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Ce jour-là, tu seras libre...
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Ce jour-là, tu seras libre...
Livre électronique167 pages1 heure

Ce jour-là, tu seras libre...

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À propos de ce livre électronique

Durant vingt ans, je me suis interdit d'aimer Claudine, ma fille née d'une aventure d'un soir. Un jour, j'ai dévoilé son existence à ma femme Hélène qui m'a pardonné et encouragé à la retrouver: « Le jour où tu diras ouvertement que tu as quatre enfants, tu seras libre! » Pour la retrouver et me pardonner, j'ai dû faire le plus long des voyages, celui qui mène de la tête au coeur.

Dans un dialogue ouvert avec ma fille et un voyage au coeur de moi-même, j'ai revisité les événements entourant nos retrouvailles et les émotions qui les ont habités. Je lui ai fait connaître le Témiscamingue de mon enfance et lui ai présenté ses grands-parents et ses ancêtres, des faiseurs de pays.

C'est une histoire qui passe par les sentiers du pardon et de l'amour. Si, par la lecture de ce livre, un père absent se libère de sa culpabilité et de ses remords, je n'aurai pas écrit en vain.
LangueFrançais
ÉditeurPerformance
Date de sortie18 nov. 2015
ISBN9782924412886
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    Aperçu du livre

    Ce jour-là, tu seras libre... - Claude J. Melançon

    Lamarche

    LA NAISSANCE

    Il y a une faille en toute chose;

    c'est ainsi qu'entre la lumière.

    – Leonard Cohen

    Claudine a accouché par césarienne de deux filles. Elle est resplendissante de bonheur et de santé. Autour de son lit, nous sommes quatre : sa mère Odette et son conjoint Jean, ma femme Hélène et moi-même. Tout le monde est heureux. Odette m'embrasse sur la bouche. J'ai le sentiment que ce baiser a une odeur de pardon.

    Charlotte et Camille sont en bonne santé. Elles ne sont pas identiques. Tant mieux pour elles! Charlotte est blonde. Camille est brune. Je les ai prises dans mes bras et le bonheur m'a pris dans les siens. En les serrant contre moi, une larme a coulé et une idée m'est venue. Celle de raconter ma relation avec leur mère Claudine et leur grand-mère Odette. Reprendre aussi la route qui m'a conduit jusqu'à elles… jusqu'à moi.

    Écrire pour visiter et mieux comprendre ce territoire intérieur où ma relation avec Claudine a vécu depuis plus de quarante ans. Notre histoire appartient déjà à l'univers, plus totalement au mien. Je veux mieux me connaître tout autant que bien reconnaître. C'est le défi d'apprivoiser l'essentiel en me connectant au sismographe de la mémoire du cœur.

    Dès le lendemain, je commence à recueillir des idées et de l'information pour réaliser ce projet. L'haleine du passé souffle très fort sur les braises de ma mémoire. Elle allume des incendies d'émotions qui envahissent mes nuits. Je dois apprendre à m'y retrouver. Je ne sais pas écrire, du moins pas sous la forme d'un roman ou d'une autobiographie.

    J'ai beaucoup écrit dans l'exercice de ma profession d'avocat qui s'est échelonnée sur quelque quarante ans : requêtes, mémoires, contrats, et j'en passe. Des documents pour convaincre, protéger, informer, non pour toucher ou divertir, comme doit le faire le genre d'écrit que je commets ici. J'ai dû délaisser la raison.

    J'ai rechargé ma plume à l'encre du cœur qui, parfois, se mêlait à celle des yeux. J'ai jeté des centaines de pages au rebut avant de pouvoir m'initier à cette nouvelle forme de dire. Je soumets humblement aux lecteurs les résultats de mon laborieux apprentissage. Les mots sont des tyrans dont je ne suis que l'humble serviteur.

    Pour écrire cette page de vie qui me lie à Claudine, il me faut avoir son accord. Elle accepte en disant qu'elle me fait totalement confiance. Et puis, elle a fait face au supplice des longs interrogatoires sur son vécu. Des questions qui suscitent rires et joies, autant qu’émotions et sanglots. J'ai beaucoup appris d'elle et tout autant de moi.

    J'ai maintenant soixante-dix ans et de la neige dans les cheveux. Elle a quarante-quatre printemps.

    Je l'ai vue quelques fois après sa naissance et je l'ai retrouvée lorsqu'elle avait dix-neuf ans. Depuis, elle fait partie de ma vie. Il y a un abîme de deux décennies à scruter et à combler.

    C'est fou ce que le temps se rétrécit lorsqu'on regarde derrière soi. Mon passé me convoque. Je me suis promené dans la galerie des souvenirs. Je ne savais comment les relater ni par où commencer. Je devais faire le tri. Surtout être vrai. Je fais œuvre de me souvenir d'un hier que je ne voulais pas être le mien. Je dois prendre congé de ma pudeur. J’ai souvent pensé à ces hommes absents de la vie de leurs enfants. Pour cause de travail, de divorce ou toute autre raison, les empêchant de vivre avec la mère de leur progéniture. Au-delà du mutisme ou de leur désintérêt de façade, je sais leur souffrance, celle de la culpabilité.

    Je ne peux décrire tous les événements de cette époque où je fus absent. Cependant, je peux dire ma vie et les émotions qui l'ont alors habillée. C'est une zone d'ombre impossible à dissimuler. Elle est maintenant envahie par tant de lumière.

    Si, grâce à la lecture de ce livre, un père longtemps absent se libère de sa culpabilité ou de ses remords, je n'aurai pas écrit en vain.

    Le passé frappe à ma porte.

    Ce temps s'était absenté de moi

    Ou plutôt, c'est moi qui en étais absent.

    Il peut bien se passer de moi, le temps,

    Mais je ne peux me passer de lui.

    Je l'ai fait attendre.

    Il m'a assez attendu.

    À défaut de le rattraper,

    Je peux le reconstituer.

    Tu m'y as aidé.

    Quel étonnement! Je constate que cette absence m'a séparé encore plus de moi que de toi. J'avais cru bien me connaître et avoir identifié toutes mes émotions dans cette longue traversée du désert qui m’a mené jusqu'à ta porte. C'est une illusion que la magie de notre relation harmonieuse depuis vingt-cinq ans avait occultée. Dans cette aventure qu'est la vie, je connais beaucoup de choses au sujet de moi, mais est-ce que je me connais vraiment?

    Cet interrogatoire, je ne te l'ai pas uniquement fait subir, je me le suis aussi imposé sans complaisance. Je croyais savoir. Quand on sait, on a déjà la réponse. C'est la question qui permet de voir toutes les réponses possibles dans un rayon de trois cent soixante degrés. Sa lumière permet de scruter toutes les zones d’ombre qui cachent si souvent ces régions fertiles du cœur qu’aucune piste n’avait jusque-là sillonnées. Sa pertinence se mesure à l’impact qu'elle crée chez le répondant. J'ai dû reprendre à zéro. J'ai bulldozé toutes mes certitudes pour découvrir les assises sur lesquelles elles reposaient.

    La vérité est une région sans route. J'ai effacé tous les sentiers balisés de mon domaine. Je suis reparti avec, comme seule boussole, l'engagement clair qu'un soir j'avais pris envers toi : celui de toujours te soutenir et de ne jamais te donner tort.

    J'ai eu parfois l'impression que j'allais trop vite dans cette enquête menée sur ton enfance et ton adolescence, périodes de ta vie où j'étais absent. Tu répondais avec une franchise désarmante, sans éluder les questions ou masquer l'émotion qu'elles suscitaient. Tu fouillais dans ta mémoire pour relier tes souvenirs à la réalité. Tu voulais surtout te rappeler comment tu avais vécu certains événements. Tu te méfies de tes croyances. Tu t'es livrée à cette introspection sans baisser les yeux, le cœur à découvert. Striptease inspirant!

    En t'écoutant, j'ai pu m'écouter. Les mots qui ont alors jailli et que j'ai couchés sur papier m'ont appris de moi ce que je voulais identifier depuis longtemps, mais que je n'identifiais pas encore. Comme le dit si bien Dany Laferrière : « J’écris pour prendre des nouvelles de moi. »

    J’ai appris de nos silences

    Autant que de tes mots.

    Avec toi, le passé revisité

    N’étalait plus ses maux.

    Il avait troqué ses ombres

    Pour des îles de lumière.

    Notre histoire serait banale,

    Simple suite d’événements,

    Si on ne peut lui donner un sens

    Par un fil conducteur

    Qui me relie à toi,

    Qui me rallie à moi,

    À l’homme de tous les temps

    Et de tous les vents.

    Si tu le veux bien, nous allons refaire ensemble ce périple qui mène jusqu'à nous.

    HÉLÈNE

    Au plus profond de l'hiver,

    j'ai finalement compris

    qu'en moi subsiste un été invincible.

    – Albert Camus

    La nuit vient de descendre son grand rideau gris sur les montagnes appalachiennes de l'État de New York ceinturant le site de retraite où nous passons six jours, Hélène et moi.

    Les étoiles intimes, presque humaines, recouvrent la vallée comme un ciel de lit et invitent à la confidence. Nous marchons bras dessus bras dessous dans ce décor enchanteur, après une longue session de partage sur le thème de la sexualité. Soirée dirigée par un animateur d'Éducation Landmark.

    Dans un petit groupe, je viens de partager pour la première fois que j’ai quatre enfants; trois avec Hélène et aussi un quatrième dont elle ne connaît pas l'existence. Pas plus d'ailleurs que ma famille et mes amis. Je déchire le linceul d'un long silence.

    Arrivés à notre chambre, j'avoue timidement à Hélène l'existence de Claudine, alors âgée de dix-huit ans.

    Je lui demande pardon pour lui avoir caché cette réalité durant toute notre relation, soit depuis seize ans. Hélène est interloquée. Après un moment de mutisme, elle me demande son nom et me pose quelques questions de repérage. Et nous nous endormons sur un silence. Le lendemain matin, à la cafétéria, elle exige de déjeuner en tête à tête. Aussitôt assise, elle déballe en quelques phrases son irritation devant mon manque d'inté grité : « Tu m'as prise pour une dinde. Je ne t’ai jamais menti sur mon statut. Je ne suis plus mariée à toi. »

    Elle ajoute : « Tu seras un homme libre le jour où tu diras ouvertement que tu as quatre enfants. Claudine est là pour le plus grand bonheur de tous. Si tu veux la retrouver, tu peux compter sur moi. Je m’engage à te soutenir dans ce projet. » Après une pause : « Malgré tout, je t’aime et je vais te remarier pareil. » Par la suite, Hélène ne m’a jamais fait de reproche à ce sujet.

    Par sa réaction, elle fut la goutte de rosée sur la fleur timide qui s'ouvrait à la possibilité d'éclore au soleil.

    Ce jour-là, j'ai épousé Hélène pour la troisième fois puisque je l'avais déjà mariée une première fois civilement et une seconde,

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