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Appelle-moi quand tu seras mort (eBook)
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Appelle-moi quand tu seras mort (eBook)
Livre électronique212 pages2 heures

Appelle-moi quand tu seras mort (eBook)

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À propos de ce livre électronique

Et si les gens qu'on aime ne mouraient pas vraiment.
C'est une impulsion qui poussa Anouk, le personnage principal, à faire ce geste absurde: enterrer son père avec son portable, au cas où… Osera-t-elle appeler? Il y a de quoi se poser la question car nul besoin de dire qu'il faut un brin de folie pour songer à appeler quelqu'un qui est enseveli à trois mètres sous terre. Elle osera. Et l'invraisemblable arrivera: une voix à l'autre bout du fil. Est-ce son imagination délirante qui lui joue des tours? Une plaisanterie de mauvais goût d'une personne mal intentionnée? Ou est-ce son père qui lui parle de l'au-delà? Un mystère planera sur la vie après la mort, mais c'est avant tout une cascade de questions sans réponse qui s'imposera à Anouk dans ses dialogues avec ses amies.
Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que débarque un certain Yvan Barthes. Anouk est d'autant plus troublée que rien n'effraie cet homme, pas même l'amour.

C'est un roman plein d'humour et de légèreté qui pourtant traite de sujets graves : la séparation avec les êtres chers, l'amour et le temps qui passe.
LangueFrançais
Date de sortie5 févr. 2015
ISBN9783869133744
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    Aperçu du livre

    Appelle-moi quand tu seras mort (eBook) - Anne Borel

    parents

    Chapitre 1

    Anouk venait d’éteindre son ordinateur. « Bonne soirée et à demain ». Son collègue n’avait pas pris la peine de répondre. « Quel petit con ! pensa-t-elle. Mais pourquoi je lui dis au revoir aussi ? Tous les soirs il me fait le même coup ! Question de principe peut-être... » Elle se souvient de lui deux ans en arrière. Il était nouveau et cherchait sa compagnie. Maintenant qu’il avait pris ses repères, Anouk ne servait plus à rien. Au contraire, elle le dérangeait car elle passait pour compétente et on aimait travailler avec elle. Malgré ses cordialités et les sourires postiches qu’il affichait régulièrement, Anouk avait ressenti la rivalité grandissante et était devenue méfiante.

    En sortant, elle dit au revoir à l’employé de la sécurité et d’un coup de hanche fit pivoter le portillon métallique.

    Dix-neuf heures trente. Elle serait encore en retard pour dîner avec son père. Depuis qu’elle avait emménagé dans son propre appartement, ils mangeaient ensemble un mercredi sur deux. Ça leur arrivait d’annuler mais c’était rare. Ce n’était pas par obligation qu’ils se voyaient. S’il en avait été ainsi, ces rencontres à répétition eussent vite fait de les ennuyer tous les deux. Ils se voyaient par pur plaisir. Le lien invisible qui les unissait pour toujours s’était resserré naturellement après le décès de sa mère, elle avait alors tout juste huit ans. Une fois dans sa voiture, elle prit son portable et appuya sur la touche du répertoire.

    – Allô ?

    – C’est moi papa. Je suis à Granville dans vingt minutes.

    – Tu veux dire dans une bonne demi-heure ? Tu sors du bureau ?

    – Oui, j’en sors à l’instant.

    – Tu travailles trop Anouk.

    – Je sais...

    – Bon... Je ne vais pas remettre ça... On se retrouve directement au restaurant alors. 

    – Oui. À tout de suite. 

    Elle accéléra puis passa la cinquième vitesse.

    Arrivée aux abords de Granville, elle regarda dans le rétroviseur et s’assura que la police n’était pas derrière elle. Elle composa un numéro sur son portable. « Demain j’achète un kit mains-libres ! se promit-elle pour la énième fois. Il faut absolument que j’en achète un ! »

    – Claire ? Oui, c’est moi... Si, si, ça va, juste ce collègue qui m’énerve comme d’habitude. Mais bon... Et toi, comment s’est passée ta journée ?... Je fais vite, j’ai encore un autre coup de fil à donner. On se voit toujours demain soir ?... 

    Anouk était encore au téléphone lorsqu’elle vit devant elle des voitures de police stationnées. Leurs lumières bleues hachurées par la pluie la mirent en état d’alerte. Son premier réflexe fut de mettre fin à la conversation téléphonique, on ne savait jamais avec eux, ils étaient capables de lui coller un PV. Elle ralentit mais comme elle ne s’attendait pas à trouver de place, elle s’engouffra directement dans un parking souterrain non loin du restaurant. Avant de descendre de la voiture, elle se passa les doigts dans ses cheveux blonds pour leur redonner du volume, se mit du rouge à lèvre qu’elle estompa du bout des doigts et réajusta le col de son chemisier blanc. « Papa sera content. Il aime bien ce chemisier-là. » C’était si simple de lui faire plaisir. Elle avait juste à bien s’habiller pour que son visage s’éclairât dès qu’il la voyait. Ça marchait à tous les coups. Elle arrivait et hop ! Le voilà qui souriait comme un gamin. Il la voulait toujours belle. Les rares fois qu’elle était apparue en jean ou mal habillée, elle avait vu sa déception dans son regard et du coup elle s’en était trouvée elle-même un peu déçue. Depuis elle faisait attention à sa tenue. Se montrer avec sa fille, ça il aimait bien. S’il avait pu, il aurait trimballé avec lui un gros projecteur d’Hollywood qu’il aurait braqué sur elle pour que nul ne manquât cette merveilleuse apparition. Il arrivait qu’on les crût amants. Quand ils entraient dans un restaurant bras dessus bras dessous, les regards des hommes s’attardaient sur elle puis se tournaient vers lui. Lui, pensant naïvement que tout le monde avait deviné qu’ils étaient père et fille, prenait ces regards pour de l’admiration. Jamais il ne lui serait venu à l’idée de les interpréter comme de l’indignation à cause de la différence d’âge. D’aucuns semblaient lui dire : « Il pourrait être son père ! »

    Toujours est-il qu’il était fier de sa fille et ça se voyait. On entendait la pluie crépiter dehors. Elle prit son parapluie et courut vers la sortie. La police était toujours là et des badauds s’étaient rassemblés autour de quelque chose à voir. Anouk comprit qu’un accident venait d’avoir lieu. Même si elle compatissait pour la pauvre victime, sa curiosité la poussa à changer de trottoir. Elle aussi voulait voir ce qui se passait, mais juste vite fait, comme ça. Elle mettait un point d’honneur à être moins basse que tous ces individus avides de sensationnel et tentait de se convaincre qu’un coup d’œil rapide sur le malheur des autres était moins condamnable que de s’arrêter pour regarder sans vergogne. Comme s’il était écrit quelque part que l’indélicatesse ne commençait qu’à partir d’un laps de temps précis. Une ambulance était déjà sur place, des médecins en gilet blanc et vert fluo s’agitaient. En traversant la rue elle tendit le cou pour mieux voir. Elle vit un homme qui gisait là, par terre sous la pluie. Au même instant sa respiration s’arrêta net, son cœur se dilata puis commença à battre, sourdement d’abord mais de plus en plus fort, au rythme de ses pas qui s’accéléraient. Le manteau, les cheveux blancs et puis l’écharpe à ses pieds, elle était rouge, rouge comme la sienne. Une soudaine envie de crier s’empara d’elle.

    – Papa ! Laissez-moi passer ! Papa ! Elle s’aperçut qu’il ne l’entendait pas. Ses yeux étaient fermés et on lui avait déjà mis un masque à oxygène sur le visage. Un filet de sang coulait de son oreille droite.

    – Poussez-vous Madame.

    – C’est mon père !

    – Nous l’emmenons aux urgences. Il faut faire vite. Vous pouvez monter devant dans l’ambulance si vous voulez. 

    Sous le choc elle n’eut pas le temps de répondre, un autre brancardier la tirait déjà par le bras et la priait de monter dans l’ambulance. Docilement, elle se laissa faire. À l’arrière du véhicule, l’équipe médicale s’affairait autour de son père. « Mais qu’est-ce qui t’est arrivé ? Tu étais encore intact il y a une demi-heure, ta jolie tête, tes beaux cheveux blancs, ta voix qui sortait de cette bouche. Et tout d’un coup ce sang rouge qui sortait de nulle part ». Elle blêmit d’effroi, retint son souffle pour ne pas se décomposer complètement. L’idée de la mort lui donna la nausée. Elle baissa la vitre, pencha légèrement la tête pour que son visage attrape le vent et la pluie. L’air humide lui fouetta les joues, elle ferma les yeux en implorant le vent pour qu’il la libère de sa peur. Et si le pire arrivait ? Elle savait depuis ses huit ans combien les corps étaient fragiles et que la vie était cruellement imprévisible. Et l’imprévisible, lui, était souvent irréparable. Non, cette fois-ci tout irait bien. Oui, tout irait bien. Ces hommes en blanc, ils étaient les anges de la route, ils s’occupaient de lui. Tout irait bien. Ils étaient à trois, sûrement qu’ils s’entraidaient, se surveillaient pour qu’aucune erreur ne soit commise. Leurs gestes avaient été des gestes rapides, des gestes diligents d’experts qu’ils avaient déjà exécutés cent fois. D’ailleurs ils n’avaient pas l’air de s’inquiéter plus que ça. Ils n’avaient rien dit. Pas d’affolement, juste de l’affairement, de l’affairement dans l’urgence peut-être, mais l’urgence était normale. Même si ce n’était pas grave, il fallait se dépêcher tout de même. Et puis s’ils s’appelaient « les urgences » ce n’était pas pour rien. L’empressement était leur métier. Ils faisaient vite par principe, par précaution, c’est tout. Oui, tout irait bien. Ils avaient la situation en main. En fait, la seule à s’inquiéter ici, c’était elle, évidemment elle n’y connaissait rien en médecine. Et puis quand il s’agit du père, rien de plus normal. Tout le monde s’inquiéterait à sa place, mais objectivement parlant, comme diraient donc ces médecins agités, objectivement parlant c’était un accident ordinaire sans conséquences graves. Tout irait bien. Mais pourquoi avait-elle si peur ? Elle avait beau se raisonner, elle tremblait de tous ses membres. Et s’il mourait là, maintenant ? Et s’ils ne parvenaient pas à le réparer, à stopper le sang qui coulait de son oreille ? Son cœur s’emballa. Elle l’entendait battre dans sa poitrine, dans ses veines. C’était la deuxième fois en trois mois. Il tapait maintenant dans ses tympans. Il allait les défoncer. Ce vacarme soudain dans son propre corps l’effraya. Elle ne l’avait ni entendu ni senti depuis des années. Le dernier soubresaut de son cœur avait été à la mort de sa mère. Il s’était cogné violemment contre ses côtes et depuis plus rien. Elle ne savait pas s’il était muet ou si elle était sourde. Elle avait, depuis, une poitrine insonore, calfeutrée au polystyrène qui ne laissait échapper aucune émotion. C’est seulement quand elle allait chez le médecin qu’elle apprenait qu’elle avait un cœur et qu’il était en bonne santé. Son pouls était normal. Elle l’entendait maintenant marteler dans sa tête, il frappait avec une force étourdissante. Elle ferma la vitre, s’essuya longuement le visage, l’enfouit dans le creux de ses mains ; son père derrière, c’était un cauchemar. Des années durant, elle avait eu besoin des oreilles d’un autre relié à un stéthoscope pour savoir qu’à l’intérieur d’elle son cœur battait à un rythme régulier. Elle s’était habituée à cette surdité jusqu’au jour où quelque chose avait sursauté soudainement dans sa poitrine. Cela remontait à trois mois. Elle avait d’abord cru à une crampe d’estomac qui lui annonçait un vomissement imminent mais c’était son cœur qui venait de bondir telle une grenouille. Elle venait de croiser le regard d’un homme. C’était à la soirée de fin d’année organisée par l’entreprise de son père. « Vous êtes médecin ? » lui avait-elle demandé par curiosité. « Non, pourquoi... ? » Elle aurait voulu être naturelle et répondre tout bêtement «  parce qu’il n’y a que les docteurs qui fassent battre mon cœur… » mais elle n’avait pas osé. D’un air interrogateur il l’avait fixée droit dans les yeux. La réponse ne venant pas, ce dernier lui avait souri. La grenouille fit un deuxième bond. « Pour rien… » avait-elle lâché. Troublée Anouk s’en retourna vers la table où elle dînait avec son père entouré de ses employés.

    Elle ne voulait pas se retourner et voir les médecins qui entre-temps s’affolaient. « Je suis là avec toi papa. Tiens bon, tiens bon », lui disait-elle les yeux remplis de larmes. Une douleur sourde et diffuse avait envahi l’intérieur de son corps. L’homme au volant de l’ambulance ne disait rien. Il était concentré. Il roulait vite. La sirène hurlait de toutes ses forces mais Anouk plongée dans un état second ne l’entendait plus. Elle retentissait au loin tel un bruit strident qui dérangeait son sommeil et qui voulait la ramener au cauchemar que la vie lui offrait. Anouk n’en voulait pas.

    Chapitre 2

    – Vous devriez rentrer vous reposer. Vous n’avez pas dormi de la nuit. 

    Le médecin avait une cinquantaine d’années. Sa voix se voulait rassurante mais Anouk avait compris que l’état de son père était préoccupant. Elle l’avait compris dès le début en fait. La voiture l’avait pris de plein fouet. De la tôle contre son corps d’homme. La vision du choc violent lui était insupportable. Forcément ses blessures étaient graves et il avait sombré dans le coma. L’équipe médicale lui expliqua avec des mots simples censés être compris par tout le monde qu’ils avaient d’abord cru à une commotion cérébrale mais un scanner crânien avait révélé des contusions profondes. En résumé et avec ses mots à elle : son cerveau était réduit en bouillie, il était au bord du gouffre. Elle sortit de l’hôpital épuisée et tiraillée par des nerfs tendus comme des cordes raides. Elle regarda l’heure à sa montre et se contraignit à appeler au bureau. Il fallait expliquer pourquoi elle n’irait pas au travail ce jour-là. Elle tomba sur « l’ancien nouveau collègue », lui parla à contrecœur de l’accident et de l’état de son père. Il jouait bien son rôle en feignant de compatir. En son for intérieur il devait déjà se réjouir d’avoir l’exclusivité de la nouvelle qu’il annoncerait au reste du service avec l’air grave de quelqu’un qui a des choses importantes à faire savoir.

    – Je ne sais pas si je rappellerai mais dis à Daniel que si je reprends le travail, ce ne sera pas avant dix jours. 

    Le cœur serré, elle écouta ensuite sa boîte vocale. Claire avait appelé, Catherine aussi. Elle ne put s’empêcher de pleurer en écoutant leurs messages. Anouk composa un numéro.

    – Claire, je peux dormir chez toi cette nuit ?... J’arriverai en fin d’après-midi. Je rentre chez moi maintenant. Je vais essayer de dormir un peu et je repars à l’hôpital... Oui, c’est grave. 

    Une fois arrivée chez elle, elle s’allongea sur son canapé. Elle s’assoupit et dormit trois heures.

    Chapitre 3

    Jamais ça ne lui était arrivé, même malade il y avait toujours de la place pour une bouchée de quelque chose. Mais ce soir-là rien ne passait. Anouk ne toucha pas le contenu de son assiette, elle avait préféré prendre un chocolat chaud qu’elle buvait en silence. Claire qui s’était donné pour mission de rassurer Anouk, parlait toute seule. Elle tentait de lui remonter le moral comme on dit, de lui faire oublier les dernières vingt-quatre heures en racontant un peu tout et n’importe quoi. Dès qu’elle sentait qu’Anouk ne mordait pas, elle passait immédiatement à un autre sujet. Alors forcément, elle avait vite fait de mettre à sec son idéation pourtant intarissable d’habitude. Il fallut piocher dans les anecdotes de bureau. Elle raconta des histoires récentes et puis des anciennes. Elle en rajoutait même un peu pour rendre son récit plus captivant. À dire vrai, elle en rajoutait même pas mal à certains endroits. Mais c’était peine perdue. La pauvre Anouk broyait du noir et ses yeux bouffis de larmes et de fatigue ne laissaient entrevoir que l’image tragique de son père. Claire était bien embêtée de la voir dans cet état-là et surtout de ne rien pouvoir y faire. Voyant le désarroi de son amie qui ne savait plus quoi inventer pour la distraire, Anouk vint à son secours :

    – Ne te casse pas la tête Claire. Vu mon état, c’est déjà courageux de ta part de m’accueillir. Allume-moi la télé. Mets n’importe quoi, ça ira pour ce soir. 

    Claire capitula et contempla Anouk d’un air résigné. Elle brûlait de tendresse pour elle. Malgré sa douleur, c’est

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