La vengeance d'Amélie

Par Suzie Pelletier

La vie d’Amélie est pavée d’amour et de bonheur. Du moins, c’est ce qu’elle croit. Jusqu’à ce que le masque tombe. La séparation brutale la fouette dans sa fierté et son orgueil. Julien, son ex, est un riche escroc. Aucun moyen légal ne lui apportera la justice. Elle veut lui faire payer cinq années de mensonges par une vengeance qui va le confondre.

Est-ce que le vieil adage « la fin justifie les moyens » deviendra un modus operandi pour Amélie ? À la recherche de justice, Amélie saura-t-elle s’arrêter à temps? Ou basculera-t-elle à son tour dans l’excès ?

• Langue: Français
• Éditeur: Éditions du Défi
• Date de sortie: 15 oct. 2021
• ISBN: 9782924785010

Suzie Pelletier

Native de Sherbrooke, Suzie Pelletier habite Kirkland, dans l’ouest de l’île de Montréal, depuis plus de 25 ans. Elle écrit des nouvelles depuis l'adolescence. Elle est également une conférencière inspirée, une animatrice scolaire d'expérience et un coach en écriture.

Aperçu du livre

Chapitre 1

Un réveil en douceur

Amélie s’étire lentement entre les draps puis ouvre les yeux. Elle aime cet instant. Un nuage l’enveloppe, la portant du sommeil au réveil, comme pour la laisser savourer les douces sensations de ce jour nouveau. Les rayons du chaud soleil de juillet pénètrent par la fenêtre grande ouverte, caressant sa peau. Elle voudrait arrêter la course de l’astre du jour afin de rester un moment de plus dans cette quiétude matinale. Elle remonte le drap sur son corps et cale sa tête échevelée dans l’oreiller moelleux. L’odeur de la passion y est encore imprégnée. Le musc de son homme chatouille ses narines. Les effluves de cette nuit d’ébats torrides avec son amoureux rallument sa libido. Aussitôt, sa respiration s’accélère. Ses seins se gonflent et ses lèvres deviennent gourmandes. Les yeux fermés, elle cherche la peau nue du mâle en faisant glisser son bras sur le lit, mais sa main ne rencontre que le drap froid. La déception brise son excitation montante.

— Julien?

Son chum s’est levé sans bruit. Amélie tend l’oreille. Elle l’entend parler au téléphone. Sa voix sourde s’infiltrant par la fenêtre ouverte, elle en déduit qu’il s’est réfugié sur le balcon du salon. Elle ne saisit pas les paroles, mais le ton sec laisse croire qu’il fulmine. Le prénom de Sarah revient à plusieurs reprises. Le boulot, c’est sûr, même s’il n’est que six heures du matin. L’homme d’affaires dynamique s’avère parfois zélé.

La jeune femme se tourne sur le dos et étire ses longues jambes minces. Elle pince la peau de son abdomen pour s’assurer qu’aucune graisse ne s’est glissée sous le derme, puis elle se lève lentement, laissant le sommeil s’évanouir peu à peu. Elle s’arrête un moment devant le grand miroir. Julien l’a installé dans un coin de la chambre pour vérifier que son allure demeure parfaite en tout temps. Elle observe son corps nu et sourit avec satisfaction. «Mes seins gardent leur forme exceptionnelle.» À 28 ans, avec son 1,75 m, Amélie Parent possède une silhouette digne de celle d’un mannequin. Sa peau en santé reste douce. «Pas étonnant que Julien m’appelle sa déesse…» Elle passe sa main dans ses cheveux ébouriffés et son visage esquisse une moue ennuyée. Ses mèches blondes trop longues et trop frisées s’emmêlent au moindre courant d’air. Elle aimerait tenter cette coiffure qu’elle voit partout en ce moment, légère et un peu garçonnière. Dans un geste ample, elle remonte sa tignasse sur sa nuque et tourne la tête. Un soupir de déception s’échappe de sa gorge. «Julien n’acceptera jamais que je les coupe…»

Alors qu’elle se dirige vers la salle de bain, un immense sourire étire ses lèvres. Elle fait marche arrière, ouvre la commode de la chambre, saisit son sac à main et y prend l’outil acheté à la pharmacie la veille. La petite boîte de forme allongée affiche le nom de la compagnie Clearblue. Ses recherches ont montré que ce produit est reconnu comme l’un des plus fiables sur le marché. Elle a tenté sa chance il y a quelques jours, mais le résultat s’est avéré négatif. Elle a utilisé le test alors qu’elle se trouvait au bureau, afin d’éviter que Julien s’en aperçoive. Elle veut garder la surprise. Surtout, elle tient à choisir le moment où elle lui annoncera la venue d’un bébé, leur enfant.

La documentation insérée dans la boîte suggère d’utiliser l’urine du matin pour une plus grande efficacité. Pendant que son homme adoré discute au téléphone sur le balcon, elle a le temps d’agir. L’analyse ne prend que trois petites minutes. Une fois dans la salle de bain, elle urine sur la languette, comme indiqué sur la boîte, puis elle laisse l’objet sur le comptoir. En attendant que le résultat apparaisse, elle tente de mettre un peu d’ordre dans ses cheveux, emmêlés depuis leurs ébats érotiques. «Il refuse que je les attache lorsque nous faisons l’amour.» Ne l’appelle-t-il pas «son amazone préférée» quand elle le chevauche? Amélie sourit au souvenir de la nuit précédente. «Nous n’avons presque pas dormi…»

Elle regarde le résultat qui s’affiche sur le bâtonnet; la déception lui chavire le cœur. De toute façon, elle n’a noté aucun signe de grossesse, comme cette nausée matinale dont les femmes du bureau parlent tant. Son cycle étant réglé comme une horloge, elle sait que ses menstruations commenceront demain, et elle devra attendre encore un mois avant d’annoncer la bonne nouvelle à Julien.

Déçue, elle ramasse rageusement l’accessoire et sa boîte, puis retourne dans sa chambre, glisse le tout dans sa sacoche. C’est bien le seul endroit, dans leur univers, où Julien ne pénètre jamais. Amélie ne veut pas qu’il trouve le paquet dans la poubelle et apprenne ainsi qu’elle n’est pas enceinte. Ça le rendrait sûrement malheureux. De toute façon, Amélie ne parle plus de son désir de commencer une famille devant lui. Son homme, souvent trop intense, pourrait bien changer d’avis si elle insiste ou si elle exprime sa joie… ou sa peine, dans ce cas-ci. Leur dernière discussion sur le sujet date d’il y a un mois. Ayant enfin obtenu l’approbation de Julien, elle refuse d’en reparler avant de pouvoir lui annoncer qu’il deviendra père l’an prochain.

Malgré son désappointement, Amélie décide de garder l’atmosphère de la maison le plus agréable possible. Elle veut éviter de décevoir celui qu’elle aime. D’ailleurs, après cette nuit d’amour inconditionnel, la jeune femme se sent rassurée. L’ardeur de son homme a diminué ces derniers mois, du moins en ce qui concerne le nombre d’approches sexuelles, mais elle s’inquiétait sans doute pour rien. Probablement que les soucis associés à son entreprise le submergent. N’est-il pas, après tout, le chef d’une grande société internationale qui se spécialise dans les importations et les exportations d’œuvres d’art? Plusieurs fois millionnaire à 30 ans, Julien en veut toujours plus. Il se donne passionnément dans son travail!

Amélie se rend dans la cuisine pour se servir un jus d’orange. Au passage, elle note que la pièce ultra moderne est demeurée sens dessus dessous. «C’est pour ça qu’il s’est réfugié sur le balcon. Il déteste le désordre…» La veille, Julien est rentré tard du travail, mais elle l’a attendu. Le repas qu’elle avait préparé avec soin est resté sur la table alors qu’ils ont plutôt décidé d’entamer la bouteille de champagne.

Le couple a planifié partir dès ce matin pour deux semaines dans la villa de la famille Martineau, celle des parents de Julien. Amélie sait que leurs ébats sexuels pendant ce séjour devront être plus modérés. Malgré l’insonorisation efficace de la bâtisse contre les cacophonies extérieures, les bruits associés aux activités nocturnes se propagent indiscrètement dans la maison silencieuse. Amélie se souvient de l’expression renfrognée et des lèvres pincées d’Emma, sa belle-mère, lorsqu’elle s’est pointée au déjeuner la dernière fois. De son côté, Henri, son beau-père, l’a lorgnée avec gourmandise. Amélie a observé la scène de ses yeux espiègles et en a déduit que la vie sexuelle de ce couple désassorti était au point mort. Coquine, elle a repoussé sa lourde chevelure de ses longs bras, mettant ainsi en évidence ses seins à peine camouflés par sa robe de chambre légère, sous le nez de son beau-père. Emma l’a fusillée du regard et Henri s’est figé, la fourchette immobilisée entre son assiette et sa bouche. Ses yeux, seule partie de son corps qui bougeait encore, suivaient les mouvements d’Amélie. Quant à Julien, il n’a rien perçu de ce petit jeu de séduction.

Ainsi, avant de prendre la route