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La guerre des chênes - Tome 2
La guerre des chênes - Tome 2
La guerre des chênes - Tome 2
Livre électronique425 pages6 heures

La guerre des chênes - Tome 2

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À propos de ce livre électronique

En suivant son ministre dans les Vosges, Françoise, l’attachée de presse n’imagine pas que sa vie va être bouleversée. Durant son séjour, une balade pourtant anodine en forêt lui ouvre un univers totalement méconnu. Sa rencontre avec un être étrange sera le point de départ d’une aventure insensée. De doutes en certitudes, elle fera face à des vérités qui n’étaient pas les siennes. Désormais, Françoise ne regardera plus les arbres de la même façon. Son amour pour l’organisation et son aversion pour les imprévus seront mis à l’épreuve lorsque sa routine sera complètement bouleversée.


À PROPOS DE L'AUTEUR

Claude François est un amateur de littérature fantastique, car attiré par les créatures qui, dans notre quotidien, ne se montrent pas, mais sont à l’origine de nombreuses légendes à l’instar des loups-garous, vampires, elfes, etc. L’écriture de La guerre des chênes a débuté il y a presque trente ans. En raison de son activité professionnelle, Claude a dû faire une pause. Il a profité de sa retraite pour ressortir son manuscrit du tiroir et achever cette histoire.

LangueFrançais
Date de sortie14 juil. 2023
ISBN9791037795199
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    Aperçu du livre

    La guerre des chênes - Tome 2 - Claude François

    Chapitre 1

    An de grâce 1990

    Dring !

    À peine le temps d’une sonnerie, le réveil est déjà arrêté. En effet, Françoise est réveillée depuis quelques minutes. L’habitude lui a donné une horloge dans la tête et presque chaque jour, elle se réveille avant la sonnerie de son radio-réveil. Gérard, par contre, n’a rien entendu. Elle le laisse dormir encore un peu.

    Sous la douche, elle chantonne. Une nouvelle journée commence. Françoise déteste la nuit ou plutôt, le sommeil. Pour elle, c’est du temps perdu. Elle a tant de choses à faire. Elle se sèche, enfile une robe de chambre et part préparer le petit déjeuner. Dans une demi-heure, Patrice et Anne vont se lever. Cette demi-heure qu’elle s’octroie le matin pour elle seule, elle ne la laisserait pour rien au monde. C’est le moment où elle réfléchit à sa vie passée, présente et à venir.

    Françoise ne se sent pas malheureuse. Au contraire, à 39 ans, elle a un mari qu’elle adore et qui le lui rend bien, deux enfants qui l’aiment et qu’elle aime et surtout un métier qui la passionne. Aujourd’hui, son planning est bien rempli. Attachée de presse auprès du ministre de l’Industrie, elle doit préparer une conférence de presse, mettre au point deux voyages en province et surtout superviser un discours que le ministre doit prononcer dans quelques jours à l’occasion de l’inauguration d’une nouvelle technopole.

    — Maman, c’est prêt ?

    Patrice vient de sortir de sa chambre. Dix-huit ans, il est en terminale C et voudrait entrer à l’ENA. Sérieux dans ses études, il n’a jamais eu de problèmes majeurs. Il s’entend bien avec le reste de sa famille. Françoise l’adore. C’est peut-être un peu son « chouchou », mais elle essaye de ne pas le montrer.

    — Oui, tu peux venir, mais personne n’est encore levé. Il est trop tôt, non ? Oh ! Tu aurais pu passer une robe de chambre !

    — Je n’ai pas le temps ! J’avale mon café, je prends une douche et je file. Je dois passer prendre Karine. Ce matin, nos cours commencent à 8 heures.

    7 h 30 – Françoise a terminé son petit déjeuner. Patrice est déjà parti. Les deux autres ne sont pas encore levés. Elle entre dans la chambre d’Anne, allume, ouvre la fenêtre et les volets.

    — Debout ! Il est l’heure de se lever.

    Un grognement inaudible lui répond. Une tête blonde disparaît sous les couvertures.

    — J’ai encore sommeil !

    — Tu n’as qu’à te coucher plus tôt le soir. Allez debout !

    Elle tire les couvertures découvrant Anne qui dormait dans le plus simple appareil.

    — Décidément, c’est une manie dans cette maison. Dépêche-toi ! Il est 7 heures et demie et je pars dans une demi-heure. Si tu veux que je t’emmène, ne traîne pas.

    — D’accord, je me lève. On pourra passer prendre Aurélie ? Son père est absent pour 2 ou 3 jours et elle n’a personne pour l’emmener.

    — Raison de plus pour te dépêcher ! Il te reste 20 minutes pour être prête.

    La pénombre règne toujours dans la chambre conjugale. Françoise se penche sur Gérard, persuadée qu’il dort encore. L’instant suivant, elle se retrouve enlacée dans des bras puissants, une bouche virile s’empare de ses lèvres et des mains qu’elle connaît bien partent à l’aventure sur son corps. Malgré l’envie de se laisser aller, elle se dégage.

    — Non chéri ! Pas ce matin, nous sommes déjà terriblement en retard.

    — Écoute, Françoise !

    — Non ! Pas question ! Anne m’attend pour que je l’emmène au lycée. Et je te rappelle que tu dois être sans faute au bureau pour 9 heures.

    — Bien ! Bien ! Je m’incline, dommage !

    — Voyons, tu peux bien patienter jusqu’à ce soir !

    Et, sous l’œil admiratif et un tantinet grivois de son mari, elle commence à s’habiller.

    — Ne me regarde pas comme ça, tu vas me faire rougir !

    — D’accord ! Je vais prendre une douche et mon petit déjeuner.

    L’instant d’après, un hurlement retentit.

    — Qu’est-ce qui se passe ? demande Françoise.

    — Rien, c’est ta fille qui n’avait pas fermé la porte de la salle de bains.

    — Quelle famille ! pense Françoise.

    Soudain, une douleur fulgurante lui perce le cerveau. Elle a failli tomber et s’est retenue de justesse à l’armoire. Cela n’a duré que quelques secondes, mais la laisse vidée. Pourtant, elle ne dit rien et après avoir repris ses esprits, finit de s’habiller et passe à la salle de bains achever de se coiffer et de se maquiller. Elle est désertée. Le père et la fille ont dû faire des concessions et sont en train de prendre leur petit déjeuner. D’ailleurs, elle les entend se chamailler pour savoir qui aura la dernière tranche de pain grillé.

    Quelques minutes de répit qui vont lui permettre de se remémorer rapidement l’emploi du temps de sa journée.

    — Alors ! Emmener Anne au lycée. 8 h 30 au ministère. Avant l’arrivée du ministre, vers 9 h 30, mettre la dernière touche à la conférence de presse. Répondre aux coups de téléphone, les journalistes s’y prennent toujours au dernier moment pour régler leurs détails. Ensuite, réserver les avions, les chambres d’hôtel et contacter les médias pour les deux voyages à faire cette semaine. S’il n’y a pas trop de problèmes, je devrais régler ça lundi au plus tard. Reste le plus difficile à faire : l’inauguration. Le discours n’est pas encore écrit et ça se passe dans huit jours. Il faut absolument que je m’y mette ce matin.

    Un dernier coup d’œil dans la glace lui renvoie l’image d’une femme belle et épanouie. Elle porte magnifiquement ses 39 ans et une longue pratique lui permet de s’habiller avec un goût très sûr.

    — Anne, tu es prête ? On y va.

    — J’enfile ma veste et je viens !

    Elle passe à la cuisine où Gérard est encore en train de manger.

    — À ce soir, mon chéri ! Ne traîne pas trop ! N’oublie pas ton rendez-vous, lui dit-elle en l’embrassant tendrement.

    En rejoignant la voiture où Anne est déjà installée, elle s’interroge sur ce qui vient de lui arriver. C’est la première fois qu’elle éprouve une telle douleur. Bon ! Pas le temps de s’interroger, elle doit y aller. Très vite, Françoise se retrouve dans la circulation de banlieue. Il est presque 8 heures et rouler vers Paris n’est pas toujours une partie de plaisir. Malgré tout, elle arrive à l’heure fixée au ministère après avoir déposé Anne à la porte de son lycée. Quelques poignées de mains aux collègues déjà présents et elle se retrouve dans son bureau. Cet endroit lui plaît. Depuis 2 ans qu’elle occupe ce poste, elle a pu se rendre compte de la difficulté qu’il y a à s’occuper de l’emploi du temps d’un ministre. Mais elle aime ça. Les responsabilités ne lui font pas peur et surtout, Monsieur le Ministre lui fait confiance et elle a la « faiblesse » d’en être fière. Sa première tâche, lire la presse et trier ce qui est intéressant. Avec l’habitude, une demi-heure suffit. D’ailleurs, ce matin, peu de choses importantes ressortent des journaux. Elle décroche le téléphone.

    — Monsieur Bocquart, pouvez-vous m’apporter le texte de la conférence de presse de Monsieur le Ministre, je vous prie ?

    — Tout de suite, Madame !

    Quelques instants plus tard, il entre dans le bureau.

    — Bonjour, Monsieur Bocquart, ça va ce matin.

    — Très bien, merci, Madame Devigne ! Voici le texte.

    — Parfait ! Je le relis et vous pourrez le faire taper pour la conférence de ce matin.

    — Rien d’autre ?

    — Non ! Ah si ! J’ai le discours de l’inauguration à mettre au point. Je n’ai aucun renseignement sur les travaux et les personnalités qui seront présentes. Pouvez-vous me faire un petit résumé sur tout ça pour ce soir ?

    — Tout à fait ! Je crois avoir tous les renseignements nécessaires.

    — Merci ! C’est tout.

    Déjà, Françoise s’est plongée dans la relecture attentive du texte de la conférence. Femme très ordonnée, presque maniaque, elle ne veut laisser à personne le soin de mettre au point ce que va dire le ministre.

    Quand ce dernier arrive, elle est toujours plongée dans sa lecture, pesant chaque mot et chaque phrase des réponses aux questions qui sont susceptibles d’être posées.

    — Eh bien ! Françoise, déjà en pleine activité ?

    — Ah ! Bonjour, Monsieur le Ministre ! Oui, je mettais la dernière main à ce que vous allez dire tout à l’heure aux journalistes.

    — Parfait, parfait ! Apportez-le-moi rapidement pour que je puisse l’étudier avant cet après-midi.

    — Monsieur Bocquart vous l’apportera tout à l’heure.

    Ce soir, c’est le week-end, pense Françoise. Sa douleur matinale, elle n’y songe déjà plus. Quelques heures de répit vont faire le plus grand bien. Et rien n’est prévu au planning. Françoise va pouvoir se consacrer à sa petite famille. Pas très longtemps d’ailleurs, puisque dès mardi, elle part pour les Vosges.

    Les Vosges, une région, des montagnes qu’elle ne connaît pas. L’Est de la France lui est totalement inconnu sauf par quelques lectures, prospectus ou reportages télévisés.

    Mais ce n’est pas le moment d’y penser. Aujourd’hui, toute la famille part à Louviers. C’est en effet de cette région de Normandie qu’est originaire toute la famille Devigne. Françoise est née à Louviers et ses parents y habitent toujours. Retraités du commerce, Monsieur et Madame Leroy tenaient une épicerie dans un quartier périphérique. Depuis leur retraite, prise 5 ans plus tôt, ils vivent dans un coquet appartement du centre-ville. Leurs trois enfants sont tous montés à Paris pour leur travail. Françoise, la dernière, ils ne la voient plus souvent, trop accaparée qu’elle est par ses occupations.

    C’est à Évreux, au lycée, qu’elle a rencontré Gérard. Ce ne fut pas le coup de foudre, loin de là. On peut même dire que le premier contact fut franchement désagréable. Gérard était en première quand Françoise entra en seconde au lycée d’Évreux. À l’époque, le bizutage était de rigueur, et les premières, qui y étaient passées l’année précédente, étaient aux premières loges pour faire subir les épreuves aux « bleus » de seconde. Françoise n’avait pas apprécié le traitement et gardait une rancune tenace envers celui qui dirigeait les opérations, en l’occurrence, Gérard.

    Pourtant, ce dernier n’était pas resté insensible à l’attrait que pouvait avoir Françoise. Et au fil des mois, à l’occasion de « Boum », il avait essayé de revaloriser son image auprès d’elle. Cela prit du temps, mais, petit à petit, la carapace d’indifférence dont s’était protégée Françoise à son encontre se fissura. Son humour, son aplomb et surtout sa gentillesse vis-à-vis d’elle, malgré les rebuffades, finirent par conquérir la jeune fille. Après avoir été ennemis, ils furent copains. Quand l’amour s’en mêla-t-il ? Ni l’un ni l’autre ne le savent exactement. Leurs études respectives les menèrent à Paris et ils décidèrent alors de vivre ensemble.

    Françoise voulait être journaliste. Elle entra dans une école menant à cette voie. Gérard, lui, fit une école de gestion. Et, pendant trois ans, ils vécurent ainsi, ensemble, mais se voyant peu, trop accaparés par leurs études et les différents stages à assumer, aussi bien à Paris que partout en Province.

    Gérard, à la fin de ses études, entra comme directeur dans une agence importante d’une grande banque française. Aujourd’hui, il est au siège, comme directeur adjoint, responsable de toute la stratégie commerciale de l’entreprise.

    Françoise, avant d’être au ministère, avait « navigué » pas mal. D’abord journaliste dans une radio libre, elle s’est ensuite beaucoup intéressée à la politique pour tenir une chronique dans un journal spécialisé. Ensuite, elle avait pu diriger la rubrique politique d’une radio périphérique importante, avant que le ministre lui demande de devenir son attachée de presse. Malgré la précarité de cet emploi, elle avait accepté, sachant qu’elle pourrait beaucoup apprendre et connaître en côtoyant les membres du gouvernement.

    Ça y est. Pour aujourd’hui, tout est terminé. Les derniers détails du voyage sont au point. Quant à l’inauguration, Françoise a déjà pris un certain nombre de contacts aujourd’hui qui vont lui permettre de tout régler avant le départ pour les Vosges, mardi matin.

    Mais maintenant, il est temps de penser à autre chose. Ce week-end est pour elle et sa famille. Il est 19 h et, dans 2 heures, tout le monde sera à Louviers et elle oubliera un peu ses soucis professionnels. Louviers, ses parents l’attendent, et là-bas, vraiment, avec son mari et ses enfants, elle goûte au repos sans arrière-pensées, elle réussit à tout oublier de son travail.

    Il est environ 22 h lorsque la famille débarque à Louviers, dans la maison de Papi et Mamie. Bien sûr, on les attend avec impatience. Les enfants, bien qu’ils ne soient plus tout à fait des gosses, adorent venir ici. Papi et Mamie leur sont aussi indispensables que leurs parents. Ils représentent autre chose, une sorte de havre de paix dans la tourmente parisienne. Ici, tout le monde se ressource.

    — Eh bien ! Vous êtes en retard ! On commençait à s’inquiéter !

    Ça, c’est tout Mamie. Il ne faudrait jamais lui dire une heure d’arrivée. Si on a 5 minutes de retard, elle s’inquiète tout de suite.

    — Mais non, répond Françoise. On avait dit neuf heures et demie et il est à peine dix heures.

    — Bien sûr, répondit Papi, mais tu connais ta mère, à 9 h, elle commençait déjà à dire : qu’est-ce qu’ils font, ils devraient déjà être là.

    — Allez, entrez, vous devez avoir faim.

    Après les embrassades, tout le monde se retrouve autour de la table. Mamie est un fin cordon-bleu et elle adore faire plaisir à ceux qu’elle aime. Alors, quand elle attend sa fille, elle met les petits plats dans les grands.

    La soirée est passée très vite. Il est déjà une heure du matin. Tout en mangeant, la discussion a roulé sur différents sujets. Mais, tacitement, on a évité tous les sujets « sérieux », notamment la politique. Ce n’est pas seulement pour des divergences de pensées, mais simplement personne n’a envie de parler travail. Tout de même, Françoise a demandé à son père de lui parler un peu des Vosges. Elle va y passer deux jours et, comme son père a fait son service militaire à Colmar, il pourra peut-être lui donner ses impressions sur la région.

    — Mais mon petit, Colmar, c’est l’Alsace, pas les Vosges.

    — Je sais, mais quand même, ce n’est pas très loin, et en dix-huit mois, tu as bien dû aller t’y balader quelquefois.

    — Pas tellement, tu sais. À l’époque, j’avais un copain qui était originaire des Vosges. C’était un petit village à côté d’une station de ski : La Bresse. Je ne me rappelle plus le nom de ce village. J’ai dû aller chez lui deux fois. Et ça fait tout de même près de cinquante ans. Je n’y suis jamais retourné et je n’ai jamais eu de nouvelles de lui. Je ne me rappelle même plus son nom. Les seuls souvenirs qui me restent, c’est des montagnes, des sapins et de la pluie. Les deux fois où j’y suis allé, il pleuvait.

    — C’est très vague pour se faire une idée de la région.

    — Je te l’avais dit. L’Alsace, j’ai plus de souvenirs. On y faisait des manœuvres et nos permissions nous permettaient de visiter un peu les alentours. Mais seulement la région de Colmar, car, avec les moyens financiers qu’on possédait à l’époque, on ne pouvait aller très loin, sauf pour revenir à la maison quand on avait des permissions longues.

    — Et alors, ça te laisse quels souvenirs ?

    — Très confus ! L’Alsace me laisse l’impression d’une région agréable. J’y ai passé de bons moments, mais qui ne m’ont pas laissé des souvenirs impérissables. Le fait que je sois à l’armée doit y avoir de l’importance. Je n’ai jamais eu vraiment l’envie d’y retourner. Mais après cette discussion, finalement, je crois que j’y retournerai, pour connaître l’Alsace dans un contexte différent.

    — Tout ça ne m’avance pas beaucoup. Enfin, je verrai bien. Allez, il est tard, on va se coucher. À demain tout le monde ! Dormez bien !

    Gérard s’était endormi, mais Françoise avait du mal à trouver le sommeil. Elle repensait à ce qui lui était arrivé le matin même. Elle n’avait pas de réponse et finit par sombrer à son tour dans les bras de Morphée. Pas pour longtemps ! Une image s’imposa à elle qui la réveilla en sursaut. Une vieille femme lui barrait le passage sur un sentier très étroit puis elle disparut. Françoise se leva sans bruit et se dirigea vers la fenêtre pour prendre un bon bol d’air. Qu’est-ce qui lui arrivait ? Elle resta un long moment devant cette fenêtre à respirer et finit par se calmer et se recoucher. Elle se rendormit.

    Le week-end se passa malgré tout sans problèmes et le lundi, tout le monde repartit pour son travail habituel. Le soir, Françoise prend le train pour Épinal, chef-lieu des Vosges. Elle devait arriver avant, afin de débroussailler un peu les choses. Une demi-journée lui était nécessaire. Le ministre n’arriverait qu’au début de l’après-midi.

    Gare d’Épinal. Il est 22 h 10. Le train est à l’heure. Il n’y avait que peu de monde. Depuis Paris, elle a pu étudier les notes qu’elle avait prises en consultant les documents nécessaires au bon déroulement de cette visite. En principe, mardi soir, elle devrait être dans l’avion pour Paris. Elle n’aurait donc pas le temps de visiter cette région.

    — Dommage, pensa-t-elle. Qu’est-ce que je connais de cet endroit ? Peu de choses, finalement. Les images d’Épinal, son député-maire, homme politique important et puis l’affaire Grégory. Mais je peux difficilement me faire une opinion avec aussi peu d’éléments. Mais dans toutes les régions, c’est la même chose. On ne connaît rien sinon les problèmes posés par les responsables au ministre.

    Le taxi la dépose à son hôtel. Au centre-ville, construit au bord de la Moselle, il était confortable et bien aménagé. Le lendemain, le soleil brillait. On était mi-octobre et l’automne qui commençait s’annonçait très agréable. Françoise sourit en pensant aux paroles de son père. Des Vosges, il n’avait vu que la pluie. Elle avait déjà un avantage au moins sur lui, elle les connaissait ensoleillées.

    Elle prit son petit déjeuner, puis se rendit à ses divers rendez-vous afin de terminer les préparatifs.

    À 14 h, après un déjeuner pris dans un restaurant de la ville en compagnie de personnalités locales, tout ce petit monde partit accueillir le ministre à sa descente d’avion. Trois étapes étaient prévues au programme de cet après-midi. Une réunion avec le maire d’Épinal et le président du Conseil Général, la visite d’un site choisi pour l’implantation d’une nouvelle entreprise dans la vallée de la Moselle et l’inauguration d’une usine qui avait déjà créé une cinquantaine d’emplois et à terme en créerait environ 200 dans la périphérie d’Épinal.

    C’est lors de cette dernière manifestation qu’un incident se produisit. Les ouvriers d’un tissage de la ville apostrophèrent le ministre. L’usine textile en question avait des difficultés, la chose n’étant pas rare dans ce secteur d’activité, et les ouvriers, qui craignaient pour leur emploi, demandèrent au ministre de faire quelque chose. Ce dernier décida de recevoir les délégués et après cette confrontation promit d’étudier le problème.

    Il appela ses collaborateurs présents et leur demanda d’étudier la situation et d’essayer de proposer une solution. Il fallait donc que quelqu’un reste sur place quelques jours afin de négocier avec les partenaires sociaux de cette entreprise.

    Françoise, au cours de la journée, avait éprouvé une attirance certaine pour cette région. Rien ne l’obligeait vraiment à rentrer à Paris. Gérard et les enfants se débrouilleraient bien sans elle pendant quelques jours. Elle décida de rester et d’essayer de résoudre les problèmes posés à cette petite ville des Vosges. Eloyes, c’est son nom, comptait un peu plus de 3500 habitants.

    Elle s’installa dans un des hôtels de la ville après avoir raccompagné le ministre à l’aéroport. Elle loua une voiture afin d’être plus indépendante, mais elle ne commencerait vraiment sa mission que le lendemain. Elle avait déjà demandé aux partenaires sociaux de l’usine de lui préparer un maximum de renseignements afin de démarrer une première séance de travail dès le lendemain matin.

    Quand elle put se libérer, une fois le ministre parti, elle se rendit à Épinal et, comme il était encore tôt, elle se promena dans la ville. Il faisait doux. L’automne commençait à peine. Elle aurait aimé visiter le musée de l’imagerie ainsi que l’imagerie, mais ils étaient déjà fermés. Alors elle flâna dans les rues. La plupart des magasins étaient fermés. Il y avait peu de monde. Elle alla jusqu’à la Roseraie. C’est un jardin public qui entoure un bâtiment à l’allure d’une villa romaine qui abrite la bibliothèque municipale. Elle est ainsi nommée à cause du nombre important de rosiers de toutes variétés qui y ont été plantés depuis des années. À cette époque, peu de roses étaient encore en fleurs. Cependant, des massifs avaient été aménagés et offraient à l’œil des badauds une harmonie de couleurs chatoyantes.

    La nuit tombait. Les lumières de la ville, une à une, s’allument. Tout à coup, la Roseraie s’illumina. Cet éclairage soudain donne une autre dimension au bâtiment. Françoise l’avait pourtant admiré, mais là, la véritable beauté de la façade prenait tout son relief. Un long moment, elle contempla ce spectacle. Désormais, elle était seule dans le jardin, mais peu lui importait. Pourtant, un vent léger se leva qui la fit frissonner.

    — Il est tard, se dit-elle et je n’ai pas encore dîné.

    Elle sortit du jardin en quête d’un restaurant qu’elle ne mit pas longtemps à trouver d’ailleurs. Juste en face, il y avait un « chinois ». Françoise aimait bien cette cuisine et y allait souvent avec Gérard à Paris. Elle se dit alors que le hasard fait bien les choses et entra. Elle dîna très bien et rentra à son hôtel. Elle allait avoir besoin de tout son tonus demain et puis, pensa-t-elle, les distractions ne doivent pas être légion, un soir en semaine, dans cette petite ville.

    Seule dans cet hôtel, sa douleur et son rêve lui revinrent en mémoire. Elle eut soudain peur de s’endormir dans cette chambre et d’être de nouveau importunée. Sans pouvoir expliquer pourquoi, elle savait que ces deux événements étaient liés. Elle n’en avait pas parlé à son mari. Pourquoi ? Elle était incapable de l’expliquer. Pourtant, elle passa une nuit sans problèmes.

    Chapitre 2

    Le lendemain, la journée passe très vite. Françoise avait pris une chambre dans un hôtel à Eloyes, pour être au plus proche des événements. Cependant, la situation était bloquée et Françoise, qui n’était pourtant pas de nature pessimiste, se rendit compte que trouver une solution ne serait pas une partie de plaisir. Les réunions se succèdent toute la journée. Et ce n’est que vers 23 h que se termine la dernière. Françoise était épuisée et affamée. La simple collation servie vers 13 h lui paraissait loin. Elle demanda si elle pouvait encore trouver un restaurant ouvert dans le village.

    — Ça ne va pas être facile, lui répondit-on.

    Monique, la secrétaire de direction, lui propose de venir dîner à la maison. Françoise hésita. Elle ne tenait pas à ce que les employés et ouvriers pensent qu’elle puisse être « achetée ».

    — Allez-y ! lui dit le délégué syndical qui avait remarqué son hésitation, vous verrez, son mari fait très bien la cuisine.

    Elle partit donc avec Monique, à pied. En effet, celle-ci n’habitait pas très loin, un petit pavillon construit dans les années 50 qu’ils avaient racheté, il y a quelques années. En arrivant devant ce pavillon, coquet, elle put voir que cette maison avait l’air très agréable. Un réverbère proche donnait un peu de lumière. Un jardin l’entourait et malgré l’automne, quelques fleurs y poussaient encore. Françoise avait enregistré ces petits détails d’un seul regard. Elles entrèrent et elle put constater que l’intérieur n’avait rien à envier à l’aménagement extérieur, du moins du peu qu’elle avait pu en apercevoir dans la pénombre. Une petite entrée, prolongée d’un couloir, desservait les pièces de la maison, tandis qu’un escalier partait au bout du couloir et accédait à un étage supérieur.

    Le repas était prêt. Mais le mari de Monique avait déjà dîné avec les enfants et ceux-ci étaient couchés. À leur arrivée, il était en train de regarder la télévision. En les entendant, il se leva, l’éteint et vint à leur rencontre.

    — Je vous présente Michel, mon mari, dit Monique.

    — Très heureux de vous connaître, sourit Michel.

    — Enchantée, dit Françoise.

    — Si vous voulez faire un brin de toilette avant de manger, dit Michel, la salle de bain est au fond du couloir.

    — Volontiers, répondit-elle.

    Elle alla donc se rafraîchir un peu et se laver les mains. La salle de bain était à l’image du peu qu’elle avait vu de la maison, chaleureuse et fonctionnelle. Elles se mirent ensuite à table et Michel, en parfait maître de maison, les servit. Ce fut un repas simple, mais excellent.

    — Votre délégué syndical avait raison, remarqua Françoise, vous faites très bien la cuisine, Michel.

    — Merci, répondit celui-ci. Mais je n’ai pas grand mérite, Monique avait tout préparé avant de partir à midi.

    À la fin du repas, ils passèrent au salon.

    — Je suis désolé de vous avoir obligé à quitter votre film, dit Françoise.

    — Non, je ne regardais pas vraiment. J’attendais Monique pour connaître les résultats des négociations.

    — Je te raconterai tout à l’heure, répondit Monique, mais pour l’instant parlons d’autre chose.

    — C’est une belle région, par ici, reprend Françoise. C’est la première fois que je viens dans les Vosges, mais je m’y sens bien. Je suis passée hier à Épinal, j’ai flâné un peu dans les rues, dans les jardins, c’est une très jolie petite ville.

    — Oui, répondit Michel. Mais ce n’est pas la ville que je préfère dans la région.

    — Ah bon !

    — À 10 kilomètres d’ici, il y a Remiremont, plus petit qu’Épinal, mais bien aussi coquet et encore plus intime.

    — Pourtant, dit Françoise, si on compare à Paris...

    — Bien sûr ! répondit Michel, mais Paris ce n’est pas comparable.

    — Non bien sûr ! Mais il y a beaucoup de forêts par ici. J’aimerais bien m’y promener un peu.

    — Oh ! Vous pouvez, dit Michel, mais faites attention, vous pourriez vous y perdre. Malgré tout, si vous n’êtes pas imprudente, il n’y a pas de réel danger. Des sentiers ont été tracés, ils sont fléchés et si vous ne les quittez pas, vous pouvez vous promener en toute sécurité.

    — C’est intéressant, dit Françoise, j’irai peut-être faire un tour demain matin. Les discussions ne reprennent qu’en début d’après-midi, ça me laissera le temps de m’aérer un peu. Le paysage me fait penser un peu à la région d’où je suis originaire, la Normandie, avec les montagnes en moins, bien sûr. Mais nous avons aussi quelques belles forêts.

    — Je ne connais pas la Normandie, dit Michel. Mais je suis un peu casanier. J’aime bien les Vosges. Je suis né ici, je travaille ici, et mon rêve serait de finir mes jours ici.

    — Pourquoi pas ? dit Françoise.

    — On verra bien, répondit Michel.

    Plus tard, Françoise prit congé de ses hôtes et rentra à son hôtel. Le lendemain, elle se décide à aller faire une promenade en forêt. Elle descend à la réception et s’entretient avec la propriétaire, Madame Souvaire. Elle lui dit ce qu’elle avait l’intention de faire. Cette dernière l’incite à la prudence. Françoise promit qu’elle ne ferait pas d’imprudence. Et, ainsi qu’elle l’avait décidé la veille, elle monta jusqu’à la forêt. Elle laissa sa voiture à la lisière, sur un petit parking qui y avait été aménagé. Il n’y avait personne. Elle emprunta le premier sentier qui se présenta. Elle marcha sans se préoccuper du temps ou de la distance. Elle se sentait bien. Respirant à pleins poumons, elle apprécie la solitude et la beauté un peu sauvage de l’endroit. Un soleil un peu pâle perçait les nuages. Quelques brumes matinales finissaient de s’effilocher çà et là parmi les arbres. Le sentier serpentait à travers la forêt, parmi différentes espèces végétales qu’elle ne reconnaissait pas toutes. Elle n’était pas très versée en botanique. Elle identifia malgré tout, quelques arbres comme les chênes ou les sapins. Au bout de deux heures de marche, elle commença à sentir un peu la fatigue. Une petite clairière se présenta. Un banc y avait été aménagé. Elle s’y assit. Elle souffla un peu, regarda sa montre et décida de continuer un peu sa promenade. Quelques dizaines de mètres plus loin, un autre sentier partait sur sa gauche. Curieuse, elle décida de l’emprunter. Aucune direction n’était indiquée. Mais elle ne s’inquiéta pas, si elle connaissait quelques problèmes, elle ferait demi-tour. Pourtant, très vite, le sentier ne fut plus qu’une sente. Françoise ne s’en rendit pas compte tout de suite. Ce n’est que lorsqu’elle eut quelques difficultés à se frayer un passage parmi les arbustes et les broussailles qu’elle se décida à faire demi-tour. Mais, en se retournant, elle fut prise de panique. Les buissons s’étaient refermés derrière elle, et elle ne vit aucune trace du sentier qu’elle avait emprunté.

    — Restons calme ! se dit-elle. Je marchais dans cette direction. Si je repars tout droit dans l’autre sens, je vais retrouver mes traces.

    Elle se remit donc en route dans la direction d’où elle venait. C’est effectivement ce qu’elle crût. Mais après avoir marché à travers les arbres pendant un bon quart d’heure, elle dut se rendre à l’évidence, elle ne retrouvait aucun sentier ni aucune des traces qu’elle aurait pu laisser. Elle sentit l’angoisse monter en elle. Michel, hier soir, lui avait pourtant recommandé de rester sur les sentiers fléchés. Elle s’assit au pied d’un arbre et essaya de réfléchir. Elle était perdue. Bon ! Elle n’allait pas paniquer. Elle respira un grand coup. Allons, on allait s’enquérir de ce qui lui était arrivé. Elle devait participer à une séance de travail à 14 heures. Si personne ne la voyait arriver, on s’inquiéterait. On partirait à sa recherche. Elle avait dit à Monique et Michel qu’elle irait se promener en forêt. Et puis on trouverait sa voiture.

    — Allons, allons, se dit-elle, pas de panique. On va te retrouver. Tu en seras quitte pour passer quelques heures en forêt.

    Malgré tout, cette perspective ne l’enchante pas vraiment. Autant elle avait trouvé les lieux magnifiques au début, autant, maintenant, ils lui paraissent hostiles. Il est vrai qu’elle était en pleine forêt, que le ciel commençait à se couvrir et que les arbres, assez serrés à cet endroit, atténuaient encore plus la lumière du jour.

    — Il faut que je sorte de là, se dit-elle. C’est plus fort que moi, cet endroit me fait peur.

    Elle se leva, respira un grand coup et se mit à marcher. Elle se retint pour ne pas courir. Il lui semblait entendre des bruits bizarres derrière elle.

    — Ce n’est rien, pensa-t-elle pour se rassurer. Mais elle n’osait pas se retourner, de peur de se retrouver face à... elle ne savait quoi.

    — Tu deviens complètement folle, ma fille !

    Elle avait parlé très fort, presque crié. Et le son de sa voix lui redonna un peu de courage. Elle ralentit son pas qu’elle avait peu à peu accéléré, comme pour fuir un danger inconnu. Sans s’en rendre compte, elle était sortie de cette forêt noire, et se retrouvait dans

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