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Prisonnière du silence (32)
Prisonnière du silence (32)
Prisonnière du silence (32)
Livre électronique247 pages2 heures

Prisonnière du silence (32)

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À propos de ce livre électronique

Je suis une adolescente normale. Du moins, je l’étais : quatorze ans, des parents séparés, trois meilleures amies, l’école… Jusqu’à ce jour. Celui où ma mère a rencontré Michel, son nouveau chum. Au début, leur histoire d’amour avait des airs de conte de fées. Mais rapidement, ma mère a commencé à changer. Elle est devenue secrète, ne s’habillait plus comme avant, se maquillait tout le temps (même pour faire le ménage !) et semblait toujours sur le qui-vive.

Méfiant, jaloux, contrôlant… Le prince charmant de ma mère était loin de ceux que j’avais connus dans les livres de mon enfance. Avec le temps, les insultes sont devenues des menaces, puis des gifles, et, pour finir, des coups. Ma mère ne sortait plus, elle mentait à ses amies, ne répondait plus au téléphone. Malgré ma peine et ma révolte, la loi du silence semblait plus forte que tout. Jusqu’à cette nuit terrible où j’ai enfin trouvé le courage d’appeler à l’aide…

La violence domestique ne blesse pas que ceux qui la subissent, mais aussi ceux qui en sont témoins, le plus souvent des enfants et des adolescents. On pourrait croire qu’en raison de la gravité de la situation et de la diversité des réseaux de communication, il est devenu facile de se confier, de dénoncer. Mais c’est sans compter la honte, la culpabilité et la peur qui transforment chaque jour davantage la maison familiale en prison.
LangueFrançais
Date de sortie21 juin 2023
ISBN9782897925482
Prisonnière du silence (32)
Auteur

Myriam De Repentigny

Myriam de Repentigny est née et a grandi dans les Laurentides, mais elle vit maintenant à Montréal. Elle possède une maîtrise en création littéraire de l’UQAM et, après avoir travaillé pendant quinze ans comme libraire et technicienne aux achats pour une grande chaîne de librairies, elle est devenue travailleuse autonome. Ainsi, depuis 2013, elle partage son temps entre la révision linguistique, le journalisme, la critique littéraire, la rédaction d’articles – entre autres pour les revues Lurelu et Enfants Québec – et l’écriture. Elle est aussi maman de deux enfants qui, tout comme elle au même âge, aiment écrire et illustrer leurs propres histoires. Myriam puise ses sources d’inspiration dans la vie quotidienne et est sensible aux problématiques sociales. Son souhait le plus cher serait que ses livres fassent une différence dans la vie de ses lecteurs! Elle a publié, jusqu’à maintenant, trois romans pour enfants (chez Soulières éditeur) ainsi que Prisonnière du silence, son premier roman pour adolescents.

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    Aperçu du livre

    Prisonnière du silence (32) - Myriam De Repentigny

    - 1 -

    Lundi 22 octobre

    Je prends mon sac à dos et referme ma case d’un coup de pied. Ce soir, je vais chez mon père. Ça ne me tente pas ! Il y a deux semaines, sa nouvelle blonde, Valérie, a emménagé chez lui. Déjà que la maison n’est pas bien grande, là, on va carrément se marcher sur les pieds. Et on ne peut pas dire qu’entre elle et moi, ce soit l’amour fou…

    Alors qu’en soupirant je me dirige vers la sortie de la polyvalente, je vois mon amie Marianne qui m’adresse de grands signes.

    – Hé, Léo !

    Je m’appelle Éléonore. Léo, c’est mon surnom.

    Je m’approche de Marianne qui, avec ses longs cheveux blonds, ses yeux bleus et son rire en cascade, attire tous les regards. Aujourd’hui ne fait pas exception à la règle, car, dans la cohue générale marquant la fin de la journée, plusieurs garçons se retournent pour la fixer. Les ignorant, elle me prend par le bras et m’entraîne à l’extérieur, où nous rejoindrons Laurie et Anaïs.

    – Ça va ? T’as l’air bizarre, on dirait que tu vas te mettre à pleurer.

    – Je pensais à Valérie.

    – Valérie la folle ?

    – Ouais. Mon père vient me chercher à dix-sept heures.

    Tandis qu’on marche, mon amie, qui n’a pas lâché mon bras, me serre un peu plus étroitement contre elle. Depuis le temps qu’on se connaît, on n’a plus besoin de parler pour se réconforter mutuellement. Quand nous avions cinq ans, Marianne a perdu son père, qui luttait contre un cancer depuis déjà plusieurs années. Je me souviens qu’à cette époque ni elle ni moi n’avions de mots pour exprimer ce que nous ressentions. Mais, comme je partageais sa peine, je la prenais tout le temps dans mes bras, la serrant contre moi au point de l’étouffer. Sa mère m’invitait souvent à dormir chez elles. Lorsque Marianne se mettait à pleurer au beau milieu de la nuit, je lui caressais les cheveux jusqu’à ce qu’elle se rendorme. Depuis, nous avons toujours été là l’une pour l’autre.

    – Salut, Léo ! Salut, Marianne ! lance Laurie en sautillant sur place.

    Anaïs soupire.

    – Pitié, les filles, faites quelque chose ! Justin lui a donné son numéro de téléphone et, depuis, elle est hystérique !

    Effectivement, Laurie a l’air passablement excitée. Elle exécute maintenant de petits pas de danse autour de nous. Je l’attrape par la main.

    – Allez viens, miss hystérique, on va rater notre autobus.

    Marianne et Anaïs se dirigent elles aussi vers leurs autobus respectifs.

    Ciao, les filles ! À demain ! lance Laurie en gambadant et en leur envoyant théâtralement des baisers.

    Dans l’autobus, elle me dit tout sur Justin et sur la façon dont il lui a donné son numéro de téléphone. Habituée à son bavardage incessant et préoccupée à la perspective de passer la soirée avec mon père et Valérie, je ne l’écoute qu’à moitié.

    – … pis, comme ça faisait déjà un bout de temps qu’on se cruisait, je commençais à avoir hâte qu’il se décide ! Youhou, Léo !

    Étant donné que le moment est mal choisi pour me confier, je feins d’avoir l’air intéressée.

    – Ben oui, Lau, je suis contente pour toi ! Il a l’air cool, Justin !

    Laurie sourit et ramasse ses affaires. Avant de se lever, elle se penche pour m’embrasser sur la joue.

    – J’t’aime, Léo. Bonne soirée !

    – Toi aussi ! Et oublie pas de faire tes devoirs, hein ?

    Elle m’adresse un clin d’œil et se dirige vers l’avant de l’autobus. Quand elle est amoureuse (ce qui arrive souvent), Laurie oublie tout, jusqu’à ses devoirs et ses examens. Elle a même failli couler son cours de maths l’an dernier à cause de William, un gars de cinquième secondaire qui lui a brisé le cœur. Et, comme ses parents sont souvent absents, elle ne peut pas compter sur eux pour la rappeler à l’ordre.

    L’autobus s’immobilise dans ma rue. J’en descends lentement, le cœur aussi lourd que mon sac à dos. Lorsque j’arrive chez moi, je vois le joli visage de Sabine, ma petite sœur, dans la fenêtre du salon. Chaque jour, debout sur le canapé, elle guette avec impatience mon arrivée. Puis, elle court m’ouvrir la porte et, avant même que j’aie le temps de déposer mes affaires, elle me saute dans les bras. Sabine, avec ses deux petites tresses blondes, c’est un rayon de soleil. Lorsqu’elle est née, j’avais huit ans et je me suis promis que je serais toujours là pour elle. Je l’embrasse dans le cou, ce qui la fait rigoler. Je lui demande si elle a passé une bonne journée.

    – Oui, répond-elle en sautillant. Et, ce soir, on va chez papounet !

    Comme si j’avais besoin qu’on me le rappelle…

    – Justement, je vais préparer mes affaires, Sab. Maman est là ?

    – Oui ! Elle va à un bal, ce soir ! Elle est en train de se faire belle.

    Un bal ? Depuis quand fréquente-t-elle les bals ?

    Je ramasse mon sac et monte à l’étage. Ma mère, Elsa, est dans la salle de bain en train de se maquiller. Elle porte une robe bleue et à son cou brille un fin collier orné de pierres. Par ailleurs, elle a remonté en un élégant chignon ses longs cheveux bruns.

    – Bonjour, ma grande ! me dit-elle sur un ton enjoué.

    – Salut, maman. Comme ça, tu vas à un bal ?

    Elle pouffe de rire.

    – Catherine m’a invitée à sortir avec elle et quelques-uns de ses amis.

    – Ah ? Et tu espères tomber sur ton prince charmant, j’imagine ?

    Mon ton sarcastique n’échappe pas à ma mère, qui soupire en me fixant dans le miroir.

    – Léo… Tu ne crois pas qu’il serait temps pour moi de rencontrer quelqu’un ?

    Je hausse les épaules et me dirige vers ma chambre. Depuis que mes parents se sont séparés, il y a cinq ans, ma mère n’a eu qu’un seul copain, et ça n’a pas duré longtemps. Au fond de moi, je sais bien qu’elle a raison. Mais l’idée que ma mère puisse se faire un nouveau chum me dérange. J’ai déjà bien assez de Valérie la folle à supporter !

    Je fais mon sac rapidement et redescends au rez-de-chaussée. Ma mère est toujours en train de se préparer pour son « bal ». Ma sœur regarde la télévision, son sac sur le dos. Sabine adore notre père et aime encore plus Valérie, qu’elle considère comme une véritable princesse. Des fois, j’ai envie de lui dire que sa Valérie adorée ressemble davantage à la belle-mère qu’à Cendrillon…

    Alors que j’ouvre le garde-manger pour me prendre quelques craquelins, on sonne à la porte. Aussitôt, Sabine s’élance pour ouvrir et se jette au cou de notre père, Stéphane, qui nous fait l’honneur d’être à l’heure pour une fois. Il nous regarde d’ailleurs toutes les deux comme s’il s’attendait à ce qu’on lui déroule le tapis rouge. Et puis quoi encore ? J’enfourne en vitesse trois craquelins et referme, irritée, la porte du garde-manger. La bouche pleine, je salue mon père d’un bref hochement de tête.

    – Vous êtes prêtes, les filles ? demande-t-il en passant la main dans ses cheveux impeccablement coiffés.

    Mais bien sûr que je suis prête. Ne suis-je d’ailleurs pas en train de sauter de joie à la perspective de passer la soirée avec lui et sa blonde fêlée de la tête ?

    Ma mère descend l’escalier pour nous embrasser. Je dois admettre qu’elle a mis le paquet ce soir. Elle est vraiment belle ! Mon père, qui pense toujours impressionner les autres avec son look d’enfer, a presque l’air d’un itinérant à côté d’elle.

    – Salut, Elsa, dit-il, visiblement mal à l’aise.

    – Salut.

    Ma mère lui en veut toujours de l’avoir laissée tomber alors que Sabine n’avait que dix-huit mois et qu’ils venaient tout juste d’acheter une nouvelle maison. Je crois bien que jamais elle ne le lui pardonnera. Son ton sec et son air renfrogné en sont la preuve.

    Tandis que Sabine sort avec mon père, ma mère me prend dans ses bras et me serre contre elle. Comme une petite fille, je me grise de son odeur.

    – Je sais que tu n’as pas envie d’aller chez ton père, Léo, mais c’est comme ça.

    Si je ne me retenais pas, je crois que je me mettrais à pleurer comme un bébé.

    – OK. Bye, maman.

    Saut d’espace temps.

    – Assieds-toi derrière avec ta sœur, Léo, on va chercher Valérie à son travail.

    Évidemment, comme d’habitude, cette chère Valérie passe avant tout le monde. Après avoir aidé Sabine à boucler sa ceinture, je m’installe donc à l’arrière et, afin que mon père comprenne bien que je n’ai rien à lui dire, je sors mon iPod de la poche de ma veste et m’enfonce les écouteurs dans les oreilles. Dix minutes plus tard, la voiture s’immobilise devant l’immeuble où travaille Valérie. Cette dernière, juchée sur ses éternels talons hauts, a tôt fait de nous rejoindre. Après avoir langoureusement embrassé son chéri, elle daigne se tourner vers nous.

    – Bonjour, Sabine ! Bonjour, Éléonore !

    Elle est la seule personne sur terre à ne pas m’appeler par mon surnom. Elle est probablement trop snob pour ça ! Tandis que ma sœur lui répond d’un retentissant « allo », je lui fais un signe de tête pour lui montrer que j’ai remarqué sa présence. Tout en me regardant du coin de l’œil, elle se penche vers mon père. Discrètement, je baisse le volume de ma musique.

    – Non, mais tu ne penses pas que ta fille pourrait faire un effort pour me dire bonjour ? lui murmure-t-elle.

    Mon père hausse les épaules.

    – C’est une ado, Val. C’est normal qu’elle soit dans sa bulle. Ne t’en fais pas pour ça…

    – Quand même, il me semble que sa mère pourrait lui apprendre les bonnes manières.

    Mon père ne répond pas. Il se contente de me lancer un regard réprobateur dans le rétroviseur.

    Lorsque nous arrivons, je m’empresse de monter à la chambre que je partage avec Sabine. Parce que je n’ai pas envie de voir Valérie, mais aussi parce que j’ai un examen d’histoire demain. Mes écouteurs toujours dans les oreilles, je tente péniblement de retenir les faits marquants de la conquête de l’Amérique par Christophe Colomb. Vers dix-neuf heures, mon père apparaît dans l’embrasure de la porte.

    – Tu viens manger, Léo ?

    Je referme mes cahiers, éteins mon iPod et me lève en m’étirant.

    – Tu pourrais essayer d’être gentille avec Valérie, s’il te plaît ? me demande-t-il comme si j’avais trois ans.

    – Sinon quoi ? Tu vas me mettre au coin ?

    Mon père soupire et, en silence, nous descendons rejoindre Sabine et Valérie, déjà attablées devant une lasagne fumante. Mon père a beaucoup de défauts, mais il cuisine bien. Lorsque j’étais petite et que nous vivions tous les trois, ma mère, lui et moi, je pouvais passer des heures à la cuisine avec lui, à l’aider à préparer toutes sortes de plats. Il me donnait beaucoup de miniresponsabilités ; j’avais l’impression d’être une grande ! Ça me manque, tout ça. Il me manque, lui. Depuis qu’il a rencontré Valérie, j’ai l’impression de l’avoir perdu. Quoi qu’il en soit, la perspective de déguster sa merveilleuse lasagne me réjouit. Cependant, ma joie est de courte durée, car je me rends vite compte que quelque chose cloche.

    – Ah ! ah ! lance Valérie devant mon air sceptique, vous vous demandez ce que la lasagne a de différent, ce soir !

    Son ton faussement taquin m’exaspère au plus haut point.

    – Eh bien, c’est moi qui l’ai faite ! C’est une lasagne végétarienne, une recette super que j’ai trouvée sur un site de cuisine français. Pas mal, non ?

    Pas mal dégueulasse, ouais… Sabine, candidement, avoue qu’elle préfère la recette de papounet. Mais, devant l’air ravagé de Valérie et ne voulant pas lui déplaire, elle ajoute que la sienne est quand même très bonne. Quant à moi, je choisis de me taire. À six ans, on peut encore dire ce genre de chose, mais, à quatorze, ça passe moins bien.

    – C’est bon, hein, Steph ? demande alors Valérie, en désespoir de cause.

    Mon père lui fait les yeux doux.

    – Merveilleux, mon amour. Comme tout ce que tu touches, d’ailleurs, ajoute-t-il en lui faisant, j’imagine, du pied sous la table.

    Beurk ! Je préférerais être morte plutôt que d’assister

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