Indésirable (41)
Par Ariane Charland
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À propos de ce livre électronique
Maintenant, elle a l’intention de repartir à zéro, d’effacer la réputation qu’on lui a collée et de retrouver un semblant de vie normale. Pour cela, elle souhaite d’abord regagner sa popularité.
De son côté, Bastien se fait rejeter et humilier depuis le début de son secondaire. Il a l’impression qu’il ne trouvera jamais sa place et restera l’exclu, le freak, l’indésirable. Celui qu’on montre du doigt uniquement parce qu’il n’entre pas dans le moule.
Puis il la rencontre, elle, la nouvelle. Mais comment pourrait-il plaire à ce genre de fille? Tanné d’être toujours seul, il décide que, cette année, les choses devront changer.
Le rejet social prend différentes formes et, malheureusement, personne n’en est à l’abri. Peu importe la façon dont il se manifeste, il blesse immanquablement ceux qui en sont victimes et laisse des cicatrices douloureuses, parfois indélébiles. À long terme, il peut avoir de graves conséquences sur l’estime de soi, et même provoquer d’importants problèmes d’anxiété ou de dépression. Mais, surtout, les personnes rejetées vivent ensuite dans la peur, souvent viscérale, de subir un nouveau rejet.
Ariane Charland
Ariane adore les histoires. Toutes les histoires. Les drôles, les tristes, les vraies, les fausses. La lecture et l’écriture ont toujours été ses passions, mais elle s’inscrit tout de même en traduction à l’Université de Montréal pour avoir un « vrai métier ». Elle obtient son diplôme en 2005 et commence tout de suite à travailler à la pige. Les années passent, et le vieux rêve la rattrape : écrire un livre et (idéalement, peut-être, qui sait?) le faire publier. Sa première série jeunesse paraît aux Éditions Michel Quintin, de 2012 à 2014, puis, en 2016, elle publie Comme un coup de poignard aux Éditions de Mortagne. La tête pleine de projets, Ariane ne quitte jamais la maison sans son stylo et son carnet de notes. Elle habite à Montréal avec son conjoint et leurs deux merveilleux enfants.
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Indésirable (41) - Ariane Charland
Remerciements
1
Ses yeux bruns, cachés derrière ses cheveux longs, se baissent dès qu’ils croisent les miens. Il rougit et ça me fait sourire. J’adore les garçons timides.
De l’autre côté du comptoir, la serveuse lui demande ce qu’il désire. Il s’éclaircit la gorge en montrant quelque chose dans la vitrine.
– Un biscuit aux pacanes avec un chocolat chaud, s’il vous plaît.
La serveuse prend le biscuit avec ses pinces. C’est le dernier. Je la regarde le déposer dans une assiette, légèrement catastrophée. C’est moi qui le voulais!
Mon tour arrive.
– Est-ce qu’il vous reste des biscuits aux pacanes?
– Non. On en a aux pommes et à la cannelle.
Elle désigne les pâtisseries en question. Je me renfrogne en affichant une moue boudeuse, mais je hoche quand même la tête pour signifier que j’en veux un.
– Avec un chocolat chaud extra guimauve, s’il vous plaît, ajouté-je.
On gèle, dehors, et j’ai besoin de me réchauffer. Le garçon aux cheveux longs me jette un bref coup d’œil, que je me contente d’ignorer. Je le trouve un peu moins adorable depuis qu’il a volé mon biscuit. Je suis bébé, je sais.
Mes parents passent leurs propres commandes et mon père paie pour nous trois. Ma mère le taquine:
– Franchement, Sylvain! Je suis capable de me payer un café!
– Ça me fait plaisir, lui assure-t-il. Et puis, c’est juste un café!
– Avoir su, réplique ma mère, j’aurais choisi le plus cher!
Elle esquisse un sourire moqueur. Mon père rigole. C’est rare que je les voie ensemble, mais, chaque fois, je me demande pourquoi ils se sont séparés. Ils sont en si bons termes! Quand j’étais petite, je leur en avais parlé, et ils avaient répondu qu’ils s’entendaient mieux en amis qu’en amoureux. Encore maintenant, je ne suis pas trop sûre de comprendre. Si je dénichais un gars avec qui j’avais une aussi grande complicité, je ne le laisserais jamais partir!
De toute façon, en ce moment, je préfère ne pas penser au sexe opposé. Ou au sexe tout court.
C’est justement à cause d’une histoire de gars que nous sommes ici. De gars au pluriel. C’était rendu l’enfer, à mon école, alors mes parents ont accepté de m’inscrire ailleurs. J’ai vécu chez mon père presque toute mon existence; toutefois, à partir de ce soir, j’habiterai chez ma mère, et c’est à lui que je rendrai visite la fin de semaine.
Pour souligner ce changement de garde, ils ont décidé qu’on passerait la journée en famille. Nous sommes allés patiner au parc juste en face du café, parce que j’adorais ça, enfant. La dernière fois que j’avais chaussé des patins, je devais avoir huit ans. Peut-être neuf ou dix, pas plus. Aujourd’hui, c’était le fun. Je ne me suis pas cassé la gueule comme je le craignais. Je ne me suis pas risquée à effectuer des pirouettes comme je l’ai appris dans mes cours de patinage artistique non plus.
– On se rejoint là-bas, Mélie, m’informe ma mère dès qu’elle et mon père ont leurs cafés.
– OK.
Ils s’éloignent vers une table au fond, près des fenêtres qui donnent sur la terrasse enneigée. Moi, je vais attendre mon chocolat chaud près du voleur de biscuit. Je ne peux m’empêcher de le détailler discrètement.
Bottes génériques, jeans informe, manteau trop grand, ouvert sur un kangourou noir à tête de mort géante, il ressemble aux rejets de mon ancienne école. En fait, cette déduction ne s’appuie pas tant sur ses vêtements que sur son attitude. Très grand et très mince, les bras croisés sur sa poitrine et le visage à moitié dissimulé derrière ses cheveux, il contemple le carrelage couvert de slush en se mordant l’intérieur des joues.
Je me rappelle l’avoir aperçu sur la patinoire. Il paraissait beaucoup plus à l’aise sur la glace, en patins et la capuche sur le front, qu’ici, sous la lumière artificielle. Il se rend compte que je l’observe et devient encore plus rouge que tout à l’heure. Il décroise les bras et glisse ses cheveux derrière ses oreilles. La voix mal assurée, il indique nos assiettes sur le comptoir et demande:
– Est-ce que… Est-ce que tu aimerais qu’on échange? Tu voulais un biscuit aux pacanes, non?
Je hausse les épaules.
– C’est pas grave.
– Ça me dérange pas de te le donner et de prendre celui aux pommes. Enfin… si tu as le goût.
Son regard rencontre le mien et je devine que le garçon doit fournir un immense effort pour ne pas baisser les yeux. Ça me le rend de nouveau adorable. En plus, je remarque qu’il a de longs cils noirs et que le brun de ses iris est teinté de vert et de doré. C’est tellement beau que j’en reste saisie.
– Vos chocolats chauds! annonce la serveuse en déposant nos tasses sur le comptoir.
Le voleur de biscuit aux yeux magnifiques attend toujours ma réponse. Je devrais refuser son offre. Le biscuit aux pommes est sans doute très bon. Mais c’est vraiment celui aux pacanes qui me tente.
– On pourrait les séparer en deux, proposé-je en prenant mon assiette et la tasse débordante de guimauves.
Il acquiesce.
– Oui, OK. Bonne idée.
Nous allons à l’autre comptoir, un peu plus loin, où sont rangés le sucre et le lait. Il casse son biscuit et me donne la grosse moitié. Je l’imite. La situation m’amuse.
– Tu dois me trouver bébé d’avoir boudé pour un biscuit!
– Non, répond-il. J’ai un frère de onze ans et il fait tout le temps pareil.
Un sourire en coin étire sa bouche et je me rends compte qu’il se moque de moi. Gentiment. Et en rougissant. Comme je me sens rougir aussi, je me dépêche d’attraper une pile de sachets de sucre à mettre dans mon chocolat chaud (rien n’est jamais assez sucré, dans la vie) et de reprendre mon assiette et ma tasse.
– Merci pour le biscuit, dis-je.
Il rougit de plus belle en bafouillant:
– Oh! Euh… c’est correct.
– T’es un gentil grand frère, ajouté-je avec un sourire espiègle.
Ça le fait rire. Il prend lui aussi sa tasse et son assiette, et nous restons l’un en face de l’autre.
– Bon, ben, euh… bye! finis-je par lancer.
– Oui, acquiesce-t-il. Bye.
Un autre client tend le bras entre nous pour s’emparer d’un paquet de serviettes de table. J’en profite pour tourner les talons et, ainsi, nous tirer de notre embarras mutuel. Je vais rejoindre mes parents, qui me fixent d’un drôle d’air.
– Ça va, Mélie? s’inquiète ma mère. T’es toute rouge.
Je m’assois avec eux, enlève mon manteau et fourre mon foulard dans ma manche.
– J’ai chaud, c’est tout.
Mon père regarde quelque chose derrière moi.
– Avec qui tu parlais? m’interroge-t-il.
Je croque dans mon demi-biscuit aux pommes (je garde le meilleur pour la fin) et réponds avec indifférence (du moins, je l’espère):
– Personne. Je le connais pas.
Une expression anxieuse sur le visage, ma mère sirote son café en l’aspirant, parce qu’il est brûlant.
– Tu te tiens loin des gars, hein, dans ta nouvelle école? m’avertit-elle d’une voix encore plus anxieuse.
– Ben là, je vais pas être bête non plus!
– Commence donc par te faire de bonnes copines. On verra après pour les garçons.
Elle cherche à me protéger et ça m’énerve. Mon père continue de zyeuter un truc derrière moi.
– Voulez-vous bien me dire c’est quoi, cette mode-là!
Son ton est plus amusé que scandalisé, mais j’entends sa désapprobation. Je ne peux résister à l’envie de me retourner. Le garçon aux iris hypnotiques s’est levé pour aller accrocher son manteau à un des crochets près de la porte. Mon père fronce les sourcils en continuant d’observer ouvertement le dessin morbide sur son chandail.
– C’est pas une mode, papa. Ça doit être le logo d’un groupe de musique.
En revenant à sa table, le garçon capte mon regard et m’adresse un sourire discret. Je le lui rends et je crois rougir un peu. En tout cas, ma mère s’en aperçoit.
– Mélie, rappelle-toi ce qu’on s’est dit. Tu te tiens loin des gars. Surtout de ceux dans ce genre-là!
Je bois mon chocolat chaud en levant les yeux au ciel. Les vieux peuvent tellement être déconnectés, des fois! Les gars à cause desquels je suis obligée de changer d’école avaient tous l’air de bons petits fils à papa, et mes parents les auraient sans doute adorés!
Le garçon aux cheveux longs se rassoit. Il est avec sa famille, lui aussi. Enfin, c’est ce que j’en déduis d’après l’apparence physique de chacun. L’homme a les mêmes cils noirs; la femme, le même visage mince; et le garçon d’une dizaine d’années est carrément son modèle réduit.
En arrachant les pacanes de mon biscuit pour les grignoter une à une, je songe que mes parents ont raison sur un point: à ma nouvelle école, je ne peux absolument pas être vue en compagnie d’un gars comme ça. Ce serait mon arrêt de mort! Bon, de mort sociale, on s’entend.
Je veux me venger de Charlotte (celle avec qui je passais toutes mes pauses à l’école), de Gaël (celui que je croyais être mon chum) et de tous ceux qui m’ont écœurée. Même si je suis parfaitement consciente qu’il s’agit d’une réaction immature et ridicule, j’ai l’intention de devenir la fille la plus populaire, d’avoir les amis les plus cool et d’être convoitée par les plus beaux gars!
J’ai changé mon nom sur les réseaux sociaux et purgé mes profils de tout ce qui me reliait à mon ancienne école, et je compte bien les remplir de nouveau rapidement. Et pas avec de grands maigres à chandail macabre. Même s’ils ont de beaux yeux.
Je sirote mon chocolat chaud en me disant que j’ai sans doute exagéré sur le sucre. Mes parents, eux, règlent les derniers détails de mon déménagement.
Ça fait quinze ans que j’habite chez mon père et que je vais chez ma mère une fin de semaine sur deux. J’ai ma chambre dans son condo, bien sûr, mais pas mon vélo ni mon bureau pour faire mes devoirs, et il n’y a de place ni pour l’un ni pour l’autre. Ils décident que je ferai mes travaux sur la table de la salle à manger et qu’on trouvera un coin dans le garage commun pour ma bicyclette.
Je trempe mon biscuit dans ma tasse en essayant de ne pas penser aux raisons de ce transfert de garde. Évidemment, ça ne marche pas. Mon cerveau rejoue sans cesse les mêmes scènes. J’entends encore les rires, dans la cafétéria. Les «pute», les «slut», les «cochonne», les «c’est combien pour une pipe dans les toilettes?».
Je revois le courriel que Gaël m’a montré sur son cellulaire. Tout le monde l’avait reçu, sauf moi. Il contenait une photo me montrant assise sur un lit, tout habillée. Debout devant moi, un gars était en train de rattacher son pantalon. Au-dessus, on pouvait lire: «Pour une pipe pas chère, appelez Mélie la pute.» C’était suivi de mon numéro de téléphone.
Il y avait aussi une vidéo. Gaël l’a fait jouer pendant qu’on était dans le corridor, à sa case. C’était un montage qui condensait plusieurs semaines en quelques secondes à peine et qui, en plus, avait été accéléré, ce qui donnait un drôle d’effet. Des indiscrets se sont attroupés autour de nous. Ils riaient et s’exclamaient, mais je n’entendais rien. Mes oreilles bourdonnaient tandis que je me voyais m’enfermer dans une cabine du vestiaire des filles avec une demi-douzaine de gars différents, un à la fois, et en ressortir en ajustant mes vêtements.
À la fin, j’ai relevé les yeux vers Gaël et j’ai surpris son air dégoûté. J’ai tenté de m’expliquer, de lui faire comprendre que ç’avait eu lieu avant qu’on soit ensemble et que je ne l’aurais jamais, jamais trompé. Il n’a rien voulu entendre.
– Tout le monde t’a vue, Mélie! Je sors pas avec des putes, moi! m’a-t-il craché juste avant de me planter là.
Malgré la douleur que ses paroles ont provoquée en moi, celles qui me hantent le plus, ce sont celles de Charlotte. Quand je l’ai vue dans le corridor, après le départ de Gaël, j’ai éprouvé du soulagement. J’étais persuadée qu’elle, au moins, serait de mon bord. Après tout, je ne lui cachais rien et ça faisait plus de quatre ans que nous étions amies.
Faut croire qu’elle a préféré sa cote de popularité à notre amitié.
Dans les cauchemars que je continue à faire, ce sont souvent ses mots qui tournent en boucle dans ma tête:
– Sérieux, Mélie, t’as mis tellement de pénis dans ta bouche que j’ai de la misère à te regarder sans avoir mal au cœur!
2
Les écoles secondaires ne sont pas faites pour les rejets. La mienne, en tout cas, est loin de l’être. Pour aller m’acheter un repas, je dois traverser l’entièreté de la cafétéria. Au moins, cette année, les jambettes et les coups d’épaule vicieux se font plus rares. Même les gros caves comme Momo et sa gang finissent par vieillir.
Enfin… peut-être pas tant que ça, puisque les insultes et les remarques haineuses continuent, elles.
Le sac sur l’épaule, les mains agrippées à la bretelle parce que je ne sais jamais quoi faire avec, j’avance, les yeux au sol et les cheveux dans la face. Ils me servent d’œillères… qui ne m’empêchent aucunement de les voir, assis aux tables de chaque côté de l’allée: les autres élèves, ceux qui rigolent avec leurs amis et n’ont aucune idée de ce que c’est, le secondaire, quand on est tout seul.
D’habitude, j’essaie d’éviter cet endroit. J’apporte mon lunch et je vais dehors, ou je me trouve un coin tranquille, au bout d’un corridor, dans une cage d’escalier, où je peux écouter ma musique sans trop craindre de me faire écœurer. Mais, aujourd’hui, c’est le premier jour de classe au retour des vacances de Noël. Après avoir passé deux semaines à me lever à midi, je n’ai pas entendu mon réveil sonner, ce matin, et j’ai à peine eu le temps de happer une pomme dans le panier de fruits avant de courir pour attraper mon bus.
Alors que je crois avoir réussi l’impensable, c’est-à-dire traverser la cafétéria sans me faire traiter de laid ou de fag, je l’aperçois…
La fille de l’autre fois… Celle des biscuits… Celle qui m’a souri en me remerciant… Celle à qui j’ai pensé pendant tout le reste des vacances…
À force de l’avoir mise en scène dans mille films improbables, j’en étais presque rendu à douter de son existence. Ou, en tout cas, à me dire que j’avais sans doute exagéré sa beauté et que sa bouche en cœur ne pouvait pas être aussi désirable que dans le cinéma que je me faisais.
J’avais tort.
Elle est là, devant moi, encore plus attirante que dans mes rêves. J’avais même oublié à quel point la peau de son visage avait l’air douce.
Mes paumes deviennent moites et mon cœur se met à cogner fort dans ma poitrine.
Elle est seule et elle pianote sur son téléphone en piquant des macaronis dans un plat de plastique avec sa fourchette. Elle doit être nouvelle. Elle a sûrement emménagé dans le coin pendant les vacances. Je me trouve idiot de ne pas lui avoir demandé à quelle école elle allait. J’aurais pu lui offrir de lui servir de guide. On aurait pu échanger nos numéros et se texter, ou même se voir, avant que les cours reprennent.
Je me rends compte que je me suis arrêté pour l’observer.
Il faut absolument que j’aille lui parler! Je vais lui rappeler nos moitiés de biscuits et elle va rire, j’en suis sûr. Je me racle discrètement la gorge et répète dans ma tête: «Salut! Comment ça va?»
Ou plutôt: «Hé! Tu te souviens de moi? Le gars au biscuit.»
Non, trop nul. La première phrase était meilleure. À moins que je me contente de m’asseoir devant elle et de lui sourire en attendant qu’elle m’adresse la parole? Encore plus nul. Elle risque de me trouver freak.
OK, j’arrête de réfléchir et je me remets à marcher. Je me dirige vers elle. Mon cœur bat de plus en plus vite et je sens quelques gouttes de sueur dans mon dos. Je suis presque rendu. Je ralentis. J’hésite. Mes jambes me paraissent molles, tout à coup.
– Ah ben! Si c’est pas la belle Bastienne!
Je reconnais la voix du gros Momo. Marc-Olivier Morin de son vrai nom. Un gars de mon année. Populaire, même si je ne comprends pas pourquoi. Il a autant d’acné que n’importe quel gars de notre âge et il se met beaucoup trop de déo. Sans blague, il pue le douchebag à des kilomètres à la ronde. Mais il est musclé et il a une grande gueule. Je suppose que c’est suffisant pour bien des gens.
Je ne me retourne pas. Par chance, la fille ne semble pas l’avoir entendu. Ou elle s’en fout, trop absorbée par l’écran de son cellulaire.
Je continue vers elle en répétant mentalement: «Hé! Salut,