Le feu au royaume
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À propos de ce livre électronique
Dans "Le feu au royaume", André Thiriet, alias Dédé la Classe, truand rangé des voitures, a pris sa retraite en Espagne. Mais il revient à Paris pour enterrer son fils, Alexandre, assassiné en plein jour, et venger sa mort en enquêtant parmi ses "vieux amis". Bourdeau bien sûr n'est jamais loin, paradoxal ange gardien de l'ancien boss du Milieu.
Sébastien Doubinsky
Sébastien Doubinsky est un écrivain trilingue, né à Paris en 1963. Ses romans et poèmes sont publiés en France, aux Etats-Unis et en Angleterre. Il vit au Danemark, où il enseigne la littérature à l'université d'Aarhus.
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Aperçu du livre
Le feu au royaume - Sébastien Doubinsky
Sommaire
DIMANCHE
Chapitre
Chapitre
Chapitre
LUNDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
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Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
MARDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
MERCREDI
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Chapitre
Chapitre
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Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
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Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
JEUDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
VENDREDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
SAMEDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
DIMANCHE
Chapitre
LUNDI
Chapitre
MARDI
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
Chapitre
MERCREDI
DIMANCHE
1.
Entre le moment où j’ai décroché le combiné de mon oreille et celui où je l’ai reposé, je n’étais plus le même. Quelque chose avait fondu, disparu, s’était dilué dans mes veines pour toujours. C’était indescriptible, fugace, foudroyant comme un poison antique – cette tragédie grecque qui nous poursuit depuis vingt siècles sans jamais nous lâcher. On pourrait dire que cela me pendait au nez, que celui qui vit par l’épée, etc., mais en cet instant, cette vérité, cette évidence était derrière moi comme à contre-jour et j’ai entendu ta voix qui demandait quelque chose à Frank au bord de la piscine. D’ici je pouvais sentir le chlore et entendre la surface clapoter contre le rebord en ciment – et pour la première fois, j’ai remercié ta maladie, je l’ai remerciée du plus profond du cœur ; avec un peu de chance tu ne te rappellerais pas que tu as un fils – et moi je n’aurais pas à t’expliquer qu’il vient de mourir. Notre fils, pour toujours dilué dans mes veines.
2.
Frank m’a aperçu et m’a fait un petit signe de la main quand j’ai traversé la double porte vitrée du salon pour les rejoindre au bord de la piscine. Je pense que je devais être très pâle car il a gardé sa main, sa grosse pogne d’ancien boxeur aux phalanges bloquées par les rhumatismes, en l’air, comme s’il ne savait pas quoi en faire.
– Ça va ? m’a-t-il demandé en vrillant son regard brun dans le mien tel un chien inquiet.
J’ai secoué la tête et lui ai fait signe de venir à l’intérieur.
Toi, tu étais allongée sur le transat, le dos tourné vers moi, et j’imagine que tu étais en train de regarder les reflets du soleil de ce début de mai jouer à la surface de l’eau faussement bleue. Je ne sais pas à quoi – ou à qui – tu pensais en cet instant précis, si les mauvaises vibrations que mon corps déchiré lançaient tout autour de moi avaient par miracle réussi à te toucher et à révéler ma présence, mais tu t’es penchée sur l’accoudoir et tu as tourné la tête vers moi – la serviette rouge enserrant ton visage comme un turban de princesse orientale, tes yeux gris effleurant mon regard de leur vide sidéral.
Tu m’as souri et tu m’as dit « Bonjour ! » comme si j’étais le facteur, le jardinier ou un voisin – un de ces inconnus familiers qui peuplent notre quotidien sans jamais en faire vraiment partie – avant de disparaître de mon champ de vision et de me laisser contempler le dos du transat comme un mur impénétrable, rayé de rouge et de blanc.
3.
J’ai accueilli Frank dans la pénombre fraîche du salon, sa silhouette trapue s’arrêtant à quelques centimètres de moi. D’ici je pouvais sentir son eau de toilette italienne qui lui avait valu le surnom du « Beau Frank » dans notre jeunesse. Je pouvais sentir ses joues rasées de frais, son déodorant épicé, son haleine mentholée de vieux séducteur. Il a passé plusieurs fois sa main dans ses cheveux blancs pommadés et je nous ai revus, jeunes hommes dans l’arrière-salle du Celtique, rue de Lappe, en train de discuter avec les Corses, noyés dans la fumée âcre des Gitanes.
Nous étions des branleurs de vingt ans, eux des truands fatigués, autour de la cinquantaine. Beaucoup d’or autour du cou, de poils sur la poitrine, de dents manquantes dans les faux sourires. Ils étaient sous pression à cause des Algériens qui leur piquaient leurs femmes et leur drogue. Trois des leurs s’étaient fait dessouder en un mois. Le Balto, le café d’en face, était fermé administrativement depuis les « événements »