La malédiction

Ophélie n’avait plus le cœur à rien. Samuel était mort, six mois plus tôt, d’une crise cardiaque, juste un mois avant l’anniversaire de leurs cinq ans de mariage. Il avait 40 ans, était en pleine santé. Rien ne laissait supposer qu’il souffrait de problèmes cardiaques. C’était un sportif, il ne faisait pas d’abus. Ce jour-là, la jeune femme avait d’abord entendu des bruits étranges venant du bureau de Samuel : un bruit de vitre brisée, une porte qui claque, des objets qu’on renverse. Elle préparait le repas du soir – des gnocchis d’aubergine, le plat favori de Samuel. Elle avait passé la tête par la porte de la cuisine et avait demandé si tout allait bien.

N’obtenant pas de réponse, elle était allée voir.

Sa main tremblait quand elle l’avait posée sur la poignée de la porte du bureau, comme si elle avait senti que quelque chose d’anormal se passait dans la pièce. Elle avait tremblé bien plus encore quand elle n’avait pas réussi à ouvrir la porte. En collant son oreille contre celle-là, elle avait eu l’impression d’entendre un rire de femme juste derrière. Après bien des efforts, elle avait pu enfin entrer dans le bureau de son mari. Ce qui empêchait la porte de s’ouvrir, c’était justement le corps de Samuel. Il s’était écroulé là et elle avait dû pousser de toutes ses forces pour parvenir à se glisser à l’intérieur. En voyant le rictus de mort sur le visage de son mari, un hurlement lui avait échappé. Vite, elle était redescendue pour appeler les secours. Mais c’était trop tard, il n’avait pas été possible de le ranimer.

Après cela, seule dans la grande bâtisse où ils avaient emménagé quelques mois plus tôt, la jeune femme avait sombré dans la dépression. A force d’appeler le fantôme de son mari, elle en était devenue un elle-même. Ses parents avaient bien tenté de l’aider, mais elle ne voulait entendre ni voir personne.