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Le Globe-trotteur: Du pionnier nomade numérique au plus grand voyageur mondial
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Le Globe-trotteur: Du pionnier nomade numérique au plus grand voyageur mondial
Livre électronique308 pages4 heures

Le Globe-trotteur: Du pionnier nomade numérique au plus grand voyageur mondial

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À propos de ce livre électronique

« Dans l'ère pré-Covid-19, être un globe-trotteur numérique et se rendre dans tous les pays du monde semblait être à la mode, donc Ian est certainement sur une tendance » - Tony Wheeler, Co-fondateur de Lonely Planet

Le Globe-trotteur – Une histoire vraie à couper le souffle de dévouement, d’innovation et de persévérance dans le monde de l’entreprenariat et des modes de vies alternatifs. Un témoignage direct qui montre comment repousser les limites de la curiosité humaine vers de nouvelles frontières.

Qu’a-t-on à apprendre de plus de vingt années à barouder dans le monde entier, dix-sept d’entre elles à travailler sans interruption en tant qu’auto-entrepreneur du monde digital ? Imaginez à quel point votre vie pourrait changer si vous exploriez tous les pays du monde, soit 230 pays dont chacun des 195 reconnus par les Nations Unies. Imaginez ce qui pourrait aller de travers . Ceci est le récit d’un incroyable voyage seulement fait de points B, sans aucun point A. Dix-sept ans où la vie et le travail sont contenus dans un seul sac à dos, depuis les indispensables absolus pour avoir un minimum de confort jusqu’aux outils de travail nécessaires pour financer les voyages grâce à la magie d'un revenu passif. C’est l’histoire d’un homme qui s’était destiné à une carrière d’ingénieur, mais se trouvant gêné par la perspective d’une routine métro-boulot-dodo : le voilà qui déclenche l’instinct nomade, qui le pousse à choisir une vie où chaque jour est consacré à vivre, à expérimenter, et à respirer le doux parfum de la liberté d’une aventure ouverte sur l’horizon.

C’est le témoignage inspirant d’une sortie des routes toutes tracées, que nous avons toujours connues, vers des expériences de vie alternative. C’est une réflexion sur un niveau de liberté dont on peut jouir à partir du moment où l’on s’en donne le droit. C’est une soif de connaissances guidée par le désir profond de rencontrer ses pairs citoyens du monde, depuis la plus petite tribu jusqu’aux royautés, de l’Afghanistan jusqu’au Zimbabwe, par les voies terrestres, maritimes et aériennes. C’est un voyage motivé par le seul désir de rencontrer l’inconnu et de vivre chaque jour comme si c’était le dernier.

Renoncer à la sécurité et au confort de la civilisation occidentale n’est pas ce qu’il y a de plus intuitif. C’est l’histoire d’un éternel rêveur en quête de voyages, qui décide de se débarrasser de son diplôme fraîchement obtenu d’ingénieur pour se lancer sur un chemin de vie risqué et extraordinaire. Le concept même d’entrepreneur en ligne était encore inconnu, à l’époque où ce rêveur décida d’inventer un nouveau mode de vie et de brasser les cartes d’un nouveau jeu avec une organisation de nomade numérique pour financer son amour du voyage. Un périple qui le conduirait lentement mais sûrement dans l’intégralité des pays du monde.

Un si long voyage apporte avec lui quantité d’anecdotes juteuses et improbables. Sa manie de toujours s’immerger dans une région et de rencontrer des gens dans les situations les plus variées l’a amené à s’infiltrer dans des tribus en Afrique, au Moyen-Orient, et dans les Îles du Pacifique ; à rejoindre les rangs de communautés de surfeurs sur les littoraux les plus reculés, et même de partager des repas avec des nomades mongols autant qu’avec des ministres afghans. Son style de voyage très peu conventionnel l’a amené à naviguer sur les sept mers, dans des cargos comme dans des yachts, à traverser des frontières internationales en passant par des jungles à moto, et même à embarquer à bord de trains intercontinentaux pour des dizaines de milliers de kilomètres ; se confrontant, aussi, aux réalités d’un monde sans pitié, comme les horreurs de la guerre en Syrie, au Yémen, en Irak, échappant à plusieurs reprises aux terroristes.

C’est l’histoire d’un aventurier qui a des fourmis dans les jambes et une passion pour la vie.
LangueFrançais
Date de sortie1 sept. 2021
ISBN9789962137733
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    Aperçu du livre

    Le Globe-trotteur - Ian Boudreault

    SOMMAIRE

    Préface

    1 : Hors des sentiers battus

    2 : Apprenti nomade

    3 : La conquête du métro-boulot-dodo

    4 : Nomade numérique

    5 : Tout autour du monde

    6 : L'été sans fin

    7 : Projet WorldWide

    8 : Le Globe-trotteur Numérique

    9 : Le fabuleux périple vers la gloire

    10 : La fin du monde

    11 : Vision d’avenir

    À propos de l’auteur

    Autres titres par Ian Boudreault

    Appendice

    PRÉFACE

    Le monde ? Conquis !

    C'est phénoménal de pouvoir enfin faire cette déclaration ! En fait, j'ai eu la chair de poule en l'écrivant pour la première fois. Mais partager le fait que j'ai voyagé dans tous les pays du monde, soit 230 pays au total, y compris chacun des 195 pays reconnus par les Nations unies, n'est pas le but ultime de ce livre. Si tel était le cas, j'aurais certainement attendu la toute dernière phrase du dernier chapitre pour livrer ce précieux slogan. Au lieu de cela, j'ai décidé de l'annoncer le plus tôt possible, au tout début du premier paragraphe. C'est ma façon à moi de briser la glace sur ce sujet. De quoi bien lancer une conversation, pas vrai ?

    Atteindre le nombre de 195 pays n'a pas été la fin de mes aventures, mais plutôt un simple jalon dans un engagement à vie, dans le nomadisme. Alors pourquoi ai-je compté le nombre de pays où je suis allé si ce n'est pas si important pour moi ? Pour la seule raison qu'il s'agit d'un moyen de mesure, tout comme le mètre l'est pour le système métrique. Il ne s'agit pas d'une de ces histoires de soi-disant compteurs de pays qui mettent le pied dans chaque aéroport pour passer au suivant aussi vite que possible, dans le but d'obtenir un précieux record Guinness. Si tel avait été mon objectif, je n'aurais pas étiré mon exploration de toutes ces nations sur près de vingt ans, en faisant le tour du globe sans relâche et en appréciant non seulement de voir, mais aussi d'expérimenter au sein de différentes cultures, et de partager un temps précieux avec des personnes de tous horizons. Le véritable plat de résistance de toute cette histoire réside dans le périple lui-même, dans les décisions qui ont changé ma vie et qui m'ont fait passer du statut de simple garçon canadien suivant la trajectoire toute tracée de la vie, à celui de quelqu'un qui a soudainement refusé la facilité et a plutôt tenté de nouveaux chemins hors des sentiers battus. Ce moment clé m'a propulsé vers d'innombrables nouveaux horizons qui ont finalement forgé la personne que je vous présente aujourd'hui. 

    Tout cela peut sembler passionnant à entendre, mais malheureusement pour moi, tout n'a pas toujours été sans heurts. Heureusement pour mes lecteurs, ces cahots et ces obstacles inattendus ont permis de constituer une collection exhaustive d'épisodes dramatiques et passionnants qui ne manqueront pas de couper le souffle ! En fait, ce livre se lira surtout comme une fiction, même si je peux garantir que tout est vrai à 100 %.

    Lorsque j'ai créé mon blog The Digital Globetrotter, j'ai voulu aborder avec mes lecteurs deux notions clés qui sont ma spécialité, qui caractérisent ce que je suis, et dont je me fais l'écho dans ce livre. Tout d'abord, je voulais parler du concept de nomade numérique. En 2005, ce fut un pur pari lorsque je suis parti pour la première fois, à plein temps, en tant que nomade numérique, à une période où il y avait encore très peu d'opportunités de gagner sa vie en ligne, surtout en étant libre de tout lieu et en voyageant indéfiniment. Mon choix, précurseur à l'époque, n'a pas été aussi facile que de suivre les traces de votre influenceur préféré sur YouTube... La plateforme n'existait même pas encore ! Il s'agissait de choisir délibérément d'être un cobaye dans un tout nouveau domaine professionnel, d'apprendre par essais et erreurs, et de risquer une vocation d'ingénieur prometteuse pour les incertitudes de la vie sur la route. 

    Deuxièmement, The Digital Globetrotter concernait le globe-trotteur que je suis. Après avoir finalement les bases financières d'un voyage durable grâce à des revenus passifs en ligne, ma nouvelle liberté de mouvement m'a donné les moyens de réaliser un rêve d'enfant : celui d'atteindre les terres les plus lointaines, d'explorer en profondeur chaque pays de notre belle planète et de devenir l'homme qui a le plus voyagé au monde. Je vis toujours ce rêve, en remplissant au passage plus de dix passeports et en traversant plus de 2000 frontières internationales, avec pour seul objectif d'introduire autant d'expériences passionnantes que possible dans mon quotidien. Un style de vie qui tue la routine, une aventure passionnante après l'autre, ou comme j'aime l'appeler: mon été sans fin.

    Rassurez-vous, ce livre n'a pas été écrit comme une série de points présentant une liste de tous les pays où je suis allé. Il avait plutôt pour but d'aborder avec mon public plusieurs choix de vie délicats, en commençant par la façon dont choisir une vie alternative peut être fructueuse pour créer une existence unique et hors du commun. Après tout, on n'a qu'une seule vie... mieux vaut la vivre pleinement ! Ce livre n'est certainement pas un guide d'auto-assistance, mais il inclut à coup sûr ma rhétorique du coaching dans lequel je me suis engagé depuis tant d'années, que ce soit en personne ou par le biais de mon blog, pour aider les gens à sauter le pas vers ce mode de vie particulier. Depuis le tout début, j'ai fait de moi-même le sujet d'expériences face aux obstacles que ce style de vie peut imposer, et je suis enfin prêt à les transmettre à mon public par le biais des récits dans cet ouvrage..

    Que peut-on apprendre de presque vingt ans sur la route, dans une configuration purement minimaliste, seulement accompagné d'une unique petite valise ? Cette histoire démontre comment le fait d'envisager les choses avec simplicité et de se concentrer sur l'aspect humain de la vie peut créer des rencontres fascinantes au quotidien, où que l'on se trouve dans le monde.

    L'AUTEUR.

    Rio de Janeiro, 2021

    1

    HORS DES SENTIERS BATTUS

    (2013)

    « C’est ça, l’Afrique ! », me criait le chauffeur du taxi-brousse, comme si cela suffisait à expliquer l’absence totale de transport vers la frontière guinéenne ce jour-là. Ces trois petits mots avaient fait surgir en moi une impression de déjà-vu. J’avais déjà traversé vingt-huit pays sur le continent africain, et chacun d’entre eux avait une espèce d’habitude d’utiliser constamment la même expression pour tout. Si courte et pourtant si puissante. Comme si cela pouvait résoudre tous les problèmes, balayer d’un revers de la main le moindre souci, ainsi rendu de fait insignifiant. À ce moment-là, j’avais déjà retenu que lorsque surgissait le tout-puissant « C’est ça, l’Afrique ! », on se devait de l’accepter comme une solution viable et légitime, quel que fût le problème rencontré, et l’appuyer d’un court « Eh, oui... », puis passer à autre chose. C’est ce qui me plaisait tant sur ce continent : les défis permanents et la recherche perpétuelle de solutions aux problèmes.

    En tant qu’ingénieur, j’avais été entraîné pendant mon parcours universitaire au Canada à apporter une solution à un quelconque problème, peu importaient les circonstances. Cette compétence m’avait déjà bien aidé dans mes voyages : à ce moment-là, j’avais parcouru plus de soixante-dix pour cent des pays du monde. Les grands voyageurs savent qu’aucune grande école, aucune université, aucun diplôme ne peut vous préparer aux transports publics interurbains en Afrique. Il faut le vivre pour le comprendre ! Et ce d’autant plus, que moins de cinquante pour cent de leurs pays s'attendent à recevoir des touristes, et n'ont donc que très peu d'infrastructures prévues pour eux, si ce n’est aucune. La plupart sont uniquement prévues pour les Casques bleus, et pour les travailleurs des ONG, avec lesquels on me confondait souvent. Pour beaucoup d'Africains rencontrés sur mon chemin, c’était difficile de comprendre exactement les raisons qui poussaient un voyageur comme moi à visiter leur pays. Ils ne pouvaient pas savoir que c’est précisément le fait de surmonter tous ces défis qui rendait si palpitantes mes aventures africaines à mes yeux.

    Cela étant, je n'avais toujours pas de solution à mon problème immédiat. Il fallait absolument que je sorte de Guinée-Bissau si je voulais atteindre ma prochaine destination dans les temps. Cette fois-ci, c'était Conakry, en République de Guinée voisine. Ce pays était, avec la Guinée-Bissau, l'un des plus pauvres du monde. Mais le temps me manquait. On était à quelques jours de Noël, et je ne voulais pas rester coincé en Guinée-Bissau. Si j'attendais plus longtemps, cela compromettrait mon voyage vers une soi-disant plage paradisiaque appelée River N° 2 en Sierra Leone. Apparemment, c'était l'un des secrets les mieux gardés de l'Afrique et on m'avait promis une montagne de homards pour quelques centimes.

    C'était le lieu parfait pour oublier la solitude à l’idée de passer un autre Noël seul, loin de ma famille, dans l'un des endroits les plus reculés du monde. Le second objectif était de poursuivre mon voyage, par voie terrestre, à travers le Libéria, pour atteindre la Côte d'Ivoire à temps pour le réveillon du Nouvel An, où un ami m'attendait. C’était aussi la meilleure occasion que j’avais de pouvoir célébrer le commencement d’une nouvelle année dans toute sa splendeur, et en bonne compagnie.

    Apparemment, les taxis-brousse étaient bloqués « jusqu’à nouvel ordre » en raison des grèves et des barrages sur la route de la ville de Gabu, près de la frontière. Cela ne me surprenait pas vraiment. Et ce n'était certainement pas une raison valable pour empêcher la circulation sur la principale route du pays : les barrages routiers et les grèves étaient chose commune un peu partout en Afrique.

    À en juger par le ton de sa voix, je savais qu'il n’était pas en train de me raconter des mensonges pour essayer de faire monter les prix, quand il a marmonné : « Encore des protestations contre le gouvernement, apparemment. »

    C'était en décembre 2013. Les temps étaient durs en Guinée-Bissau. Le pays était en pleine crise politique, suite au coup d'État militaire mené par le général Kuruma, un an auparavant. À l’international, dans les médias, on l’avait surnommé « le coup d’État de la cocaïne », car on pensait qu'il était orchestré pour faciliter la narco-économie. Le pays cherchait désespérément à assurer son rôle d'intermédiaire dans le trafic de drogue entre l'Amérique latine et l'Europe.

    À l'époque, la Guinée-Bissau était le pire État narcotrafiquant d'Afrique. Pas moins de soixante pour cent de toute la cocaïne trouvée en Europe transitait par ce petit pays d'Afrique de l'Ouest. Il n’était pas difficile de comprendre que quiconque au pouvoir voudrait s’enrichir de l’argent de la drogue. En réalité, la seule chose qui me touchait en tant que voyageur était la corruption généralisée de tous ceux qui portaient l'uniforme, je devais rester sur mes gardes constamment, et toujours avoir à portée de main du liquide pour pouvoir payer des pots-de-vin, juste au cas où.

    Mais pour le moment, j’étais coincé. Il n’y avait que deux routes pour la Guinée. La première était fermée durant la saison des pluies. La seconde, nous y étions, et elle était bloquée par une grève, et si ce n’était pas à cause de cette grève, la route était de toute façon connue pour être l’une des pires d’Afrique (et probablement du monde). C’étaient sept cent kilomètres qui séparaient Bissau et Conakry, une distance qu’il fallait, au mieux, environ trois jours pour parcourir avec les transports publics. L’atroce route à moitié goudronnée était couverte de nids-de-poule, sans parler des barrages de police corrompue qu’on rencontrait tous les vingt kilomètres environ, et des innombrables vols sur la route. Le tout, installé dans le confort d’une voiture remplie par onze passagers pressés les uns contre les autres.

    Mon vieux guide périmé ne me donnait pas beaucoup d’informations, mais au moins elles étaient claires. De mémoire, il décrivait les choses ainsi : « Prévoyez trois jours pour faire le voyage. Le premier jour, prenez un taxi-brousse de Bissau à Gabu, passez la frontière et dormez à Koundara, prévoyez toute la journée pour parcourir la centaine de kilomètres, si les conditions sont bonnes. Le jour suivant, prenez un autre taxi-brousse de Koundara à Labé, comptez une autre journée complète de voyage. Enfin, le troisième jour, prenez le dernier taxi-brousse jusqu'à Conakry ». C'était terriblement lent, mais c’était aussi le meilleur des scénarios, si tout se passait bien. Les vieux taxis-brousse Peugeot 504 défoncés, étaient également connus sous le nom de « sept places », qui faisait référence au nombre de passagers qu’ils pouvaient transporter. En Guinée-Bissau, ils réussissaient miraculeusement à en faire tenir onze. Ils entassaient deux passagers à l'avant, trois sur le siège arrière, trois dans le coffre, et deux sur le toit. Il va sans dire que le niveau de confort était nul, et que cela rendait cette option de voyage encore moins séduisante.

    * * *

    Exaspéré par les derniers événements, je suis rentré à ma chambre d’hôtel pour me reposer et réfléchir à tout ça. Le ciel déversait des trombes d'eau, signe que la saison des pluies était décalée cette année. Cela voulait dire que les conditions de voyage par route seraient mauvaises pendant toute la durée de mon séjour en Afrique subsaharienne. J’écoutais la pluie tomber sur les tôles du toit de ma toute petite chambre d’hôtel un peu pourrie, qui m’avait coûté un bras—soixante-dix dollars la nuit—conséquence directe de la présence des forces des Nations Unies qui faisaient grimper les prix sur tout le continent.

    En plus de cela, je n’avais aucun accès à Internet. À dire vrai, j’avais l’impression que le pays tout entier n’avait pas d’Internet. Comment faire pour gérer mon entreprise en ligne, sans connexion ? Certains de mes sites Internet pouvaient facilement tomber en panne, et cela me rendait nerveux. Je n’aurais alors aucun moyen de réparer le moindre problème sur mes sites, et tout mon mode de vie de nomade numérique serait mis en péril. Car enfin, qu’est-ce qu’un nomade numérique sans Internet ? Un simple nomade. Et c’était une raison supplémentaire de quitter le pays aussi vite que possible.

    Il n'était pas question de prendre l'avion, car la plupart des vols avaient été annulés quelques jours avant mon arrivée. Une crise avait éclaté lorsque les autorités avaient menacé l'équipage d'une compagnie aérienne, le forçant à embarquer soixante-quatorze réfugiés syriens. Voilà comment la Guinée-Bissau gérait ses problèmes. En outre, je n’avais jamais considéré l’avion comme une option valable lors de mes voyages, car j'avais toujours été un aventurier, pas un de ces collectionneurs de pays, qui visitaient toutes les capitales du monde en sortant à peine de l’aéroport. À cette époque, j'avais déjà traversé deux fois le continent africain par voie terrestre, une fois par l'est, de l'Ouganda à l'Afrique du Sud en 2008, et une autre par l'ouest, du Maroc au Cameroun, en 2010, et cette fois encore, j’étais bien décidé à poursuivre mon voyage par voie terrestre.

    Retourner au Sénégal était la dernière option sur la liste. J’avais toujours redouté de devoir faire demi-tour, et de parcourir de nouveau le même chemin dans l’autre sens : c’était hors de question. Faire demi-tour, dans mon esprit, était la démonstration d’un échec cuisant. Je n’avais pas traversé 141 des 195 pays du monde pour abandonner et faire demi-tour, ça, c’était non ! Ce n’était pas ce que la vie m’avait appris. La seule façon dont j’envisageais les choses, c’était de continuer à avancer, à tout prix. Je me fichais bien des difficultés à surmonter tous les obstacles surgissant sur mon chemin. En termes d’obstacles, j’avais acquis une certaine expérience à travers les années, et j’avais toujours trouvé comment les surmonter, et comment continuer à aller de l'avant.

    La décision m’apparaissait, claire. J’allais devoir y retourner et me sortir de cette situation pitoyable en discutant avec un conducteur de taxi-brousse. Il allait falloir que je le convainque de m’amener à la frontière, peu importait ce qui nous attendait sur la route. Dans l’instant, j’ai fait mes bagages, quitté ce terrible hôtel, et je me suis retourné vers l’arrêt des taxis-brousse, en ayant conscience qu’il n’y aurait pas de retour possible cette fois. J’allais faire en sorte que cela fonctionne, même si je devais payer plus cher, même si cela signifiait ne pas pouvoir manger tous les soirs des prochains jours. Dans le pire des cas, je me disais que j’irais en stop ou bien je marcherais, tout simplement. Quoiqu’il en soit, j’allais trouver une solution pour me sortir de ce mauvais pas.

    * * *

    Le chauffeur était encore là et cette fois, il avait l’air de faire face aux autres passagers souhaitant voyager, dans un vrai chaos. J’avais appris à parler portugais au Brésil alors que j’y poursuivais mon aventure de nomadisme numérique, et cette compétence me permettait de négocier avec les Guinéens, sur place, ce qui aurait été parfaitement impossible à faire en anglais, et m’aurait conduit vers un échec complet.

    « Même si tu me payes plus, il faudra bien que je remplisse la voiture avec les autres passagers qui voudront bien prendre le risque d’y aller ! », me disait le chauffeur notoire. « À moins que tu ne réserves toi-même toutes les places, il n’y a aucune chance que tu sortes du pays aujourd’hui, mon ami. Sinon, tu peux aussi bien prendre la route du nord, vers le Sénégal. Ou bien même… tu peux prendre la piste à travers la jungle, au sud. » Une solution qui sortait de l’ordinaire : exactement ce dont j’avais besoin !

    « À travers la jungle dis-tu, vraiment ? », répondis-je.

    « Non, je plaisantais », répondit-il, ajoutant : « Et même si tu pouvais traverser la jungle par une piste, ou par le fleuve, tu te ferais dévorer par les cannibales. » Ses épaules ont tressauté, et si le ton de sa voix n’était pas clair, son expression disait assez bien son sarcasme.

    « Des cannibales, hein ? »

    Il plaisantait encore, mais ça m’avait percuté comme un grand coup de poing dans le ventre. Soudain, des images d’un dessin animé de mon enfance revinrent, Un régal de cannibale, des Looney Toons, qui passait à la télévision. Je m’imaginais parfaitement dans une grosse marmite, au-dessus d’un feu de camp, au beau milieu de la jungle guinéenne où des cannibales danseraient tout autour de moi, mijotant tout tranquille, une tomate dans la bouche ! Heureusement que c’était seulement mon imagination qui me jouait des tours. La présence de cannibales n’avait jamais été attestée dans cette région, et les seuls peuplades cannibales vivaient plus au sud, à environ quatre cents kilomètres, au Libéria. Je préférais croire que leur existence n’avait jamais été découverte.

    Puis je me suis souvenu d’articles, que j’avais lus, sur l'histoire de la Guinée-Bissau, selon lesquels on savait très peu de choses sur la jungle à l'intérieur du pays. De fait, même si les colonisateurs portugais ont dirigé le pays pendant des centaines d'années, y possédant des comptoirs commerciaux depuis le XVIe siècle, ce n'est qu'au XIXe siècle qu'ils ont finalement envisagé d'explorer certaines zones de l'intérieur pour la première fois, grâce au vaste réseau de voies navigables. Les dirigeants africains locaux étaient responsables du commerce africain dans la région, et ne permettaient pas aux Portugais de se déplacer librement ailleurs que dans deux villes : Bissau et Cacheu. Les jungles du sud de la Guinée-Bissau étaient en grande partie laissées à l'état sauvage, et demeurent, encore aujourd'hui, un territoire inexploré.

    Alors que je cherchais encore comment convaincre le chauffeur de m’amener à la frontière, un homme surgit miraculeusement de la foule, et me cria : « Je peux t’aider ! Mon frère peut t’emmener à Conakry sur sa moto, en passant par la jungle, en seulement deux jours ! » Cette fois-ci, je n’avais pas l’impression que c’était une blague, et aussi fou que cela ait pu paraître, je pris sa proposition au sérieux.

    « Vraiment ? Mais comment ? Et pour combien ? », m’exclamai-je. « On peut tenir à deux sur une moto avec mes deux gros sacs à dos ? »

    « Pas de souci. J’emmène ma femme et mes trois enfants sur la mienne, alors ce n’est vraiment pas un problème », me rassurait-il.

    Dans le quart d’heure, il avait appelé son frère, Paulo, et lui avait demandé de venir négocier l’accord avec moi, pour mon voyage à travers la jungle guinéenne. Ce plan, qui n’en était pas vraiment un, était franchement mauvais ! Ça ressemblait davantage à une solution de dernier recours, complètement désespérée. En gros, l’idée était de rouler à l'arrière d'une vieille moto japonaise de cent chevaux, avec mon sac à dos de vingt kilogrammes calé sur son guidon, et sur mon dos, mon second sac de dix kilogrammes, contenant toutes mes affaires de bureau et mon ordinateur. Ensuite, nous devions parcourir deux cent cinquante kilomètres lors d’un parcours à travers une forêt très dense, traverser quelques rivières et lacs, pour finalement passer la frontière et avec un peu de chance, arriver à Boké, du côté de la République de Guinée, avant la nuit. Il m’expliqua que l'avantage de cette solution, c’était que si jamais certaines routes étaient bloquées par des coulées de boue ou des crues de rivières, il existait des pistes dans la jungle, tracées par les locaux, pour relier les différents villages entre eux, qui formaient un réseau alternatif. Mauvais plan ! m’auriez-vous fait remarquer, si j'avais essayé de vous convaincre de l’accepter. Mais au vu des circonstances, c'était la meilleure solution qu'on m'ait présentée depuis des années !

    Le risque était considérable. Les rapports faisant état de la présence de bandits de grand chemin prospérant dans le pays, et moi je plaçais toute ma confiance en ces hommes que je venais de rencontrer. J'aurais facilement pu être kidnappé au beau milieu de la jungle, me faire voler mes affaires et être enterré dans un fossé sans que personne n’entende plus jamais parler de moi. Toute trace de moi aurait été à jamais perdue au milieu de nulle part, dans la jungle d’un État narcotrafiquant.

    Ce qui me surprenait plus que tout, c'était que malgré toutes mes aventures, ce type de situation était totalement nouveau. Et voilà que je me retrouvais à contempler la possibilité de poursuivre droit mon chemin, hors des sentiers battus, dans des régions de cette planète qui n’avaient peut-être jamais été visitées par un Occidental auparavant. Pas même par les colonisateurs portugais, présents dans le pays pendant quatre siècles. Tout à fait ironiquement, quelques semaines auparavant, j'avais été contacté par un journaliste de l'un des plus grands journaux canadiens, pour participer à une série d'articles sur les plus grands voyageurs québécois de l'histoire. J’étais classé second, parmi plus de trois cents candidats. Avec cent quarante-sept pays visités à mon compteur, au moment de la publication quelques mois plus tard, cela comprenait environ trois quarts des pays de la planète. N'eût été cet article, qui m’avait demandé de quantifier le nombre de pays où j’avais été, je n'aurais jamais su exactement combien de pays j’avais visités jusqu'alors. Bien sûr que j’avais envisagé de devenir l’homme ayant le plus voyagé au monde, mais quantifier cela était difficile, et mon objectif était avant tout de barouder sur le plus de routes possible, de faire le plus de rencontres possible, et d'apprendre ainsi le plus de choses possible. C’était mon état d’esprit qui m’avait suivi pendant ces dix dernières années de voyage ininterrompu.

    Voyager simplement pour le chiffre, ce n’était pas mon truc. Si c’était vraiment cela l’objectif, j’aurais pu terminer mon tour du monde en deux ans, en ayant été dans tous les pays ; certains l’ont fait d’ailleurs, en sortant à peine des aéroports. Mais quel est le but d’avoir cent quatre-vingt-quinze livres dans sa bibliothèque s'ils ne sont jamais même ouverts ? Bien sûr, ça fait joli d’avoir une bibliothèque pleine de livres, mais s’ils n’ont jamais été lus, alors ils sont simplement là pour

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