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Toom's King - Tome 3: Avant que la dernière étoile ne tombe
Toom's King - Tome 3: Avant que la dernière étoile ne tombe
Toom's King - Tome 3: Avant que la dernière étoile ne tombe
Livre électronique601 pages8 heures

Toom's King - Tome 3: Avant que la dernière étoile ne tombe

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À propos de ce livre électronique

Damien et Solah s'apprêtent à vivre à nouveau des aventures incroyables...

La folle course-poursuite pour délivrer Rêvillia de la Noirceur est à son apogée. Entre rapprochements coûteux, loufoqueries et enquêtes dans un monde hors du commun, égarements soudains, dangereuses tentations, terribles coups du sort, passions grandissantes, tout sera réuni afin d’ébranler et de pousser à l’effondrement nos héros.
L’ultime aventure de Damien et Solah vous attend.
Avec eux, tremblez, riez, frissonnez, découvrez le véritable sens du pardon et de la rédemption.
Leur belle et touchante histoire aura-t-elle droit à sa fin heureuse, ou du haut de sa tour, le mage qui guette pour abattre sa dernière carte, parviendra-t-il à renverser le jeu ?
Un jeu où toutes vos déductions vous tiendront en haleine jusqu’au bout, jusqu’à cette révélation finale : Et si tout n’avait été que le début de la fin ?

Retrouvez Damien dans un univers fabuleux et surprenant, peuplé de personnages de dessins animés, avec le troisième tome de cette saga fantastique et magique !

EXTRAIT

— Je te jure, Damien, que c’est bien parce que tu n’es pas dans ton état normal que je te porte dans mes bras.
— Mon héros, lui sourit encore plus bêtement qu’un saumon dans sa poêle à frire, le garçon. Ce que tu es fort !
L’araignée gigota. Elle se lança à leur poursuite après avoir expulsé l’épée qui disparut suite à de nombreux soubresauts contre les parois. Ce n’était pas très grave, étant donné qu’elle pouvait réapparaître à la sommation de son propriétaire, si toutefois l’univers toonesque le permettait. Et comme vous avez pu vous en rendre compte, ce n’était pas toujours évident, évident…
Allons voir comment progresse la belle idylle entre Damien et Solah ! Ai-je dit belle ? Je sous-entendais plutôt… absurde !
— Plus vite Solah, plus vite ! Elle va nous rattraper !
— Franchement, ferme-la !
L’araignée grimpant de côté leur tomba dessus. La maline leur obstrua la route, en crachant ses premiers filons gluants. Solah esquiva l’attaque. Cependant, la réflexion malvenue de son compagnon l’obligea à le lâcher avec le tact d’un homme des cavernes.

LangueFrançais
Date de sortie7 nov. 2019
ISBN9791037700100
Toom's King - Tome 3: Avant que la dernière étoile ne tombe

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    Aperçu du livre

    Toom's King - Tome 3 - Nadeim M.G.H

    Prologue

    En fin d’après-midi, toute une famille se trouvait réunie pour souhaiter un joyeux anniversaire, au jeune Damien qui fêtait ses seize ans. Ce jour de fête, hélas, ne trouva pas de résonance dans son cœur et cela malgré un soleil éclatant, noyé dans un ciel bleu, qui pourtant était sans l’ombre d’un doute annonciateur d’un superbe été.

    Mais qu’y pouvait-il ? Au fond de lui, cet ado se sentait seul, égaré, isolé parmi l’élévation des rires d’allégresse, du plaisir de partager un instant comme celui-ci. Car après tout, on avait qu’une fois seize ans ! L’âge parfait pour les premiers amours, les véritables coups de cœur et romance, les pulsions d’un jeune adulte en devenir avec ce doux sens de la contestation. La revendication d’un monde idéal est aussi présente pour ce jeune qui cherche à trouver un refuge, loin des conventions sociales qui finiront bien un jour par lui tomber dessus avec les obligations qui en découlent.

    Seize ans, la lisière entre la pleine adolescence et le début d’un monde plus mature et réfléchi, peut-être, aussi, plus gris et bien moins coloré que celui d’une enfance insouciante.

    Cela, Damien l’avait bien compris, depuis ses treize ans. Il s’était déjà questionné sur beaucoup de choses, le sens de la vie… Qu’allait-il donc bien pouvoir faire dans ce monde si compliqué, à l’avancée pour le moins inquiétante sur certains aspects ?

    Il en venait même à s’interroger – noyé entre sa grand-mère et sa mère qui s’affairaient au milieu des autres invités quelle mouche l’avait piqué de vouloir venir s’incarner, ici, dans la matière, puisque jusque-là, et c’était un fait, la vie n’avait preuve d’aucune complaisance en ce qui concernait la concrétisation de ses plus chers désirs et ses souhaits secrets.

    L’un restait, et de loin, le désir de pouvoir célébrer cette journée avec son copain.

    Oh oui, un amoureux qui aurait été là à lui sourire, le tenir par la main, ou bien lui lancer des petits regards complices tendrement liés d’affection. Encore fallait-il qu’il puisse le trouver ce copain, cet ami, cette personne qu’il avait pressentie lui manquer cruellement depuis tout petit déjà.

    Quel sentiment terrible de subir une affliction pareille, d’être, ainsi, obligé de la terrer en contrebalançant par un joyeux visage afin de ne pas attirer les regards inquiets sur lui ! Il voulait disparaître, se dissoudre entre ces deux arbres silencieux, au fond du jardin, témoins de sa détresse.

    Son cœur en tambourinait d’envie, l’implorait à grands cris de le laisser s’éparpiller, exploser dans l’air pour ne plus avoir à tolérer ce malaise indescriptible et pourtant pesant de solitude.

    Entre quelques larmichettes que Damien parvenait à dissimuler ingénieusement en prétextant les reflux de pollen résistant dans les yeux. Il se demandait ce qu’il avait pu bien faire à Dieu pour se coltiner une existence si vide de raison et absurde de légitimité.

    Vous imaginez ressentir une telle émotion, un désir incessant et ardent dans toutes vos veines de souhaiter à tout prix vous évanouir de ce monde, et de ne plus jamais revenir, vos yeux désespérément rivés vers le ciel masqué par les branches souples des arbres qui se balançaient, accompagnés d’un souffle léger ?

    C’est donc sans surprise ni expectation particulière qu’il finit par réussir à s’éclipser tandis que les conversations commençaient à diverger, d’autant que le délicieux gâteau n’avait pas encore été servi. Ce fut très facile pour Damien de s’éloigner en prétextant un besoin urgent.

    Il avait dû jusque-là encaisser beaucoup, par contre, en ce jour de fête, il était impensable d’éclater en larmes devant ses proches avec cet aveu lourd : j’aurai aimé ne plus être ici.

    Non, s’obligeait à se raisonner Damien. Cependant, il marqua une hésitation avant d’aller se recueillir dans son coin favori ; le jardin aux cerisiers, juste en face de la maison de ses grands-parents.

    Après avoir apprécié le calme de même que ce début de sérénité revenu le caresser tandis qu’il se laissait tomber au pied du tronc, le visage en l’air mais toujours aussi inexpressif, luisant de larmes sous les rayons sauvages, sans qu’il vienne à se préoccuper de ce désarroi qui glissait sur ses joues chaudes, Damien finit par s’entourer de ses bras. Les genoux repliés, il déglutissait son incapacité à ne pouvoir hurler, crier, taper du poing, cracher son aversion envers l’infâme injustice qu’il ressentait d’être puni, châtié pour quelque chose, une faute grave d’instance supérieure laquelle dépassait même sa compréhension des choses.

    Pauvre garçon, s’il choisissait maintenant de céder à ses impulsions, sa famille rappliquerait toute paniquée, de quoi lui refiler des angoisses supplémentaires ! Déjà qu’il avait atteint son quota à force d’hyper sensibilité et de compassion incessante envers les autres, il en était arrivé à s’approprier des souffrances qui ne lui appartenaient pas.

    Heureusement, sa thérapeute le suivait de très près. Elle cherchait à l’aider et à composer du mieux possible avec cette situation de mal-être pour que le garçon puisse, petit à petit, retrouver ses vraies émotions et son droit d’existence. Ce droit dénigré, bafoué de maux de gorge quotidiens, avec des narines parfois bouchées pour l’obliger malgré tout, à ouvrir grand la bouche, de telle manière que son corps – ce bon vieux compagnon de route se démène pour maintenir son propriétaire en vie et en bonne santé, et cela, malgré un désir de mort gravé dans une âme de plus en plus assombrie.

    Seulement, tout cela, ces contraintes, ces anciennes habitudes et les blessures accumulées poussèrent Damien à sortir vivement de son silence puis de lancer ce message au ciel.

    — Je ne sais pas si tu m’écoutes, si de là où tu es, tu réussiras à m’entendre, ou si ce vide infernal que j’ai dans le cœur me pousse à fantasmer ton existence, pourtant… Je veux que tu saches que je me sens seul. Je ne sais pas ce que je suis censé faire. Je n’ai que ton visage et tes yeux que je recherche sous toutes les formes, dans les magazines, les séries télés, les jeux vidéo. Je t’imagine un jour me surprendre à la sortie du lycée, ou débarquer dans ma classe comme le nouvel élève. J’aimerais tellement comprendre pourquoi j’ai ce besoin incurable de te trouver, c’est comme si depuis que j’en ai pris conscience à treize ans, une part de moi, une moitié m’a été arrachée. Je me sens vide et à ta perpétuelle recherche. Chaque jour, je souhaite te rencontrer, je te prie de toutes mes forces, tous les soirs avant de m’endormir. Il n’y a que dans mes rêves que je suis bien, que je suis avec toi, que je ressens cette union.

    L’adolescent essuyait des larmes qui l’enfonçaient davantage dans la tourmente. Il laissa passer la première vague accompagnée d’expirations haletantes, une main tremblante sur le front.

    — J’ignore si toi tu la ressens, ou si mes sentiments sont voilés par la détresse et qu’il n’y a jamais rien eu en vérité. Mais dans l’éventualité, chevrota-t-il une impression insistante que quelqu’un entendait son appel, si c’est bien toi et que de là où tu es, tu me surveilles, je t’en supplie, sauve-moi ! Retrouve-moi ! Je n’y arrive plus, cette vie est un mensonge. Je pourris de l’intérieur. Les jours qui passent me paressent vides, dénués de plaisir. Je n’éprouve aucune gratitude. Comment fait-on pour rire ? Je ne sais plus. Ma joie, je l’ai perdue. Le grand amour, je n’y crois plus. Je n’apprécie rien. Les quelques instants joyeux me sont volés, et à présent, je les repousse pour ne plus souffrir. Mon cœur se verrouille. Il se dessèche et se noircit. J’ai l’impression que jamais cela ne s’arrêtera ! C’est trop pénible d’accepter que les parcelles de bonheur nous glissent entre les doigts. Rien n’a de sens ! Je jalouse la vitalité, le plaisir des gens qui jouissent d’une meilleure vie. Ils obtiennent tout facilement, sans effort ! C’est dégoûtant, écœurant ! Je ressens beaucoup de haine, de révolte face à tout ça. J’en ai marre, grinçait-il des dents, je ne veux plus vivre ! Ce n’est pas une vie, c’est un cauchemar ! Je suis enfermé, je suffoque dans cette réalité… cette prison, ma prison. Je t’en prie, si tu es là quelque part, aide-moi ! Je m’embourbe, et, avoua-t-il découragé d’un long soupir, je crois que je ne veux plus me débattre. Je pense à me laisser couler.

    Lorsqu’en fin, il se sentit gagné par ses Ombres, Damien se reprit en redressant la tête, les yeux pleinement conscients. Sa dernière étincelle plus puissante que jamais n’avait cessé de briller. Elle le conduisit à ajouter ceci :

    — Je t’aime, même si je m’éteins et qu’importe si la solitude me pousse à te l’avouer, je t’aime… je t’attendrai toujours.

    — Damien ? Damien, mon chéri où es-tu ? Viens, on t’attend pour le gâteau.

    C’était le moment. Tous les convives se rassemblèrent autour du jeune garçon, qui cette fois-ci, au bord de l’effondrement, dut durement donner le change pour ne pas être démasqué par ces visages rivés vers lui. La frimousse éclairée par l’arrogante lueur des bougies, les doigts crispés de ne pouvoir réduire en miettes ce glaçage dégoulinant sous une meringue blanche craquelée : quel moment interminable pour Damien !

    Quelqu’un semblait apprécier de le voir se décomposer, de marquer avec insistance un sourire exagérément faux et trompeur aux yeux de tous. Non, sans rire, qu’il se désigne l’enfoiré de première qui avait appuyé sur le bouton pause afin que l’ado cuise de crainte au point de laisser son mal, insatisfait, être remonter par vagues d’assauts à la manière de la marche des Walkyries.

    — Fais un vœu, mon chéri, allez ! Avant que toute la glace ne fonde !

    Damien inspira et s’apprêta à souffler quand il crut percevoir une forte présence venir l’entourer d’un bras solide à la taille, robuste et si vivement qu’il en fût troublé.

    Son esprit l’envahit soudain d’images lointaines. Un épais brouillard saisit sa vue et tous ses sens à l’unisson d’un bruit de plus en plus lourd et frappant qui relevait de l’affrontement de deux hommes au milieu d’une vallée engloutie d’Ombres hurlantes.

    — Je suis là pour ramener ma Lumière.

    — Ta Lumière m’appartient. Tu ne la retrouveras pas dans cette vie, tel est le Marché. Quand comprendras-tu ?

    Les deux individus bondissant du sol reprenaient leurs impulsions contre les parois fendues à cause de leurs nombreux impacts. La détermination souveraine dans le ventre, l’épée en l’air, aucun des deux ne fléchit. Ils se bousculaient, se malmenaient, se repoussaient contre les montagnes de rochers et ne desserraient pas de leur furie quand ils s’attrapaient pour rouler sur le sol tout cabossé, fumant entre deux crevasses.

    Rien ne semblait les arrêter, pas même la pluie brûlante tonnant l’arrivée d’une apocalypse inévitable.

    — Tu es fou de vouloir me défier ! Je suis la Grande Puissance à qui tout obéit ! Revenir sur ce qui a été établi revient à détruire l’équilibre.

    — Je me moque de toutes les lois désormais. Je trouverai le moyen !

    — Alors, ton âme est encore plus idiote que je ne le pensais…

    Ils s’envolèrent plus haut, tournoyèrent d’intensité, avec une violence féroce dans les yeux qui conduisait les moindre de leurs coups. Et au milieu de cet antagonisme, tout volait en éclats : les chemins effondrés, les dalles brisées ; à l’image d’un joli tableau ravagé par la fureur d’une peinture sombre, s’écrasant à même le parquet. Les lampadaires de la contrée, comme les chaumières arrachées, flottaient dans ce vide saisissant, transportés par le vent soufflant son tourbillon implacable.

    En équilibre sur des morceaux de chemins flottant, l’un des hommes bouillonnait de rancœur sous un long manteau de cuir. Alors qu’il poursuivait sa lutte, il fut ébranlé lui aussi, par une vague de souvenirs, dont un particulièrement pénible à surmonter.

    Il dépeignait une scène surprenante au pied d’un saule pleureur.

    Car, là se tenait tous nos compagnons des anciens tomes de notre jolie histoire, Tily, Doony, Jogo, la belle Nadeige, entourée d’autres visages assez flous, qui réussissaient à peine à percer la brume angoissante.

    Pourtant, une figure subsista parfaitement claire et nette : celle de Solah. Le chevalier se trouvait accroupi, les yeux désespérés devant un cercueil de verre. Il s’efforçait de contenir une rage indicible du bout des doigts qu’il pressurait autour du manche de son épée.

    — Pardonne-moi, disait-il, de toute la flagellation qui déchirait son cœur. Pardonne-moi.

    Son maître, le grand Astaroth le rejoignit avec ces mots compatissants tandis qu’il lui posa la main sur l’épaule.

    — Il est en paix à présent. Cet enfant a ramené la Lumière dans nos contrées.

    Solah se tourna.

    — Cela ne se peut ! Ça ne devait pas se terminer ainsi. Impossible !

    — La porte de son cœur se retrouve verrouillée et avec elle, toute l’Obscurité.

    — Maudit sortilège… Tout est de ma faute.

    — Non, Solah, il ne s’agit pas d’un sortilège. Cela relève, tout au plus, de la promesse d’un destin inéluctable. Retiens mon jeune élève, que nul ne peut défier l’Univers…

    — Moi je le peux, se reprit résolument l’individu sur le chemin flottant une fois le souvenir dissipé. Je le peux !

    Il s’élança dans un cri de rage vers son adversaire, ne lui laissant plus le temps de rétorquer d’une quelconque parade. La victoire s’annonçait ! Elle lui permit de se délester de son ressentiment enchaîné à sa douloureuse culpabilité, par un ultime coup, avant de s’élancer vers une porte…

    Mais de quelle porte s’agissait-il ?

    Au même instant, Damien se ressaisit. Il fut sur le point de souffler ses bougies sous l’œil expectatif de toute sa famille quand une voix lui murmura :

    — Garde une bougie allumée ! Pour que ton vœu s’exauce, laisses-en briller une. Ne l’étouffe pas.

    — Damien, s’inquiéta sa mère, tout va bien ?

    Et là, le garçon put nettement percevoir quelqu’un qui continuait d’empêcher ses larmes insistantes de ruisseler, d’une caresse tendre sur la joue, sans omettre ce bras résolument protecteur toujours là, à l’entourer à la taille.

    — Je veux en garder une…

    — Une quoi mon trésor ?

    — Je veux garder une bougie allumée.

    — Qu’est-ce que tu dis ? Il faut bien toutes les souffler afin que je puisse couper le gâteau.

    — Ne les retire pas toutes, la dernière qui reste sera pour ma part à moi, s’il te plaît.

    Sa mère très surprise par cette requête étrange – mais puisque son garçon de ses yeux bleus suppliant avait l’air d’y tenir – se chargea de couper la première part une fois les autres bougies éteintes.

    Damien apprécia de voir la dernière chandelle luire de sa fragile lueur sur cette part de gâteau qui, au bout du compte, donnait vraiment envie et avait l’air plus qu’appétissant. En outre, il avait eu droit à la plus grosse portion et tandis qu’il finit par s’asseoir après que tout le monde eut applaudi, Damien entendit cet écho persistant résonner dans son oreille.

    — J’arrive ! Attends-moi, j’arrive !

    Des voix

    — Maître. Elle est ouverte ; la porte de son cœur…

    — Enfin, il approche… Le Pacte est formel, jamais le Gardien ne doit la retrouver, s’il veut que de leur séparation, leur quête puisse être menée. 

    Chapitre 1

    Damien et Solah mènent l’enquête

    — Monsieur Deyviant, s’annonça Damien suivi de Solah. Merci de nous recevoir si rapidement.

    — Rapidement, ne put s’empêcher de tiquer du sourcil Solah, c’est vite dit !

    — Solah !

    Damien se tourna vivement vers le guerrier célestin avec des yeux qui en dirent long.

    — Je t’en prie, ne commence pas !

    — D’accord, je me tais. Explique donc la situation à ce monsieur.

    Le chevalier le provoqua tout de même de son petit air disant : « de toute façon, je sais que tu vas te planter si je n’interviens pas ».

    Il plaça donc les mains derrière la tête, avec son sourire qu’on ne lui reconnaissait que trop bien désormais.

    — Monsieur Deyviant, reprit Damien, bonjour.

    Un petit castor en tailleur avec le chapeau melon qui penchait de côté, sortit le museau de son poste de télévision et l’accueillit avec courtoisie.

    — Shhh !

    — Ben voyons un chapeau toon, expira Solah.

    En effet, le jeune homme venait tout juste de remarquer des yeux aux pupilles roulant sur l’avant du dit chapeau. Ce n’était pas plus surprenant que ce porte-manteau arrogant dans le coin de la salle. Il lançait un de ses regards qui faisait froid dans le dos en direction de Solah.

    — Monsieur Deyviant, je me permets d’insister, souligna Damien, se penchant un peu plus. Je…

    — Ne voulez-vous pas vous taire rien qu’une minute, le temps que se termine le show ?

    Solah éclata de rire.

    — Demander à Damien de se taire, reviendrait à exiger de l’univers que la paix règne sur terre. Donc impossible !

    Le détective plissa son museau de contrariété. Ses deux petites moustaches tremblotèrent, à croire que lui aussi avait un caractère explosif.

    — Vous me ruinez mon show ! Ce n’est pas tous les jours qu’on peut revoir une rediff de Elsa Rymes.

    — De qui ?

    — On voit bien que vous n’êtes pas d’ici ! C’est la chanteuse la plus célèbre de Zambzout.

    — Ah ouais, approuva Solah, jolie donzelle ! Ils sont bien vos miroirs magiques. On n’en a pas des comme ça à Landasia.

    — Non, mais que ne faut-il pas entendre ! maugréa Damien, se plaquant la main sur le front.

    — C’est une télévision. Je te l’ai déjà dit ! Et arrête un peu de la lorgner de cette façon. Tes hormones ne prennent jamais de congés ?

    — T’es jaloux ? Normal, tout le monde ne peut se vanter d’avoir mon charme. Qu’est-ce que tu veux, c’est la dure loi de la Nature. Ne fais pas cette tête, toi aussi tu finiras par trouver ta gazelle !

    — Pitié… vaut mieux entendre ça que d’être sourd ! Bon et vous, reprit de plus belle Damien. Monsieur Deyviant, nos amis ont disparu et le bruit court que c’est le cas pour beaucoup d’autres habitants.

    Le détective sortit une pipe à bulles de son veston. Oui, vous avez bien lu… à bulles !

    Damien se surprit à vouloir laisser tomber sa mâchoire parce qu’il s’agissait en vérité, de bubulles chantantes, et une fois encore, l’adolescent n’avait pas pu se vanter d’en croiser dans sa vie, surtout que chacune avec son petit air, de larges mirettes et une ronde figure, entamait déjà un chouette refrain.

    Deyviant finit par éteindre le poste de télévision.

    — Bon, je vous écoute. C’est quoi votre problème ?

    — Je viens de vous le dire, s’agaça un peu Damien. Nous sommes à la recherche de nos amis disparus et…

    — Je le conçois bien. Mais des amis qui s’évaporent… un peu abstrait comme point de départ pour ouvrir une enquête, vous ne trouvez pas ? Quand les avez-vous vus pour la dernière fois ?

    Solah perdit patience, tout cela commençait instamment à lui chatouiller les nerfs.

    — Nous venons d’une autre terre. Cependant, nos compagnons sont originaires de la vôtre : Toonylia. Ils se sont évanouis suite à un périple dans une contrée appelée Enchantia.

    Deyviant se grattouilla la moustache en buvant sa tasse de café, qui elle aussi se mettait à grimacer vers le chevalier.

    — J’ai du mal à suivre, déclara Deyviant entre deux gorgées.

    — Oh, ce n’est pourtant pas si compliqué.

    Damien se pencha un peu plus vers le détective, les mains appuyées sur le bureau.

    — On vous dit qu’ils ont disparu, on ignore comment ! Ce que l’on sait en revanche ; c’est qu’ils ont atterri ici !

    — Et comment pouvez-vous en attester ?

    Damien dissimula que ce fut grâce au grimoire de Mesméria qu’il détenait cette information, et misa plutôt sur un fort pressentiment, histoire d’éviter de se relancer dans une interminable explication. Pire que de supporter le son infernal de ces bubulles, lesquelles après avoir chantonné lui éclataient au visage.

    Deyviant sortit un classeur d’un de ses tiroirs.

    — Description des disparus, s’il vous plaît ?

    — Tily : un lapin aux longues oreilles, vif d’esprit, et doué avec les poignards.

    — Je vois, un serial Tooner donc

    — Qu’est-ce qu’il raconte ?

    Damien se mordit férocement les lèvres pour ne pas lui aboyer dessus : espèce d’abruti ! Arrête de jouer au con et aide-nous à retrouver nos compagnons, avant que je te la fasse bouffer ta pipe idiote et que je te transforme en taupinière !

    Au lieu de cela, l’adolescent se contint du mieux qu’il put, à tel point que ses oreilles en fumaient presque.

    — C’est notre ami, expliqua-t-il au détective, ainsi que Doony et Jogo. Un canard cupide et un ours gentil comme tout.

    — Je vois… merci. Je vais mettre votre dossier en attente.

    — Quoi ? C’est tout ? Mais, et ensuite ?

    — Vous croyez quoi ? J’ai plusieurs affaires sur les bras. Les collègues m’ont tout refourgué, car ils sont dépassés par les disparitions qui s’accumulent. Et bien que je sois le meilleur détective de la région, je ne peux tout résoudre !

    — Et que fait la police alors ?

    — Il leur manque des effectifs, eux aussi… envolés !

    — Oh misère ! soupira Damien. Et il n’y a vraiment personne qui puisse nous venir en aide ?

    — Y a bien Tonkerz.

    — Excusez-moi ? Vous pouvez répéter ?

    — Tonkerz. Une nouvelle recrue dans la police, une brave patte ce type, un très bon flic ! Je bosse souvent avec lui. Il travaille aussi comme serveur les vendredis au Toonights ; un club branché. Vous choisissez bien votre jour car il y sera ce soir. On peut s’y retrouver. J’ai moi aussi besoin de décompresser. La belle Elsa y fera son show et vous pouvez être sûrs que l’endroit sera bondé ! J’ai des relations et je peux même nous avoir des places.

    — Euh, ma foi merci.

    — Un petit conseil cependant, vous devriez vous trouvez un hôtel. Votre affaire ne risque pas de se régler en un jour… Allez ! J’ai encore des clients à voir. Merci de votre visite et à ce soir.

    Alors je vous laisse imaginer la tronche que pouvaient bien tirer nos deux héros complètement démunis dans un monde où tout est sans-dessus dessous.

    Pour cause, quand ils sortirent de l’immeuble, ils manquèrent de se faire écraser par un chauffard, les gaz à fond, doublant et déboulant sur le trottoir et aussi sur une des terrasses de cafés. D’ailleurs, il venait d’embarquer au passage la jolie serveuse. Voyez un peu !

    Il fallait avoir le cœur bien accroché, surtout pour Solah. Le pauvre jeune homme ne se remettait pas de voir d’aussi près des rangées de buildings. Tout cela était déroutant, et rien d’onirique ni d’harmonieux. Comme elle lui manquait tellement sa belle cité des nuages !

    — Bon, dit-il, nous voilà bien avancés. On ignore comment retrouver nos compagnons, puis cette contrée est décidément de plus en plus dérangeante.

    — Tu l’as dit… C’est moi, ou y a des plongeurs qui font du crawl dans les nuages ?

    — De quoi tu parles ? Assez perdu de temps ! Toi qui entends des voix, pour une fois demande donc d’être guidé.

    Damien se retourna surpris.

    — Comment tu sais ça toi ?

    — Oh ! je t’en prie Dams, les toons sont incapables de garder un secret. Bon, alors tu te décides ?

    — Tu crois que c’est facile ! Puis d’ailleurs, je ne dirais pas des voix, plutôt la meilleure partie de moi qui me parle.

    — Ouais

    Solah croisa dubitativement les bras de son air, « rappelle-moi quand même de t’inscrire dans une maison de santé pour maladies mentales à notre retour ».

    — Dams… franchement ! Des fois, je me demande si tu n’es pas un tantinet…

    — Quoi ?

    — Rien, laisse tomber. Regarde, c’est la demoiselle de la boîte magique de tout à l’heure !

    — Qui ? Ah, Elsa.

    — Je vais aller lui parler.

    — Non mais, tu comptes toutes les draguer ?

    — Vraiment, tu n’y entends rien. Je vais lui demander par une simple question si elle peut nous indiquer le chemin de sa taverne.

    — Club ! Dis club ! Taverne porte à confusion…

    — Bien…

    — Attends-moi.

    — Ah non pas question, le fusilla du regard Solah. Toi tu ne bouges sous aucun prétexte ! Compris ?

    Une voix s’éleva soudain.

    — Demandez l’édition spéciale : un étrange phénomène se répand à Zambzout. Demandez l’édition spéciale !

    Et tandis que Solah allait en apprendre un peu plus sur les lieux, Damien s’empara d’un de ces journaux braillant sur bottines, sans trop se préoccuper des voitures taxis garées à l’ombre, bien au frais sous les parasols d’un café accueillant. Elles prenaient le temps de siroter leur cocktail diesel, les lunettes de soleil sur les phares.

    — Hey, attention !

    Toute une rangée de fourmis, portant les sacs à dos, coiffées de casquettes de randonneur manquèrent de faire tressauter Damien en arrière quand il manqua de les écraser. Et il valait mieux, pour l’ado, de ne pas se cogner à ce poteau suintant de sueur s’il ne voulait pas être trempé et collant. De plus, ce pilier faisait triste mine à rester fixe sur son emplacement guettant avec empressement la pause déjeuner, sous la chaleur aussi, il sortit un petit ventilateur lui permettant au moins de se rafraîchir légèrement.

    Damien voulut s’asseoir un instant sur un banc. Cependant, des grondements féroces qui s’apparentaient plus à ceux d’un fauve sauvage et affamé le dissuadèrent très vite de poser son postérieur dessus. Vous imaginez si le banc se mettait à lui croquer les fesses ?

    Il s’éloigna rapidement, tenta d’apostropher quelqu’un parmi ces curieux passants qui vociféraient.

    — Oh bon sang de bon sang, je suis encore mal garé ! Je vais récolter une contravention, c’est sûr !

    — Vite, vite je suis en retard ! Affreusement en retard, je devrais déjà être au studio !

    — Oh, bah ça alors, c’est fou ce qui fait chaud aujourd’hui !

    — Euh excusez-moi, finit par demander Damien.

    — Oh ! Voilà un charmant garçon qui va pouvoir m’aider à traverser la rue, dit une dame âgée.

    Ah que voulez-vous, notre héros n’était pas un goujat, néanmoins, il en profita pour obtenir des informations de la part de cette gentille grand-mère.

    — Dites-moi, êtes-vous au courant de ces disparitions ?

    — Oh, oui, oui, quelle chose affreuse, affreuse...

    — Personne n’a une idée de qui peut bien les provoquer ?

    — Provoquer quoi ?

    — Les disparitions…

    — De qui ?

    — Bah c’est justement ce que je désirais savoir et… ATTENTION !

    Une voiture manqua de leur foncer dessus. Une chance que Damien soit pourvu de bons réflexes ; et ainsi les mettre tous les deux en sécurité sur le trottoir opposé. Dire que le feu était passé au rouge ! Impensable…

    Moins stupéfiant cependant quand l’ado vit la vieille dame dégainer un nouveau bras de son sac à main, tandis que l’autre se trimbalait encore joyeusement accroché au rétro de l’automobile. Il grimaça largement d’un coin à l’autre de sa bouche.

    — Oh, c’est immonde !

    — Il ne faut pas vous inquiéter, gloussa la petite vielle, ça m’arrive tout le temps. La dernière fois, c’est mon œil qui s’est mis à gambader tout seul. Heureusement que je pense à prendre toujours des paires de rechanges.

    — Ôtez-vous de mon chemin, ricana une sorcière.

    Et un strike ! Voilà le mot pile poil qui convenait à l’image de la pauvre mamie qui éclata éparpillée comme un jeu de quilles, sous le regard ébahi de Damien. Il avait encore la main collée de frissons sur la poitrine et ne put s’empêcher de regretter son impatience dévorante d’avoir entraîné Solah dans ce calvaire.

    Très intriguant pour Damien ! De plus, il lui sembla reconnaître cette drôlesse de sorcière. Peut-être l’avait-il vue dans un vieux dessin animé de son enfance, ou même en rêve, tiens !

    — Laissez-moi vous aider, se proposa gentiment le garçon à la mamie en train de se rassembler d’elle-même de ses petites mains actives.

    — C’est très gentil ! Mais mon docteur va m’arranger ça. Et puis, heureusement que je peux compter sur mon sac à main pour m’y transporter, dit-elle avant d’être tirée par une longue langue baveuse.

    La mémé se retrouva ingurgitée par ce drôle de sac aux yeux vicieux et menaçants sitôt qu’on s’approchait d’un peu trop près de sa propriétaire. Le voilà qui justement, sur ses quatre pattes, se mit en route en direction du cabinet du docteur Brooks, se frayant un chemin parmi les piétons affairés.

    Ah et devinez quelle inscription s’affichait sur le sac ? Boobeep !

    Espérons que Solah avait eu plus de chance, car de son côté, Damien n’avait pas avancé d’un pouce dans ses recherches.

    Tiens, le voilà, notre bourreau des cœurs, qui toutefois, se laissa un peu trop émoustiller par la superbe créature aux jambes fuselées et délicates, dans sa robe fine verte à paillettes. Pourvue d’une poitrine généreuse au décolleté avenant et d’une bouche aux lèvres pulpeuses discrètement tapotées de gloss, elle était incroyablement envoûtante et c’est ce qui désarma, sans le moindre doute, le plus Solah. Et waouh, que dire de ce regard bleu vibrant, aussi saisissant que la belle chevelure ondulante qui tombait en cascade avec ses reflets dorés. Comme quoi, il pouvait y avoir de ravissantes créatures chez les toons ! À en croire qu’elle était presque humaine cette demoiselle !

    — Est-ce que je peux vous aider mon mignon, demanda-t-elle d’une voix suave.

    Elle alluma sa longue cigarette d’un geste qui ne manqua pas de faire tourner la tête de notre brave chevalier. Heureusement que Damien n’était pas présent, il aurait fulminé de voir son mec se laisser séduire facilement par une bécasse sur échasses ! Enfin son mec, dans la tête de notre joyeux râleur, cela va de soi.

    — Euh mon nom est Solah et je…

    — Tu n’es pas d’ici, c’est évident ! De quelle province viens-tu ?

    — De très loin…

    Il ajouta, une main plaquée derrière la nuque en plus de quelques rougeurs apparentes sur les fossettes.

    — J’aimerais en apprendre un peu plus sur votre ville.

    — Cela tombe bien que tu sois en plus craquant.

    Elle s’avança vers lui, et ne manqua pas de donner la cadence par un jeu de jambes prononcé, tout en tournant autour du jeune homme pour apprécier davantage sa carrure. Solah ne savait plus où se mettre. D’habitude, c’est lui qui se montrait entreprenant, et là, le voilà tout timide comme un gamin qui s’intéressait à une jolie fille pour la première fois. Elsa lui révéla après avoir soufflé sur le nuage de fumée qui s’échappait de sa gorge.

    — Je n’autorise personne à me déranger avant un show, cela me déconcentre toutefois… j’aime bien les surprises de temps en temps. C’est pour cette raison que mes gorilles ne t’ont pas expédié à l’autre bout de la ville. Ils peuvent se montrer parfois violents quand ils s’y mettent. J’aime me sentir protégée, rassurée. Tu vois ?

    L’entreprenante diva caressa le bras robuste du chevalier, dont les poils s’étaient tous mis au garde à vous. Puis, si on en croyait cet émoi naissant entre les jambes de Solah, un autre de ses attributs témoignait également d’une vive réaction quant aux attentions délicates de la jeune femme.

    — Je ne suis pas une mauvaise personne, certifia Elsa. J’adore mes fans. J’aime aussi le calme, l’intimité, cela m’inspire pour écrire et composer de nouvelles chansons. Saisis-tu ce que je veux dire ?

    Les yeux de notre pauvre chevalier luttèrent pour ne pas s’attarder sur ce décolleté qui lui faisait presque du rentre-dedans, à tel point qu’il faillit se retrouver le nez plongé dedans s’il n’avait pas eu ce geste de recul.

    — Euh, je vois oui… Je… Il fait chaud, par ici !

    — Oui, toujours ainsi en période estivale. Tu m’offres un verre ? On pourra parler plus longuement. Je te garde une place toute réservée pour le show de ce soir, si tu le souhaites.

    — Ah oui, justement ! Mon ami et moi cherchons le club Toonights. Et un genre d’auberge pas très loin pour y séjourner le temps de régler une affaire.

    — Ton amie… Oh, elle est plus belle que moi j’imagine, pour m’avoir autant devancée.

    — Ah non mais, sua à grosses gouttes Solah, c’est un compagnon de route. Il s’appelle Damien.

    — À la bonne heure ! Si tu m’accordes ce verre, ton ami et toi, pourrez séjourner à bas frais. Je connais personnellement le gérant.

    — Fantastique ! Je pars vite le chercher et nous viendrons nous désaltérer ensemble.

    La chanteuse le retint par le bras.

    — À vrai dire, j’avais espéré savourer ce petit moment en tête à tête, lui susurra-t-elle à l’oreille, ce serait bien plus agréable. Je dirai à mes gorilles d’escorter ton ami à l’hôtel pour ne pas qu’il se perde. Le Toonights Club se situe juste à deux rues plus loin. Il ne pourra pas le rater, l’inscription scintille d’un rose fushia, très voyant, conclut-elle, en descendant lentement sa main sur le buste du chevalier.

    Solah n’en finissait plus de dégouliner de gêne sous sa tunique, pourtant fine et assez légère.

    — On y va, proposa-t-elle après avoir envoyé un message sur son portable.

    — Euh, oui… Bien sûr, après vous, gente dame !

    Mazette, Solah était tellement sous le charme qu’il n’avait rien remarqué de ce curieux gadget qui sonne et permet d’envoyer des messages.

    — Ce que tu es galant, minauda Elsa au bras du chevalier.

    Damien réagit vivement quand il le surprit en train de s’éloigner.

    — Non, il se fout de moi !

    Il leur courut après et fut docilement arrêté par les sbires de la chanteuse.

    — Hé, laissez-moi ! Je dois retrouver mon ami ! Mais fichez-moi la paix !

    — La diva Elsa veut s’entretenir seule avec votre camarade et ne veut pas être dérangée, ce sont les directives reçues par textos !

    — Directives ?! Je t’en fouuuutrais de la diva ! Je vais lui faire bouffer sa perruque à cette Castafiore, tu vas voir ! Lâchez-moi ! Espèce de grands abrutis que vous êtes ! Et, où est-ce que vous m’emmenez ?! Solahhhh ! Au secours ! Sooolahhh !!

    — Arrêtez de brailler, on vous conduit à l’hôtel.

    — Quel hôtel ?

    — Celui où vous y retrouverez votre ami, votre chambre est déjà réservée par la belle Elsa pour un prix modique…

    — Je ne suis pas au courant ! Maintenant, écoutez-moi bien, grosses brutes. Ou vous ôtez vos sales pattes ou je vous réduis en cendres !

    Les deux hommes de main ne lui accordèrent aucune attention, ce qui poussa Damien à agir.

    — Vous l’aurez voulu !

    Cependant, le chanceux qu’il était, se retrouva contrarié dès que ses pouvoirs le projetèrent sur la vitrine du fleuriste, et comme si cela ne suffisait pas, après avoir réussi à se dégager, – enfin surtout après avoir glissé à l’image d’une pâte à crêpe collante qui aurait mal pris, Damien se retrouva fauché par une mobylette complètement folle. Elle le trimbala sur plusieurs mètres avant de le laisser tomber en rade au milieu du grand carrefour.

    Je tiens à préciser, et vous en conviendrez, qu’il s’agissait là d’un pur hasard puisque le feu avait décidé de passer au vert, pile à ce moment-là. Juste le temps pour Damien de rouspéter, de gesticuler à grands cris, et de déguerpir avant de recevoir des éclaboussures de peinture fraîche provenant d’un seau qu’un peintre maladroit avait dû renverser de son échafaudage.

    Pestant après le manque de bol et contre toute attente, Damien tomba nez à nez avec Freddy le lion qui tenait un nouveau sachet de cacahuètes, et portait toujours ces lunettes de soleil groovy sur le museau.

    — Ça par exemple, mon p’tit bonhomme ! Bah ! t’étais passé où ?

    — Oh juste ciel, s’émerveilla Damien. Freddy, enfin un visage familier. Comme je suis content de te revoir !

    — Bah moi aussi, vous aviez disparu où avec ton ami ? La secrétaire du commissariat m’a dit vous avoir vus partir.

    — Oui, il y a combien de commissariats dans cette ville ?

    — Six, pourquoi ?

    — Six ? Bon, un flic qui s’appelle Tonkerz, ça te parle ?

    — Tonkerz ? Oui, c’est un bon pote à moi. Un sacré flic. Pourquoi ?

    — Le détective Deyviant nous a suggéré de nous en remettre à lui pour retrouver nos amis disparus. Il pourra, peut-être mettre la main aussi sur ton copilote ?

    — Sacré nom des noix de coco !

    Freddy prit Damien dans ses bras.

    — T’es un sacré petit génie de bonhomme toi !

    — Repose-moi, ou tu vas me réduire en bouillie si tu continues à me serrer aussi fort.

    — Oups, pardon.

    — J’y pense, percuta Damien, tu sais où se trouve le club…

    Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase que quelque chose le fit bondir de stupeur : un camion fou ! Après la mobylette, le camion ! Et complètement siphonné, a priori, avec ses dents carnassières en lieu et place des phares. Qui plus est, il coursait toute une famille de porcelets !

    Non, il ne s’agissait pas des trois petits cochons, vu qu’ils étaient six, mais plutôt des musiciens qui devaient se produire, ce soir au Toonsnights Club.

    — C’est quoi ce bord...

    — Vite !

    Freddy le tira par le bras, il manqua même de le lui arracher.

    — Il ne faut pas rester là, mon p’tit bonhomme !

    — À l’aide ! Au secours ! Cochons en danger !

    Les musiciens s’écrièrent, leurs trompettes en l’air, cymbales et autres instruments largués sur le sol pour échapper à ce camion fou.

    — Au secours !

    Un premier cochon se fit happer par un genre de grappin qui sortit droit de la gueule du camion, avant de l’enfourner à l’intérieur de son moteur rugissant. Damien, Freddy et les autres toons piétons témoins de la scène, filèrent dans les recoins des rues.

    — Attends, pria Damien, épuisé. Deux secondes !

    — Par sainte Pastèque, lui hurla dessus Freddy, c’est pas le moment de s’arrêter pour se bronzer l’ananas !

    — Et si c’était cet engin qui enlève les Toons qui disparaissent…

    — Nom d’une noix de pécan ! Damien ! Tu penses que…

    Hop, ni une ni deux, Freddy, imposant comme il était, embarqua Damien sous le bras. Il se rua sur le premier taxi venu.

    — Vite, s’écria le lion tout paniqué : suivez ce camion !

    — Bien monsieur.

    — Hey ! Revenez ! Attendez-nous !

    En effet, il aurait été plus simple pour Damien et Freddy de monter à bord du taxi, avant que celui-ci ne s’élance, seul, dans une folle course poursuite.

    — Ces toons, rumina Damien la main désespérément placardée sur le front.

    Heureusement, un immense bras exagérément allongé saisit nos deux compagnons à la volée dans sa petite coccinelle bleue.

    — Oh bah ça par exemple ! Tonkerz, le reconnut Freddy.

    Le lion s’installa bien confortablement sur le siège avant et en profita pour replacer sa casquette qui penchait sur le côté.

    — Si je m’attendais à te voir !

    Un puma tout tacheté, en uniforme de police lui répondit en restant bien concentré sur sa trajectoire.

    — Je t’ai vu te lancer à la poursuite du camion. Il m’a déjà échappé trois fois ! Ce coup-ci, je ne compte pas le laisser filer, alors… accrochez-vous !

    À cette folle allure, Damien, qui émergeait à peine sur la banquette arrière, crut sentir son estomac lui remonter par la gorge à coup de balles de ping-pong, tel un match de haut niveau. De même que ses boyaux semblaient exploser comme des paquets de pop-corn, alors que le paysage défilait à une vitesse décapante devant ses yeux élargis. Il ne restait plus qu’une seule solution : s’enfoncer carrément dans le siège en cuir.

    Le camion quant à lui, avait capturé les six musiciens. Il s’apprêtait à prendre le premier embranchement menant direct sur l’autoroute quand il entendit la sirène d’urgence retentir…

    — Oh là, ça va mal, grommela le camion à cause de la file d’attente qui s’étirait. Voilà que j’ai les flics aux fesses !

    — Cette fois, s’exclama Tonkerz, il est cuit ! On le tient ! Quoi ???

    Ses yeux s’étirèrent largement, doublés par le bruit de klaxon habituel qu’un toon use pour traduire de sa stupeur, au moment où le camion déversa de sa cargaison arrière, une flopée de dynamites ! Cependant, rien à voir avec les dynatoons. Celles-ci ne présageaient rien de bon avec leurs petits rires diaboliques et leur regard fripon.

    Heureusement, Tonkerz était un as du volant. Il tira sur le manche et là, la voiture se suréleva, grâce à un ingénieux petit mécanisme sur roulettes, tenu par des ressorts. Vraiment innovant ! Cela lui permit d’éviter de finir en petits morceaux de charbon, écrasés sur la chaussée.

    Le camion força le péage. Il passa par-dessus les voitures encombrantes.

    Toutefois, ne vous inquiétez pas ; aucun mal n’a été fait à tous les conducteurs étalés entièrement comme des galettes éclatées, tatouées de marques de pneus apparentes. Les voici tous déjà en train de se regonfler avec leur petite bouteille d’hélium. Heureusement que chacun conservait toujours son pack d’urgence car un tel événement arrivait souvent sur cette autoroute. Les camions de chargement qui roulent par-dessus les voitures pour gagner du temps étaient légion par ici.

    Mes amis, me voici bien content de constater que de telles choses ne se passent pas ainsi chez nous ! Ils sont complètement dingues ces toons !

    Revenons-en à Tonkerz, et ses facéties. Vous me direz que l’on n’était plus à ça près, d’autant que ce ne sont pas moins de dix dynamites, bondissantes et furieuses qui traquaient la petite voiture bleue.

    — Oh sacré nom des bananas. Tonkerz, l’avertit Freddy, on a de la compagnie.

    — T’inquiète, je gère, et…

    Paf, un pneu qui vient d’exploser, visiblement, les dynamites ne perdaient pas une minute pour attaquer.

    — Waaaa, ça va mal, s’écria Tonkerz tandis que le camion prenait une bonne longueur d’avance.

    Les ressorts permettant à la voiture de prendre de la hauteur s’ébranlèrent. Ajoutez à cela, un deuxième pneu qui partit en vrille, sans omettre les autres automobilistes qu’il fallait dûment éviter, les dynamites sautillantes prêtes à toutes exploser, on ne pouvait qu’en venir au fameux : attention au virage !

    La coccinelle virevolta. Elle sortit de l’autoroute surplombant le lagon et se retrouva ensevelie avec la légèreté d’un boulet de canon sous les eaux. Et là, on ne pouvait que le suspecter, un poisson-serveur. Avec son plateau fixé à la nageoire, il accueillit les nouveaux clients.

    — Puis-je prendre votre commande ?

    Il ne fallut cependant pas sous-estimer les dynamites folles. Soucieuses de bien exécuter leur travail, elles décidèrent de plonger la flammèche les premières dans le lagon.

    Vous ne serez donc pas étonnés, chers lecteurs, puisqu’on est presque dans un dessin animé à présent, si je vous disais que toute l’eau se suréleva dans le ciel, quelques secondes, le temps pour Damien de se demander si ses mirettes ne finiraient pas, elles aussi, par se mettre en grève tant cette situation rocambolesque devenait trop difficile à supporter. Cela, juste avant que l’eau ne retombe dans le lac puis que le poisson-serveur, une fois qu’il eut fini d’expectorer les derniers résidus de fumée, reprit de son air courtois.

    — Eh bien, j’attends ?

    Ainsi, pendant que Damien et ses deux nouveaux compagnons regagnèrent le port, pas sans mal, je vous le concède, Solah se trouvait toujours en compagnie de l’entreprenante mais charmante Elsa, dans le hall coquet

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