À 99 ans, elle a choisi de quitter la Côte d’Azur pour retourner en Ukraine. Notre reporter, membre de sa famille, l’a accompagnée dans cette odyssée extraordinaire
Dans le train, la fragile babouchka ne passe pas inaperçue. Et mérite bien son champagne à l’arrivée !
Ils ont préparé le pain noir et l’ail, et sorti une bouteille qu’ils gardaient précieusement pour arroser la victoire. Trois mille kilomètres séparent Paris de Dnipro, troisième ville d’Ukraine, au bord du Dniepr tumultueux, la seule frontière naturelle qui protège le pays des envahisseurs. Le voyage a duré vingt-quatre heures, aux trois quarts passées dans un wagon sur lequel veille le chef de train, chargé d’alimenter le poêle à charbon, et une cantinière. C’est le fils de Nina, sa chère voisine, qui avait accompagné Valentina à la gare en pleine offensive russe. C’est lui qui est venu la chercher, fidèle au poste. Dnipro a retrouvé une de ses plus anciennes citoyennes, une des plus fragiles aussi, mais des plus déterminées.
Deux guerres, autant de famines, l’exil et des amours contrariées. Sa vie raconte un siècle d’histoire ukrainienne
Cette histoire, l’Occcident l’a longtemps ignorée. Devant de vieilles photos, Valentina la raconte. Née pendant la disette de l’après-guerre civile, elle est confrontée, à 8 ans, aux ravages de l’Holodomor, la famine provoquée par les réquisitions massives ordonnées par Staline. Elles feront des millions de victimes. Même les vieux bolcheviques sont pourchassés pour crimes de déviationnisme ou de nationalisme bourgeois. L’occupation nazie ajoute le malheur au malheur. Valentina découvre les camps de travail en Allemagne où les Slaves sont maltraités, puis, à la Libération, les soupçons de collaboration avec l’ennemi. Aujourd’hui, elle retrouve les vieux réflexes et surnomme Poutine « le petit kagébiste ».
À ceux qui ont cru à une lubie de vieille dame et ont tenté de la dissuader, Valentina a brandi la menace d’une