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Lettres empoisonnées
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Livre électronique112 pages1 heure

Lettres empoisonnées

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À propos de ce livre électronique

Trois lettres, trois destinées. Dans chacune des nouvelles, un personnage reçoit un courrier qui ravive une douleur enfouie, intime, parfois insoutenable. Chaque lettre agit comme une faille qui s’ouvre, révélant les fragilités propres à chacun. Leurs réactions, modelées par leurs histoires personnelles, tracent des chemins divergents : l’un résiste, l’autre chancelle, un troisième cherche un sens. Ainsi se dessine un triptyque sensible sur la façon dont la douleur s’insinue, se vit, et parfois, se dépasse.

 À PROPOS DE L'AUTEUR

Nourri par un riche parcours professionnel et social, Anas Boutchich a toujours cheminé aux côtés de la littérature, qui l’a accompagné tout au long de son itinéraire académique. Après Une histoire inachevée, il revient avec ce second ouvrage.
LangueFrançais
ÉditeurLe Lys Bleu Éditions
Date de sortie11 août 2025
ISBN9791042270575
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    Aperçu du livre

    Lettres empoisonnées - Anas Boutchich

    L’égarement

    1

    Les rideaux étaient fermés, la porte de la chambre aussi.

    J’étais dans un noir absolu.

    Il était presque minuit et cela faisait près de deux heures que j’essayais désespérément de dormir. Je fermais les yeux, regardais un noir encore plus sombre, prenais un grand souffle, et essayais de m’éloigner de la conscience. À chaque fois, c’était un échec. D’ailleurs, cela faisait plus d’un an que la même chose se répétait jusqu’à ce que l’insomnie de tous les jours devienne une routine.

    À un moment de cette nuit, je me suis levé et j’ai allumé la lampe.

    Dans la chambre à coucher, il y avait un canapé que j’avais acheté exprès pour m’asseoir à cette heure-ci de presque tous les jours. Après m’être levé, j’ai pris un verre d’eau puis je me suis assis sur le canapé. La lumière venant du plafond était tellement forte que mes yeux s’ouvraient de plus en plus, causant un mal profond à mon cerveau. J’ai alors éteint la lampe et allumé la bougie qui se trouvait sur la table de chevet.

    Assis, je me suis mis à penser et comme à chaque fois, la seule chose qui me venait en tête était la scène que j’ai vue deux ans de là. Comme toutes les fois, ma tête commençait à tourner anarchiquement comme pour donner naissance à ce mal de tête qui venait quelques secondes plus tard. Comme toutes les fois, je me hâtai d’ouvrir le tiroir de la table de chevet, agenouillé par terre, la main droite sur ma tête et l’autre cherchant la boîte blanche que je sortais d’habitude. Mais cette nuit-là, ma main gauche sortit la boîte noire.

    Lorsque j’ai vu la couleur de la boîte, je me suis rassis par terre, le dos contre la table de chevet et la main droite toujours sur ma tête. Je restai quelques minutes à regarder la boîte noire puis d’un geste instantané et brutal, je la jetai. Je me hâtai par la suite à me retourner vers le tiroir et lorsque ma main gauche s’y est glissée, je sortis la boîte de manière déraisonnée. Dans la boîte, il y avait mon médicament que je prenais dans de pareilles circonstances. Lorsque j’ai avalé la gélule, le verre d’eau me paraissait si lointain que je ne pouvais aller le prendre. Me contentant de ma salive pour pousser la gélule dans l’œsophage, je me suis allongé par terre en regardant au plafond les images que le mouvement de la flamme de la bougie produisait.

    Puis, sans le sentir, je me suis endormi.

    2

    Le lendemain, lorsque nos yeux se sont croisés, je n’ai pas pensé aux mots bleus qu’elle allait prononcer quelques jours plus tard. Lorsque nos yeux se sont croisés, je lui ai souri, mais ce sourire pourtant sincère ne ressemblait pas à celui que j’allais lui faire quelques jours plus tard.

    C’était un matin d’hiver, il faisait froidement triste alors que mon esprit ne survivait que par l’espoir du printemps qui allait venir. Cet hiver-là était triste parce que j’étais solitaire dans une solitude qui sentait la mort. L’hiver est fait pour être vécu à deux. C’était donc un matin d’hiver et la grisaille obscure m’inspirait un chagrin peuplé de désarroi. Je me réveillais dans le noir et me couchais dans le noir. Entre les deux, je vivais dans cette grisaille. Ce matin-là devait ressembler à tous les autres matins de cet hiver. Il devait être ennuyeux.

    Pour aller au bureau, je prenais le train. Ce matin-là, comme tous les autres, j’ai pris le train. Durant le trajet, j’étais habitué à écouter de la musique. Les matins d’hiver sont faits pour écouter de la musique. Il pleuvait ce matin-là et comme j’étais seul, je n’aimais pas lorsqu’il pleuvait. La pluie est faite pour être partagée. On est mieux à deux sous la pluie que tout seul. Dans le train, écoutant la chanson « November rain » même si on était en janvier, je regardais la pluie à travers la fenêtre du wagon. Et puis, je ne me sentais plus seul. La musique est une compagne qui fait du bien.

    Lorsque je suis arrivé à la gare, il pleuvait encore, mais je n’avais pas de parapluie.

    Comme la pluie est faite pour être partagée, j’ai gardé ma compagne dans mes oreilles. Le bureau était à un peu moins de dix minutes à pied de la gare. Alors, je me suis choisi « Stairway to heaven » comme compagne.

    En arrivant au bâtiment de l’entreprise, j’étais mouillé comme si je sortais de la douche. Alors, je me suis directement dirigé vers mon bureau pour prendre la serviette que je laissais pour une quelconque circonstance. On est mieux lorsqu’on est deux à être mouillés que tout seul. J’ai pris la serviette et je suis allé à la salle de bain pour me sécher.

    Après avoir fini le séchage, je suis allé chercher mon café de ce « matin d’hiver » à l’espace de partage comme on l’appelait. Mais le café des matins d’hiver est fait pour être partagé.

    J’étais seul dans l’espace de partage lorsque j’ai commandé un expresso à la machine. Il faisait froidement triste et seul, j’entendais un silence assourdissant. Quelques instants plus tard, le silence s’interrompu et comme des secouristes de l’âme, quatre personnes apparurent.

    Elle était parmi les quatre. Elle était une secouriste parmi ces quatre. Mon regard croisa d’abord le sien et il se tourna ensuite vers les trois autres. Dans cet espace, il y avait désormais elle et moi, et puis les trois autres. À leur arrivée, le silence partit soudainement pour que les dialogues prennent place. Moi, je ne disais rien. Elle, non plus. Je me contentais d’écouter les autres, les trois. Elle, aussi. Seul, moi, et seule, elle, écoutions les autres, les trois. Et puis, nos regards se croisèrent. Lorsque nos yeux se sont croisés une deuxième fois, je n’ai pas pensé aux mots bleus qu’elle allait prononcer quelques jours plus tard. Lorsque nos yeux se sont croisés, je lui ai souri, mais ce sourire, pourtant sincère, ne ressemblait pas à celui que j’allais lui faire quelques jours plus tard.

    C’était un matin d’hiver. C’était un mardi d’hiver.

    3

    Elle avait des yeux de lynx. Son sourire était machiavélique. Ses cheveux étaient « princessement » coiffés. Elle était d’une sveltesse idéale et d’une élégance remarquable. Lorsqu’elle souriait, le paysage autour d’elle changeait. Et lorsqu’elle riait, l’attention des Autres se perturbait. Sa manière de marcher était aussi remarquable, inimitable. Son corps, animé, était artistiquement parfait. Elle incarnait ce qui n’existait pas encore. Elle incarnait un art que je ne connaissais pas encore. Elle était le huitième art. Jusque-là, tout ce

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