qu’à faire, il fallait que la résidence soit digne de notre lieu de travail – avança Diego.

    – Il faut bien que tu sois sur place, – ajouta Carlos.

    – Finalement je dois vous remercier pour les travaux que vous avez faits… pour vous. 

    – Tu n’allais tout de même pas faire vivre Fina dans la bicoque que tu avais ? 

    – C’est bon, – acquiesça Pedro touché et vaincu par l’argument d’Enrico. – C’est formidable ce que vous avez fait… C’est même magnifique… et en si peu de temps… et je ne m’en suis même pas aperçu ! 

    – C’était le but Pedro… C’était le but. 

    – Et Fina, était-elle au courant ? – repris Pedro pris d’un doute subi.

    – Oh non, je lui ai seulement dit qu’elle pouvait te garder le plus longtemps possible, il y avait trop à faire sans toi, – indiqua Miguel les yeux au ciel. – J’avais l’impression que tu ne la gênais pas trop. 

    – Attention ! C’était une prescription de médecin, – coupa Carlos l’air grave et le doigt tendu.

    Miguel reprit. – Et puisque toi non plus tu… 

    Les rires fusaient…

    – Je ne veux plus rien savoir, – interrompit Pedro qui sentait venir le reste de la phrase.

    – C’est notre cadeau de mariage, – clama Diego.

    – Merci pour le cadeau, bande de coquins. Vous êtes de sacrés bougres… 

    – …d’amis, sois en sûr, – rajouta Enrico qui venait de servir le café.

    La matinée commençait joyeusement. Chacun apportait son lot de renseignements et de questions. Pourtant, un doute se glissait dans la tête de Pedro. Bien qu’il ne puisse l’exprimer ouvertement, il craignait de ne plus pouvoir contrôler tous les événements et que, dorénavant, beaucoup de choses se fassent sans son avis.

    – Enfin, si c’est constructif, – pensa-t-il. – Peut-être devrais-je revoir ma conception de mon rôle ? 

    Plusieurs mois s’étaient écoulés depuis le mariage. Ce dimanche la cloche de la chapelle avait sonné, Pedro prit son chapeau entre ses mains. Il n’était pas croyant et ne pouvait oublier les dégâts que les prêtres avaient faits dans le monde paysan. Pourtant, il avait cédé à Fina et avait accepté la présence d’un religieux dans la ville. Il est vrai que de nombreuses femmes l’avaient aussi souhaitée. Fidèles, elles étaient présentes à

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