Malheureusement, les perroquets ne sont plus là pour raconter. Toto, le gris du Gabon que Lucette avait offert à Céline après la disparition de son chat Bébert, s’est tu quelques années après la mort de l’écrivain, en 1961. « Toto lui cassait ses crayons, lui faisait des tours pendables, raconte l’académicien Frédéric Vitoux dans sa Vie de Céline, dont une nouvelle édition revue et augmentée paraît ce printemps. Louis criait contre lui, Toto lui répondait. Ils s’entendaient tous deux d’une manière fantastique, ils ne se quittaient pour ainsi dire jamais. »
Lucette l’avait remplacé par une copie conforme, qu’elle nomma aussi Toto. Ce dernier se montrait toutefois moins bavard que son prédécesseur. Cette espèce de volatile serait capable, dit-on, d’assimiler 200 mots. Toto 2 en répétait un avec une sorte de jubilation : « cooorrrssseee ». Il imitait ainsi un visiteur de Lucette, l’écrivain et critique littéraire Angelo Rinaldi, à qui celle-ci avait demandé en le voyant pour la première fois à Meudon : « Vous êtes italien ? » « Je suis coorrssee, Madame », avait répondu le fier insulaire. Le second Toto était également moins joueur que le premier. Mais un soir, alors que la marraine de Nicole Vitoux, l’épouse de Frédéric, était adossée à sa cage, il avait picoré la moitié de son chandail. Peut-être fut-ce une manière de se venger de l’écrivain, qui avait tenté de lui apprendre L’Internationale… Toto 2 s’est éteint quelques jours après Lucette, durant l’hiver 2019.