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Livre électronique224 pages3 heures

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À propos de ce livre électronique

Une femme mariée qui a un amant. Rien de bien exceptionnel… Elle meurt dans un banal accident de voiture. Le mari découvre sur son ordinateur qu'elle entretenait une relation extra conjugale. Il décide de se venger par mail et il s'ensuit…
LangueFrançais
Date de sortie20 mars 2012
ISBN9782312006369
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    Aperçu du livre

    vengeance@.com - Louis Jonval

    978-2-312-00636-9

    Chapitre 1

    1

    De l’amas de ferraille de la voiture qui avait percuté un des platanes de la nationale cinquante sept à proximité de Besançon, le gendarme prit le sac à main de la victime. C’était un sac à main d’une grande marque, les deux C entrelacés étaient la signature de Chanel.

    A l’intérieur un petit miroir cassé témoignait de la violence du choc. Le gendarme sortit un tube de rouge à lèvres, un poudrier, un trousseau de clefs et des mouchoirs en papier. Il ouvrit un porte-cartes. Une attestation d’assurance du véhicule, un permis de conduire et une carte nationale d’identité étaient au nom de Martine DUBOIS, mariée, née le 12 mai 1963 à Besançon dans l’est de la France. Les photos sur les documents représentaient le visage d’une femme élégante, blonde aux traits finement dessinés. Il contrastait avec le teint livide de la personne qui venait de quitter le monde des vivants mais il s’agissait bien de la même personne.

    L’ambulance dépêchée par la gendarmerie de Besançon arriva en silence. Plus rien ne pressait. Il n’y avait plus rien à faire. La victime était décédée. Deux infirmiers sortirent un brancard et enfilèrent le cadavre dans un sac à viande d’une blancheur immaculée. On n’entendit que le glissement de la fermeture éclair qui scellait le corps de cette jeune femme dans le linceul. Ils glissèrent le brancard articulé sur les rails de l’ambulance et claquèrent la porte arrière du véhicule. Le véhicule repartit comme il était venu, en silence. Le ronronnement du moteur diminua d’intensité jusqu’à se confondre avec le vent qui soufflait par rafales dans les arbres avoisinants.

    Sur le bord de la route il ne restait que le véhicule enroulé autour du platane. Les âpres rugosités jaunes et brunes de l’arbre accrochaient la lumière. Sans doute un sculpteur aurait pu trouver dans ce spectacle matière à inspiration : le métal du véhicule et le bois de l’arbre intimement mêlé dans des entrelacs sensuels.

    Le choc de l’accident passé, quelques rouges-gorges revinrent se percher sur un bouleau voisin et voletaient dans les branches. Ces toutes petites boules de duvet faisaient entendre un gazouillis inattendu dans ce lieu où la mort venait d’ôter une vie. Dans l’azur profond de l’aube naissante, des nuages à reflets roses se poursuivaient. Le paysage respirait la sérénité.

    Il fallait faire les constations d’usage. A qui la faute ? Le gendarme remplira un formulaire. Il y dessinera l’arbre et la voiture, peut-être y ajoutera-t-il un ou deux autres arbres comme repères. Il y annotera des distances et quelques commentaires sous des flèches. Un rapport administratif scellera le dossier et ira rejoindre les milliers de dossiers sur les étagères poussiéreuses de l’administration. La compagnie d’assurance fera elle aussi son dessin. Elle y apportera sensiblement les mêmes commentaires. Mais le résultat de leurs conclusions ne feront pas revivre la victime dont le véhicule s’était encastré dans l’arbre, elles auront du moins le pouvoir d’attribuer la cause de l’accident non pas au platane qui avait été planté par l’homme il y a plus d’un siècle mais à la femme qui conduisait le véhicule.

    2

    Paul DUBOIS a la cinquantaine. Il est asiatique et commissaire principal de police aux Quai des orfèvres dans le premier arrondissement. Le quidam qui le croiserait dans la rue aurait du mal à reconnaître en lui un des chefs de la police. Il est aux antipodes d’un Maigret, Frost ou Derrick et bien loin des clichés que les films donnent d’un commissaire de police. Comme tous les commissaires de la criminelle il est le premier informé quand il y a une mort violente dans la capitale et c’est encore lui qui fait les premières constatations d’usage.

    Il est marié et a deux enfants. Il a connu sa femme Martine à Besançon. Elle était étudiante aux beaux-arts. Il finissait ses études de droit. Le commissaire a toujours eu la logique cartésienne du policier et elle, a gardé l’insouciance de l’étudiante des beaux-arts. Ils se sont mariés à Besançon et sa première affectation fut Paris. Ils n’ont jamais beaucoup voyagé. Elle, quelques expositions en province et lui, quelques déplacements professionnels.

    Depuis deux ans, à la suite d’une banale dispute à laquelle leurs enfants avaient assisté, elle avait voulu faire chambre à part. Cette banale dispute fut le prétexte pour se dérober à ce que les femmes appellent « le devoir conjugal ». Le couloir qui séparait leurs chambres était devenu la frontière de leur vie sexuelle et avec elle, bien sûr, l’arrêt de toutes relations intimes.

    Peut être aurait il dû prendre une maîtresse comme l’avaient fait certains de ses collègues dans une situation similaire mais il avait gardé de ses parents une éducation qui n’était pas permissive. Il considérait l’adultère comme un échec dans une union. Il préféra l’abstinence. Avec les semaines ses envies étaient passées. Le sexe est sans doute plus une habitude qu’un besoin.

    Malgré cela, ils étaient assez proches l’un de l’autre car le point commun qui les unissait était leurs enfants. Ils leur donnaient satisfaction dans leurs études. Depuis cette dispute les enfants revendiquaient leur indépendance. Ils allaient entrer à l’université. Il était difficile pour un père de refuser à ses enfants une autonomie quand il avait les moyens d’y pourvoir et que l’ambiance familiale nuisait à leur épanouissement.

    Leur fille Virginie avait vingt trois ans et vivait en Angleterre où elle effectuait un stage de langue. Elle faisait son maximum pour ne pas venir chez ses parents passer un week-end alors que son père lui avait pris un abonnement sur Air France. Elle prétextait des stages et des réunions. Leur fils Patrick avait vingt-cinq ans. Il était en cinquième année de droit. C’était un garçon qui affectionnait sa liberté. Son père avait conclu un pacte avec lui : il lui louait un studio dans le Quartier Latin, alors qu’ils habitaient une maison à Paris mais en contrepartie il devait se classer parmi les cinq premiers de sa promotion. Cet accord satisfaisait les deux parties. L’indépendance si chère à son fils était préservée. Il menait une vie que son père préférait ignorer mais il avait la satisfaction de constater sa réussite universitaire.

    Quand l’épouse du commissaire était en manque d’affection maternelle, elle se plaignait de l’égoïsme de ses enfants. Elle avait de bonnes raisons pour cela car l’amour filial que Patrick leur portait se limitait à la fin du mois quand son père payait le loyer de son studio et qu’il lui donnait son chèque pour ses dépenses personnelles. Sa mère lui rappelait qu’il devrait au moins en retour leur manifester un peu de reconnaissance. Patrick répondait alors à l’instinct maternel de sa mère en venant le dimanche suivant à la maison. Quant à Virginie il suffisait que sa mère haussât le ton et elle retrouvait, le temps d’un week-end, le chemin de l’aéroport pour rejoindre la maison familiale. Quelques fois la famille était au complet un dimanche. Ils déjeunaient alors tous les quatre.

    A la décharge de leurs enfants l’ambiance familiale n’était pas des meilleures. Le père était rarement disponible. Il travaillait aussi bien le jour que la nuit. Les criminels ne tuaient pas toujours aux heures ouvrables. Il était donc naturel que le vide de cette maison ait pu nourrir les envies d’indépendance de leurs enfants.

    Quai des Orfèvres. Section criminelle. Bureau du commissaire principal Dubois. Le téléphone portable du commissaire sonnait.

    – Ici le commandant de la gendarmerie de Besançon, lança une voix grave.

    – Commissaire principal Dubois, je vous écoute.

    Un silence hésitant lui répondait.

    – Je suis porteur d’une mauvaise nouvelle, lui dit la voix grave.

    Son correspondant prenait un temps de pause comme pour maintenir le suspense d’une action.

    – Ah ? attendant la nature de la mauvaise nouvelle.

    – Votre femme, votre femme… répétait il comme si le commissaire était bigame.

    – Ma femme ?

    – Votre femme a eu un accident de voiture.

    Le gendarme dispensait chacun de ses mots comme une faveur.

    – Grave ? lui demanda spontanément le commissaire Dubois.

    – … (Silence du gendarme, identique à celui que prendrait un médecin qui ne sait pas comment annoncer à son patient qu’il n’a plus qu’un mois à vivre.)

    – Où est-elle ?

    – Elle est ici à l’hôpital de Besançon, lui répondit le gendarme.

    – Je pars tout de suite !… et alors que le commissaire se levait pour se diriger vers la patère prendre son blouson et sortir, il l’entendit murmurer :

    – Votre femme est décédée.

    Le gendarme avait dit cela alors que le commissaire s’apprêtait à enfiler son blouson. Il le remit sur le portemanteau. Sans mot dire il revint à son bureau. Le téléphone portable encore à la main il ne voulait pas lui faire sentir son désarroi. Sa détresse resta silencieuse, sans pleur ni bruit. Quelques bribes de phrases lui parvinrent… « je suis désolé… mes condoléances… rappelez moi… ». Des « merci » et des « oui » automatiques ponctuaient puis closent leur entretien. Il resta prostré un long moment, effondré dans son fauteuil, perdu dans ses pensées. Le vide se fit dans sa tête. Quelques souvenirs fugaces lui traversèrent l’esprit.

    Martine rendait visite à ses parents en Franche-Comté quand elle eut cet accident de voiture sur la nationale cinquante sept. La mairie de Besançon lui consacrait une exposition sur la miniature chinoise. Le beau-père du commissaire était conseiller municipal, chargé des affaires culturelles, ce qui avait facilité les démarches pour organiser cette exposition. Elle était peintre et s’était hissée au niveau des plus grands miniaturistes à force de patience et de dextérité. Maintenant qu’elle n’était plus là, le commissaire regrettait de ne pas avoir assez communiqué avec elle, de ne pas s’être assez intéressé à son travail. Il avait toujours considéré la peinture comme un passe-temps, comme une distraction qui était bien loin du sérieux d’un dossier criminel. En se souvenant de cela, les reproches qu’il avait pu lui faire et qui les avaient conduit à faire chambre à part furent oubliés, laminés par sa disparition. Que s’était il passé ? Pourquoi en étaient ils arrivés là ?

    3

    Dans la soirée le commissaire partit avec ses enfants pour Besançon.

    Ses beaux-parents consacraient leur vie à la famille. C’était, sans aucun doute, le mot le plus employé dans leur vocabulaire : sécurité de la famille, prospérité de la famille, entraide dans la famille, des choses comme cela. A leurs yeux leur maison était pure et honnête. Chacun était rempli de bonnes intentions. Les parents de Martine étaient catholiques et attachés aux rites religieux. Ils acceptèrent donc la mort de leur fille avec l’idée que Dieu l’avait rappelée pour poursuivre sa vie terrestre au paradis. Il n’y avait aucun doute pour eux. La pièce dans laquelle reposait Martine était plongée dans l’obscurité. Quatre cierges habillés d’or et de rouge se consumaient lentement aux quatre coins du catafalque. Cette mise en scène était ridicule mais que faire d’autre ? Patrick et Virginie regardaient leur mère qui gisait là dans ce cercueil. Son visage mat contrastait avec le vernis brillant du cercueil. Les petites flammes des cierges éclairaient les joues de Virginie. De ses yeux perlaient des larmes. Lorsqu’elle s’aperçut que son père la regardait, elle tourna la tête. Il la prit dans ses bras. Il sentit ses larmes contre son visage et se mit lui aussi à pleurer.

    Le commissaire avait beaucoup vu de morts dans son métier et n’avait jamais ressenti une quelconque compassion. Il les regardait toujours longuement cherchant une explication à leur mort. Ils n’étaient que des cadavres dont la seule identité était une étiquette accrochée à leur orteil, mais là il s’agissait de sa femme. La famille et quelques amis de province défilaient en silence se signant devant le cercueil en observant du coin de l’œil l’ultime tête-à-tête du veuf avec sa femme. Qu’espéraient-ils voir dans ses yeux ? Son esprit refusait obstinément ce que ce terme de « tête à tête » suggérait d’analogie avec le monde des vivants. Il n’y avait pas de tête-à-tête comme il en avait pu en avoir avec Martine pendant plus de vingt ans avec des sourires, des paroles et quelques engueulades. Elle restait là devant lui, muette. Il n’y avait que lui qui regardait ce corps étendu.

    Il avait bien du mal à se persuader que sa femme était morte. Il revoyait le jour de leur rencontre où le soleil filtrait à travers les feuillages et où le vent formait des vagues sur sa robe… sa réflexion fut interrompue par l’ordonnateur des pompes funèbres qui baigna soudainement la pièce. La lumière inonda le catafalque et comme pour donner plus de vérité à l’image d’un mort, elle se déversa impitoyablement sur son front, ses yeux, l’arête de son nez, ses pommettes et fit ressortir, avec encore plus de contraste, les zones d’ombre de sa face immobile. Comment aurait il pu l’imaginer dans un cercueil ? Ce corps et cette âme ne semblaient avoir été faits que pour la lumière du soleil et à qui cette seule lumière s’accordait et non le faisceau lumineux des lampes de la morgue qui baignait son visage. Ce n’était pas sa femme qui était devant lui mais un cadavre qui se laissait regarder, rien de plus qu’un cadavre qui s’ajoutait à tous ceux qu’il avait vus. Rien, en elle, absolument rien ne pouvait laisser prévoir une fin prématurée. Il n’y avait pas trace en elle de quoi que ce soit qui ressemblerait de prés ou de loin à la mort, tant elle semblait naturellement à l’abri de l’angoisse et de la douleur.

    Le commissaire avait un tempérament énergique mais respectueux des circonstances actuelles. Il n’avait jamais montré la moindre faiblesse mais, d’un air absent, il avait tiré une cigarette de la poche intérieure de sa veste pour la porter à ses lèvres. A la réflexion, c’était un geste inattendu qui ne convenait pas à la situation, mais qu’importait ! Il l’alluma par bravade contre les règles établies par sa belle-mère.

    4

    Après les formalités d’usage, l’enterrement à Besançon dans le caveau familial et les condoléances habituelles, les enfants retournèrent à leurs chères études.

    Quand le commissaire rentrait à la maison et qu’il prenait connaissance des messages téléphoniques sur le répondeur, ils étaient tous pour sa femme. C’étaient toujours les mêmes personnes qui appelaient : des artistes peintres ou des amies qui n’étaient pas encore au courant du drame. Quand tout le monde fut au courant, les messages furent pour lui. Des messages de condoléances qui affluaient de partout et dont, pour la plupart, il ne connaissait pas les auteurs.

    La mort de Martine lui emplit l’âme de deuil pendant de longues journées. Oh ! Certes, oui ! Il pensait, comme toutes les personnes qui perdent un être cher, que sa vie s’arrêterait avec le décès de sa femme. Les premiers jours il était devenu dépressif. Il avait perdu l’appétit et le sommeil et même s’il n’avait plus le besoin de sentir son corps tiède dans son lit, c’était sa présence, si minime fut-elle qui lui manquait à présent à moins que ce ne fût de savoir qu’il était marié et qu’il avait une femme ? Lui qui traitait les problèmes professionnels les plus ardus avec rapidité, sa lenteur à percevoir les changements dans sa vie personnelle lui rappelait sa jeunesse. Il avait été lent à décider de se marier avec Martine, il avait la même lenteur à se détacher maintenant de son souvenir.

    Le changement social était devenu une chose éprouvante. Quand les gens parlaient « du veuf » tout le monde savait qu’il s’agissait du commissaire. Leurs chuchotements faisaient bruisser son nouveau statut : « Ne pas oublier d’inviter le veuf » et même les impôts lui rappelleront quand il remplira sa déclaration de revenus… Votre situation familiale a changé depuis le premier janvier ? Et il devra cocher la case « veuf » …

    Depuis la mort de Martine il ne voyait plus ses amis et quand à ses enfants ils menaient leur vie. Une génération en pousse une autre, que pouvait il dire ? à leur âge on ne pense pas à la mort, la vie seule préoccupe leurs pensées. Il est fascinant de constater comme la mort a moins de prise sur les enfants que peut en avoir sur un conjoint. L’idée de la mort est tellement étrangère à un enfant qu’il en oublie la réalité, fut

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