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Bonhomme Ecriture: Naissance à l'écriture
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Bonhomme Ecriture: Naissance à l'écriture
Livre électronique82 pages1 heure

Bonhomme Ecriture: Naissance à l'écriture

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À propos de ce livre électronique

L’apprentissage de la langue, de la littérature, du monde enfin, conduit l’auteur de l’école à son destin d’écrivain.

D ’un trait léger et profond, Philippe de Boissy écrit son enfance, sauvée par l’écriture. Ce Bonhomme Écriture traverse la vie avec une force qu’il doit au pouvoir des mots entendus puis mis en pages, calligraphiés ou dessinés, ces mots qui permettent d’apprivoiser les peurs, de séduire, d’exprimer ses sentiments, de survivre en toutes circonstances. Une naissance à l’écriture, grâce à deux maîtres extraordinaires. L’apprentissage de la langue, de la littérature, du monde enfin, conduit l’auteur de l’école à son destin d’écrivain.

Découvrez un ouvrage dans lequel Philippe de Boissy écrit son enfance, sauvée par l'écriture.

EXTRAIT

La semaine suivante, M. Nicolas me fait dessiner la vraie vedette de la marine, traversant la rade de Toulon. Mais avant, il me demande de donner un titre à mon dessin écrit la semaine précédente. Il me demandait toujours des choses impossibles. Je lâche : Le bateau. Mieux que ça ! J’ajoute : Le bateau au salon. Bateau au NON ! Mieux que ça ! Bateau dans un salon. Oui ! Mieux que ça ! Bateau dans un salon en été. Bateau de Noël au salon. Bateau en mer au salon. Tapis de vagues et barque. Salon fenêtre et barque blanche. Je passe de l’angoisse à la trouvaille, et de la trouvaille au délire. J’écris en colonne des phrases où je mélange tout exprès. Salon à tribord de la mer. Barque à la cloche d’accostage. Coup de roulis dans un fauteuil. Fenêtre ouverte sur un tapis. Tapis de mer pour vedette.
Alors je vais dans le n’importe quoi. Bateau à quai sans maman. Le Pacha entre au salon. Georges Leygues sort de la maison. Je nage plus vite que ma mère. Alors il part vers le fond de la classe, les bras levés, sans que je sache s’il m’approuve encore. Il revient vers moi et conclut en souriant : On s’arrête. Tu dis n’importe quoi maintenant, mais c’est pas mal. C’est pour tout le monde pareil.
II prend ma liste et mon dessin, relit quelques titres, et me lance : Je l’aime bien, ta chaise-bateau. Allez, au travail. Je m’y mettais volontiers. Mais toujours dans l’espoir qu’une fois passé l’orthographe, l’accord des verbes, le foutu accent grave sur le a, et parvenu à rédiger des phrases cohérentes que je savais relire avec bonheur, nous déboucherions sur ces plages d’invention où tout était permis, sauf le délire. Mais c’était quoi, le délire, et ça commençait où ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Écrivain, peintre et poète, Philippe de Boissy habite une ferme en Isère. Il a publié une trentaine d'ouvrages : poésies, nouvelles et romans, aux éditions Flammarion et dans des revues (NRF, Esprit, Sud…). Il a obtenu la bourse Guy Levis Mano de poésie en 1985, avec la publication de La Lampe sous le boisseau. Il a été instituteur, professeur d'anglais et animateur chargé de la littérature à la Maison de la Culture de Grenoble, où il crée des ateliers d'expressions écrites en 1972, puis des ateliers d'écriture en 1974. Il lance en 1981 le Centre de création Littéraire de Grenoble, qui éditera plusieurs ouvrages de poésie, des nouvelles et des livres d'histoire dans la série « Modestie de l'Histoire ». En 2004, il reçoit le prix de poésie Charles Vildrac de la Société des Gens de Lettres pour son recueil Jubilations du désert, aux Éditions du Jasmin. Lecteur à voix haute, il enregistre entre autres Le Silence de la mer de Vercors. Il travaille actuellement sur des contes, et un récit : L'enfant de ma tête (à paraître aux Éditions du Jasmin).
LangueFrançais
ÉditeurJasmin
Date de sortie6 juil. 2018
ISBN9782352844235
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    Aperçu du livre

    Bonhomme Ecriture - Philippe de Boissy

    DU MÊME AUTEUR

    AUX ÉDITIONS DU JASMIN

    Littérature

    Nouvelles d’Elles,

    JASMIN LITTÉRATURE

    , 2012

    Poésie

    Petite suite des choses, 2009 (poésie)

    Ça saute aux yeux, 2006 (poésie)

    Jubilations du désert, 2003, Prix de poésie Charles Vildrac

    de la Société des Gens de Lettres

    Littérature pour la jeunesse

    L’enfant de ma tête, récit autobiographique, 2004

    La légende du Mont (Texte et illustrations), 2002

    Un loup dans la vitre, roman, 2001

    L’empereur et le poète (Texte et illustrations), 2000

    La baleine bleue (Texte et illustrations), 2000

    L’enfant et l’oiseau (Illustrations), 1999

    L’histoire de Séédimwé (Illustrations), 1999

    Pour l’actualité de Philippe de Boissy et une bibliographie plus exhaustive, consultez www.philippedeboissy.fr.

    Title

    Philippe de Boissy

    Philippe de Boissy est né en 1933. Poète, peintre et écrivain, il a publié une quarantaine d’ouvrages. Animateur chargé de la littérature, il crée des ateliers d’écriture à La Maison de la Culture de Grenoble au début des années 1970. En 1981, il lance le Centre de Création Littéraire de Grenoble, qui édite plusieurs ouvrages de poésie et d’histoire.

    Il a obtenu la bourse Guy Lévis Mano de poésie en 1985 avec La lampe sous le boisseau. Il a été lauréat du prix de poésie Charles Vildrac 2004 décerné par la SGDL pour son recueil Jubilations du désert, publié aux Éditions du Jasmin.

    Tous droits de reproduction, de traduction

    et d’adaptation réservés pour tous pays

    © 2012 Éditions du Jasmin

    www.editions-du-jasmin.com

    Dépôt légal à parution

    ISBN : 978-2-35284-423-5

    Avec le soutien du

    Hormis celle de la couverture, toutes les illustrations de cet ouvrage sont de Philippe de Boissy.

    1

    Quand ai-je vraiment commencé à écrire un mot ? Je n’en sais rien. Peut-être papa maman ont-ils fait partie d’une première écriture. Aurais-je débuté par l’amour ? Ce dont je me souviens le mieux, c’est de mon incapacité à écrire ce que j’adorais : coquelicot, camarade, et mon prénom, que j’avais réduit à deux syllabes orales, Pite, que mon père transforma en Le Pite. Ma grand-mère utilisait un terme que j’ai aimé très tôt sans savoir l’écrire. C’était charabia. Quand elle ne voulait plus entendre, elle disait : tout ça, c’est du charabia. Et le mot devenait merveilleux. Charabia, c’est tout le reste. Une histoire folle. Toute la vie à côté. Je l’employais parfois. Mal à propos, sûrement. Ce n’était pas de mon âge. L’ai-je écrit ? Non. Ce n’était pas au programme. J’échouais aussi avec spahis, vermicelle, édredon longtemps pris pour un animal, et deux termes épouvantables qui étaient chantés par ma sœur : la métempsychose se métamorphose. Chanson sur Paris, le tube des années trente ! J’admirais ma sœur pour ce savoir. En mettant le couvert elle chantait qu’en parlant un peu de Paris, la métempsychose se métamorphose… Aujourd’hui je m’interroge encore sur ma mémoire. Mon grand-père réglait tous les problèmes de communication par trois mots : c’est une histoire à dormir debout. Quand ma grand-mère se plaignait pendant le déjeuner du prix devenu exorbitant des salades ou des abricots, grand-père laissait tomber une simple phrase qui changeait la conversation du tout au tout. Il lâchait presque à voix basse : devant la mort cela n’a pas beaucoup d’importance. Toute ma vie devant les avatars du quotidien je me redirais cela.

    Il m’est arrivé de rester debout, et d’essayer de m’endormir comme un cheval. C’était très dur. J’ai donc inventé des histoires à dormir debout en restant éveillé. C’était facile. Le pire, c’était que j’arrivais quand même à m’assoupir jusqu’à manquer de tomber. J’étais sur le point de faire une découverte, mais je ne tenais pas le coup. J’en étais parfois très proche. Ma mère me découvrant debout devant la cheminée me réveillait par un qu’est-ce que tu fais ? Je restais sans réponse, je répondais : rien et elle concluait que tant qu’à dormir je ferais mieux de me coucher. Grand-père avait raison on peut dormir debout.

    Enfin, ma grand-mère, devant les grands événements du monde, la Seconde Guerre mondiale, s’exclamait Où ça nous mène ? J’avais écrit cela en un seul mot qui lui allait bien : ouçanoumène. Cela me plaisait bien. Cela devenait un nom africain ou étranger. Et ma voisine de campagne, Colette, devant d’autres catastrophes, s’exclame souvent : qu’est-ce qu’on peut faire ? C’est peut-être pour leur répondre que j’écris pour ainsi dire depuis toujours. « Le seul réel dans l’art, c’est l’art », a écrit Paul Valéry. Je suis donc un réaliste. Dans la citation de ma grand-mère on peut supprimer le où, et dire que le ça, c’est nous !

    Je dois aussi aux gladiateurs qui mouraient dans les arènes, et à un certain docteur grec qui s’appelait Damien, d’avoir un jour réfléchi à ce que j’avais dans la tête : un kilo trois cents grammes de cervelle, selon mon livre de Sciences naturelles, chapitre : « Le cerveau, description et fonctionnement ». Enfant, j’étais aristotélicien. Je n’ai pas connu Aristote. Mais je faisais de mon cœur le lieu de mes intelligences, de mes sensations, de mes souvenirs. Damien soignait les gladiateurs. Quand ces malheureux perdaient la tête, et la vie, il regardait dans les crânes pour analyser les cerveaux. Il en conclut que le cerveau était le centre des sensations, l’initiateur des mouvements, un lieu de mémoire… Avant la Seconde Guerre mondiale, un enfant de mon âge avait bon cœur ou pas de cœur. J’ai souvent entendu cette expression dans la bouche d’un adulte : oh celui-là, il n’a pas de cœur, et cela m’étonnait toujours. C’était un vocabulaire courant. Il pouvait aussi n’avoir pas de cervelle. Avec Damien, le cœur dépendait de la tête. Mes études dans ce domaine s’arrêtèrent là. C’est donc en pleine enfance que j’ai découvert ce qu’on avait dans la tête. Je ne voulais pas plus devenir écrivain que pompier ou médecin. Ma mère me disait souvent pour m’encourager au travail scolaire que je devais travailler pour moi. Je suis sûr soixante-treize ans après, que je ne comprenais pas grand-chose à cette

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