Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Géographies
Géographies
Géographies
Livre électronique138 pages1 heure

Géographies

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Géographies est son premier recueil. L’auteur y a rassemblé quelques-uns des textes écrits lors de ses séjours professionnels en Afrique mais aussi lors d’allers retours touristiques ou purement virtuels.
LangueFrançais
Date de sortie4 nov. 2013
ISBN9782312017006
Géographies

Auteurs associés

Lié à Géographies

Livres électroniques liés

Poésie pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Géographies

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Géographies - Luc Madec

    cover.jpg

    Géographies

    Luc Madec

    Géographies

    Poèmes

    img1.jpg

    LES ÉDITIONS DU NET

    22, rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-01700-6

    Ailleurs

    AFRIQUES (1979-92)

    Afrique (Nord)

    AU NORD D’OUZOUD (1979)

    Cinq cordes en nylon

    Frottées

    Un archet de fortune

    Les sons amplifiés

    Par le bidon d’essence

    Percé au bon endroit

    Les sons amplifiés

    Par le Moyen Atlas

    Qui prolongeait l’aurore

    Nous avaient délogés

    D’une nuit hors du temps

    Elle gardait ses moutons

    Au pied des neiges éternelles

    Ses doigts couraient

    Le long du manche

    Elle était sale

    Et ses habits déchirés

    Rouge et or

    Par le passé

    Cristaux sonores

    Qu’elle offrait au ciel

    Un sourire

    Tout à l’invisible

    Sans se soucier

    Du reste

    De nous

    Qui ne savions plus distinguer

    Le vrai du faux

    Nos corps fourbus

    D’un partage illicite

    Surtout ne pas s’accrocher

    A une vie possible

    Au plus vite

    Lever le camp

    Et reprendre la route

    img2.png

    UTIQUE RUINES

    Tandis que la chaleur plombe la ville

    Les carreaux de mosaïque se détachent

    Les couleurs s’éparpillent

    Les poissons perdent leurs écailles

    Et la mer son écume crémeuse

    Je foule un sol qui se disloque

    Jusqu’aux guerres puniques

    Soulevée par les racines d’un figuier

    L’allée de marbre à l’ombre des lauriers roses

    Les navires n’accostent plus ici

    Les scènes bucoliques sont en miettes

    Je peux fermer les yeux et la ville recueillir

    Les confidences d’un naufragé du soleil

    ROUTES ALGÉRIENNES, PRINTEMPS 1990

    Là comme partout ailleurs, un meurtre a été commis, à l’arme blanche. Après une course folle, dans le champ de ruines. Ruines exsangues, mer bleu-roi. C’est, paraît-il, le seul endroit au monde où l’eau a choisi cette couleur. Spectateur. Encore cette impression de violer l’intimité d’une communauté en exil. J’ai déjà visité de nombreuses villes mortes, en toute innocence, me suis servi de leur marbre blanc comme d’un miroir. Une forêt de colonnes corinthiennes supporte aujourd’hui le poids du ciel. L’arc de triomphe s’apprête à accueillir Scipion le Conquérant ; il se dresse au centre de la cité, en plein soleil, il attend, obsolète. La mémoire des pierres, immobile. Le squelette d’une fourmilière avec encore, ça et là, quelques lambeaux de couleurs et de formes patiemment rongés par le temps.

    On a donné quelques dinars aux enfants sans histoires ; j’ai béni leur inconscience, ils ont souri comme jamais je n’ai vu des gamins sourire, au milieu de leurs chèvres et des vestiges qui ne les concernent pas. Quelques dinars, que faire d’autre ? Peut-être les jeter dans une fontaine porte-bonheur. ‘Donne-moi un dinar…’. Pas besoin de visite guidée, je veux entendre battre leur cœur, alors surtout pas de guide bavard et insolent, je veux entendre le cœur des pierres, seul. Le théâtre est là, intact ; y résonne encore l’écho d’une tragédie, suinte dans les coulisses le trac d’éternels débutants. Mais le spectacle cède bientôt quelques-uns de ses interstices aux premières fleurs sauvages, aux premiers mollusques à coquille. Combien de saisons des pluies, combien de sable depuis l’abandon de la scène ?

    On a repris la route dans le brouillard. Berbères enveloppés dans trois épaisseurs de pauvreté, leurs visages de star, en dehors de la ville sale. Demain, on sera à la lisière du Sahara qu’on longera à la recherche d’une carrière de roses brunes. La pompe à eau risque de nous lâcher à tout moment : que deviendront nos projets, que nous restera-t-il à faire ?

    La baie de Séraïdi, les petits restaurants de la côte Est, la trouille de nos héros morts tous les vingt kilomètres en plein cœur des Aurès. Dévaler la pente abrupte et plonger dans un lit de lauriers roses et frais, que ferons-nous ? Alger à l’écoute du monde, avec une multitude d’oreilles paraboliques, quelques mètres au-dessus des poubelles pleines à ras-bord. Les villes impériales, les jardins de l’Allambrah, la coupe du monde de football, le tournoi de Roland Garros, les canyons de l’Andalousie…

    Après s’être assis à moins d’un mètre de moi, après avoir introduit son regard dans la franchise qu’il me reste, le singe des gorges de Kherrata se saisit délicatement du morceau de pain que je lui tends. Tout à l’heure se déplaçait comme un chien. Sa main est exactement semblable à la mienne mais c’est moi qui offre le pain et c’est lui qui a peur. Rigoureusement la même, jusqu’au bout des ongles, et il a peur, il me craint comme si j’étais un pestiféré, comme si j’étais contagieux et que la mort m’accompagnait, comme si j’étais l’image de la mort. Avec une souplesse inouïe, ses copains s’amusent ou se chamaillent dans un figuier voisin tandis que d’autres tentent de piquer tout ce qu’ils peuvent dans la voiture dont les portières sont grand-ouvertes.

    img3.png

    DJÉMILA (1990)

    Tiennent vos traits en mémoire

    Bien plus

    Qu’un triomphe de pierre

    Il fait froid

    Les pavés ont éclaté

    La route ne mène plus nulle part

    Foules quotidiennes

    A fleur de terre

    Egrenées

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1