Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Émergence
Émergence
Émergence
Livre électronique255 pages3 heures

Émergence

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

À dix-neuf ans, Rose pourrait être une jeune femme comme les autres, mais ce n’est pas le cas. Dotée de capacités intellectuelles hors du commun, l’héroïne n’avait jamais envisagé que cette douance puisse, un jour, devenir un danger pour sa vie. À l’aube de la vingtaine, Rose constate l’apparition de pouvoirs surnaturels qui la contraindront à faire face à sa nouvelle réalité. Guidée par ses camarades, la jeune femme apprendra à apprivoiser ses capacités. La présence de Christian à ses côtés mettra un baume sur les douleurs physiques et psychologiques de son apprentissage, mais cet amour représentera aussi un danger insoupçonné!

En constant chevauchement entre la réalité et le fantastique, ce roman plein de rebondissements nous transporte dans un univers que l’on pourrait croire réel et qui ravira les fans du genre.
LangueFrançais
Date de sortie8 avr. 2020
ISBN9782898035630
Émergence
Auteur

Mélissa Blais

Mélissa Blais nous propose sa toute première série intitulée L’Apprentie. Cette notaire de profession nous transporte dans un univers fantastique qui évolue en parallèle avec la réalité. Se qualifiant elle-même de lectrice «grand public», l’auteure a souhaité écrire un roman sans prétention, mais aussi sans longueurs et pleins de rebondissements!

Auteurs associés

Lié à Émergence

Titres dans cette série (2)

Voir plus

Livres électroniques liés

Fantasy pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Émergence

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Émergence - Mélissa Blais

    jC843/.6—dc23

    Chapitre 1

    Rose

    Ce matin-là, mon réveil fut abrupt. Je dormais paisiblement lorsque, pour la première fois, toutes sortes d’images défilèrent en cascade dans ma tête. Je distinguai une couverture rose, un ourson en peluche et mon visage, en plein sommeil. Le choc de ces apparitions soudaines me sortit de mon état léthargique et je m’assis aussitôt dans mon lit. Ma brusquerie poussa ma petite sœur, Julia, en bas du lit, et je sentis ses mains chaudes qui s’éloignèrent de mon visage. Une fois sur le sol, Julia me regarda avec intensité, sans rien dire. Encore engourdie par le sommeil, je me penchai pour la récupérer et lui faire une chaleureuse accolade, ce qui déclencha une cascade de rires joyeux de part et d’autre. Elle se défit avec adresse de mon étreinte et glissa hors du lit. Je l’observai quitter la pièce au pas de course vêtue de son pyjama rose, son ourson en peluche sous le bras, et je me permis quelques minutes de paresse supplémentaires.

    Aujourd’hui était mon premier réveil depuis la fin de mon semestre intensif d’été. Je me sentais si légère que je n’avais même pas pesté contre Julia de m’avoir sortie de mon sommeil. J’en profitai plutôt pour me prélasser dans mon lit et réfléchir à mes projets pour les vacances.

    — Tu dois te rendre à l’évidence, Rose : tu n’as pas de plan pour l’été, me dis-je à voix basse.

    Cet hiver, j’avais décidé de me trouver un boulot à temps partiel pour la période estivale afin de tuer le temps jusqu’à la rentrée, mais il était déjà trop tard pour ce projet. Après tout, nous en étions déjà à la fin du mois de juin et les emplois intéressants devaient sans doute avoir été comblés par des gens plus décidés que je l’avais été au moment opportun. Qu’est-ce qu’une jeune femme de 19 ans pourrait bien faire de tout ce temps libre ?

    Je me souvins alors que ma mère m’avait parlé d’aller rendre visite pendant quelques jours à son amie, Angela. Elle avait insisté pour que je l’accompagne sans me partager davantage de détail quant à notre séjour. Je ne ressentais pas le désir ardent d’assister à leurs retrouvailles, d’autant plus que je n’avais rencontré cette femme que de très rares fois. Son allure bohème et ses cheveux d’un roux flamboyant avaient cependant marqué ma mémoire et je n’avais jamais pu oublier ses yeux verts perçants qui m’avaient dévisagée avec insistance lors de la célébration de mon onzième anniversaire.

    Bon, il était vrai que j’avais l’habitude des regards insistants. Mon large éventail de connaissances générales et ma grande maîtrise des langues avaient toujours suscité la curiosité autour de moi. Mon apparence physique n’était pas différente des autres personnes de mon âge, mais mes aptitudes intellectuelles outrepassaient largement celles de mes camarades. Alors que j’avais l’âge de Julia, j’étais le centre d’attention de tous dans les réunions familiales. Toutefois, avec les années, les adultes s’étaient blasés de mes acrobaties et maintenant que j’étais plus réservée, je ne voulais plus exposer mon talent avec autant de nonchalance.

    Après l’évocation de ces souvenirs, je sortis du lit pour me rendre jusqu’à la fenêtre de ma chambre, qui surplombait notre jardin.

    Ce sera une journée superbe, pensai-je.

    Le soleil se trouvait près de son zénith, il devait être presque midi. J’avais fait la grasse matinée pour la première fois depuis des mois et j’en ressentis un sentiment de gratitude immédiat.

    Je pris le temps d’observer notre jardin, où ma mère avait planté, plusieurs années auparavant, des lilas, des pruniers, des pommiers et diverses espèces de fleurs. Deux énormes érables se retrouvaient dans un coin du terrain et l’on avait suspendu entre eux un énorme hamac multicolore tissé à la main que mes parents avaient rapporté d’un voyage dans les Antilles. Je me promis d’y faire une petite sieste cet après-midi-là afin de lui rendre honneur. Je regardai aussi notre piscine creusée en forme de haricot et pensai consacrer une heure ou deux de ma journée à Julia afin de lui apprendre à nager. Je savais qu’elle serait folle de joie.

    Je me détournai de la fenêtre pour attraper au passage mon peignoir sur le coin de mon lit avant de sortir de la pièce. Je descendis l’escalier et me laissai guider par l’odeur alléchante du café.

    Alors que j’entrais dans la cuisine, ma mère, Catherine, se retourna pour m’accueillir. Ses longs cheveux auburn retombaient en cascade sur ses épaules et elle m’adressa un sourire en me tendant une grande tasse fumante. Je la pris entre mes mains et dégustai ma toute première gorgée de café de la journée ; elle y avait ajouté un sucre et un soupçon de crème.

    — Merci, maman, pour ce café, il est délicieux !

    Elle m’adressa un clin d’œil et retourna à la préparation de ce qui me semblait être notre dîner.

    Tous les gens qui nous connaissaient, ma mère et moi, ne cessaient de répéter à quel point nous avions le même regard. C’était bien le seul point que je nous avais trouvé en commun. Ma mère était le type de femme qui faisait sentir les autres un peu moches avec ses jambes interminables et sa taille de guêpe. Son style vestimentaire était toujours parfaitement décontracté et tout lui allait comme un gant. En ce qui me concernait, mis à part la grande taille et la couleur bleue des yeux de ma mère, je n’avais rien du cygne gracieux auquel je la comparais. Je m’étais toujours beaucoup plus identifiée à mon père, James : élancé, réservé, cheveux de jais.

    En pensant à lui, je jetai un bref regard autour de la pièce, mais ne l’aperçus nulle part.

    — Où est papa ? On est samedi, non ?

    — Oui, je sais. Il a eu une urgence au travail et je ne pense pas qu’il revienne avant ce soir. Tu sais comment c’est.

    Mon père travaillait dans le domaine de la politique depuis presque 20 ans, et il s’était beaucoup investi dans son travail. Pour lui, c’était important de redonner à la société et d’y contribuer, à sa façon. Donc, vu ses horaires plutôt incongrus, ma mère était toujours demeurée à la maison pour s’occuper de moi, et maintenant de Julia.

    Même si Julia et moi étions des sœurs adoptives, plusieurs aspects de notre personnalité présentaient de profondes ressemblances. Ce petit bout de femme aux cheveux dorés et aux yeux noisette était avide d’apprendre, tout comme moi à son âge. Mes parents l’avaient adoptée alors qu’elle n’avait que deux mois, et ils m’avaient toujours affirmé, pour faire suite à mes nombreuses questions, qu’ils ne possédaient aucun détail quant à son passé, qu’ils ne connaissaient pas sa famille d’origine, ni ce qu’elle avait vécu au moment où nous l’avions accueillie. Nous l’avions donc intégrée à notre famille et lui avions donné tout notre amour. En plus de fréquenter l’école, Julie profitait de la présence de ma mère qui lui apprenait le bricolage, l’écriture et même la musique. Elle serait une enfant douée, davantage que je l’avais moi-même été, j’en étais certaine.

    Bien que je puisse difficilement rationaliser ma capacité d’apprentissage supérieure à la moyenne, je croyais que l’omniprésence de ma mère pendant mon enfance pouvait expliquer, du moins en partie, mon développement précoce. Toutefois, en dépit de tous les efforts déployés par ma mère, je devais aussi avouer que mon cerveau avait toujours été une vraie éponge. À l’âge de huit ans, je maîtrisais déjà le piano, le violon et la guitare. Mon parcours scolaire, en tant que première de classe, était des plus impressionnants. Je collectionnais les médailles, les bourses et les honneurs depuis mon arrivée à l’école. À 19 ans, je pouvais me targuer d’avoir deux diplômes universitaires en poche, un en musique classique et un autre en mathématiques, obtenus de façon concomitante. Je parlais l’anglais, le français, l’espagnol, l’allemand et l’italien depuis mes 10 ans. Ma grande maîtrise du piano me permettait de reproduire une mélodie, dans toutes ses nuances, après l’avoir entendue une seule fois. Je me rappelais aussi que lorsque j’étais enfant, les adultes s’amusaient à me faire apprendre toutes sortes de mélodies au piano en un temps record.

    Cependant, à l’adolescence, je n’aimais pas l’étendue de mes talents, qui me démarquaient de mes pairs. Contrairement à mes amis, je n’avais jamais fait mes devoirs scolaires ; je saisissais les concepts aussitôt que l’on me les expliquait sans avoir à y faire de retour par la suite. Beaucoup de professeurs et de camarades de classe avaient tenté de comprendre comment je pouvais arriver à tout saisir aussi promptement. Il avait toujours été difficile pour moi d’expliquer le fonctionnement de mon cerveau, ce qui y survenait lorsque j’ingérais toutes ces informations et ces notions que l’on m’exposait. Mes neurones fonctionnaient avec davantage d’efficacité que celles des autres, de toute évidence… Mais comment pouvait-on expliquer, d’un point de vue scientifique, ma condition particulière ? Tous les établissements scolaires que j’avais fréquentés jusqu’à maintenant avaient insisté pour me faire passer divers tests, mais chaque fois, ma mère avait refusé avec fermeté que je m’y soumette. Elle me répétait constamment : Cette intelligence, ce cadeau que tu as, il est inscrit dans ton code génétique. Nul besoin de recherche pour l’expliquer ! J’en avais déduit qu’elle voulait que ma vie demeure aussi normale qu’elle pouvait l’être en de telles circonstances.

    Alors que je me dirigeais vers la porte française qui communiquait au jardin extérieur, toujours vêtue de mon peignoir, café à la main, ma mère me lança :

    — Rose, as-tu réfléchi à la discussion que nous avons eue pendant ta semaine de relâche ? Je sais que tu as été très occupée au cours des dernières semaines avec la fin de tes études, mais ton avenir, c’est maintenant, ma grande. Si tu veux, nous pourrions en parler avec ton père ce soir. Je suis convaincue qu’il aurait plusieurs bonnes idées concernant le début de ta carrière.

    Avoir une discussion aussi sérieuse le premier matin de mes vacances alors que j’étais encore en peignoir me fit sentir tout à fait ridicule. Je n’avais aucune envie d’avoir cette discussion en ce moment.

    — Pas maintenant, maman. Je vais prendre mon café dehors.

    Je passai le pas de la porte extérieure et me rendis jusqu’à la chaise longue qui se trouvait sur le bord de la piscine. Une fois bien étendue, je songeai à ma dernière journée à l’université et surtout à mes projets en tant qu’adulte. La discussion que j’avais eue avec ma mère à propos de mon avenir refaisait surface. À 19 ans et des études universitaires terminées, il me fallait décider ce que je voulais faire de ma vie. J’avais toujours vécu une grande dualité intérieure. Avec la musique, la créativité en moi s’exprimait et grandissait, tandis que les sciences mathématiques me mettaient au défi et consolidaient ma personnalité cartésienne. Je ne pouvais m’imaginer vivre sans l’une ou l’autre de ces disciplines, et les solutions se faisaient de plus en plus rares. Je savais avec pertinence que mon père désirait que je me dirige vers les mathématiques, d’autant plus qu’il m’avait déjà parlé d’un éventuel stage dans l’une des plus grandes firmes d’ingénieurs du pays. Les offres ne manquaient pas, vu mes résultats universitaires remarquables, mais ma décision n’en était que plus complexe.

    Ce n’était pas la première fois que je m’accordais un temps d’arrêt pour envisager mon avenir, mais plus j’y réfléchissais, plus je croyais que la seule solution qui s’offrait à moi en ce moment était de prendre du recul. Vu mon jeune âge, je n’entrevoyais pas de décision ferme concernant mon avenir avant plusieurs mois encore. Je voulais voyager, explorer le monde avec mon sac à dos. Je savais que ce serait la fin du monde si j’exposais cette réflexion à mes parents ; de façon naturelle, je repoussais ma prise de décision autant que possible. Jusqu’à maintenant, ç’avait été plutôt aisé vu mon horaire occupé, mais mon temps était désormais compté. Je devais me fixer.

    Alors que je cogitais sur le bord de la piscine, Julia me rejoignit à l’extérieur et grimpa sur la chaise longue, à mes côtés.

    — Rose, pourquoi t’en fais-tu comme ça ? me questionna-t-elle en attendant patiemment ma réponse.

    — Tu sais, Ju, plus on grandit, plus les choses se compliquent. Il faut bien réfléchir et faire les choix qui nous rendront heureux. Il faut être égoïste et penser à soi, parce que de toute façon, notre vie, c’est nous qui la vivrons, dis-je tout en pensant que j’étais beaucoup trop philosophe pour une fillette de six ans.

    — Je me rappellerai, m’assura-t-elle en me donnant un baiser pour par la suite retourner à l’intérieur de la maison.

    Dans mon for intérieur, je me souris et me remémorai toutes les fois où, comme aujourd’hui, Julia réussissait à me surprendre par sa maturité.

    Après avoir sommeillé pendant quelques minutes, je me réveillai en sursaut alors que ma mère me criait de venir manger. Je me rendis à l’intérieur et m’assis à la table avec ma mère et Julia. En silence, je dégustai avec appétit la recette de pâtes de grand-mère.

    — Te rappelles-tu cette ancienne amie dont je t’ai parlé il y a plusieurs semaines ? s’enquit ma mère. Tu sais, j’ai toujours l’intention d’aller la visiter prochainement et j’aimerais bien que tu viennes avec moi. Qu’en penses-tu ?

    — Je ne comprends pas pourquoi tu me demandes d’y aller avec toi ; je ne la connais presque pas. Je préférerais prendre du repos à la maison et je pourrais m’occuper de Ju sans problème. Ça nous permettrait de passer du temps ensemble.

    Je fis un clin d’œil à Julia, qui se mit à glousser.

    — En fait, j’ai déjà prévu le coup pour Julia. Je la ferai garder chez Diane. Julia pourra jouer avec Gaby et on pourra partir ensemble, toi et moi, pour deux semaines chez Angela, déclara maman tout en dévorant une bouchée de pâtes.

    — Finalement, tu ne me demandes pas vraiment mon opinion. Tu as déjà tout prévu, lançai-je, irritée.

    — Ne réagis pas ainsi, Rose. Tu sais bien que je fais ça pour que nous puissions passer un peu de temps ensemble. Je sais que tu vas t’y plaire. Angela est très chouette et elle a beaucoup insisté pour que tu viennes.

    — Pourquoi autant d’intérêt ? l’interrogeai-je avec exaspération. Je ne la connais presque pas. Je ne veux pas y aller et n’insiste pas, s’il te plaît.

    Sur ce, je me levai sans terminer mon assiette et me dirigeai vers ma chambre, agacée. Je fermai la porte et m’étendis de tout mon long sur mon lit. Je détestais lorsque ma mère décidait de mon emploi du temps sans m’en parler. Elle avait toujours été comme ça avec moi et je ne protestais qu’à l’occasion. Je l’avais laissée décider de tout et de rien pendant une bonne partie de ma vie, et ce n’était pas dans mes habitudes de contrecarrer ses projets. Mais maintenant, je n’en pouvais plus. À partir d’aujourd’hui, je déciderais moi-même de ce que j’allais faire pour les jours et les mois à venir. La première étape de cette nouvelle résolution était de leur faire part de la réflexion que j’avais entamée à l’égard d’un possible voyage pour l’automne. J’étais déterminée, et il ne me restait qu’à faire des réserves de courage pour le leur annoncer.

    Plusieurs minutes plus tard, alors que le calme m’avait regagnée et que je rêvassais sur mon lit, j’entendis deux petits coups à la porte. Ma mère me demanda si elle pouvait entrer quelques minutes pour me parler. J’acquiesçai. Elle vint s’asseoir à mes côtés alors que je m’étais assise en tailleur sur mon lit pour l’accueillir. Je remarquai qu’elle avait dans ses mains un vieux livre en velours rouge sur lequel étaient cousues des lettres en cuir noir. La curiosité me gagna aussitôt et je ne pus réprimer une envie d’en savoir davantage à propos de ce cahier relié de façon si distinctive.

    — Est-ce que ça te dit quelque chose ? demanda-t-elle en me tendant le livre avec précaution.

    Je pris l’ouvrage et m’y sentis tout de suite attachée. Je ne voulais plus le laisser, je ne voulais même plus le poser. J’étais totalement obnubilée par sa couverture et par les détails qui l’ornaient. Je lus à voix haute les lettres qui y étaient appliquées avec soin et esthétisme.

    — Lisa. Je ne connais pas ce livre. Si je l’avais déjà vu, je l’aurais reconnu, j’en suis certaine. À qui appartient-il, maman ?

    — Il appartenait à grand-mère Helen, souffla-t-elle avec beaucoup de chagrin.

    — Pourquoi le nom Lisa est-il écrit sur le dessus alors ? ne pus-je m’empêcher de demander.

    — Il a appartenu à quelqu’un que ta grand-mère a connu et qui lui en a fait cadeau, expliqua-t-elle en me regardant avec insistance. Je crois que tu es prête à ce que je te le donne. Il te revient. J’en suis la gardienne depuis de nombreuses années maintenant, tel que me l’a demandé Helen, mais je crois qu’aujourd’hui est le bon moment pour que je te le remette, continua-t-elle.

    Ma mère prit une grande inspiration en se tordant les mains de malaise. Elle semblait sur le bord des larmes. Je la regardai avec hébétude, ne sachant quelle attitude adopter.

    — Je sens que je vais te perdre, Rose, et que je ne pourrai bientôt plus t’aider autant que je l’aurais souhaité. La seule chose que j’aimerais que tu m’accordes, ce sont ces deux semaines chez Angela. C’est la dernière chose que je te demande.

    — Mais maman, de quoi parles-tu ?

    Au fur et à mesure que je prononçais ces paroles, je me sentais pâlir. Je me demandais comment elle avait fait pour savoir que j’envisageais de partir en voyage. Pourtant, je n’en avais parlé à personne. Mais que se passait-il ?

    — Je te demande une seule chose et c’est que tu viennes avec moi chez Angela. Tu verras, tu y comprendras beaucoup de choses.

    — Quelles choses ? Qu’ai-je à comprendre ?

    — Fais-moi confiance, insista-t-elle sur un ton dramatique que je ne lui connaissais pas.

    Je pris une pause pour réfléchir à cette possibilité. J’aurais préféré rester à la maison pour me reposer plutôt que de me retrouver au beau milieu de gens inconnus. En contrepartie, ma mère semblait tenir à cette visite. Qu’avais-je à perdre de toute façon ?

    — D’accord, d’accord. Quand veux-tu partir ? cédai-je.

    — Dans quelques jours. Nous partirons tôt le matin pour ne pas arriver trop tard en après-midi. Apporte ton deux-pièces, il y a une superbe rivière tout près de son domaine.

    Elle se leva et me remercia dans un murmure. Dès qu’elle fut sortie de ma chambre, je me couchai sur mon lit et me traitai de poule mouillée. J’étais incapable de tenir tête à mes parents. J’aurais aimé pouvoir profiter de ces deux semaines pour explorer de façon plus approfondie ce potentiel voyage et peut-être même débuter mes préparatifs. Tout cela attendrait à mon retour.

    Cette discussion avec ma mère m’avait presque fait oublier ce cadeau mystérieux de grand-mère. Je récupérai le livre et l’observai avec attention. J’étais tellement curieuse d’en feuilleter les pages et de découvrir ce qu’il y avait à l’intérieur. J’ouvris délicatement le recueil en son centre pour éviter d’en déchirer les pages jaunies et à ma plus grande surprise, il me fut impossible de comprendre le sens de ce qui y était inscrit. Je distinguais des croquis et des dessins accompagnés de chiffres et de phrases. Ma logique de mathématicienne se demanda, au premier abord, si certains de ces chiffres et phrases n’étaient pas des problèmes mathématiques irrésolus. Je constatai aussi qu’il y avait des mots en anglais, en espagnol, en allemand ainsi qu’en plusieurs autres langues que je ne pouvais identifier. Ma grand-mère maîtrisait-elle autant de langues ? Je n’avais pas le souvenir que ma mère m’en ait fait mention.

    Que connaissais-je de ma grand-mère,

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1