MOI LECTRICE “J’ai échappé au destin de ma mère grâce aux livres”
Pour sortir de son milieu paysan, brutal, elle a privilégié ce qui pouvait lui apporter de la liberté. Elle avait remporté un concours de miss locale. Elle correspondait aux canons de son temps, l’après-guerre, un profil à la Bardot, très jolie, très yéyé. Une poupée qui a construit sa vie entière sur son apparence. Toute petite, j’ai su intuitivement que je ne voulais pas lui ressembler. Quand j’étais enfant, elle passait trois heures dans la salle de bain chaque matin, sortait de la maison, ongles et maquillage impeccables, sublime mais à midi. Pour moi, c’était incompréhensible. Ma mère prenait soin de moi. Elle s’est occupée de mes leçons de piano, de mes chaussures cirées… Pas du tout de mon cerveau. Elle a délégué mon éducation intellectuelle à mon , c’était moi. Ce personnage de femme très apprêtée et libre à la fois a été, je m’en aperçois rétrospectivement, un modèle féministe pour moi. J’ai dû le lire cinquante fois. Les livres ont favorisé l’éveil de mon esprit critique face aux comportements maternels que je trouvais absurdes.
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