Mila « Je ne me donnerai pas la mort »
C’est une tragédie d’une ère nouvelle : une toute jeune fille menacée de mort qui puise son sentiment d’exister sur les mêmes réseaux sociaux qui charrient cette haine ayant brisé sa vie. Ainsi va celle dont plus personne n’ignore le prénom, Mila. Deux syllabes qui disent l’insoumission. Une paire d’yeux bleu courage que jamais elle ne baisse, même pour pleurer, et qui sont entrés dans l’histoire pour avoir, quand elle avait 16 ans, c’est-à-dire il y a dix-huit mois, très exactement le 18 janvier 2020, fixé une caméra en déclarant, en réponse à des insultes, que l’islam était « de la merde » et qu’elle mettait « un doigt dans le trou du cul » de leur Dieu. « Une vidéo qui me coûtera probablement la vie un jour », écrit-elle dans le livre qu’elle publie ces jours-ci et dont le titre est une apostrophe qui nous renvoie à notre impuissance : Je suis le prix de votre liberté. Le texte finit par une injonction, qui barre la dernière page : « Force à nous. » À l’intérieur, l’émotion affleure partout, au point que parfois ça vous étrangle. « Je veux donner toute mon énergie, toute la magie qu’il y a encore en moi pour qu’il n’y ait plus jamais une autre Mila. »
La Mila qui écrit ces mots-là doit le peu de liberté qui - comme elle dit - que sont venus la poignarder les assassins électroniques qui ont mis sa tête à prix. Mais c’est aussi grâce à eux qu’elle garde un lien avec la vie, à présent que les menaces la visant lui interdisent d’aller à l’école, de faire un pas sans protection policière, sans bonnet et sans lunettes de soleil, de mettre son nom sur sa boîte aux lettres, etc. écrit-elle. Et aussi : Pour une extravertie de sa trempe, c’est une mort symbolique. Et comme elle n’entend pas se laisser gommer de la carte de la vie, elle s’accroche aux réseaux sociaux pour se faire voir, entendre, et tant pis si c’est trop, parce que trop, c’est mieux que rien. Si vous l’en privez, fût-ce quelques heures, elle perd pied. C’est pour cela que, quand son compte Instagram a été provisoirement fermé, elle a craqué - et appelé un journaliste auquel elle fait confiance (Nicolas Bastuck, du ) pour hurler son désespoir.
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