véritable merveille. J’étais venu attendre ma mère qui rentrait d’un séjour chez une cousine. Faustine est descendue juste devant elle. Ma mère m’a interpellé d’un air sévère :
– Ferme la bouche, Séraphin. Tu as l’air d’un idiot ! Et elle avait raison, ma mère. Il se passait quelque chose dans mon cerveau, mais pas que là ! C’était un peu comme si deux fils s’étaient touchés et m’avaient grillé une case. A partir de ce jour, j’ai commencé à faire des rêves parfaitement inavouables.
Mais quand j’y pense, bien des années plus tard, je me dis que cet ange de l’automne, qui en portait les couleurs chatoyantes, n’aurait jamais dû descendre de ce train.
Bien sûr, il y a ce fichu dicton qui dit « Va où tu veux, meurs où tu dois », mais tout de même… Et puis d’autres fois, surtout maintenant, je pense que c’est vrai. Que nous débarquons dans ce monde avec un livre invisible sous le bras où tout est déjà écrit. Du début à la fin. On ne peut rien y changer. Les pages du livre se collent au fur et à mesure qu’elles se tournent et l’encre qui les recouvre est indélébile. On peut pleurer dessus des nuits entières, elle reste aussi fraîche et noire que le sang de nos veines au moment où les lignes ont été tracées. adis, dans mon petit village non loin de Moulins, dans l’Allier, il y avait une gare. C’était dans les années 1960. La gare est fermée depuis un bail, elle n’était plus assez rentable. Elle ne l’a jamais été, mais avant, tout n’était pas histoire de profit. Même si le petit train qui s’y arrêtait le mercredi et le samedi ne livrait pas beaucoup de voyageurs, elle avait le mérite d’exister. Il y avait aussi un car, une fois par semaine. Il venait de Paris. Aujourd’hui, si l’on n’a pas de voiture, le village perché sur la colline, avec ses petites maisons regroupées autour d’une forteresse moyenâgeuse n’est pas très facile d’accès. Et c’est très bien comme ça ! Il peut