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La maison à la grande cheminée
La maison à la grande cheminée
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Livre électronique253 pages3 heures

La maison à la grande cheminée

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À propos de ce livre électronique

Une histoire émouvante sans être sentimentale. Plusieurs histoires de femmes aux parcours très différents mais toutes aussi fortes les unes que les autres. Une histoire familiale qui vous fera voyager entre l’Italie et la Belgique avec en toile de fond la tragédie de Marcinelle et le phénomène migratoire des années soixante-dix. Un style calme qui insuffle sérénité et force au lecteur : pour ceux qui le veulent, rien n'est impossible, surtout si ce sont les femmes qui le veulent.

LangueFrançais
ÉditeurBadPress
Date de sortie17 nov. 2022
ISBN9781667444079
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    Aperçu du livre

    La maison à la grande cheminée - Giuseppina Valla Innocenti

    La maison à la grande cheminée

    Giuseppina Valla Innocenti

    ––––––––

    Traduit par Angelina OSWALD 

    La maison à la grande cheminée

    Écrit Par Giuseppina Valla Innocenti

    Copyright © 2022 Giuseppina Valla Innocenti

    Tous droits réservés

    Distribué par Babelcube, Inc.

    www.babelcube.com

    Traduit par Angelina OSWALD

    Babelcube Books et Babelcube sont des marques déposées de Babelcube Inc.

    Giuseppina VALLA INNOCENTI

    La maison à la grande cheminée

    Roman

    Giuseppina Valla Innocenti est née à Castagnole Piemonte le 14 janvier 1953, elle y vit encore aujourd'hui avec sa famille.

    Diplômée en Lettres, elle a publié Sulla strada dei ricordi (Alzani, 2002), La vecchia cipolla d'argento (Edizioni Nuovi Poeti, 2004), Le radici della felicità (Edizioni Nuovi Poeti, 2005), Il mistero di Casa Castagno (Edizioni Angolo Manzoni, 2008) e Battiti di emozione (GDS edizioni, 2009). En 2012, elle publie chez Araba Fenice La forza dell'edera et, auprès de la même maison d'édition, Non ti fermare sul ponte! en 2015 et Tace il labbro en 2016.

    Souvent, avant de s'endormir sur les livres qu'elle avait sur sa table de chevet, à côté de la mienne, elle me répétait que je devais prendre ma vie en main, me construire un avenir loin des limites que les autres avaient établies pour moi, car chaque femme devait revendiquer sa propre indépendance.

    Et moi, même si j'étais toujours très fatiguée, je l'écoutais jusqu'à ce que mes yeux ne se ferment...

    (Giuseppina Valla, La maison à la grande cheminée)

    À ma fille Giorgia.

    CHAPITRE UN

    ––––––––

    Janvier 2012.

    L'aile imposante de l'avion cache les nuages, pendant quelques minutes on ne peut que les imaginer, mais, enfin, les voilà qui apparaissent. Dans leurs formes arrondies et extravagantes, des amas de chantilly qui contrastent avec la légère couche de brouillard, me faisant penser à celle qui recouvre la campagne de Turin lors des premiers jours d'automne.

    À l'intérieur de ce grand bolide orange, de légers bruits de fond, des rires exubérants de femmes, des petits cris d'enfants dans les bras de leur mère, attirent l'attention et empêchent les voyageurs de se réfugier dans leurs pensées.

    Poussé par un personnel de bord aux allures chaleureuses et accueillantes, le chariot fumant de boissons chaudes apparaît dans le long et étroit couloir. Il laisse derrière lui une agréable atmosphère de salon de maison ou de bar de ville et invite les passagers, intéressés, à détacher leur regard du hublot. Petit à petit les yeux des enfants s'écarquillent devant tant de tentations et les adultes, eux aussi pris de l'envie de vider le chariot abondant de sandwichs et d’en-cas sucrés et salés, se contentent d'acheter de petits sachets de chips croustillantes.

    Ce moyen de transport low cost, réservé sur internet quelques jours avant, favorise la présence d'un bon nombre de jeunes qui, de temps en temps, avec leur musique à plein volume dans leurs écouteurs ronds collés sur les oreilles, remplissent l'air des nouveautés musicales commerciales.

    Moi, Vanessa[1], assise sur le siège central, je scrute avec attention tout ce qu'il se passe. Ce n'est pas la première fois que je prends l'avion mais l'émotion est forte. Peut-être est-ce dû à mon prénom si particulier, peut-être est-ce dû à mon caractère, toujours un peu nerveux. Ce qui est sûr, toutefois, c’est que les sept lettres de mon prénom en ce moment même me procurent, à tout juste quarante-deux ans, une grande euphorie ; je vais enfin pouvoir connaître durant ce voyage en Belgique le visage, les traits et les habitudes de ma tante maternelle, la personne que j'ai tant aimée, respectée, mais aussi malheureusement, attendue pendant des années.

    Et, c’est exactement quand ma vie a enfin pris la bonne tournure, que j'ai près de moi un mari qui m'adore et une fille qui se dirige avec assurance vers son avenir, que l'arrivée d'une lettre en français, envoyée non de ma tante mais d'une inconnue, m'oblige à partir en toute hâte. Pendant mes cinq années, désormais bien lointaines, à l’université de Droit, j'ai étudié cette langue. J'en ai toujours aimé sa musicalité et je la comprends assez bien. Le courrier reste toutefois très bref : « Venez voir votre tante le plus vite possible. » Mais, l’étrange signature qui précise « Brigitte, sa seule et unique grande amie » m'a tout de suite alerté.

    Cette femme serait donc complètement seule ? Après la mort de ma grand-mère avec qui j'avais toujours vécu, moi, jeune fille de quatorze ans, orpheline de mes deux parents, je m'étais tant de fois demandé pourquoi la sœur de ma mère n'avait jamais pris la peine de venir me rencontrer, me parler, et étant donné que j'étais le dernier membre de sa malheureuse famille, me serrer, au moins une fois, dans ses bras.

    Je savais de la supérieure de l’école religieuse que c'était elle qui payait, chaque mois et toujours de manière ponctuelle, mes frais scolaires. Elle veillait à ce que je ne manque de rien, de ma garde-robe aux livres d'études, des visites culturelles aux appels téléphoniques coûteux. Ces derniers étaient très fréquents, car même de loin, elle souhaitait être informée de chacun de mes faits et gestes, qu'ils soient petits ou grands. Le personnel du l'institut, de la secrétaire aux plus humbles des concierges étaient au courant de la générosité de Mademoiselle et quand, tous les ans, on parlait de la sortie de fin d'année, certaines de mes camarades, d'un air profondément envieux, répétaient :

    —  Les sœurs devraient peut-être nous dire le prix parce qu'ici il n'y a que Vanessa qui ait une tante super riche.

    À chaque fois que j'entendais cette réplique, je baissais les yeux, mortifiée, sans réussir à trouver le courage de leur répliquer qu'elles avaient beaucoup plus de chance que moi, car même si elles étaient bien moins aisées, chaque week-end elles rentraient chez elle car quelqu'un les y attendait. J'ai toujours eu en moi des sentiments contrastés envers cette figure si présente d'un côté mais tellement loin de ma vie de l'autre, particulièrement à l'âge de l'adolescence et ce, jusqu'à ce que je trouve un travail. Pendant très longtemps, ce mot Belgique a été le symbole de l'origine de mon malheur autant que, par un jeu tragique du destin, il l'a été pour ma mère et ma grand-mère. Quand j'étais petite, je me suis demandé bien plus d'une fois, ce qu'il pouvait bien y avoir de si spécial dans ce lieu qui attirait les personnes les plus importantes de notre famille...

    C'était en effet, exactement, là-bas que le 8 août de l'année 1956 mon grand-père, âgé de 36 ans, 126 autres étrangers et 135 compatriotes, avaient trouvé la mort dans un incendie qui avait débuté dans l'un des puits de la mine de Marcinelle, une commune de la ville de Charleroi.

    Parmi les victimes italiennes qui venaient de tout le pays, soixante étaient originaires de la région des Abruzzes, beaucoup d'entre eux étaient du Piémont. Des jeunes, majoritairement des paysans et des ouvriers, exaspérés par une situation de reprise économique très dure, seuls avec des enfants à élever, avaient laissé leur famille et ce qui leur était le plus cher pour aller gagner, à l'étranger, des salaires plus dignes. Mon grand-père avait toujours travaillé dans les champs, mais comme ses toutes petites économies avaient servi à rénover la maison, presque entièrement détruite par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, les seules rentes de la récolte des champs ne lui permettaient plus d'aller de l'avant. Sur les grandes affiches roses distribuées dans toutes les municipalités italiennes, il lisait, depuis un certain temps déjà, qu’on recherchait de la main-d'œuvre pour aller travailler dans les mines belges. Il voulait y aller depuis des années, mais ma grand-mère le lui avait toujours interdit, jusqu'à ce jour où, en cachette, un sac de toile sur l'épaule, il monta sur un buggy qui se dirigeait vers la gare de Turin et personne, jamais plus, ne le vit en revenir. Il rejoignit Milan, voyagea des dizaines et des dizaines d'heures par les vieux chemins de fer militaires. Quand il eut finalement rejoint sa destination, on lui offrit un misérable lit dans un hangar presque aussi grand que la place de la ville et il devint, à son tour, une gueule noire. Là-bas, la fatigue, qui en chaque coin de la Terre à ses propres caractéristiques, ne consistait pas à transpirer sous le soleil pour faucher tous les recoins des prés existants, ni à retourner le foin du lever au coucher du soleil sans jamais s'arrêter, mais consistait à travailler dans les entrailles de la montagne où l’air manque, dans des tunnels si longs et si étroits bien plus adaptés à des animaux qu'à des hommes. Pour aller creuser dans l’obscurité, au milieu de la poussière qui monte à la gorge jusqu'à ne plus pouvoir respirer, on choisissait les personnes les plus saines et musclées parce que les corps diminués par le temps et la maladie, au-delà d'une certaine profondeur, risquaient d’étouffer. Lui qui était fort et en bonne santé, avait toutes les caractéristiques demandées. C’est sous un autre ciel que l'espoir, plus vigoureux que jamais, sembla à nouveau briller et que les nuages apparurent moins obscurs.

    Un mois plus tard, on reçut une petite carte froissée remplie d'une écriture incertaine et tremblante faisant ressentir la fatigue qui en découlait, elle disait en peu de mots : « Tendres baisers à mes trois femmes. » Ma grand-mère la déposa derrière la vitrine du buffet de la cuisine et l’exhiba à tout le voisinage. Quand une autre lettre arriva, fermée dans une grosse enveloppe jaune, et où le directeur de la mine l'informait de la mort de son mari, elle la cacha au fond de la poche de son tablier, mouillée de larmes et de sanglots. Son pauvre corps, entièrement dévoré par les flammes d'un tragique incendie, ne put être identifié. De notre grand-père, il ne restait plus rien, pas même un minime fragment de sa montre oignon, sa seule richesse qu'il gardait toujours dans la poche de sa chemise à carreaux de paysan. Ce fut peut-être la meilleure chose pour la veuve et ses deux petites filles de dix et huit ans, qui n'auraient jamais pu trouver l'argent nécessaire pour faire rapatrier le corps en Italie. Comme beaucoup d'autres, il fut englouti dans un inimaginable enfer, comme on le vit écrit par la suite sur le registre des personnes décédées ce jour-là. On réussit enfin à dominer le feu de la mine après de longs jours interminables et pénibles mais, dans ma famille, les conséquences de la terrible mort de mon grand-père ne s'éteignirent jamais.

    Si, quand j'étais petite, je posais des questions sur ce qu'il s'était passé, ma grand-mère changeait directement de sujet. La majeure partie du temps elle s'énervait, mais sur son lit de mort, le seul mot qu'elle prononça jusqu’à la fin fut exactement Belgique associé au nom de Vittoria, la fille qui, comme son père s'en était allée dans ce pays sans son accord. C'est ainsi, en effet, que s'appelait ma tante et, quand la maîtresse nous faisait chanter l'hymne national d'Italie j'aimais répéter le couplet où ce nom était prononcé car j'étais convaincue qu'il avait été écrit pour moi, sa nièce qui avait tant besoin de la connaître. Mon père n'a ni frère ni sœur et, étant donné qu'il a quitté maman quand j'avais à peine un an, il y a bien longtemps qu'il ne fait plus partie de mes souvenirs. Ma tante est donc depuis toujours, la personne la plus importante à mes yeux. Les rares fois où ma grand-mère me parlait d'elle, elle me disait qu'elle s'entendait très bien avec ma mère. De deux ans la cadette, elle obéissait au doigt et à l'œil à son aînée. Elles jouaient ensemble des journées entières sans jamais se chamailler et, les longs soirs d'hiver, avant que le poêle à bois rond ne s’éteigne, elles se blottissaient dans le même lit, se réchauffant et discutant jusqu'à s'endormir. Ma tante n'avait pas continué ses études et, à la fin du collège, elle était restée pour aider ma grand-mère à la campagne, pendant que ma mère, tous les matins rejoignait Turin grâce au bus de village pour fréquenter la faculté de Droit, université publique et non privée, comme moi.

    Dans la vieille maison de mon enfance, située à une vingtaine de kilomètre de Turin, à côté de la photo en noir et blanc de Papi, un casque de métal de minier sur la tête, une grosse lampe en fer posée sur le sol et le regard triste et apeuré de l'émigrant, les murs humides de la pièce étaient recouverts de nombreux portraits des deux sœurs, pris au cœur de leur jeunesse. Vittoria, assise sur les marches de l'escalier de la maison, est mince, une expression douce et soumise sur le visage, ses cheveux bruns attachés en queue de cheval. Maman, elle, debout devant une plate-bande colorée d'œillets, les a longs, abandonnés sur les épaules et le roux naturel, hérité d'on ne sait quel descendant, reflète dans les yeux de celle qui la regarde. Elle sourit à pleines dents, sa robe est fleurie, soignée mais aussi tape-à-l’œil. Elle porte des chaussures à talons très hauts tandis que ma tante porte un tablier de travail et des sandales plates. Elles se tiennent par la main, témoignage de la complicité qui les lie.

    CHAPITRE DEUX

    Il est cinq heures de l'après-midi. Alors que l'hôtesse de l'air, très gentille, m'offre un café, je pense à ce moment que j’attends depuis si longtemps. Que ce soit dans notre maison de campagne, perdue au milieu de vastes étendues dans la plaine de Turin, ou dans la salle d'attente du grand internat des religieuses, ma tante Vittoria, ou « la belge » comme on l'appelait au village, a toujours été présente dans mon cœur et dans ma tête.

    On était en 1972, elle avait tout juste vingt-quatre ans mais, seule avec seulement quelques centimes en poche, elle est partie pour Bruxelles, dans un train triste et gris comme son cœur. Mes pleurs incessants n'avaient servi à rien. À seulement deux ans, comme un chaton qui remue sans cesse, je lui courais autour et m'accrochais à sa jupe pour l'empêcher de franchir le seuil de la cour.

    On était début mai, et en cet après-midi brûlant de fin de printemps, non seulement moi, qui était toute petite, mais aussi les paysans dispersés dans les champs pour couper le foin, ne comprirent pas immédiatement ce qui était en train de se passer. C'est seulement après avoir entendu :

    —  Non ! pas en Belgique comme ton père ! tu ne peux pas me faire ça ! pas aujourd'hui ! qu’eux aussi furent assaillis d'une immense douleur.

    Ce cri désespéré venait de ma grand-mère car en ce jour précis la maison à la grande cheminée était de nouveau replongée dans le deuil. Quelques heures à peine étaient passées depuis que la voiture noire des pompes funèbres était sortie, par l'imposant portail en fer, portant au cimetière le corps sans vie de ma mère qui, à l’âge de vingt-six ans s'était fait renverser, à bicyclette, par une voiture qui, allant à une allure incontrôlable, avait soudainement surgit d'une rue adjacente. À l'endroit précis de l'accident, pendant des semaines, on vit encore la terrible trace de pneu laissée sur la terre battue et le regard miséricordieux de la Vierge, peint sur le pilier, semblait, lui aussi, attristé par ce terrible malheur.

    —  Après la souffrance causée par la perte de ta sœur, tu ne peux pas me faire ça ! Sans toi je n’y arriverai pas, tu dois rester ! criait ma grand-mère sans plus aucune retenue.

    On alla chercher le prêtre, on fit tout ce qu'on pouvait pour la retenir, mais tante Vittoria, comme on le raconte encore aujourd’hui, ne revint plus.

    J'ai donc grandi avec, ancrée en moi, l'image d'une jeune fille qui quitte son village de campagne pour partir, complètement seule, voyager à travers le monde. La nuit, à l'internat, alors que les branches pleines des feuilles des arbres du parc battaient sans relâche sous la force du vent, je la voyais courir vers moi. Prête à la serrer contre moi, je me réveillais en sursaut et, le visage défait et les pieds nus sur le sol froid, je me mettais à hurler : « Tata ! reviens ! Je t'en prie reviens ! ». Je ne compte plus les fois où, la nuit, dans la chambre éclairée par la faible lumière des lampadaires qui passaient à travers les volets entrouverts, je prenais sous le coussin mon papier à lettre parsemées de petites fleurs pour lui écrire, la suppliant de venir me chercher, mais je me rappelais ensuite les mots de mamie : « Il faut avoir la force et le courage d'affronter soi-même les épreuves, même les plus difficiles ! » j'effaçais tout et me rendormais en pleurant.

    Assaillie par tous ses souvenirs, moi aussi maintenant, comme ma tante à l’époque, je comprends le sentiment de celui qui s'embarque dans une aventure aux contours très incertains. Moi-même, je commence à ressentir cette forte inquiétude et, pour essayer de me libérer de l'émotion qui me saisit, je ravale ma salive. Je n'ai aucune envie de commencer à discuter avec ma voisine qui me regarde d'un air trop insistant à travers ses lunettes de soleil et je me demande pourquoi j’ai dû attendre la lettre d'une inconnue pour trouver le courage d'aller retrouver ma tante moi-même.

    Soudainement les mots que la maîtresse me répétait, quand, à l'approche de Noël, elle me voyait particulièrement triste, me reviennent en mémoire : « Avec le nom que tu as, Vanessa, même si tu n'as pas d'ailes, toi aussi tu voyageras et quand tu seras grande, tu voleras jusqu’en Belgique, c'est certain ! » Elle avait raison : j'étais sur le point d'y arriver, mais un triste sentiment s’empare de moi lorsque je pense au fait qu'il était peut-être trop tard...

    À présent, c'est à mon tour de me sentir coupable car, je dois bien reconnaître que depuis que j'ai rencontré mon mari et que ma vie a trouvé le bon chemin, je n’ai plus beaucoup pensé à ma tante exilée. Quand on trouve l’épaule sur laquelle poser sa tête fatiguée, même le souvenir d'une enfance malheureuse et de tant de souffrances passées s'atténue sensiblement afin de recueillir et de faire fructifier, de la meilleure des façons possibles, les opportunités que nous offre

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