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Obsession
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Livre électronique126 pages1 heure

Obsession

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À propos de ce livre électronique

Pénétrer dans le monde du rêve, du désir, de l’enfance et se laisser emporter, les yeux grands ouverts, par la fulgurance des sentiments. Écarter prudemment le voile de Maya et s’approcher tout doucement de ce qui est tapi derrière l’univers phénoménal.

LangueFrançais
Date de sortie13 oct. 2021
Obsession
Auteur

May Koliander

I was born in the States, the outcome of an Oklahoma - Pennsylvania love story, but bred in Europe. My taste for stories started a long time ago with Mom reading to us every evening for hours and giving us free access to the stash of Classics Illustrated a mile high she had thrown into the great ocean liner trunks along with other artefacts, such as vegetable peelers and pie tins, when she decided to cross the seas with her brood. As we grew in years, we graduated from Uncle Wiggly, Uncle Remus and Pogo to the great epics and then on to the world's classics. I still remember my brother's laughter when we got to The Pickwick Papers and must confess I fell asleep during most of The Brothers Karamazov, but was totally enthralled by War and Peace. I sometimes try to draw up a list of my most loved books, something like a top ten. It would read - today - like this : Lolita by V. Nabokov War With The Newts by K. Capek God's Grace by B. Malamud Anna Karenin by L. Tolstoy La Soif et Autres Nouvelles by Ivo Andritch Ferdydurke by W. Gombrowicz The Barsoom Novels by Edgar Rice Burroughs The Things They Carried by T. O'Brien Le Testament Français by Andreï Makine A Good Man is Hard to find and Other Stories by F. O'Connor Us by E. Zamiatine Frankenstein by Mary Shelley Of course, it's easy to remember the works that have marked generations. However, we don't only feed on 'literature' - there are myriads of other books out there of a less lofty nature that we have read and thoroughly enjoyed, but whose titles or authors have faded from our memory. So, the big blank space in the middle of the list is for all those writers whose work has given me countless hours of excitement and pleasure - writers of genre fiction. One day, however, the unthinkable happens - you reach for a book and after a few pages, you let if fall back down. It's not what you wanted - the shoe doesn't fit - so you pick up another and it happens again... Then there's only one thing left to do - sit down at your computer and start writing...

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    Aperçu du livre

    Obsession - May Koliander

    Le grand œil turquoise de la source à l’entrée de la grotte le retenait prisonnier. Allongé sur le sol dur, le visage planant au-dessus de l’eau, il s’abîmait dans sa transparence. La source était si cristalline, si oublieuse d’elle-même qu’il lui semblait n’être séparé que par un vide de la profonde faille secrète d’où sourdait l’onde. Étendant la main vers cette pupille oblongue comme celle des chèvres de montagne, il était chaque fois surpris de rencontrer le liquide glacé.

    À son insu cependant, l’œil bleu cerclé de moire lui rendait son regard. La source connaissait chaque détail du visage la dominant soudain. Elle se pâmait sous le regard fixe et attentif qui la scrutait ; s’offrait avec vertige aux lèvres rouges qui, tendues vers sa surface, s’y attardaient longuement avant de se désaltérer.

    Bien au-dessus de la grotte où l’eau pleure doucement, un cirque de sommets blancs se découpe sur le ciel pur. Le rayonnement intense et froid des pentes immaculées se réfléchit jusque dans les recoins les plus obscurs des hautes vallées : les gorges étroites, les sous-bois sauvages sont pénétrés d’un jour où flotte de la poudre d’argent en suspension.

    Le soir, dès que le soleil, soudain las, ne parvient plus à franchir la terrible barrière des monts, le souffle enneigé des sommets chantant leur inaccessible splendeur se coule dans les vallées. Saisissant les forêts de pins encore bruissants, cette haleine polaire annonce l’aube silencieuse de la nuit et le lent dévoilement des étoiles.

    Lorsqu’il voyait poindre l’étoile du berger, il redescendait au village. Son chemin traversait les pins touffus et longeait les champs pierreux aux formes torturées. Sise tout au bout du village, la petite église construite le long de la montagne l’accueillait dès qu’il débouchait de la forêt. Les beaux soirs, le lourd parfum des fleurs du rosier escaladant ses vieux murs s’épanouissait dans la pénombre, et séparait d’un rideau embaumé le monde de la forêt de celui du village. Derrière l’église, les modestes maisons en pierres arrachées à la montagne se nichaient entre des parois abruptes et nues.

    Rentrant des hauts champs ou de la source à la tombée du jour, il voyait à travers la petite fenêtre de sa demeure sa mère s’affairant dans la cuisine, illuminée par le feu brillant dans le foyer. Venue de la grande plaine, cette femme jeune encore attachait ses longues tresses brunes en un gros nœud sur la nuque. Ses robes de coton rugueux aux couleurs vives, bien qu’adoucies par le soleil mordant, égayaient l’univers minéral où la vie l’avait transplantée. Brune et mate, sa peau scintillait comme si le vent qui balayait les parois rocheuses l’avait, en passant, saupoudrée de fines particules de mica.

    Parfois, lorsqu’ils étaient tous deux occupés à la cuisine, il prenait une de ses longues mains fines et chaudes et en baisait tendrement la paume.

    Après le repas, il sortait dans l’air vif s’occuper des lapins et du cochon dans l’enceinte derrière la maison. Dans la pièce commune, à la lueur de la lampe à huile, il taillait des ustensiles en bois, pendant que sa mère tricotait ou raccommodait. Ils parlaient peu. Le cliquetis régulier des aiguilles, le tintement clair d’une cuiller heurtant les bords d’une tasse accompagnaient le chuintement de la lame attaquant la chair blanche du bois. On entendait distinctement le froissement sec des copeaux tombant sur le sol. Animés un instant d’une vie propre, les longues spirales rebondissaient, s’emmêlaient, se frottaient l’une à l’autre pour oublier dans l’étreinte la douleur de la lame vive tranchant leurs fibres.

    Dehors, très haut au-dessus la corolle livide des monts, l’écho des lointaines explosions des astres grondait sourdement dans l’air froid. Le ciel laiteux frissonnait comme un dormeur dont les songes sont traversés de visions cataclysmiques. Dans la vallée, la nuit raffermissait imperceptiblement l’étreinte noire dans laquelle elle enserrait le village et le monde.

    Comme l’eau du ruisseau que l’on entendait faiblement rire et gazouiller des chatouillis que lui prodiguaient les pierres de son lit, la vie s’écoulait douce et paisible. L’accomplissement des travaux des champs et des tâches domestiques n’était troublé que par l’appel bleu et muet de la source.

    Un après-midi torride, alors qu’il se rendait aux champs, il vit qu’un des battants de la porte de l’église était resté entrouvert. Attiré par la pénombre fraîche de la nef, il pénétra dans le bâtiment. L’église était méconnaissable. Des objets du culte soigneusement rangés comme à l’accoutumée, il se dégageait une nostalgie poignante. Il sentit que sa présence était une intrusion. Seul à bouger en cette heure de grosse chaleur pendant laquelle tous se terraient, il surprenait les choses alors qu’elles avaient oublié les hommes et pleuraient leur innocence perdue. Misérables éclats déchus, les pierres des murs rêvaient du temps, où tout près du ciel, elles offraient au feu et à la glace une face compacte et lisse aussi vieille que le monde. Au fond de l’église, suspendu dans la niche, le crucifix grossier emperlé de larmes gluantes de résine, se remémorait sa vie d’arbre puissant et solitaire avant que les hommes ne le forcent à revêtir la forme cruelle de leur tourment. Les abeilles bourdonnant autour des fleurs sauvages posées sur l’autel parlaient aux cierges de la vie pleine de chuchotements de la ruche et des flots dorés de nectar. Songeant à sa vie d’antan et à la dégradation de sa splendeur géométrique en de tristes cylindres, la cire exhalait de faibles soupirs, dont la molle suavité se mêlait à la senteur végétale enivrante et profonde de la rose s’infiltrant par la porte entrouverte, pour étouffer toute trace d’encens, seul luxe de cette église pauvre.

    Troublé par l’extase malheureuse des choses, il s’avança timidement parmi la matière en plein abandon. Au centre de la nef, entre les rangées de bancs en bois, une pastille colorée, projetée par les rayons ardents du soleil transperçant la rosace, tremblait sur le sol irrégulier. Des signes cabalistiques aux couleurs délicates et givrées des friandises en sucre filé, dansaient autour du cœur écarlate de la pastille. Leurs arabesques lentes traçaient sur les dalles l’insondable mystère des destinées humaines. Il entra dans le cercle magique de la rosace dont l’obscure vérité le recouvrit un bref instant d’un habit d’arlequin. Le visage tourné vers le faisceau de lumière, il s’immobilisa en son centre. Dans l’obscurité frémissante de l’église, le vitrail le transforma, de son doigt rouge et épais comme la chair voluptueuse des roses, en une colonne de sang ruisselante.

    Une brise nonchalante effleura le battant de la porte qui émit une plainte ténue. Le grincement des gonds le tira de la torpeur qui le menaçait. Il ouvrit les yeux et aperçut à travers l’ouverture, le monde – un bout de ciel lumineux, un pin luisant, les dalles poudreuses menant à l’église et, dépassant à peine d’un des battants, une rose rouge agitée par les souffles capricieux du vent. Il répondit à l’éclat du jour et échappa à la mélancolie diffuse de l’église. Sur le seuil, il mordit doucement les pétales épicés de la fleur qui s’offrait à lui et cueillit une rose encore en bouton, petite bouche carmin aux lèvres pincées.

    L’heure ardente avait passé. La lutte entre la fraîcheur de l’air et l’intensité du soleil s’était résolue en une douce caresse. La rose à la main, il se tourna vers la montagne. Sous l’ombre des pins, il jouit de la vigueur de ses jambes qui gravissaient sans effort les pentes escarpées, du bonheur de sentir s’effriter sous ses semelles les mottes de terre du chemin bordé d’herbes sèches et poussiéreuses. Au-dessus des champs baignés de lumière, les insectes flottaient, suspendus dans l’air telles de légères gouttes de bonheur toutes occupées à vivre leur frêle existence aussi intensément que possible. Il dépassa les derniers champs et monta à la grotte abritant la source. L’œil était là, limpide et bleu. Surplombant l’eau de toute sa taille, il laissa choir la rose en son centre. Gouttelette de sang délicatement ombrée de mauve, elle tournoya sur l’eau turquoise. Mais petit à petit, la tache rouge se détacha du fond azur qui ne fut bientôt plus qu’un lointain et pâle horizon. S’élevant toujours plus vers le regard qui la fixait, elle enflait démesurément. Il vacilla lorsqu’il sentit cette force ardente pénétrer son regard et submerger le monde d’un lourd voile rouge. L’instant d’après, la rose reposait à nouveau sur l’eau. Légèrement étourdi, il s’assit à l’entrée de la caverne à côté du ruisselet de larmes s’échappant de la source. Son torse puissant appuyé contre la montagne, le lourd bracelet d’argent encerclant son

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