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Free Me: Found la duologie, #1
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Free Me: Found la duologie, #1
Livre électronique447 pages6 heures

Free Me: Found la duologie, #1

Évaluation : 4 sur 5 étoiles

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À propos de ce livre électronique

Par Laurelin Paige, l'auteure de la trilogie Fixed on you figurant au classement de best-sellers du New York Times...

Je n'étais pas censée travailler le soir où j'ai rencontré JC.


Avant lui, je me satisfaisais de mon train-train quotidien en tant que gérante de l'un des night-clubs les plus prestigieux de la ville de New York. Et tant pis si ma vie ne connaissait jamais le fameux : ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants ! De toute façon, je n'y croyais pas.


Et puis JC est arrivé.

 

Sexy, riche et beau parleur, JC n'est rien de plus qu'un divertissement. Je ne suis pas intéressée par une soirée latex, alors c'est facile pour moi de repousser le play-boy. Ou du moins, jusqu'à ce que ma vie échappe à mon contrôle sans crier gare. Cet homme est là pour moi, il me propose une nouvelle méthode de survie basée sur l'obéissance à mes besoins et mes pulsions les plus primaires qui exigent que j'abandonne mon besoin constant de tout contrôler.

Ses leçons sans aucune attache font voler en éclats les murs que j'ai soigneusement érigés. Alors que je découvre la liberté, je commence à éprouver pour lui des sentiments inavouables, des choses qui me font craindre le pire pour mon cœur de plus en plus vulnérable. Parce que JC a des secrets bien à lui, et ses secrets refusent de le libérer.

Ce livre est le premier tome d'une duologie. Cette série peut se lire de manière indépendante ou en accompagnement de la trilogie Fixed on you.

LangueFrançais
Date de sortie20 juil. 2020
ISBN9781942835868
Free Me: Found la duologie, #1
Auteur

Laurelin Paige

Laurelin Paige is the New York Times and USA Today bestselling author of the Fixed Trilogy. She's a sucker for a good romance and gets giddy anytime there's kissing, much to the embarrassment of her three daughters.

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    It seems simple enough; a bargain between two people who are not looking for love, but looking for a little fun and exploration. Although the scenes between JC and Gwen were spicy, I found their two- dimensional struggle to remain unattached a little annoying at times. To be honest, I struggled to finish the book. I really wanted to see where the character development was going. JC never made it past lukewarm. The moment he has to defend Gwen against her father, he shows more of a weaker side than I originally pictured for him. The failure seemed out of character. Overall, although I like the writing style, I was disappointed in the story. I do not believe I will continue on with this series.

Aperçu du livre

Free Me - Laurelin Paige

Un

Je n’étais pas censée travailler le soir où j’ai rencontré JC.

Jana m’avait appelée à la dernière minute pour la remplacer. Je savais que c’était grave avant même qu’elle ouvre la bouche. Jana ne se faisait jamais porter pâle.

— Apparemment, j’ai besoin de douze points de suture. Sur le menton, Gwen. Seigneur, j’espère que ça ne laissera pas de cicatrices.

— L’essentiel, c’est que tu ailles bien.

J’avais très envie de lui dire que c’était étonnant qu’elle ne se soit pas déjà blessée auparavant – après tout, le roller derby, c’était un sport plutôt dangereux –, mais je parvins à me retenir.

— Oh, c’est trop gentil.

Son accent portoricain de Long Island semblait plus prononcé au téléphone. À moins que ce soient les antalgiques qu’on lui avait administrés contre la douleur.

— Ça va, je te jure. Je pourrais passer quand ce sera terminé.

— Ne sois pas ridicule. Je prends la relève pour toute la durée de ton service.

De toute façon, qu’avais-je prévu d’autre ? Regarder The Voice avec Norma, c’était à peu près tout, et je pouvais toujours voir la première moitié avant de partir. C’était notre rituel entre sœurs, à la fin de sa journée et au début de la mienne. Cela dit, ces derniers temps, nos soirées télé étaient un peu moins formidables, comme si elle avait la tête ailleurs. C’était bizarre. C’est vrai, quoi, où peut bien être votre tête alors qu’Adam Levine est à l’écran, à se chamailler avec Blake Shelton ?

De toute façon, nous avions un magnétoscope numérique. Je pourrais regarder la suite en rentrant au petit matin, avant d’aller me coucher.

— Merci, ma belle, fit Jana à mon oreille, d’une voix traînante. Je n’ai pas pu appeler Matt, mais je suis sûre qu’il sera d’accord. Je te remplacerai jeudi, comme ça, tu auras quand même ton week-end.

J’espérais qu’elle n’était pas trop défoncée pour s’en souvenir. J’attachais beaucoup d’importance à mon « week-end » – deux jours d’affilée sans poser le pied à l’Étage 88 où je bossais. Je n’avais rien d’extraordinaire à faire pendant mon temps libre et je n’avais pas vraiment besoin de repos. Si la loi l’autorisait, je travaillerais non-stop. Mais j’étais la seule manager au club à bénéficier avec régularité de deux journées libres consécutives, faveur que j’appréciais à sa juste valeur. Cela signifiait que je faisais bien mon travail, que je méritais une récompense.

Cela signifiait qu’il y avait un domaine, dans cette vie minable qu’était la mienne, où j’étais bonne à quelque chose.

— Tu y retournes ? me demanda Norma lorsque je mis un terme à ma conversation téléphonique.

Elle ne leva même pas les yeux des documents étalés sur son bureau. Norma était un vrai bourreau de travail, et même si elle essayait de le laisser entre parenthèses pour nos soirées ensemble, il arrivait souvent qu’elle en soit incapable. Je ne pouvais pas lui en vouloir. Elle avait acquis son poste de responsable financière chez Pierce Industries à la sueur de son front et avec une ambition acharnée. Ma sœur, cette bosseuse aux dents longues.

Mais c’était son ambition qui nous avait sorties du ghetto, qui payait l’appartement de standing qu’elle partageait avec moi, qui finançait mon frère et sa vie de l’autre côté du pays et qui nous empêchait de replonger dans un passé où nous n’avions aucune envie de retourner.

— Oui, dis-je en retirant déjà mon jean. Jana est aux urgences.

Je marquai une pause en me demandant si je devais en informer notre manager général, Matt, mais je me ravisai. Il était en vacances pour la semaine, je n’allais pas le déranger pour ces changements mineurs.

— Elle me remplacera jeudi. Comme ça, j’aurai quand même deux jours d’affilée. On pourrait regarder Projet haute couture ensemble cette semaine.

Norma leva les yeux de son travail, les sourcils froncés comme si elle étudiait un calendrier imaginaire suspendu devant elle.

— Euh, je ne pense pas que jeudi, ça me convienne. J’ai… un truc.

Sur ce, elle s’abîma à nouveau dans son travail sans même m’interroger sur l’accident de ma collègue.

Je haussai les épaules et récupérai mes vêtements avant de me rendre sous la douche. Elle avait sans doute un gala de charité ou un autre de ces événements raffinés auxquels elle participait constamment. Même ma sœur, plus âgée de cinq ans, avait une meilleure vie sociale que la mienne. D’accord, c’était en lien avec son travail, mais ce n’en était pas moins une sortie !

Tandis que l’eau chaude ruisselait sur mon corps, je réprimai mon vilain réflexe de jalousie envers elle. Après tout, je pourrais sortir, moi aussi, si j’en avais envie. Seulement, je ne décidais jamais que j’en avais envie. Et même si je prenais cette décision, je n’avais pas la moindre idée de la marche à suivre.

C’était bizarre de travailler le mardi, surtout parce que je me trompais constamment au moment d’inscrire la date dans les nombreux documents à remplir. L’Étage 88 était l’un des clubs les plus sélects de Greenwich Village. D’ailleurs, c’était l’un des plus sélects de tout New York. Nous étions presque aussi occupés en semaine que le week-end. Ce soir, c’était tout particulièrement animé à cause de l’arrivée des vacances. Les étudiants avaient terminé, les gens rendaient visite à leurs amis, il faisait trop froid pour les activités extérieures – même si ça ne se voyait pas au premier coup d’œil d’après les tenues qu’arboraient la plupart des filles. Où que mon regard se porte, il rencontrait des seins à peine couverts par des hauts de bikini ou des fesses engoncées dans des micro-jupes. Je n’aurais peut-être pas la même impression si j’étais imbibée d’alcool, à me trémousser sur la piste, mais j’étais bien au chaud et à l’aise dans mon pantalon gris et mon débardeur bordeaux à col boule.

J’étais peut-être trop vieille pour la vie nocturne. La trentaine approchait. Était-ce normal, à mon âge, de préférer une soirée pénarde sur le canapé à une sortie en boîte de nuit ? Norma n’avait jamais été une fêtarde, alors je ne pouvais pas me comparer à elle. Notre petit frère, Benjamin, vivait sur la côte ouest depuis ses dix-huit ans et je ne connaissais pas très bien son mode de vie. Quant à mes amis… disons que je n’en avais pas vraiment.

C’était le cœur du problème, évidemment. Je sortirais le soir sans hésitation si j’avais quelqu’un avec qui m’amuser. Peut-être pas, cela dit… difficile de le savoir.

J’aimais mon travail. Il était exigeant et dynamique. Le management me donnait l’occasion d’être pragmatique, dure. J’aimais être comme ça. Froide, sèche, responsable.

La soirée commençait comme d’habitude. Nos quatre salles étaient pleines et, à vingt-trois heures, il y avait même la queue devant la porte. On ne manquait pas de personnel aux bars. Les caissiers avaient suffisamment de monnaie. Notre meilleur videur assurait la sécurité. Ma soirée de travail s’annonçait prévisible.

Pourtant, je ne devais pas me reposer sur mes lauriers. Rien n’était vraiment prévisible et mieux valait rester sur le qui-vive. J’aurais dû mieux me préparer.

Mais rien n’aurait pu me préparer pour JC.

Je n’avais commencé que depuis deux heures lorsque j’entendis les serveuses murmurer. Elles se turent dès que je m’approchai, comme d’habitude. Après tout, j’étais leur chef, pas leur amie. En temps normal, je ne prêtais pas attention aux bavardages entre employés. La plupart de leurs ragots portaient sur le nouvel employé canon ou sur les conseils pour décrocher un meilleur pourboire, et je ne m’en souciais pas tant qu’elles faisaient bien leur travail.

Cette fois, cependant, deux mots piquèrent ma curiosité : Vipère et fumée de cigare. Bon, d’accord, plus de deux mots. Un mot et une expression qui déclenchèrent une alarme dans ma tête.

Je m’approchai des femmes.

— Qu’est-ce que vous avez dit ?

Bethany écarquilla les yeux.

— Je dois apporter ça, dit-elle en détalant en direction du bar lounge avec un plateau d’apéritifs avant que je puisse l’arrêter.

L’autre serveuse était toujours en train de saisir sa commande à la caisse. Elle n’avait aucune excuse pour déguerpir.

Je m’accoudai au comptoir à côté d’elle, contente que les caisses se trouvent non loin des cuisines, dans une partie plus calme où je n’avais pas à hurler pour me faire entendre.

— Alyssa, que voulait-elle dire en parlant de fumée de cigare dans la Vipère ?

Il était courant que des clients suçotent un cigare sans l’allumer – apparemment, de nombreuses personnes étaient restées bloquées au stade oral –, mais il était interdit de fumer au club. L’Étage 88 était un établissement non-fumeur, et si quelqu’un enfreignait cette règle, c’était à moi d’y remédier.

Alyssa ne leva pas tout de suite les yeux de l’ordinateur. Je vis sa gorge tressauter lorsqu’elle déglutit. Puis elle croisa mon regard, un grand sourire aux lèvres. Trop éclatant pour être honnête.

— Oh, tu sais. Des rumeurs. Je suis sûre qu’il n’y a pas vraiment de fumée, en fait.

Je plissai les yeux.

— Hmm…

Alyssa était l’une des employées les plus fiables. Mais encore une fois, je n’étais pas son amie.

— Et d’abord, qui a réservé la salle ce soir ?

La Vipère n’était pas le véritable nom de l’espace clos qu’offrait le club à ses clients d’élite. Officiellement, sur nos supports marketing, il s’agissait de la Mezzanine, la salle VIP du club. Mais dans nos documents de travail, Matt écrivait toujours VIP R, pour VIP room, et à cause de son écriture en pattes de mouche, c’était devenu la Vipère pour tout le personnel.

Alyssa secoua la tête, agitant sa queue de cheval.

— Personne en particulier. Un groupe en col blanc.

Elle restait évasive. Puis, comme si elle prenait conscience que sa tactique ne fonctionnait pas avec moi, elle ajouta :

— Je peux aller jeter un œil. S’il se passe quelque chose de louche, je te tiendrai au courant.

Oui, c’est ça, comme si j’allais tomber dans le panneau.

— Si on allait voir ensemble ?

Son visage se ferma visiblement, mais elle acquiesça et se dirigea vers l’escalier métallique en colimaçon qui conduisait jusqu’à la Mezzanine.

Je la suivis. L’adrénaline crépitait déjà dans mes veines tandis que je montais jusqu’à la Vipère. Je n’avais pas peur de ce que j’y trouverais – nous avions un bon service de sécurité et j’en avais assez vu dans ma vie pour placer plus haut que ça mon seuil de tolérance à la peur. Mais il y avait un côté excitant dans la perspective de découvrir quelque chose de différent. Le frisson que, peut-être, tout compte fait, la soirée ne serait pas aussi typique et prévisible ; une délicieuse sensation de chair de poule se propageait sur ma peau claire, alors que, quelque part, j’espérais l’inattendu.

Cela dit, je me contenterais de rétablir l’ordre. J’aspirais peut-être à un peu de nouveauté, mais je ne savais pas comment réagir devant une situation vraiment inattendue.

À la porte de la Vipère, Alyssa s’arrêta et attendit que je la rejoigne.

— On devrait peut-être frapper ?

Certainement pas. Les managers avaient carte blanche partout dans l’établissement. Je n’allais pas donner à nos clients irrespectueux le temps de cacher leur cocaïne et de rentrer leurs queues. D’autant plus que je sentais déjà l’odeur des cigares cubains.

J’ouvris la porte à la volée et je m’avançai sur le seuil pour balayer la scène du regard. Ce que je découvris me surprit. Ou du moins, une partie. L’air enfumé et les cigares à demi consumés, je m’y attendais. Si les clients enfreignaient une règle du club, ils ne s’arrêtaient pas là, en général, et je ne fus pas décontenancée par la présence de femmes à demi nues. Pas plus que par les trois types qui jouaient au poker dans leur coin, de vrais billets étalés sur la table.

Ce qui m’étonnait, c’étaient les hommes. Leur manière de se comporter, leur stature d’hommes d’affaires respectés comme l’indiquaient leurs costumes luxueux, et non une bande d’étudiants ivres morts. Ils étaient une dizaine, tous jeunes et célibataires. En tout cas, je n’apercevais aucune alliance ni marque de bronzage trahissant l’emplacement d’une alliance enlevée. Les bribes de conversation qui me parvenaient étaient intelligentes et intelligibles, bien loin de celles de ces centaines de jeunes d’une vingtaine d’années qui fréquentaient le club chaque semaine, ceux qui reluquaient les seins des serveuses quand ils passaient commande et qui étaient trop saouls pour se rappeler où ils avaient laissé leur iPhone.

Et puis, il y avait les femmes.

Une scène de débauche ne serait pas complète sans les prostituées et les call-girls sordides. C’était la routine. Pourtant ces femmes, cinq au total, n’avaient rien de sordide. Même si elles étaient vautrées dans les bras des hommes, même si trois d’entre elles avaient enlevé le haut et une quatrième ne portait qu’un soutien-gorge français et une culotte en dentelle, elles avaient une classe indéniable. Elles exsudaient le raffinement et le chic. Sexy, certes, mais pas vulgaires.

L’une des femmes à la poitrine nue, une brune assise sur les genoux d’un homme, leva la tête vers moi. Son regard s’éclaira, comme si elle m’avait reconnue. Elle me sourit et articula un bonjour silencieux avant de reporter son attention sur les cheveux de l’homme où elle passait sensuellement les doigts.

Je fronçai les sourcils en essayant de la replacer. Une vague de stupeur me traversa quand je pris conscience que ce n’était pas dans mon passé douteux que je l’avais connue, mais lors de mes études. C’était une étudiante de master qui enseignait un cours de cuisine commerciale auquel je m’étais inscrit. Maintenant, elle dirigeait un restaurant cinq étoiles des quartiers résidentiels.

Et elle était ici ? Dans cette… cette…

Je ne savais pas vraiment ce que c’était, en réalité. C’était une fête privée qui enfreignait les règles, mais ce n’était pas débridé, glauque ni incontrôlable. C’était coquin, sensuel et… attirant. J’allais fixer les règles – bien sûr, comment pourrais-je faire autrement ? – mais pendant un moment, j’hésitai. Pendant un moment, au lieu de vouloir les réprimander, j’eus envie de me joindre à eux.

— Sentez-vous libre de vous asseoir.

La voix provenait de derrière. Elle était clairvoyante, comme si elle comprenait mon conflit intérieur. Comme si elle savait ce que je désirais vraiment.

Bien sûr, c’était ridicule. Ce n’était qu’une invitation à baiser. Rien de plus.

Je fis volte-face, prête à livrer mon discours moralisateur sur le ton de « mais qu’est-ce qui se passe ici ? », lorsque mes yeux se posèrent sur l’homme qui venait de parler. En le voyant, j’en perdis l’usage de la parole. Il était assis, les jambes tendues devant lui, le dos contre le mur – derrière la porte, voilà pourquoi je ne l’avais pas remarqué en entrant.

Pourtant, maintenant que je le remarquais, je le remarquais vraiment.

Le contraire eût été impossible. Le sex-appeal et le charisme émanaient de lui comme s’il en était vêtu. Des muscles bien définis tendaient sa chemise près du corps. Ses cheveux blond foncé étaient structurés : courts sur le côté et sculptés sur le dessus à la manière d’un séduisant gangster italien des années vingt. Une barbe de quelques jours lui évitait de paraître plus jeune que son âge, que j’estimais aux alentours de trente ans.

Et ses yeux…

Je ne les distinguais pas nettement dans la pénombre, mais je les sentais. Je sentais le sérieux avec lequel ils me dévisageaient, l’envie tout juste perceptible, et au-delà, la pesanteur qu’ils recelaient, mâtinée d’une certaine peine, d’une amertume peut-être.

Comme le mou d’une corde soudain resserrée et tendue, mon propre regard fut attiré vers le sien. J’étais incapable de détourner les yeux, et alors qu’il continuait à me dévisager – à lire en moi –, une vibration se mit à monter dans mon corps, plaçant toutes mes molécules en alerte maximale. Même mes parties intimes, en pleine hibernation, se réveillèrent devant lui ; elles se gonflèrent et frémirent, attisées par sa présence.

Tout cela était pour lui, je le comprenais soudain. La fête, le divertissement, c’était à lui. Tout était centré sur sa personne.

Malgré ça, dans ma vision périphérique où les autres reprenaient leurs activités, je voyais bien que tout n’était pas exactement centré sur lui. La fête était peut-être organisée autour de cet homme, mais personne ne lui prêtait attention. C’était moi qui restais rivée à lui. Concentrée comme si toute la salle était un navire sur des vagues houleuses et que cet homme, devant moi, était l’axe unique. Un point d’équilibre solitaire dans un espace chaotique. C’était inhabituel, parce qu’en général, c’était moi le point d’équilibre dans le chaos. J’étais la stabilité. Je représentais l’ordre.

Sous son regard insistant, j’étais prise au dépourvu. Comme si j’avais un talon cassé, que mon pied cherchait à se stabiliser et qu’il était là pour me tendre le bras. Il me faisait trébucher et me rattrapait à la fois.

J’ignore quand il reprit la parole. Je vis ses lèvres bouger avant de prendre conscience du son de sa voix.

— Venez. Joignez-vous à nous, me sembla-t-il entendre.

— Quoi ?

Maintenant, j’étais complètement suspendue à sa bouche – ses dents étaient parfaites, droites et blanches. Sa lèvre inférieure était plus rebondie que l’autre, claire et engageante.

Sa bouche esquissait un petit sourire.

— Prenez un siège. Alyssa va vous apporter à boire. Luke pourrait même vous masser le dos. Il n’a pas son pareil pour détendre les muscles. Vous êtes tellement crispée que je peux voir vos nœuds d’ici.

— Je ne… Je ne peux pas, je…

J’étais troublée, interloquée. C’était comme un gangster qui invitait un policier à dîner. Bon sang, mais qui faisait ce genre de choses ?

Et puis, il était très beau. En règle générale, les beaux spécimens ne me faisaient ni chaud ni froid, mais pas cette fois. Et cela… m’effrayait.

Moi qui pensais avoir un seuil de tolérance à la peur plutôt élevé.

L’homme désigna quelqu’un derrière moi.

— Jennie, peux-tu apporter une chaise à notre invitée ?

La femme en sous-vêtements rapprocha un siège et, par automatisme, je m’assis, les genoux orientés vers l’inconnu comme une boussole indiquant le nord.

Soudain, prenant conscience que ce n’était pas la bonne attitude, je me relevai d’un bond. J’avais retrouvé mes esprits, ma position d’autorité, de contrôle, et mon assurance.

— Merci, dis-je résolument, avec aplomb – du moins, j’espérais exprimer aplomb et résolution. Mais non. En fait, je vais devoir vous demander d’arrêter tout ça.

— D’arrêter quoi, au juste ?

Sa nonchalance me troublait. Une fois de plus. En temps normal, quand un manager surprenait un client sur le fait, le coupable se montrait pénitent et se répandait en excuses. À moins qu’il ne soit trop défoncé ou saoul pour s’en soucier, mais cet homme n’était ni l’un ni l’autre.

Tout étonnée que je sois, je restai professionnelle.

— Il est interdit de fumer ici, de pratiquer des jeux d’argent ou de se déshabiller. Demandez à vos amis d’éteindre leurs cigares, de ranger leurs cartes et de se rhabiller, sinon ils devront s’en aller. Vous pouvez aussi faire tout ça et vous en aller ensuite. Ce serait une autre option encore meilleure.

Alors que la majeure partie de l’assistance ne semblait pas affectée par mon discours, l’un des hommes tapota ma serveuse sur l’épaule.

— Alyssa, c’est qui cette fille ?

Agacée qu’à l’évidence, Alyssa en sache plus au sujet de cette fête qu’elle ne voulait bien le laisser entendre, je lui décochai un regard assassin, à la fois pour lui intimer de ne pas répondre et pour lui faire savoir que nous aurions une petite conversation plus tard.

Dans ma contrariété, je me trompais peut-être de cible. Il était courant que les hommes connaissent les serveuses par leurs noms, parfois en toute innocence, parfois un peu moins. Matt avait pour règle stricte que seuls les prénoms devaient être employés au club pour cette raison précise – afin que personne ne soit harcelé en ligne ni que l’on puisse chercher leurs adresses personnelles sur retrouverquelquun.com. C’était une précaution de sécurité que j’approuvais à cent pour cent.

Pourtant, à en juger par les coups d’œil échangés entre Alyssa et l’homme en question, elle semblait connaître ces gens bien plus qu’il n’y paraissait. Je commençais à me demander si c’étaient des habitués.

Moi, en l’occurrence, je n’étais pas une habituée. Pas du mardi. Quelle ne fut pas ma surprise quand l’inconnu au charisme magnétique répondit à sa place :

— C’est Gwen. C’est notre manager pour la soirée.

— Comment… ?

Je m’interrompis, mais il était trop tard. Je m’étais trahie.

Impossible qu’il ne se rende pas compte de l’état de trouble dans lequel il me plongeait.

— Vous vous demandez comment je sais tout ça.

Il se rencogna dans son siège, la cheville sur le genou opposé. L’une des femmes à la poitrine dénudée vint se percher sur son accoudoir et passa une main autour de son cou tandis qu’il parlait, mais il lui accorda à peine un coup d’œil et poursuivit :

— Je vais vous dire comment je le sais. C’est mon rôle de m’occuper de mes invités, y compris de connaître le personnel en service. Alyssa m’a informé que vous étiez responsable ce soir. Elle vous a plutôt bien décrite.

Je crispai la mâchoire en me demandant au juste comment Alyssa avait bien pu me décrire : blonde ? Maigrichonne ? Coincée ? Une vraie casse-pieds ?

— Cela dit, Alyssa, tu t’es trompée, reprit JC, s’adressant à la serveuse derrière moi. Tu as dit qu’elle était jolie, ce qui est totalement inexact.

J’écarquillai les yeux avec horreur. Je n’étais peut-être pas une top-modèle, mais on ne m’avait encore jamais dit en face que je n’étais pas jolie.

JC reporta son attention sur moi.

— Non, non, non. Vous n’avez pas compris.

Seigneur, étais-je aussi transparente ?

— Jolie est une véritable insulte, si vous voulez mon avis, parce qu’en réalité, vous êtes splendide. Une sorte de beauté unique. Endurcie. Peu de personnes peuvent être à la fois revêches et belles. Mais c’est votre cas. Ce sont vos yeux. Ils sont plus doux, plus profonds. En contradiction avec le reste de votre expression.

Je clignai des paupières. Je restai peut-être bouche bée, aussi. La franchise avec laquelle cet homme – cet inconnu – parlait de moi, de mon physique… cela aurait dû me paraître impoli. Inquisiteur. Pas flatteur, en tout cas, ni charmeur.

Et une chose était certaine, cela n’aurait pas dû me faire un drôle d’effet dans le ventre ni accélérer mon pouls, ni me faire rougir jusqu’à la racine des cheveux.

La femme derrière lui se pencha en avant et ses seins frôlèrent négligemment l’oreille de l’homme.

— Elle a une belle poitrine, ce qui ne gâche rien, ajouta-t-elle.

Cette fois, j’ouvris carrément la bouche. Primo, comment pouvait-elle deviner quoi que ce soit au sujet de ma poitrine, opulente certes, mais entièrement recouverte ? Et secundo, s’était-elle au moins regardée dans un miroir ? Parce qu’en parlant de belles poitrines, la sienne était hors concours, et j’étais quasiment certaine qu’elle était naturelle.

— Enfin, Natalie, c’est franchement inapproprié.

Pourtant, son regard se posa attentivement sur mon balcon pour évaluer ses propos.

J’appréciai sa tentative de politesse, avant de me rappeler qu’en réalité, je n’appréciais rien de tout cela.

— La flatterie ne vous mènera nulle part avec moi. Vous devez sortir, tout de suite.

Ma voix était naturellement rauque et je m’en réjouissais. Ainsi, mon manque d’assurance passait inaperçu.

— Je ne flatte jamais, Gwen.

Il marqua une pause, comme pour laisser ses paroles faire leur chemin, avant de poursuivre :

— Et je suis au regret de vous informer que j’ai réservé cette salle pour faire absolument tout ce qui me chante.

— Vous avez peut-être réservé la salle, mais pas pour n’importe quoi.

Cet endroit avait un contrat de location très explicite, avec des règles claires. Il en avait forcément reçu un exemplaire. C’était un client régulier, il n’ignorait rien. Et s’il pensait pouvoir profiter du fait que ce n’était pas mon jour habituel, il se fourrait le doigt dans l’œil.

Je me raccrochai à cela : le règlement, la charte, la certitude que j’étais dans mon bon droit.

— En fait, il a bien réservé la salle pour faire tout ce qu’il veut, intervint Alyssa d’une petite voix.

Je me tournai pour voir sa mine contrite. J’ignorais si elle était désolée de ne pas m’avoir exposé la situation plus tôt ou désolée de prendre son parti.

Parce qu’une chose était certaine, elle ne pouvait pas avoir raison.

Comme s’il lisait dans mes pensées, il confirma :

— Alyssa dit la vérité. C’est ce que j’ai fait.

Seule une personne en position d’autorité aurait pu donner son aval pour une chose pareille, mais je demandai néanmoins, redoutant la réponse :

— Qui l’a décidé ?

— Matt.

Ils avaient répondu en même temps. Aussitôt, l’homme précisa :

— Matt et moi, nous avons un accord tacite.

Ce qu’il me restait de dignité s’envola. Si c’était vrai – et j’avais le terrible pressentiment que c’était le cas – alors je me trompais. C’était humiliant. Et décevant.

J’avais entendu des rumeurs au sujet des fameux accords tacites de Matt, mais je n’en avais encore jamais été témoin en personne. Sans doute parce que Matt savait que je désapprouverais. Étant donné qu’il était mon patron, il n’avait pas besoin de mon approbation. À moins qu’il craigne que je m’adresse en plus haut lieu et que je le dénonce au propriétaire, Joseph Ricker.

Je ne ferais pas cela. Matt était un bon chef et je n’étais pas intéressée par son poste. Mais je pouvais au moins lui faire peur pour le dissuader de passer ce genre d’accords ridicules.

— Je devrais peut-être l’appeler.

Il sembla comprendre ce qu’il risquait. Lorsqu’il inclina la tête, avant même de prendre la parole, je sus qu’il serait doué pour débattre :

— Vous n’allez tout de même pas faire ça, n’est-ce pas, Gwen ?

Il s’avança sur son siège, les deux pieds bien à plat sur le sol, les mains jointes et les index tendus.

— Écoutez, voilà comment je vois les choses. À l’évidence, Matt ne veut pas que vous soyez au courant. Je réserve cette salle depuis, quoi, sept ou huit mois maintenant ?

Il jeta un regard circulaire et plusieurs personnes approuvèrent aussitôt.

Ses yeux revinrent vers moi.

— Depuis combien de temps travaillez-vous ici ?

— Cinq ans.

J’avais été engagée comme manager juste avant mon vingt-cinquième anniversaire. C’était mon premier véritable emploi après mon double diplôme en gestion de restaurants et ressources humaines – études payées par Norma, évidemment. Je n’avais pas forcément l’intention de rester au 88, mais en trois ans, j’étais passée d’assistante manager à temps partiel à sous-chef. La paye était bonne, le travail agréable. Mon patron et mes pairs me respectaient.

À présent, l’homme tendait ses index vers moi.

— Vous ne travaillez jamais le mardi, n’est-ce pas ?

— Non.

— Parce que Matt vous a toujours caché mon existence. Pourquoi cela, d’après vous ?

Sa question était condescendante et je lui lançai un regard noir en guise de réponse.

— Aucune idée ? Je vais vous le dire. Je parie que vous êtes la coincée de service. La fille qui suit le règlement à la lettre. Et dans l’accord que j’ai passé avec Matt, voyez-vous, les règles sont plutôt floues. C’est sans doute contraire à votre nature. N’est-ce pas, Gwen ?

J’avais horreur de sa façon de prononcer mon prénom, comme s’il avait tous les pouvoirs parce qu’il savait cette information à mon sujet. Je détestais cela, et en même temps, ça me plaisait. Je n’aimais pas non plus son regard pénétrant sur mon corps, langoureux et attentif. Il effleurait sensuellement chaque courbe, chaque arête.

Je détestais ça et j’adorais ça. Je détestais le fait que j’adorais ça.

Je m’assis sur la chaise qui attendait toujours derrière moi. À présent, je ne faisais plus confiance à mes jambes pour me maintenir debout.

— Quel accord avez-vous passé, au juste ? Et qui êtes-vous ?

— Je… fit-il avant de s’interrompre. Je suis JC.

Je n’avais jamais entendu parler de lui.

— JC… ?

— JC tout court.

Comme si cela répondait à toutes mes questions. Deux petites syllabes pour me remettre à ma place.

— Comme dans Jésus Christ ?

Quelques ricanements fusèrent. En réalité, si le Christ avait réellement existé, ce dont j’avais de sérieux doutes, j’imaginais qu’il était comme cet homme en face de moi. Magnétique, beau parleur, entouré d’une dépravation à laquelle il ne participait pas ouvertement.

JC partit d’un petit rire, lui aussi, à la fois effronté et sexy.

— On m’a déjà appelé comme ça. Mais en général, uniquement quand mon visage est enfoui entre les cuisses d’une femme.

Pouah.

Mais waouh, aussi.

J’avais l’habitude d’entendre ce genre de propos grivois. Après tout, je travaillais dans un club. À New York. La vulgarité ne m’était pas étrangère.

Mais la façon dont JC avait prononcé ces paroles déplacées contractait curieusement les muscles de mon bas-ventre. Et encore un peu plus bas. Dans des régions oubliées qui n’avaient pas été stimulées depuis des années, auxquelles je n’avais même pas pensé depuis des années. Une fois de plus, la salle tanguait.

Ça ne me plaisait pas. Je ne comprenais pas. Bien sûr, j’étais humaine – une femme avec des désirs sexuels comme tout le monde –, mais j’avais appris depuis longtemps à faire taire ces besoins. Ils ne se manifestaient pas sans ma permission, et ils ne propageaient certainement pas des étincelles le long de ma colonne vertébrale jusque dans mes membres, embrasant chaque cellule au passage. Non, ça ne me plaisait pas du tout.

Je décidai de ne pas en faire cas.

— Et votre accord… ?

La lueur dans le regard de JC m’indiquait qu’il savait parfaitement ce que j’essayais de cacher. À moins que ce soit le fruit de mon imagination, parce qu’il n’insista pas sur la question et j’avais le sentiment qu’il était pourtant du genre à le faire. Au lieu de quoi, il répondit :

— Je réserve la Mezzanine tous les mardis. Je m’en sers pour divertir mes amis et mes associés.

— Vous divertissez vos associés, répétai-je.

Ah, je comprenais. C’était un charmeur de serpents, un homme qui signait des contrats en soignant son relationnel à coups de filles canon et d’alcool fort.

— Avec des strip-teaseuses ?

— Enfin, croyez-vous vraiment que ces femmes soient des strip-teaseuses ? Ce sont mes associées, elles aussi. Ne les jugez pas d’après leurs tenues légères.

Il jeta un œil vers l’un de ses amis, qu’une femme torse nu chevauchait éhontément.

— Attendez encore une heure et je vous parie que les hommes aussi se seront déshabillés.

Une fois de plus, je regardai autour de moi. Cette idée m’était totalement étrangère. Être payée pour retirer ses vêtements… je pouvais le comprendre. Je venais d’un monde où, parfois, il fallait se résoudre à ces extrémités pour mettre du pain sur la table.

Mais enfreindre les règles pour le plaisir ? Cela m’échappait. Comment pouvait-on être aussi désinhibé ? Aussi débridé ?

Je secouai la tête. Tout cela me dépassait. Et j’étais furieuse, aussi. Je me sentais ébranlée, bafouée. Quand Matt m’avait proposé les mardis et les mercredis, un an plus tôt, était-ce vraiment parce que je le méritais ? Ou était-ce simplement sa façon de garder ses petits arrangements loin de mon radar ?

— Quelles conneries, marmonnai-je, orientant ma colère vers ma propre stupidité plus qu’autre chose.

JC haussa un sourcil interrogateur.

Hors de question que je m’explique.

— Que faites-vous, d’abord ?

— Tout et rien. J’investis parfois dans des projets. Le reste du temps, je traîne ici et là.

D’accord, ce n’était pas un charmeur de serpents, mais l’un de ces gars, un prodige de la bourse qui entretenait son style de vie en donnant de l’argent à d’autres afin qu’ils exécutent tout le travail pendant qu’il faisait la fête et récoltait les bénéfices.

Je levai les yeux au ciel sans pouvoir me retenir.

— Je pourrais aussi vous aider à retirer votre balai dans le cul.

L’intonation de JC était très sérieuse, mais je remarquai un petit air taquin sur son visage. Il plaisantait.

— Et comment ? dis-je en plissant les yeux. En le remplaçant par votre manche ?

— Ah, ah. Très drôle. Bien sûr, si vous voulez…

Il marqua une pause comme pour me laisser l’occasion d’accepter sa proposition. Une belle occasion, tu parles.

— Mais ce n’est pas là que je voulais en venir. Je vous proposais autre chose. Non, je vous propose autre chose.

C’est ça. Autre chose. Bien sûr.

— C’est ce que vous faites ? Un job d’appoint ?

— Je n’en tire aucun revenu, si c’est ce que vous sous-entendez. Non. Ce n’est pas un job. Je vois bien que vous êtes tendue. Je crois que je peux vous aider.

Il était sérieux alors que j’étais sarcastique. Sincère alors que j’étais caustique.

Cela me

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