Émile Ollivier. Un destin exemplaire
Par Gérard Aubourg, Marcel Fournier, Lise Gauvin et
()
À propos de ce livre électronique
Un carnet de photos permet de suivre visuellement cet itinéraire et des lettres de l’auteur avec son ami Gérard Aubourg et avec ses éditeurs sont reproduits dans l’ouvrage.
Les principaux aspects de la vie et de l’œuvre d’Émile Ollivier, ses réflexions, son engagement, sont abordés dans cet ouvrage qui donne à lire et à voir la trajectoire d’Émile Ollivier, cet être déplacé qui a consacré sa vie à une œuvre de première importance. Émile Olivier, ce schizophrène heureux, est présent parmi nous.
Gérard Aubourg
Gérard Aubourg, né à Port-au-Prince, a passé son enfance et son adolescence à Haïti, rue des Casernes. Il a fait ses études primaires à l'Ecole Smith Duplessis et ses études secondaires au Lycée Alexandre Pétion. Diplômé de l'Ecole normale supérieure de Port-au- Prince, il part à Paris en 1965. Il s'inscrit à la Sorbonne : licencié en sociologie, et en Droit des affaires, il obtient son doctorat en histoire économique sous la direction du Professeur Pierre Vilar Professeur de sciences économiques et sociales, il a enseigné dans les lycées des Académies de Créteil, de Versailles et de Paris.
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Avis sur Émile Ollivier. Un destin exemplaire
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Aperçu du livre
Émile Ollivier. Un destin exemplaire - Gérard Aubourg
ÉMILE OLLIVIER
UN DESTIN EXEMPLAIRE
Mise en page : Virginie Turcotte
Maquette de couverture : Étienne Bienvenu
Dépôt légal : 2e trimestre 2012
© Éditions Mémoire d’encrier, 2012
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Gauvin, Lise,
Émile Ollivier : un destin exemplaire
(Collection Essai)
ISBN 978-2-89712-044-3
1. Ollivier, Émile, 1940-2002. 2. Écrivains haïtiens - Québec (Province) - Biographies. 3. Littérature de l'exil. 4. Éducation. I. Titre.
PS8579.L38Z64 2012 C843'.54 C2012-941172-8
PS9579.L38Z64 2012
Nous remercions Madame Marie José Glémaud et les Éditions du Cidihca pour leur aimable autorisation de reproduction des photos de leurs archives. Nous remercions également les archives de l'Université de Montréal pour avoir permis l'accès à leurs documents et la reproduction de certains d'entre eux.
Nous reconnaissons, pour nos activités d’édition, l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Conseil des Arts du Canada et du Fonds du livre du Canada.
Nous reconnaissons également l’aide financière du Gouvernement du Québec par le Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres, Gestion Sodec.
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Version ePub réalisée par :
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Amomis.comÉMILE OLLIVIER
UN DESTIN EXEMPLAIRE
Sous la direction de
Lise Gauvin
Collection Essai
Amomis.comDans la même collection :
Transpoétique. Éloge du nomadisme, Hédi Bouraoui
Archipels littéraires, Paola Ghinelli
L’Afrique fait son cinéma. Regards et perspectives sur le cinéma africain francophone, Françoise Naudillon, Janusz Przychodzen et Sathya Rao (dir.)
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uneh
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Présentation
Un destin exemplaire
Lise Gauvin
J’ai toujours eu une grande admiration pour Émile Ollivier. Pour l’homme, fin causeur, attentif à toutes les formes de culture, digne représentant de ce qu’il désigne dans La Brûlerie comme Le « Ministère de la Parole ». Pour l’œuvre, dont la pertinence et l’originalité ont été mainte fois reconnues. Après l’avoir côtoyé au cours des années 1980 et l’avoir invité à collaborer à la revue Possibles, j’ai eu l’occasion de le revoir à quelques reprises dans le cadre des événements entourant le prix Carbet de la Caraïbe – qui lui fut accordé en 1996 pour les Urnes scellées – et d’apprécier son humour tonique. En 2000, nous avions été reçus le même jour à l’Académie des lettres du Québec. Nous nous sommes retrouvés ensuite au jury du prix de l’essai décerné par cette institution. Deux ans plus tard, en octobre 2002, Émile Ollivier prononçait sa dernière conférence publique lors d’un colloque que j’avais co-organisé à l’Université de Montréal sur « Le dire de l’hospitalité¹ ». C’est donc sans hésiter que j’ai accepté l’invitation faite par les responsables du Centre de recherche sur la littérature et la culture québécoise (CRILCQ) de préparer une journée d’étude à partir du Fonds Émile Ollivier déposé à l’Université de Montréal, journée qui a eu lieu le 11 février 2011. Les textes réunis ici sont en majeure partie issus de cette journée et renvoient à des documents inédits que nous avons pu consulter grâce à ce fonds². Quant aux photos, elles proviennent soit de ce fonds, soit des archives personnelles de Marie José Glémaud, épouse d’Émile Ollivier, qui nous a aimablement autorisés à les publier.
On trouvera dans cet ouvrage un parcours d’Émile Ollivier qui porte aussi bien sur son itinéraire d’écrivain que sur celui de sociologue de l’éducation. Alors que Dany Laferrière évoque les multiples talents de son ami, Marcel Fournier et Julien Landry retracent l’intellectuel engagé qu’il n’a cessé d’être. Les premiers romans d’Ollivier sont présentés sous l’angle de la mémoire (Klaus) ou de la rumeur (Satyre) et la réception critique de l’œuvre est abordée par Christiane Ndiaye et Mylène Dorcé. J’examine pour ma part le rapport particulier qu’entretenait Ollivier avec la question de l’exil, question qui traverse l’ensemble de ses récits et de ses essais. Il ne s’agissait pas d’analyser ici chacune des publications d’Ollivier, auxquelles d’autres ouvrages ont déjà été consacrés³, mais plutôt de donner un aperçu de certaines des orientations qui y sont privilégiées, en écho à l’aspect biographique évoqué par Laferrière et Fournier.
Une deuxième partie s’intéresse aux correspondances d’Ollivier. Les échanges avec les éditeurs, présentés par Isao Hiromatsu, évoquent les débuts du jeune romancier et ses difficultés pour se faire publier. Les lettres à Gérard Aubourg, un ami avec qui il a correspondu durant près de vingt ans, sont des documents précieux qui témoignent des haltes et « passages » de la vie du romancier.
Ce portrait contrasté montre à quel point celui qui aimait se décrire comme un « cheval fou » a surtout représenté pour ceux qui l’ont fréquenté un destin exemplaire d’écrivain et d’intellectuel⁴.
1 Cette conférence est reproduite dans Émile Ollivier, Repérages 2, Leméac, 2011.
2 Classé Fonds Émile Ollivier P349, Division de la gestion de documents et des archives, Université de Montréal. C’est aussi grâce à certains inédits recueillis dans ce fonds et grâce au concours de Marie José Glémaud que nous avons pu préparer la publication de Repérages 2.
3 Voir, notamment, « Émile Ollivier », numéro spécial d’Études littéraires, sous la direction de Christiane Ndiaye, vol. 34, no 3, été 2002 ; Satyre, Joubert, Émile Ollivier : cohérence et lisibilité du baroque, Sarrebruck, EUE, 2011.
4 Je tiens à remercier les responsables du Service des archives de l’Université de Montréal et ceux du CRILCQ ainsi que madame Marie José Glémaud pour leur soutien dans l’élaboration de cet ouvrage. Je remercie également Isao Hiromatsu pour son travail de « repérage » dans les archives ainsi que le soutien du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) qui a rendu celui-ci possible.
Portraits et perspectives
Rapide portrait d’un ami en dix éclats
Dany Laferrière
La rencontre
– Décembre 1976. Un dimanche soir glacial montréalais, comme on en trouve dans la poésie de Nelligan. Toute la tribu des intellectuels et artistes haïtiens, qui vivaient à Montréal depuis plus d’une décennie, s’était retrouvée dans le salon aux vastes baies vitrées de l’appartement de Mireille Barberousse. On mangeait, buvait, fumait, dansait, mais surtout on causait. On parlait naturellement de la situation politique haïtienne (la dictature des Duvalier), mais aussi de littérature, de cinéma, d’histoire et de musique. Il y avait là : le cinéaste Roland Paret, le chanteur Jean Coulanges et son jeune frère, le guitariste Amos Coulanges, le poète Anthony Phelps, le politologue Daniel Holly et sa femme Hélène Magloire (la fille du poète Magloire Saint-Aude que Breton a naguère comparé à Nerval), le dramaturge Syto Cavé qui vivait lors à New York, la sociologue Micheline Labelle qui enseignait à l’Université du Québec à Montréal, l’économiste Yves Montas qui signait dans la revue Nouvelle Optique des articles implacables sur la bourgeoisie féodale haïtienne du pseudonyme de Jean-Luc en hommage à Goddard, l’éditeur Hérard Jadotte, l’historien Claude Moïse et le sociologue Frantz Voltaire qui dirigeait le CIDHICA, un centre de recherches caribéennes. On était au milieu de la soirée quand Émile Ollivier et sa femme Marie José Glémaud, qui écrivait alors une thèse sur Magloire Saint-Aude, ont franchi la porte. C’est Milo, m’a soufflé Voltaire en le voyant prendre place au bout du divan. J’ai tout de suite été attiré par la douceur qui émanait de sa personne. Sa simple présence donnait un ton plus modéré et courtois à la soirée qui commençait déjà à déborder (alcool + politique). Il avait cette façon particulière de tendre l’oreille quand quelqu’un prenait la parole, et de trouver du sens même à des opinions rapides et émotives. Dans ma petite chambre de la rue Saint-Denis, cette nuit-là, j’ai repensé à Émile Ollivier, en me disant que c’est rare de voir un pareil mélange d’intelligence et d’humanité chez un intellectuel.
La cuisine
– L’historien Claude Moïse, son alter ego, m’avait parlé des talents de cuisinier d’Émile Ollivier. J’étais impressionné car je tiens Claude Moïse pour un excellent cuisinier. Puis un jour, Ollivier m’invita à dîner. Il habitait à Notre-Dame-de-Grâce, ce qui était à mes yeux le bout du monde. À l’époque, je quittais rarement les limites du Quartier latin. Quand je suis arrivé chez Ollivier, il était en train de préparer le repas. Une odeur accueillante. Je l’ai donc rejoint dans cette vaste cuisine bien éclairée où il rayonnait. Il nous a offert à boire, à Claude Moïse et à moi, tout en fredonnant une bluette d’été. Marie José, sa femme, comme Dominique, sa fille, le taquinait là-dessus. Au fil de la conversation, j’ai découvert son côté midinette. Il ne se contentait pas de connaître par cœur les succès de la saison, il s’informait des moindres détails de la vie amoureuse des vedettes de l’heure. Plus le cliché sur l’amour était gros, plus il était touché. Cette poésie naïve (les vers mirlitons des chansonnettes) lui allait droit au cœur, ce qui faisait sourire un Claude Moïse tout aussi romantique, mais plutôt imperméable à ce genre de littérature. J’ai compris ce goût étrange quand j’ai entendu Ollivier évoquer son adolescence à Port-au-Prince. Pour tout le monde, mais plus encore pour un exilé, l’adolescence est une machine à produire des images brûlantes et nostalgiques. Surtout quand le paysage où s’est déroulée cette adolescence commence à s’effacer de notre mémoire. On a du mal à vivre l’effritement de cette sensibilité primitive. Pendant que ces idées se bousculaient dans mon esprit, Ollivier se démenait à nous préparer un délicieux canard à l’orange. J’écoutais la conversation entre Claude Moïse et lui à propos de leurs plats favoris. L’historien Moïse, cet homme qui vient du centre d’Haïti, une région connue pour ses grandes rizières, pratique une cuisine nationale où les épices locales tiennent le haut du pavé, tandis qu’Ollivier, né à Port-au-Prince, est plutôt un cuisinier cosmopolite qui ne rechigne pas à la fusion des genres. Deux visions différentes qu’on retrouve parfois dans la politique haïtienne.
La littérature
– Déjà à Port-au-Prince, je lisais les romans sud-américains. Avec Ollivier, j’ai trouvé quelqu’un avec qui partager mon enthousiasme pour Amado, Cortázar (Marelle), ou Asturias (surtout son portrait du dictateur Monsieur le Président). Et notre favori (on salivait rien qu’à en parler) c’était Gabriela, girofle et cannelle de Amado. L’histoire du Syrien Nacib parti à la recherche d’une cuisinière et qui tombe sur la plantureuse Gabriela. On y parlait de cuisine et de désirs dans un style ensoleillé qui nous rappelait Haïti. On connaissait García Márquez par cœur. Ses premières nouvelles (Pas de lettre pour le colonel) comme ses grands romans (Cent ans de solitude et L’amour au temps du choléra). Ollivier avait un faible pour Chronique d’une mort annoncée. Une mécanique parfaite. C’est ce côté intellectuel qui l’a fait pencher pour le Nouveau roman et Robbe-Grillet, Barthes et le degré