Pénitence

Karen, bien calée contre le dossier de son fauteuil, relut encore une fois la lettre qu’elle venait de recevoir, puis elle leva des yeux incrédules sur le jardin.

Le soleil était déjà haut dans le ciel lillois en ce mois d’avril, il n’était pas loin de midi.

Les petits matins étaient encore frisquets, mais la météo promettait une belle semaine et une montée en flèche des températures.

Elle n’arrivait pas à croire ce qu’elle venait de lire. Elle osait à peine s’en réjouir tant le contenu de ce courrier était improbable.

La chance de sa vie tenait là, en quelques lignes, sur le papier à en-tête d’une association à portée nationale pour laquelle tous les photographes animaliers rêvaient de travailler.

Elle n’exerçait en photographe indépendante que depuis un an. Elle, qui s’estimait déjà heureuse quand elle vendait une photo pour un petit magazine, venait de recevoir une proposition que d’autres, bien plus expérimentés, avaient attendue pendant des années. C’était inespéré, presque incroyable.

Le président de l’association Petits Mondes et Merveilles avait remarqué son travail sur la galerie virtuelle Internet où elle exposait ses clichés et il lui proposait un contrat d’un an. Rien de moins ! L’association prévoyait de publier un magnifique ouvrage qui présenterait la faune et la flore du parc naturel du Mercantour, dans la haute vallée du Verdon, dans les Alpes-de-Haute-Provence.

C’était loin, bien loin de Lille.

Karen n’y avait jamais mis les pieds. D’ailleurs, elle n’était jamais allée plus loin que la Bretagne. Sa mère, Hélène, morte prématurément à l’âge de 55 ans dans un accident de voiture, avait parcouru toute la France.

C’était elle qui avait transmis sa passion de la photographie à sa fille et lui avait enseigné les trucs et les astuces des plus grands reporters. Karen pouvait bien avoir 30 ans, quand elle pensait à sa mère, elle n’était plus qu’une enfant. Depuis deux ans que cette dernière était morte, il semblait encore