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Livre électronique190 pages2 heures

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À propos de ce livre électronique

Dans des lieux différents, 4 femmes et 4 hommes disparaissent au même moment. Un seul point commun les unit : la croyance. Ils se retrouvent le lendemain dans un vaste lieu appelé Casa Nostra. Ils se rendent vite compte qu’ils en sont prisonniers. Peu à peu, les membres de la communauté abandonnent toutes leurs valeurs. Un jour, un hologramme apparaît. Ce dernier affirme qu’il est le représentant du seul Dieu existant jusqu’à ce qu’un nouvel arrivant leur apprenne l’inconcevable vérité…
LangueFrançais
Date de sortie24 oct. 2018
ISBN9782312062624
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    Aperçu du livre

    Deus - Patrick Garcia

    cover.jpg

    Deus

    Patrick Garcia

    Deus

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2018

    ISBN : 978-2-312-06262-4

    Disparitions

    PAUL

    Mercredi 4 avril 2018 : 20 h 44. Lyon

    Ce soir-là, Paul avait fait ce qu’il ne s’autorisait jamais : un détour. Dans un quartier qu’il traversait d’ordinaire sans jamais s’y attarder, il avait stoppé net sa voiture, la laissant au bord d’une petite route, puis s’était approché d’une imposante bâtisse, Cette maison avait attiré son attention, l’avait happé, hameçonné, hypnotisé. Chaque pas franchi en sa direction le confortait dans l’idée qu’il la connaissait, même si un bref mais réel effort de mémoire contredisait cette troublante certitude. Après s’être assuré de l’absence d’habitant, il en avait fait le tour. Fissures et craquelures indiquaient qu’elle était abandonnée. Peut-être son propriétaire avait-il jugé bon de la laisser là, pourrissant sur pieds, sous le regard indifférent des automobilistes.

    Par contraste avec l’état de délabrement avancé de la maison, un jardin propret l’entourait joliment. Des genêts, par esprit de contradiction sans doute, étaient en pleine éclosion. Cette maison devait être magnifique, regretta Paul en l’examinant à travers une barrière au bois vermoulu. Où avait-il bien pu la voir ? Paul creusa en vain dans sa mémoire. Même les plus lointains souvenirs ne pouvaient éclaircir ce mystère. Le nez écrasé sur une vitre sale, il fût bien en peine de distinguer un élément déclencheur d’une quelconque réminiscence. Dépité, il en vint à considérer ce phénomène comme une chose finalement assez commune. Un classique « déjà vu », Et puis il devait rentrer chez lui, retrouver sa femme Camille. Sur le chemin du retour, par habitude, il brancha la radio, écouta les infos, de la musique, mais au fond ne cessa de penser à cette maison

    À peine rentré chez lui, Paul confectionna à la hâte un sandwich jambon-beurre, histoire que son estomac tienne le coup.

    Cette fois-ci, il ne s’attarda pas trop longtemps à lire ses messages, désirables ou pas. Internet pouvait-il lui venir en aide ? Il tapa « Réincarnation » sur un célèbre moteur de recherche. Plusieurs sites défilèrent sur sa page. « Les gens sont d’une crédulité ! » pensa-t-il avant de se rendre compte qu’il faisait lui aussi partie du club.

    Il choisit de cliquer sur Vies antérieures. Il se laissa facilement pénétrer par cet univers si loin de ses préoccupations habituelles. Peu à peu, Paul se persuada de la réalité du phénomène.

    Néophyte, il ne lui restait que quelques minutes pour atteindre le vif du sujet avant que sa femme rentre de son service à l’hôpital Edouard Herriot. Afin de défricher ce vaste thème, il devait tout d’abord distinguer l’approche orientale de l’occidentale et découvrit avec surprise que cette croyance, loin d’être une spécificité du sous-continent indien, traversait toutes les croyances du monde, hormis les deux religions monothéistes que sont le christianisme et l’Islam. Le sandwich-club était depuis longtemps englouti lorsqu’un sifflement d’abord sourd, puis de plus en plus aigu se propagea dans la pièce. Paul en attribua tout d’abord l’origine à son ordinateur déclinant. Désolé de ne pouvoir poursuivre ses passionnantes recherches, il se résout à l’éteindre. Las ! La pression acoustique s’accentua, le son se fit de plus en plus strident de sorte que Paul se boucha les oreilles afin d’amoindrir une douleur devenue vite insupportable.

    Paul avait disparu.

    MEI

    Mercredi 4 avril 2018 : 20 h 44. Paris

    Meï s’installa dans le confortable fauteuil en cuir marron et ferma les yeux. Le concerto n° 23 de Mozart avait sur elle un pouvoir apaisant. Aussi longtemps qu’elle se souvenait, des inquiétudes dont elle ne comprenait pas toujours l’origine empêchait son esprit d’être en paix. Elle s’était toujours comparée à un paratonnerre, attirant les forces, les énergies à son corps défendant. Confrontée à ses tourments, la musique lui apportait une bien heureuse parenthèse.

    Chaque note emplissait le salon comme un souffle divin, précédait la suivante, suite magnifique, soustrayant au silence sa pesante angoisse. Elles lui permettaient de remettre les éléments de sa vie en place, de les rendre plus clairs, visibles.

    Visibles, ils ne l’étaient plus depuis qu’une encéphalite survenue trois ans auparavant avait privé Meï de l’usage de la vue. Les autorités médicales avaient alors pronostiqué un recouvrement de celui-ci impossible à prévoir. Cette soudaine cécité avait provoqué une réaction en chaîne au-delà de ce qui était imaginable : son compagnon, loin de la soutenir dans cette épreuve, l’avait quittée peu de temps après. Elle avait ensuite perdu son travail de traductrice dans une grande maison d’édition qui avait eu pour effet d’interrompre net son envie de tour du monde, programmé de longue date. Seule la visite hebdomadaire de sa sœur aînée lui redonnait quelque allant.

    Le constat était implacable. Les éléments néfastes de son passé ressurgissaient, créant dans son esprit un tumulte que la seule magie Mozartienne ne suffirait pas, cette fois-ci, à chasser. Ses démons étaient de retour. Elle devait les chasser par l’action. Mei, 38 ans, aveugle de son état, devait répliquer mais il lui fallait dans un premier temps se calmer, ralentir le rythme de sa respiration.

    L’image de son grand-père lui revint, apaisante. Elle se souvint avec nostalgie des moments passés à écouter ce paysan d’un autre âge, qui en plein Sichuan, lui racontait des histoires extraordinaires de la Chine éternelle. Ses yeux vitreux d’aveugle, si impressionnant fussent-ils, l’avaient par la suite attirée, constituant une fenêtre sur le monde ainsi que sur elle-même. Il la comprenait, percevait ses attentes, lui racontait l’avenir en quelque sorte. Dans ces yeux que la mobilité du visage rendait vivants, elle pouvait ressentir les choses réelles et surtout imaginaires. Depuis longtemps disparu, leur handicap les reliait dorénavant. Elle sentait une passerelle invisible entre eux. Le souvenir du vieil homme lui redonnait force et courage. Meï se sentait bien.

    Au moment le plus intense de la mélancolie musicale, la jeune femme se redressa, comme si elle avait entendu une voix, un appel. Elle se leva d’un coup. La plénitude qui était la sienne quelques secondes auparavant avait subitement disparue. Sans tâtonner, elle se saisit d’un bloc-notes et d’un stylo. Elle se dirigea vers la table du salon.

    Meï s’assit face à la fenêtre entrouverte. Un léger courant d’air fit danser une mèche de ses cheveux. Elle resta quelques secondes immobile, la respiration saccadée, Elle posa la pointe du stylo, prête à coucher sur le papier quelque fulgurance de l’esprit dont elle était coutumière. Meï, dans un état second, leva son visage. Sa main s’agita au-dessus du papier, Les mots noircirent celui-ci avec une vitesse hallucinante. Puis un sifflement aigu commença à agresser ses tympans. Sa tête se balançait de gauche à droite. Meï essaya de faire abstraction de la douleur, poursuivant à en perdre le souffle sa rédaction frénétique. La résonance brutale, suivie des dernières notes du concerto n°23 de Mozart venait de s’évanouir. Le silence qui s’en suivit était certes encore du Mozart…

    … mais Meï avait disparu.

    FRÉDÉRIC

    Mercredi 4 avril 2018 : 20 h 44. Ardèche

    La nuit promettait d’être étoilée. Les nuages qui avaient recouvert les Monts ardéchois s’étaient enfin dissipés. Regarder le toit de l’univers était un spectacle que Frédéric, jeune berger de son état, ne se lassait de contempler. Ce soir-là, il avait décidé de laisser ses moutons dehors. Lui et Ben, son vieux « patou » de 14 ans, avaient la flemme de les rentrer dans la bergerie. Du reste, aucune attaque de prédateur n’était à craindre sur les contreforts de Chaseaux. Quand bien même, malgré son grand âge, Ben veillerait à repousser l’impudent.

    Frédéric, un brin d’herbe à la bouche, s’assit sur une pierre plate et sortit une bûchette de sa poche. À l’aide de son couteau, il commença à tailler dans le bois avec des gestes assurés. À ses côtés, Ben était tout à son grignotage bruyant d’un morceau de bœuf séché. Frédéric goûtait les plaisirs simples que pouvait lui apporter cette nature encore sauvage.

    De temps à autre, Frédéric faisait une pause et levait la tête afin de contempler cette voie lactée qui le fascinait depuis toujours. Il connaissait par cœur le nom des 88 astérismes, les fameuses figures caractéristiques des constellations, et savait les relier entre elles.

    Un santon prit forme sous ses entailles précises. Frédéric en faisait la collection. Peut-être se décidera-t-il un jour à les vendre sur le marché de Privas ?

    L’harmonie parfaite ne dura que quelques minutes. Frédéric entendit des bêlements caractéristiques. Les moutons s’agitaient, devenaient nerveux. Auraient-ils senti un prédateur à proximité ? Frédéric connaissait ce danger mais s’était toujours refusé à posséder un fusil, contrairement aux vieux bergers du coin. Bien différents de lui, ceux-ci considéraient le loup comme une bête nuisible, à abattre, rien de plus. Frédéric avait dû essuyer bien des moqueries, lui le néo-rural !

    Le jeune berger regarda son vieux compagnon Ben qui s’était relevé avec difficulté sur ses quatre membres perclus d’arthrose, la truffe en alerte. Lui aussi avait senti quelque chose. Frédéric tenta de le rassurer, lui tapotant le flanc d’une main ferme. « C’est rien, mon gros », lui dit-il pour ensuite se rasseoir sur la pierre plate. Puis un son aigu, comme le mistral dans les branches des peupliers d’Italie, sembla descendre des hauteurs. Il s’intensifia, provoquant la panique chez les ovidés qui partirent dans tous les sens. Ben, qui pour l’occasion avait retrouvé sa voix d’antan, hurla à la mort. Frédéric regarda d’un air effrayé le ciel parsemé d’étoiles. De toutes ses forces, il plaqua ses mains contre ses oreilles afin de se protéger un tant soit peu de l’horrible son, puis il hurla : « Laissez-moi tranquille ! »

    Frédéric avait disparu.

    FARES

    Mercredi 4 avril 2018 : 20 h 44. Bondy

    Fares était un bon musulman. Tiraillé depuis l’enfance par des exemples familiaux divergents, il avait enfin trouvé un équilibre. Son père algérien s’était moulé dans son pays d’accueil pour devenir plus français qu’un bon Français. Il avait mis en sourdine toute manifestation spirituelle jusqu’au point d’ignorer sa foi. Le musulman républicain parfait made in France en quelque sorte. Par opposition sans doute, son petit frère Ahmed s’était facilement laissé tenter par les thèses salafistes et n’avait dû son salut qu’à la vigilance de sa sœur et de Fares lui-même. Il avait ainsi été rattrapé à l’approche d’une chute mortifère. Cela ne les avait pas rapprochés pour autant, et Fares souffrait de cet écartèlement familial.

    Comme beaucoup de ses coreligionnaires, Fares savait que pour un musulman, la pratique de sa foi n’est pas chose aisée. Comme le Chrétien Saint Augustin en son temps, il connaissait l’importance de l’exercice de la prière. Fares se devait de faire vivre sa croyance à travers elles. Les cinq salat se devaient d’être pratiquées telles que le voulait la tradition. En oublier une en ferait un mécréant.

    Il était l’heure pour lui d’effectuer la quatrième invocation du jour, la prière du coucher de soleil, dite Al-Maghrib’. Après avoir effectué les ablutions d’usage, Fares se positionna sur le sajada (tapis de prière) les mains à hauteur d’épaules et prononça les mots rituels : « Allahou Akbar », Il les posa ensuite sur sa poitrine, la droite sur le dos de la gauche.

    Enfin il débuta sa prière en demandant au seigneur de l’éloigner des pêchés. Après avoir récité la première sourate du Coran, Al Fâtiha, Fares s’inclina, puis dit par trois fois : « Soubhaana rabi al’athiim ».

    À cet instant, Fares entendit un sifflement. Sa voisine de palier Malika, devait certainement faire bouillir de l’eau. Ce bruit strident le troubla d’autant que celui-ci gagnait progressivement en intensité. Tous les buveurs de thé de l’immeuble avaient-ils décidé de le perturber dans l’expression de sa foi ? Il comprit qu’il s’agissait d’autre chose. Ces brutales ondes sonores emplirent la petite pièce, puis pénétrèrent son conduit auditif avec une violence inouïe. Fares se cramponna au tapis et pria pour que le son s’arrête enfin. Le seigneur, apparemment, ne l’entendit pas.

    Fares avait disparu.

    ELENA

    Mercredi 4 avril 2018 : 20 h 44. La Défense

    Le bureau d’Elena se situait au huitième étage d’un immeuble flambant neuf en bordure de Seine, Enfoncée dans un profond fauteuil en cuir blanc, elle regardait le faisceau de lumière projeté par la tour Eiffel, balayant inlassablement l’espace environ toutes les vingt secondes, Elle posa ses pieds enfin débarrassés de leurs escarpins sur un coin d’un large bureau, se les massa à travers ses bas couleur chair. Puis elle les ôta, les jetant en boule. Elle écarta au maximum ses orteils. Ceux-ci avaient bien mérité quelque repos, ayant arpenté durant la journée des kilomètres de couloirs.

    Le combiné du téléphone collé à l’oreille, elle attendait que son interlocutrice daigne enfin décrocher. « Mais qu’est-ce qu’elle fout, cette conne !? » s’exclama Elena tout en faisant circuler son stylo Mont Blanc entre ses doigts fins comme l’aurait

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