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Saliou: Polar
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Livre électronique240 pages3 heures

Saliou: Polar

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À propos de ce livre électronique

Il ne fallait pas lui faire ça. Non ! Il ne fallait pas s’en prendre à Céline. Et la police qui piétine avec une enquête qui s’embourbe dans les procédures judiciaires. Puisqu’il le fallait, lui, Eusébio Salvi, irait le chercher lui-même, ce petit salopard qui lui avait arraché le cœur. À l’autre bout du monde, si nécessaire. C’est ainsi qu’un beau jour, avec son ami Ben, il s’envole pour Conakry, en Guinée, où ils le retrouvent, au fond du tiroir d’une morgue de la ville. À la morgue mais encore vivant.
Ils vont alors tout tenter pour le ramener en Europe et vont mener leur propre enquête avant de livrer le jeune Guinéen aux forces de l’ordre. Malheureusement, la vie sans Céline est décidément trop dure.
Eusébio, qui avait toujours été un homme d’action, va-t-il pouvoir survivre ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né en 1949 en Suisse, Jean-Luc Laurent vit à Lausanne. Après une vie professionnelle bien remplie, tant dans les forces de police que dans l’industrie pharmaceutique ou encore à la tête d’un tea-room en compagnie de son épouse, il découvre l’écriture en 2015 avec un pamphlet politique, Le Lampiste.
Marié, père et grand-père, il occupe son temps entre l’écriture, la lecture, ses petits-enfants et les balades. Il publie ici son troisième roman.
LangueFrançais
Date de sortie16 déc. 2020
ISBN9791037717757
Saliou: Polar

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    Aperçu du livre

    Saliou - Jean-Luc Laurent

    I

    Eusébio Salvi était furieux. Il n’avait pratiquement pas fermé l’œil de la nuit et ne s’était endormi que le matin. De ce fait, il n’avait pas entendu Céline se lever et s’était réveillé après son départ pour le bureau, dans un appartement étrangement silencieux. Il s’était rapidement douché, s’était préparé un café et avait dû faire le tour de ses poches pour trouver un paquet de cigarettes qui n’était pas vide. Puis, comme à son habitude, il s’était réfugié sur sa terrasse.

    Il s’en voulait de n’avoir pas su réagir le soir précédent lorsqu’elle lui avait dit qu’elle voulait s’acheter une voiture car ce serait plus pratique pour aller chez le pédiatre. Plus tard, lorsqu’il avait réalisé ce qu’elle avait dit, c’était trop tard, elle dormait déjà. En même temps, il était furieux contre elle aussi. Pourquoi ne lui avait-elle rien dit ? Mais non ! Ce ne pouvait pas être ça ! Elle prenait régulièrement la pilule et ne pouvait pas tomber enceinte comme ça, même si elle avait une fois oublié de la prendre.

    Il en était là de ses réflexions lorsqu’il décida de descendre en ville. Il savait bien qu’il avait un rapport à rendre pour la Fondation à Fraser Castle. Depuis qu’il avait quitté son emploi auprès des services de sécurité du Vatican, il avait été admis dans les rangs des membres de la Fondation, organisme qui s’était engagé à tout mettre en œuvre pour lutter contre la maltraitance animale à travers le monde. Il venait de terminer sa première mission qui avait consisté à faire abolir la corrida en Europe et avait parfaitement rempli son contrat. Pas tout seul, bien sûr. Il s’était adjoint la collaboration d’amis fidèles dont il avait fait la connaissance dans le sud de la France et en Espagne, mais aussi de personnages politiques œuvrant au sein du gouvernement français, ainsi qu’au Parlement européen. Ça ne s’était pas fait totalement sans casse, comme l’aurait voulu la Fondation. Mais en définitive, c’était le résultat qui comptait. Et dans le cas présent, les députés européens avaient décidé, un soir du début du mois de mai, d’interdire la corrida sur tout le territoire. Ils avaient déjà, auparavant, décidé de supprimer les subventions aux éleveurs de taureaux de combat et comme ça, le tableau était complet.

    Il ignorait quelle serait la prochaine mission que la Fondation lui confierait, mais s’il était envoyé à l’autre bout du monde, en fonction de l’état de Céline, il allait devoir repenser sa collaboration avec les gens de Fraser Castle. Car il n’était pas question pour lui de se retrouver en Australie ou en Chine alors qu’ici, sa compagne assumerait seule les joies de la grossesse. Mais non ! Elle ne pouvait pas être enceinte. Ce n’était pas possible.

    Tout en descendant à pied en direction du centre-ville, il envoya un bref SMS à la jeune femme.

    — Dîner ?

    Quelques minutes plus tard, il reçut une réponse presque tout aussi brève.

    — Pas possible aujourd’hui.

    Au vu de cette réponse, il sauta dans le métro et descendit jusqu’à Ouchy. L’ambiance du bord du lac lui ferait du bien. Il y avait suffisamment de choses à regarder pour se distraire l’esprit et éviter de ressasser sans arrêt ce que la jeune femme avait voulu lui dire le soir précédent. Il marcha tout au long de la rive, traversant Vidy, passa le pont sur la Chambronne, si bien que peu avant midi, il se retrouva à St-Sulpice, devant le restaurant du Petit-Port. Il faisait un temps magnifique en cette fin du mois de mai, si bien qu’il décida de s’installer sur la terrasse de l’établissement. Il commanda trois décis d’Ollon et un plat de filets de perches et resta là jusqu’en début d’après-midi. Il rebroussa chemin selon le même itinéraire, reprit le métro jusqu’à l’arrêt Fourmi et rentra tranquillement chez lui.

    Cet intermède lui avait fait du bien et il pouvait maintenant attendre le retour de la jeune femme en étant un peu plus serein. Il y avait de quoi préparer un repas froid dans le frigidaire, si bien qu’il prit son paquet de Winston Blue et sortit sur la terrasse. Depuis ce point de vue, il pouvait voir la verdure de la forêt de Sauvablin mais aussi, en regardant plus au sud, les toits de la ville et tout en bas, le lac Léman avec les Alpes de Haute-Savoie de l’autre côté.

    Il en était là de ses rêveries lorsqu’il se rendit compte que quelque chose l’agaçait. Il mit un petit moment avant de se rendre compte qu’il y avait, en contrebas, un ballet incessant de véhicules de secours qui montaient depuis la ville, toutes sirènes hurlantes.

    — Eh ben ! Ils ont tout sorti aujourd’hui, murmura-t-il en tirant sur sa cigarette.

    Il écrasa finalement son mégot et rentra. Céline allait bientôt revenir et il commença à préparer les plats pour le repas du soir.

    Il fut surpris de constater qu’à 18 heures, elle n’était toujours pas rentrée. À 18 heures 30, non plus. Il lui envoya un SMS pour savoir où elle était et curieusement, pour la première fois, il ne reçut aucune réponse. À 19 heures, n’y tenant plus, il appela sur son portable et une nouvelle fois, il n’obtint aucune réponse. Il sentait l’angoisse le gagner. Céline n’avait jamais fait ça et si elle avait été retenue par son travail, elle l’aurait appelé auparavant. Il avait rarement été dans cet état et cette incertitude le mettait hors de lui. Il marchait en long et en large dans son appartement lorsqu’à 20 heures, enfin, son téléphone se mit à carillonner. Il répondit à la première sonnerie, sans prendre la peine de vérifier la provenance de l’appel.

    — Ici le major Delarivière de la police de Lausanne, s’annonça son interlocuteur.

    Eusébio avait reconnu le policier qui avait dirigé l’enquête sur la destruction du clocher de l’église St-Nicolas de Flüe à Chailly, quelques années auparavant, et qui les avait occupés tous les deux, l’un comme policier, l’autre comme agent des services de sécurité du Vatican. D’instinct, il faillit lui lancer une plaisanterie sur cette précédente affaire, mais il se dit finalement que ce n’était probablement pas le moment. Si l’autre appelait, c’est qu’il y avait quelque chose de grave, et en relation avec Céline en plus. Et effectivement, le major continua.

    — J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer. La succursale de la BCV de La Sallaz a été la cible d’une attaque à main armée cet après-midi. Votre compagne, qui passait malheureusement devant la banque à ce moment-là, a été atteinte par des balles et a été emmenée aux urgences du CHUV dans un état grave.

    L’homme laissa un instant de répit à Eusébio pour qu’il enregistre bien ce qu’il venait de lui dire. Mais ce dernier resta sans voix.

    — Vous êtes toujours là ? s’enquit le policier. Vous avez compris ce que je vous ai dit ?

    — Oui, oui, répondit Eusébio, complètement abasourdi.

    — J’ai prévu une voiture pour venir vous chercher et vous conduire jusqu’à l’hôpital, reprit le major. Il est préférable que vous ne conduisiez pas vous-même tout de suite. Mes collègues sont en route et seront à votre porte dans quelques minutes.

    — Ça va aller, ça va aller, répondit brutalement Eusébio en raccrochant.

    Il enfila rapidement une veste, prit ses cigarettes au passage et sortit précipitamment de chez lui. Il descendit directement au parking de l’immeuble, sauta dans sa Volvo et sortit en trombe sur la route de Berne, en direction de la Sallaz. La voiture de la police municipale qui arrivait précisément à cet instant dû piler devant le 4x4 qui débouchait pour ne pas l’emboutir.

    — Beau réflexe, grommela Eusébio en écrasant l’accélérateur.

    Furieux, les deux perdreaux enclenchèrent gyrophares et sirène et se lancèrent à la poursuite du chauffard. Mais Eusébio n’en avait cure. Ignorant toutes les règles de la circulation, il arriva deux minutes plus tard devant la porte principale de l’hôpital.

    II

    N’ayant aucune idée où pouvaient se trouver les urgences, il arriva en courant devant le desk des hôtesses d’accueil, bousculant au passage quelques personnes pas assez agiles à son goût et demanda son chemin. Lorsqu’il eut compris qu’il devait se rendre au cinquième étage, c’est-à-dire qu’il devait descendre de trois niveaux, sans attendre la suite des explications, il se rua dans la rampe d’escalier, ignorant les ascenseurs, pas assez rapides selon lui. Il se repéra ensuite en suivant les panneaux indiquant les différentes directions à suivre en fonction des services recherchés, dut revenir plusieurs fois sur ses pas parce qu’il s’était trompé de couloir et c’est finalement un Eusébio complètement hors de lui qui arriva aux urgences de chirurgie. Il prit à partie la première personne qui lui tomba sous la main, bafouilla, s’embrouilla dans ses explications avant d’être pris en charge par une infirmière qui le calma un peu et le conduisit dans un petit salon réservé aux familles. Elle lui expliqua encore que Céline était pour le moment au bloc opératoire et qu’un médecin allait venir discuter avec lui et lui expliquer la situation. Il demanda à pouvoir fumer afin de se calmer un peu et elle lui indiqua une porte qui donnait sur l’extérieur du bâtiment, dans un espace clôturé qui était utilisé comme fumoir aussi bien par les familles des patients que par le personnel.

    Après avoir fait le plein de nicotine, il revint à l’intérieur et retourna s’installer dans le petit salon. Là, il fut rapidement rejoint par le chef de clinique qui avait reçu Céline à son arrivée. Il lui expliqua qu’elle avait été amenée par l’ambulance vers 16 heures 30. Elle semblait sérieusement atteinte et était inconsciente. Elle avait reçu une balle dans le visage, au niveau de la pommette, balle qui était ressortie à l’arrière de la tête. Elle avait également reçu deux balles au niveau du ventre et avait perdu énormément de sang. Elle était maintenant au bloc et il ne pouvait rien lui dire de plus pour le moment. Il fallait attendre.

    — Mais… elle est vivante ? s’inquiéta Eusébio.

    — Oui, puisqu’ils sont en train de l’opérer. Si elle n’était plus vivante, ils ne l’opéreraient pas. Soyez donc rassuré de ce côté-là.

    — Est-ce que vous avez prévenu ses parents ?

    — Non, nous n’avons aucune information à leur sujet, mais si vous avez leur téléphone, vous pouvez les appeler sans problème.

    — Je ne m’en sens pas le courage. Je vous donne leur numéro et vous le faites, s’il vous plaît. Moi, je ne peux pas, répondit-il en cherchant dans son portable.

    Lorsqu’il eut trouvé et transmis les informations au médecin, ce dernier lui assura que le nécessaire serait fait dans les plus brefs délais. Sur ce, il regagna le fumoir et alluma une Winston. Vers 22 heures 30, il fut surpris de voir arriver le major Delarivière qui venait aux nouvelles.

    — Comment va-t-elle ? Où est-ce qu’ils en sont ? demanda ce dernier en lui serrant la main.

    — Je n’en sais rien, elle est toujours au bloc. Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Comment s’est-elle trouvée là alors qu’elle aurait dû être au bureau ? J’ai bien entendu les sirènes des véhicules d’urgence depuis chez moi, mais jamais je n’aurais imaginé une chose pareille.

    — Vers 16 heures, répondit le policier, nos services ont été alarmés qu’une attaque à main armée était en cours dans les bureaux de la BCV de la place de La Sallaz et nous sommes tout de suite intervenus avec des moyens importants, notamment avec tout le personnel disponible du GIPL. Nous avons immédiatement fermé la place et bloqué tous les accès, mais les deux malfrats qui opéraient à l’intérieur des locaux ont commencé à tirer pour couvrir leur fuite. Apparemment, Céline se trouvait déjà à l’intérieur du dispositif et n’a pas pu être stoppée. C’est au moment où elle est passée devant la banque qu’elle a été atteinte par une rafale d’arme automatique. Probablement un AK 47 que nous avons d’ailleurs retrouvé dans les locaux. Elle était allongée devant une des vitrines de l’établissement, au milieu des débris de verre. Elle a d’abord été stabilisée sur place par le médecin du SMUR avant d’être prise en charge par les ambulanciers et transférée jusqu’ici.

    — Mais qu’en est-il des auteurs ? Vous les avez arrêtés ?

    — Non, pas encore ! Des collaborateurs sont en train d’étudier les images vidéo de la banque et des commerces aux alentours. Nous avons pu déterminer qu’ils étaient au nombre de trois, soit deux qui opéraient à l’intérieur des locaux et un troisième qui faisait office de chauffeur et qui attendait au volant d’une BMW série 3 noire qui avait été volée en début d’après-midi. Au vu du modus operandi et de l’arme utilisée, on peut penser qu’on est en présence de gens faisant partie du milieu lyonnais, mais c’est encore trop tôt pour de telles affirmations. Il ne faut pas tirer des conclusions trop hâtives. Il semble que l’un d’entre eux, celui qui a tiré avant de jeter son arme, a complètement paniqué et ça, ce n’est pas typique aux Lyonnais. Ou alors, il s’agissait d’un débutant qui en était à son premier coup. C’est aussi possible.

    — Est-ce que je peux voir ces images ? demanda Eusébio. Peut-être que ça me dira quelque chose.

    — En général, il n’est pas question que des civils extérieurs à l’enquête puissent consulter les éléments dont nous disposons. Mais je pense que dans le cas présent, on peut faire une exception. Appelez-moi quand vous le pourrez et je tâcherai d’organiser ça. Et je vais aussi m’occuper de vos amendes. J’ai cru comprendre que votre déplacement jusqu’ici a été quelque peu mouvementé, ajouta-t-il avec un clin d’œil.

    Sur ce, les deux hommes se séparèrent. Eusébio en profita pour sortir fumer et fut surpris, en rentrant, de se retrouver nez à nez avec les parents de Céline. La mère lui tomba dans les bras, en larmes. Il fallut leur expliquer ce qui s’était passé et leur communiquer aussi le peu de renseignements qu’il avait, puis tous trois prirent place dans le petit salon réservé aux familles.

    Il était plus d’une heure du matin lorsque le médecin revint vers eux pour leur dire que l’opération était maintenant terminée et que la jeune femme était en train d’être transférée au service des soins intensifs de chirurgie. L’opération, ou plutôt les opérations s’étaient apparemment bien déroulées, mais les prochaines heures seraient décisives. Il leur remit encore un sac plastique renfermant les effets personnels de Céline et leur indiqua le chemin à suivre pour se rendre à la station des soins intensifs, avant de tourner les talons et de disparaître. Voilà ! Il avait fait son job, maintenant débrouillez-vous ! Tous trois restèrent là, un instant, abasourdis, puis suivirent la direction indiquée.

    III

    Arrivés à destination, ils durent encore attendre, devant une porte fermée, qu’une infirmière veuille bien venir leur ouvrir et s’inquiète de ce qu’ils voulaient. Eusébio devenait de plus en plus nerveux. Après avoir exprimé le motif de leur présence, il voulut voir Céline, et tout de suite. L’infirmière se tourna vers lui et le prit gentiment pas le bras.

    — Elle vient d’arriver dans le service. Laissez-nous juste le temps de l’installer et je reviens vous chercher.

    Vingt minutes plus tard, l’infirmière vint les chercher et les fit entrer dans ce lieu confiné que sont les soins intensifs. Une série de petites pièces, plutôt des box à un seul lit ouverts sur un desk, de façon que chaque patient puisse être vu par le personnel soignant.

    — Je vous la laisse juste voir un instant, comme ça. Mais vous n’allez pas pouvoir rester. Elle est plongée dans un coma artificiel au vu de la gravité de ses blessures. Il est indispensable que son cerveau soit le plus possible au calme. La règle fixée ici est que seuls les membres de la famille proche soient autorisés à venir la visiter. Par conséquent, Monsieur, ajouta-t-elle en se tournant vers Eusébio, si vous voulez des nouvelles, il faudra vous adresser à la famille.

    En entendant ça, Eusébio qui n’avait rien dit jusqu’à maintenant sentit la moutarde lui monter au nez. Quoi ! Cette petite pisseuse, qui n’était même pas sèche derrière les oreilles, avait la prétention de vouloir lui interdire de voir Céline ? Heureusement, avant qu’il puisse intervenir, la mère de Céline s’interposa et expliqua à la jeune infirmière que c’était lui le conjoint, qu’il avait toute leur confiance et elle demandait qu’on le laisse venir aussi souvent qu’il le désirait. Eusébio la remercia d’un regard. Elle avait dit ça beaucoup plus diplomatiquement que si c’était lui qui avait parlé. Aussitôt, il sentit la pression retomber.

    Lorsqu’ils furent enfin autorisés à s’approcher du lit, ils furent complètement abasourdis. Ils ne la reconnurent pas. La moitié de son visage avait disparu sous des pansements, sa tête avait été rasée et était enturbannée comme celle d’un sultan, sa gorge traversée par une trachéotomie. De plus, elle était entourée de tubes et de tuyaux qui sortaient de tous les orifices de son corps. C’était tellement insupportable que la mère de la jeune femme éclata en sanglots et alla se blottir dans les bras de son mari.

    Cinq minutes plus tard, l’infirmière vint les prier de sortir afin de ne pas fatiguer la patiente. Par ailleurs, il serait bien qu’à l’avenir, les visites ne viennent pas toutes en même temps mais échelonnent leurs venues, si possible l’après-midi, les matinées étant réservées aux soins.

    — On vous expliquera au fur et à mesure quel comportement adopter avec elle, au vu de son évolution. Mais je peux d’emblée vous dire que ce sera très long. Par ailleurs, et dans la mesure du possible, le médecin se tiendra à votre disposition pour toutes les questions que vous pourriez avoir à l’avenir au sujet de la patiente.

    — La patiente, la patiente, grommela Eusébio. Déjà un, c’est pas la patiente, c’est Céline.

    Arrivé à l’extérieur, Eusébio alluma la dernière cigarette qui lui restait. Il était temps de retourner chez lui pour refaire le plein de tabac. D’autant plus que ce n’était pas maintenant qu’il allait mettre son projet d’arrêter de fumer à exécution. Ils discutèrent encore un moment sur la nécessité d’organiser une rotation pour les visites, mais Eusébio déclara tout de go que tant qu’il était à Lausanne, il avait bien l’intention de venir aussi souvent qu’il en ressentait le besoin. Les parents de la jeune femme décrétèrent qu’ils allaient faire de même, et zut pour la petite pisseuse. De toute façon, il n’était pas question de laisser Céline trop longtemps toute seule dans ce monde inconnu. Et si elle se réveillait ? Qu’allait-il se passer ? Elle serait paniquée !

    Déclinant l’offre de ses beaux-parents qui lui proposaient de le raccompagner chez lui, il décida de remonter chez lui à pied. Quinze minutes de marche lui permettraient de se calmer et de remettre un peu d’ordre dans ses idées. Malgré sa grande force de caractère et sa maîtrise de lui-même, il se sentait complètement désemparé. Il était sous le choc de cette situation. En arrivant chez

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