l fait non seulement très froid mais déjà noir. Ou du moins un bleu marine mystique et apaisant. Dans le petit aéroport d’Ivalo, en plein nord de la Finlande, à 50 kilomètres de la Russie, il nous donne des forces. Il tranche. Du reste, dans l’avion, il fallait voir ces visages sages et déterminés filant à la rencontre d’un paysage unique, la Laponie, et d’un peuple se faisant rare, les Samis. Ils sont 80 000 à travers le monde, 9 000 en Finlande. À une quarantaine de kilomètres d’ici, à Inari, ils représentent presque la moitié de la population locale de 7 000 habitants.
Cette obscurité magnifique, rythmée de sapins et de bouleaux, appartient à ces mondes à l’envers enfouis dans la nuit des temps. Non sanset XXe siècles. Ils décrochent des droits de pêche et de chasse laissant un goût amer aux Finlandais du Sud. Pour un peu, ils feraient même de la résistance. Ils en font. Luttant contre ce qu’ils ressentent comme une colonisation permanente, ils s’exposent en frondeurs à la Biennale de Venise, lèvent le poing. Eux qui n’ont dans leur champ lexical aucun mot pour nommer la guerre pondent des slogans comme « Suohpanterror, suohpangieh-ta ». « Ne prends pas une bombe, prends ton lasso » ; soit le lasso de l’éleveur de rennes et la corde pour se pendre, en référence au taux de suicide élevé chez les jeunes Samis. Histoire de renverser le conflit, le Sami rappe : telle la chanteuse Sofia Jannok qui proclame son Félicité suprême, afin d’éviter toute réappropriation culturelle, pour , Disney a bien pris soin de consulter les instances samies et a livré le film dans une version en same du Nord.