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Eduquer pour rendre heureux
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Livre électronique320 pages4 heures

Eduquer pour rendre heureux

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À propos de ce livre électronique

Éduquer un être humain pour le rendre heureux, c’est lui apprendre à être lui-même, à être en relation avec les autres, à être créateur de sa vie, de ses rêves et du monde. Écrit pour les parents et les éducateurs de tous les milieux par une spécialiste des relations humaines, ce livre se veut surtout un guide pratique qui fournit aux parents et aux enseignants des moyens concrets et réalistes d’accomplir leur mission auprès des éduqués.
Enfin, un auteur qualifié et d’expérience qui accorde à ceux qui sont au cœur de la relation éducative la place qui leur revient véritablement dans la société. L’auteur reconnait dans ce livre l’importance de leur rôle comme facteur premier d’évolution de l’humanité. Aussi, considère-t-elle qu’il est grandement temps qu’on valorise les parents et les enseignants et qu’on leur fournisse les ressources dont ils ont besoin. C’est pour eux qu’elle a écrit ce livre qui n’est pas un ouvrage théorique ni scientifique, mais une œuvre sensible et profondément humaine. Ce guide rejoint le cœur de chacun de ceux qui sont aux prises avec la réalité de la vie éducative dans la famille et à l’école et reconnait la valeur de leur expérience quotidienne.
Éduquer pour rendre heureux est un livre d’espoir qui entraine le parent/éducateur sur des chemins réalistes et efficaces pour qu’il puisse lui-même trouver le bonheur en éducation et pour qu’il le partage.
LangueFrançais
Date de sortie21 févr. 2018
ISBN9782897211523
Auteur

Colette Portelance

Thérapeute Non Directif Créateur et pédagogue, le docteur Colette Portelance est diplômé en Sciences de l’Éducation de l’Université de Montréal et de l’Université de Paris. Auteur et conférencière réputée, elle a créé l’ensemble des programmes de formation professionnelle du Centre de Relation d’Aide de Montréal Inc. et de l’École Internationale de Formation à l’ANDC Inc. dont elle est la cofondatrice. Thérapeute chevronnée, elle a développé ses propres conceptions psychopédagogiques et psychologiques de la relation d’aide qu’elle a élaborées dans la création d’une nouvelle approche: l’Approche non directive créatrice (ANDC), approche qu’elle développe dans ses nombreux ouvrages. Spécialiste de la communication et des relations humaines, Colette Portelance est connue et reconnue pour son authenticité, son respect profond de la personne et sa grande capacité à favoriser l’exploitation des ressources personnelles et professionnelles.

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    Aperçu du livre

    Eduquer pour rendre heureux - Colette Portelance

    [ Introduction ]

    Ce livre n’est pas un ouvrage théorique ni scientifique. Il est le résultat de l’expérience de nombreux parents et de nombreux enseignants que j’ai rencontrés au cours de ma carrière, et surtout le résultat de mon expérience personnelle d’éduquée et d’éducatrice auprès de mes quatre enfants, auprès des adolescents auxquels j’ai enseigné pendant dix-neuf ans et auprès des adultes en tant que formatrice de spécialistes de la relation d’aide et des relations humaines au Centre de relation d’aide de Montréal depuis 1985 et à l’École Internationale de Formation à l’ANDC depuis 1996.

    Conçu spécialement pour les éducateurs, cet ouvrage, qui se veut surtout un guide pratique, s’adresse particulièrement aux parents et aux enseignants. Il n’est pas centré sur le savoir et l’acquisition de connaissances, mais sur le «savoir-faire» et le «savoir-être».

    Bien que l’approche éducative proposée dans ces pages est fondée sur le respect profond de la nature de l’éduqué et de ce qui fait son unicité, elle donne à l’éducateur et à la relation éducative la place fondamentale et primordiale qui leur revient dans le processus d’évolution de la personne humaine, de la société et de l’humanité.

    Si les théories éducatives existantes tiennent de plus en plus compte de l’éduqué, elles ne donnent pas toujours les résultats escomptés au niveau de ses apprentissages et de sa réalisation parce qu’elles se concentrent surtout sur la transmission de connaissances au détriment de la personne sur laquelle repose le succès de l’éducation: l’éducateur. Pourtant, des auteurs connus comme Jung, Lozanov, Kris-namurti, ont démontré son influence indéniable sur le développement de l’éduqué: «La véritable éducation commence par celle de l’éducateur (…), écrivait Krisnamurti dans son livre De l’éducation. Son enseignement est à l’image de ce qu’il est.»

    Les parents et les enseignants éduquent avec ce qu’ils sont beaucoup plus qu’avec ce qu’ils savent. D’ailleurs si la personne de l’éducateur ne faisait aucune différence pour l’éduqué, on pourrait la remplacer par un robot, ce qui serait la meilleure manière de déshumaniser l’acte éducatif. Nul ne peut nier à quel point la relation éducative est importante dans le processus évolutif d’un être humain. Pour vous en convaincre, reportez-vous à votre expérience personnelle en tant qu’enfant, qu’adolescent voire jeune adulte. Que vous reste-t-il de plus important de ces années de formation? Quels sont les éducateurs scolaires et parentaux de qui vous gardez les meilleurs souvenirs et pourquoi? Quels sont ceux qui vous ont le plus apporté et que vous ont-ils apporté? Quels sont ceux dont l’influence a été la plus bénéfique sur ce que vous êtes devenus? Prenez bien le temps de répondre à ces questions avant de poursuivre votre lecture.

    Quand je m’arrête à faire la rétrospective de l’éducation que j’ai reçue comme enfant, écolière et étudiante, des personnes bien précises me reviennent à l’esprit. Par leur respect, leur écoute, leur confiance, ces personnes ont contribué à faire fleurir en moi ce qu’il y avait de meilleur. J’ai aujourd’hui une grande reconnaissance envers ces éducateurs qui ont cru en moi et qui ont accordé de l’importance à ce que j’étais. Avec eux, je me suis sentie un être humain et non un objet à remplir de connaissances. Leur passion pour ce qu’ils faisaient a éveillé la mienne. Ces maîtres ont su mettre leurs connaissances au service de l’humain. Par leur approche éducative, ils m’ont donné le goût d’apprendre et les clés de ma réalisation. Grâce à eux, je sais aujourd’hui qu’éduquer une personne, ce n’est pas la façonner, la modeler à l’image de nos introjections, la fabriquer comme un objet ou se limiter à des savoirs uniquement pour savoir.

    Le but de l’éducation n’est pas de faire de l’éduqué un être parfait et performant qui prend sa valeur dans le regard des autres et dans ses connaissances, mais plutôt, et surtout, de le rendre heureux, c’est-à-dire bien avec lui-même et avec les autres, et capable de sortir grandi des obstacles qu’il rencontre sur son parcours de vie. Cela s’apprend grâce à ce que transmet l’éducateur par son souci constant de cohérence entre ce qu’il est, ce qu’il pense, ce qu’il vit, ce qu’il dit et ce qu’il fait.

    Certains parents croient que si leur enfant est meilleur que les autres, il réussira mieux sa vie. Si réussir sa vie signifie être supérieur aux autres par le biais de l’apparence, de la connaissance et de la seule réussite professionnelle et financière, peut-être atteindront-ils leur objectif. Mais à quoi servent le savoir et le succès professionnel si la vie affective est sacrifiée? À quoi sert à une personne la réussite sociale et financière si, sur les plans intérieur, personnel et relationnel, elle n’est pas heureuse?

    Nous ne sommes pleinement satisfaits et heureux que lorsque nous avons le sentiment profond de suivre notre voie intérieure et de nous accomplir sur les plans affectif, relationnel, professionnel et spirituel sans contourner les obstacles de la vie et sans nier la souffrance.

    Pour atteindre cet état intérieur de sérénité et de paix qui ne se mesure pas scientifiquement, mais qui se manifeste chez l’éduqué par le sentiment de satisfaction intérieure, il m’importe de centrer mes propos non sur le savoir, mais surtout sur le savoir-faire et sur le savoir-être. C’est pourquoi je considère qu’éduquer une personne humaine c’est principalement lui apprendre:

    -à être elle-même;

    -à être en relation avec les autres;

    -à être créatrice de sa vie et de ses rêves.

    Si l’éducation est aussi «la mise en œuvre des moyens propres à assurer la formation et le développement de l’être humain» (Robert), il importe ici de se demander par quels moyens un éducateur peut apprendre à l’éduqué à être lui-même, à être en relation avec les autres et à être créateur de sa vie et de ses rêves, et ce, qu’il soit parent, enseignant, éducateur spécialisé, entraîneur sportif ou autre.

    Mon but, en écrivant ce livre, est précisément de répondre à cette question en apportant de nombreux exemples. Je proposerai des moyens concrets et pratiques pour améliorer la qualité de l’éducation et pour nourrir la relation éducative afin qu’elle devienne source de liberté, de créativité et de bonheur. Je souhaite aussi promouvoir une forme d’éducation qui puisse servir de fondement à une société plus riche intérieurement où les valeurs humaines et relationnelles y occupent une place de choix.

    CHAPITRE 1

    [ COMMENT APPRENDRE À L’ÉDUQUÉ À ÊTRE LUI-MÊME? ]

    «J’ai peur, j’ai peur», crie en pleurant le petit Georges. Le prenant solidement par la main, son père le tire vers le déclencheur de sa frayeur, le gros chien noir du voisin, et lui dit d’un ton péremptoire: «Arrête de pleurer. Tu n’as aucune raison de t’affoler, ce chien n’est pas méchant. Et puis, regarde ton frère, il est plus jeune que toi et il n’a pas peur, lui.»

    À son émotion première par rapport au chien s’ajoutent, dans le cœur de Georges, une crainte de perdre l’amour de son père en plus de sentiments intenses de honte, de culpabilité et d’infériorité. Envahi par son vécu, il refoule instantanément cette souffrance insupportable pour ne plus la ressentir. À cinq ans, il comprend que, pour être conforme aux usages et pour être aimé de son père, il ne doit pas pleurer et, conséquemment, il ne doit pas avoir peur.

    Son émotion et l’expression de cette émotion n’ayant pas été reconnues, Georges apprendra, comme des milliers d’enfants, à renier une partie importante de lui-même; il apprendra, pour être accueilli par son entourage, à se fabriquer un personnage «acceptable», qui n’est pas vraiment lui-même.

    Qui ne reconnaît pas des bribes de sa propre histoire dans l’expérience de Georges? N’avons-nous pas un jour ou l’autre fait le choix inconscient de trahir notre essence même pour satisfaire de façon compensatoire notre besoin vital d’amour? N’avons-nous pas développé une façon d’être, d’agir et de réagir qui ne correspondait pas à ce que nous étions fondamentalement pour ne pas être rejetés, disqualifiés ou abandonnés par ceux de qui notre vie dépendait?

    Loin de moi l’idée d’accuser les éducateurs qui, eux aussi, ont souffert de ce tiraillement intérieur, de cette lutte entre la personne encore si fragile de l’enfant qu’ils ont été et le personnage qui se présentait comme leur seule bouée de sauvetage psychique pour être aimés. Comment pouvaient-ils enseigner à leurs enfants à être eux-mêmes alors qu’ils ne l’avaient pas appris?

    Pour répondre à cette question qui fait l’objet du présent chapitre, je montrerai, après avoir exploré le sens de «être soi-même», les caractéristiques et les conséquences d’une éducation qui «fabrique» des personnages et les caractéristiques et les conséquences d’une éducation qui cultive l’épanouissement de la personne. Le rôle et l’importance de l’éducateur dans ces deux types d’éducation y seront clairement démontrés.

    Être soi-même

    Après avoir connu deux échecs amoureux très éprouvants, Karl était plutôt réticent à vivre une autre expérience amoureuse. La peur de souffrir encore l’empêchait de céder à ses attirances pour certaines femmes. Il réussit à contenir ses élans jusqu’à ce qu’il rencontre Karine qui, par sa transparence, son ouverture, son respect profond de l’autre, réussit à faire fondre assez de résistances en lui pour qu’il consente, malgré la peur, à ouvrir son cœur, une fois encore, à l’amour. Animé par le désir de réaliser son rêve de bâtir une relation amoureuse satisfaisante, et doutant de sa capacité d’y arriver, il me demanda un jour: «Dis-moi comment faire pour que ma relation avec Karine ne se termine pas comme les deux autres?»

    Sa question me laissa d’abord perplexe. J’aurais voulu donner à ce jeune amoureux la clé magique de la réussite d’une vie de couple, mais je me sentais impuissante à la trouver. «De nombreux facteurs ont contribué à assurer la réussite de ma vie amoureuse, lui ai-je répondu, mais je ne sais trop ce qui pourrait nourrir la tienne. Toutefois, ai-je ajouté, je suis certaine d’une chose que je considère très importante. Je vais t’en faire part. Il est fondamental que tu sois toi-même avec Karine, que tu n’essaies pas de répondre à l’idéal qu’une femme peut se faire d’un homme et que tu la voies aussi telle qu’elle est, sans l’idéaliser. Ne tente pas, ai-je poursuivi, d’être ce que tu crois que tu devrais être ou encore ce que tu crois qu’elle voudrait que tu sois, pour lui plaire. Si tu te fabriques un personnage pour être aimé d’elle, tu ne seras jamais sûr de son amour pour toi et ton attachement sera empoisonné par l’insécurité. Ce que tu gagneras à être toi-même n’a pas de prix puisque tu auras la conviction profonde, si elle reste en relation avec toi, qu’elle t’aime vraiment pour ce que tu es. Et cela contribuera à développer l’amour de toi-même et te donnera un sentiment profond de liberté intérieure.»

    Cet événement s’est passé il y a quelques années. Au moment où j’écris ces pages, Karl vit toujours une relation amoureuse avec Karine.

    Combien de personnes sont incapables de relations amoureuses et affectives satisfaisantes parce qu’elles cherchent toute leur vie l’homme idéal ou la femme idéale; en un mot, l’être parfait qui ne les forcera jamais à faire face à leur propre imperfection, à leurs propres faiblesses, à leurs propres limites.

    Dans sa quête d’amour sans problème, l’homme tente de fuir la partie de lui-même qu’il n’accepte pas et qu’il n’aime pas, cette partie que Jung appelle «l’ombre» et qui le constitue autant que son côté «lumière». Le refoulement de la partie qu’il n’accepte pas fait naître en l’être humain ce que Jung a nommé la «persona», et Winnicott le «faux self», c’est-à-dire le personnage.

    L’être humain se fabrique une image parce qu’il est convaincu, consciemment ou non, que certains éléments de sa personne ne seront pas aimés s’il se montre tel qu’il est. Il est séquestré par la honte.

    Amener à la lumière les parties de soi qui sont cachées, c’est s’ouvrir à l’apprivoisement de l’être dans sa globalité; c’est commencer un cheminement qui mène vers l’unification de ses contradictions; c’est harmoniser en soi la nuit et le jour, c’est-à-dire la douceur et la colère, l’amour et le ressentiment, la générosité et la possessivité, la paix et le trouble, comme l’a si bien montré Jung, le maître de l’inconscient collectif et des archétypes. Seule la poursuite de cette route conduit vers la vérité, vers cette vérité bien personnelle qui n’a rien d’absolu puisqu’elle est le résultat d’une démarche qui a pour but de devenir soi-même et d’être vrai.

    Par la narration de l’expérience de Karl, qui rejoint celle de la plupart d’entre nous, j’ai voulu montrer vers quelle direction peut nous attirer notre grand besoin d’être aimé. Ce besoin peut nourrir ou détruire l’amour de soi. Il peut nous pousser à nous trahir par la négation de notre vulnérabilité ou contribuer à nous construire par l’acceptation et l’expression de ce que nous sommes véritablement.

    Voilà où se situe le principal carrefour de l’éducation: elle peut mener l’enfant vers sa vérité, son essence, l’unification harmonieuse de toutes ses facettes, tant les lumineuses que les ombrageuses, ou créer une scission intérieure entre ce qu’il est et ce qu’il devrait supposément être. Elle peut le rendre heureux ou perpétuellement insatisfait.

    On comprendra pourquoi j’accorde autant d’importance à l’éducateur. Le chemin qu’il choisit de prendre lui-même aura une influence certaine sur les éduqués. C’est une grande responsabilité, j’en conviens, mais elle lui donne une importance prioritaire dans le processus éducatif. Quoi qu’on dise, l’éducateur sera toujours l’âme de l’éducation. Quand donc lui donnerons-nous sa véritable place? Quand donc lui donnerons-nous les moyens de se préparer aux véritables exigences de sa mission et lui permettre de l’accomplir sans l’emprisonner dans des contraintes de performance qui ont un effet destructeur, autant sur lui-même que sur les édu-qués? Quand lui procurerons-nous les moyens psychologiques et pédagogiques d’actualiser les belles théories de façon à ce qu’il puisse accorder réellement la priorité à la personne à qui il s’adresse et qu’il puisse lui apprendre à être heureuse en étant pleinement elle-même? Mais pour y arriver, voyons ce que signifie «être soi-même».

    Que veut dire «être soi-même»?

    Être vrai ou être soi-même, c’est apprivoiser notre vérité profonde, c’est-à-dire nos besoins, nos désirs, nos émotions agréables et désagréables, nos sentiments, nos opinions, nos valeurs, nos croyances, pour agir en accord avec ce qui nous constitue plutôt que de prendre nos points de référence à l’extérieur de nous et d’agir en fonction des valeurs, des jugements, des critiques et du regard des autres.

    Je ne saurais trop insister sur le bien-être et la liberté que procure l’authenticité. Il suffit de nous arrêter quelques instants et de faire l’exercice suivant pour nous en convaincre.

    Prenez le temps de vous détendre. Chassez de votre esprit toute préoccupation et prêtez attention à votre respiration sans la changer.

    Laissez maintenant monter l’image d’une personne en présence de laquelle vous vous sentez détendu, avec qui vous ne déployez pas d’effort et avec qui vous vous sentez adéquat et libre d’être ce que vous êtes. En sa présence, vous n’avez pas peur d’être jugé et vous avez toujours le sentiment d’être correct. Soyez attentif aux réactions de votre corps et à ce que vous ressentez quand vous pensez à cette personne. Prenez bien le temps de percevoir ce qui se passe en vous avant de passer à l’étape suivante.

    Pensez maintenant à une personne en présence de laquelle vous vous sentez inconfortable. Chaque fois que vous la rencontrez, vous vivez un certain malaise; vous n’êtes pas dégagé, vous perdez votre spontanéité et vous n’êtes plus entièrement vous-même. Prenez le temps de bien ressentir ce que vous éprouvez et essayez de mettre des mots sur ce que vous vivez.

    Voyez maintenant en quoi vous n’êtes pas entièrement vous-même avec cette personne.

    •Quelle image voulez-vous donner de ce que vous êtes?

    •Quelles émotions lui cachez-vous?

    •Quelles peurs vous privent de votre liberté d’être naturel? Avez-vous peur d’être jugé, rejeté, blessé?

    •Quel besoin vous pousse à agir comme vous le faites avec cette personne? Avez-vous besoin de plaire, d’être aimé, d’être reconnu ou besoin de vous protéger?

    •Par quel moyen indirect vous occupez-vous de votre besoin? Par le refoulement? Par la fuite? Par la critique? Par le jugement?

    •Que pouvez-vous faire pour trouver votre liberté d’être vous-même en présence de cette personne? Exprimer honnêtement votre vécu, votre opinion ou votre besoin ou prendre une distance consciente?

    Cet exercice peut vous faire voir que certaines de vos relations sont insatisfaisantes parce que vous ne vous donnez pas le droit d’être vous-même par peur de ne pas être accepté. Vous pouvez alors vous demander comment l’éducation a contribué à fabriquer, dans certaines situations et avec certaines personnes, des personnages plutôt qu’à faire éclore la personne réelle que vous êtes.

    Éduquer pour fabriquer des personnages

    Il existe un grand danger à traiter ici des erreurs de certaines pratiques éducatives. Certains lecteurs peuvent s’en servir pour se «victimiser» et rendre leurs éducateurs responsables de leurs problèmes et de leurs souffrances. Ces personnes risquent d’oublier que leurs parents et leurs enseignants ont eux aussi développé, pour se défendre contre l’envahissement de leur douleur intérieure et pour être aimés, une façon d’être qui soit acceptable.

    Rien ne sert de blâmer nos éducateurs pour apprendre à être soi et pour faire évoluer l’éducation. Mon but n’est pas d’accuser et de reprocher leur action à ces personnes qui ont donné le meilleur d’elles-mêmes pour participer à notre éducation. Étant moi-même mère de quatre enfants, et ayant été enseignante au secondaire pendant dix-neuf ans, je sais que ma bonne volonté et tous les efforts que j’ai déployés pour apporter le maximum à mes enfants et à mes élèves n’ont pas fait de moi une éducatrice parfaite.

    Bien que j’aie contribué à faire naître le plus possible la vraie personnalité de mes enfants et des adolescents à qui j’ai enseigné, j’ai, à certains moments, encouragé bien involontairement la formation de certaines facettes de leurs personnages. Reconnaître aujourd’hui mes erreurs aussi bien que mes forces, c’est donner la victoire à la personne sur le personnage, c’est favoriser l’accueil de mon côté «ombre» et me donner la liberté d’être entièrement ce que je suis, et ce, sans jugement ni culpabilité.

    Je souhaite par conséquent que cette partie du livre favorise l’accueil de soi chez chacun de mes lecteurs, cet accueil nécessaire pour apprendre à être de plus en plus fidèle à sa vérité profonde et pour apprendre aux éduqués à être eux-mêmes. Aussi est-il important de ne pas nous arrêter uniquement à trouver ce qui, dans l’approche de nos éducateurs, a contribué à susciter en nous la culpabilité, l’humiliation, la honte d’être nous-mêmes, mais de chercher aujourd’hui à trouver les moyens de composer avec ce vécu pour le rendre créateur. Il est aussi fondamental que nous prenions conscience de notre façon d’éduquer nos enfants et nos élèves, et de reconnaître que, sans le vouloir, nous avons parfois manqué de respect à leur nature véritable. Comme nous avons tendance à voir plus facilement les faiblesses de nos parents et de nos enseignants que les nôtres, il est souhaitable de nous observer, sans nous blâmer, pour ne pas répéter avec nos enfants ce qui nous a fait souffrir dans le passé. Cette auto-observation sans jugement sur nous-mêmes nous permettra notamment de nous libérer du regard des autres pour trouver notre propre voie.

    Agir en fonction du regard des autres

    À certains moments et dans certaines circonstances, n’avons-nous pas appris aux jeunes, bien inconsciemment, qu’il n’est pas bien d’être authentique et surtout qu’il faut agir en fonction du regard des autres?

    Je ne peux exprimer à quel point la peur du jugement a emprisonné ma vie. Centrée sur ce que les autres pouvaient penser de moi, j’étais incapable d’identifier mes émotions, mes besoins et mes valeurs, et j’agissais selon les critères de mon entourage pour ne pas être rejetée. Enfant, il ne me venait pas à l’esprit de me demander ce que je voulais. J’agissais parfois aveuglément, guidée par le regard des autres.

    Une image que j’ai reçue de mon institutrice quand j’étais petite fille m’a profondément marquée. Elle représentait l’œil de Dieu, cet œil perçant qui voit tout, qui juge tout, qui punit le mal. J’étais coincée. J’ai grandi dans la peur d’être vue, d’être fautive, dans la peur du péché, de l’enfer, de la condamnation pour mes fautes. Je suis consciente du fait que ces peurs trouveront une résonance plus grande dans les générations des baby-boomers dont je suis, et chez les personnes qui les ont précédés que chez les plus jeunes. Toutefois, ces derniers ne sont pas moins limités par une éducation qui, dans bien des cas encore, a donné beaucoup plus d’importance aux autres qu’à eux-mêmes.

    À ce moment précoce de mon existence, une introjection s’est ancrée en moi: «tu dois être parfaite», ce qui signifiait, dans l’interprétation que j’en ai faite, «tu ne dois pas céder à la colère, à l’orgueil, à la paresse, à l’égoïsme, à la haine, au ressentiment; tu ne dois pas avoir de besoins; tu dois répondre à l’idéal qu’on attend de toi». Ces valeurs éducatives et religieuses que mon père avait reçues de sa famille m’ont été transmises avec amour et fermeté. À cette époque, l’idée de les contester ne m’a jamais effleuré l’esprit. J’étais plutôt hantée par le sentiment d’être une mauvaise fille parce que je n’arrivais pas à m’élever au degré de perfection que je croyais nécessaire d’atteindre pour être adéquate. J’étais aussi effrayée à l’idée qu’un manquement à ce programme risquait d’être inexcusable. Mon véritable enfer sur Terre était la peur de perdre ma réputation. Je devais la garder à tout prix pour ne pas être jugée, abandonnée

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