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L'enveloppe du Sanglot
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Livre électronique95 pages1 heure

L'enveloppe du Sanglot

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À propos de ce livre électronique

« Dans nos vies des rencontres infimes, indicibles, incompréhensibles viennent percuter et parfois troubler nos logiques terriennes. Nous sommes touchés ou pas, nous nous arrêtons ou pas, nous entendons ou pas, nous relions ou pas.
Cet écrit raconte un chemin de vie traversé, comme tout un chacun, par ces rencontres étranges que certains nomment coïncidences, hasards ou synchronicités. »
LangueFrançais
Date de sortie20 juin 2023
ISBN9782312133980
L'enveloppe du Sanglot

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    L'enveloppe du Sanglot - Maud Roy

    cover.jpg

    L’enveloppe du Sanglot

    Maud Roy

    L’enveloppe du Sanglot

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    Du même auteur

    L’Homme digéré – 2013 – Les Editions du Net

    Palette – 2014 – Les Editions du Net

    Entrez les artistes – 2020 – Les Editions du Net

    Photo de couverture : Anne Duquesne

    © Les Éditions du Net, 2023

    ISBN : 978-2-312-13398-0

    À vous Christian Bobin

    Pour votre indéfectible présence

    Vos lectures attentives

    Votre sourire d’encre

    Votre reconnaissance

    Merci

    « Le hasard n’est que la mesure de notre ignorance »

    Alfred Capus

    « Il est parfaitement concevable que la splendeur de la vie s’offre à nous et toujours dans sa plénitude, mais de manière voilée, enfouie, invisible, très distante.

    Pourtant elle est là, ni hostile, ni malveillante, ni sourde.

    Qu’on l’invoque seulement en prononçant le mot juste, le nom juste, et elle viendra.

    Telle est l’essence de la magie, qui ne crée pas mais invoque. »

    Franck Kafka, journal (1921)

    « Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience » écrivait René Char. Et je pense à ces pierres lancées dans l’eau par chaque enfant que nous sommes nous laissant méditatifs au vu de ces vagues concentriques qui s’estompent lentement.

    Il y eut un objet, un geste, un regard, puis tout semble se dissoudre… Semble.

    Ainsi dans nos vies des rencontres infimes, indicibles, incompréhensibles viennent impacter et parfois jeter le trouble dans nos logiques terriennes. Nous sommes touchés ou pas, nous nous arrêtons ou pas, nous entendons ou pas, nous relions ou pas.

    Cet écrit raconte un chemin de vie traversé, comme tout un chacun, par ces rencontres étranges que certains nomment coïncidences, hasards ou synchronicités.

    Nos voies multiples sont sans doute pavées de ces lueurs discrètes qui ne demandent, peut-être, qu’à vivifier notre étonnement.

    Parfois l’éclat est fulgurant et l’ouverture chavire…

    De l’autre côté du jardin, le tissu blanc trace des mouvements sur le carreau de la maison voisine. Je devine la main. Le blanc est flamboyant. D’un côté le soleil sur la vitre, de l’autre le tissu blanc ; la main, la cuisine, le chien, la femme, la table, la nappe d’odeurs qui s’effiloche.

    Dans le jardin, le pommier darde ses dernières feuilles rousses sous un ciel noirci. Un merle s’y pose, la branche imprime le mouvement, l’oiseau s’envole. L’écorce striée de gris accroche la chaleur des ocres lisses. Lumière plantée dans le bleu. Tableau insaisissable. Faut-il seulement regarder les effets du soleil sur les êtres et les choses, la mousse pommelée du toit, le couple de mésange dans les chatons du saule ?

    Il y a tout cela que je peux toucher des yeux, de la pulpe de mes doigts, du frisson de ma peau. Il y a ce vent que je peux boire à pleine bouche. Il est dedans, dehors à creuser ma poitrine mais il court, invisible, du saule qui prie le ciel, à ce merle qui plie la branche et ce blanc flamboyant sur la vitre.

    Et puis, circulant dans et hors ce « il y a », la densité invisible, foisonnante, impalpable, irraisonnable, dépliant, déployant, agenouillant. Trop, c’est trop.

    « Je ne suis pas digne de te recevoir mais dit seulement une parole et je serais guéri »

    Quelle est donc cette parole ? Qui et que guérirait-elle ?

    Se cogner la poitrine à coups d’humilité, s’enfoncer les yeux dans la terre, avaler la poussière histoire de se rappeler que nous retournerons poussière.

    Et puis, « Il y a » se déchire. Mains ouvertes pour recueillir un fragment de compréhension, la vie entrevue est trop vaste. Marcher pieds nus, sentir le sol affûter le quotidien avec componction. Rester de ce monde. Pouvoir écouter les hommes, résister à l’ouverture qui chavire.

    Mains ouvertes pour comprendre ce que j’ai à faire entre la misère, la mésange, le souffle qui écarte mes entrailles, déchire mon esprit, m’agenouille.

    À qui dois-je m’adresser ? À cette feuille qui se rend, à ce duvet qui flotte, au piaillement de l’oiseau, à l’ami, à l’enfance, au contrat des hommes, aux projets ciblés, à la cloche qui tinte, aux rêves, à mes parents perdus, aux souvenirs qui frappent, aux anges, à Dieu, à qui ?

    La femme était agenouillée au pied de mon lit. Elle portait une jupe écossaise plissée. Cette jupe ressemblait à celle de ma mère mais la femme qui était là en pleine nuit dans ma chambre, agenouillée au pied du lit n’était pas ma mère.

    J’ai enfoui ma tête sous les draps réfléchissant vite. Nous sommes la nuit, qui est cette femme, c’est impossible ?

    J’ai ressorti ma tête lentement pour vérifier. La femme était toujours là, les mains jointes en attitude de prière au pied de mon lit. Je me suis enfouie définitivement la tête. Ne plus bouger, retenir sa respiration. Se dire, demain lorsque je raconterai cela, maman me dira : « tu as sûrement rêvé » et moi je lui répondrai « non puisque j’ai été capable de me dire tout cela puisque je pensais aux paroles que tu pourrais me dire ». Tout ce raisonnement servirait la preuve que je ne dormais pas.

    J’ai rigidifié mon corps, j’ai attendu immobile le sommeil.

    Le lendemain matin j’ai demandé à ma mère :

    - – Tu es venue dans ma chambre cette nuit ?

    - – Non, m’a-t-elle répondu.

    Alors j’ai expliqué ce qui m’était arrivé. Elle m’a écoutée puis m’a dit : « Tu as sûrement rêvé. »

    J’ai eu beau redéployer ma logique nocturne, rien n’y fit.

    J’avais 9 ans.

    À cette époque, je recommençais à manger.

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