Un printemps miraculeux

Penchée sur le lit de sa fille, Elvire se redressa d’un bond pour prendre ses sœurs à témoin.

– Vous avez vu ? Edwige a ouvert les yeux !

Martha et Solveig s’approchèrent.

– Qu’est-ce que tu racontes, ses yeux sont fermés, soupira Martha.

– Elle les a refermés aussitôt, mais je vous jure qu’elle les a ouverts et qu’elle m’a regardée fixement quelques secondes.

Et je suis sûre qu’elle sait que Julien est vivant…

– Comment le saurait-elle ? s’étonna Solveig, la cadette, qui venait de fêter ses 38 ans.

– Elle l’a senti, parce qu’elle l’aime. Elle va nous revenir, vous allez voir. Martha et Solveig échangèrent un regard suspicieux. La douleur faisait-elle perdre la tête à leur sœur ?

– Eh bien quoi, continua cette dernière, vous ne croyez pas en la puissance de l’amour ?

Solveig repoussa en arrière une mèche de ses longs cheveux bruns qui lui tombait sur les yeux, puis elle secoua la tête négativement. – C’est impossible… La pauvre n’a pas bougé de son lit depuis une semaine… Tu te fais des idées…

Elvire poussa un long soupir d’agacement.

– Qu’est-ce que vous êtes terre à terre toutes les deux ! Je suis sûre, moi, que derrière ses paupières closes il se passe bien des choses qui nous échappent.

A ce moment-là, Elvire sentit les doigts d’Edwige se refermer sur sa main, juste un bref instant, et puis plus rien.

– Elle a serré ma main ! s’exclama-t-elle.

Solveig et Martha se penchèrent sur le visage de leur nièce, puis elles se regardèrent en écarquillant les yeux.

Il se passait quelque chose d’étrange, la jeune fille semblait reprendre des couleurs, ses pommettes rosissaient puis ses yeux s’entrouvrirent.

Martha se signa en reculant.

On aurait dit que la vie était en train de revenir dans le pauvre corps affaibli de la malheureuse. Mais elle y revenait à la vitesse d’un torrent, on pouvait presque voir le sang affluer dans ses veines, sous sa peau, et entendre son cœur palpiter dans sa poitrine. C’était comme si les