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Prince d’épée
Prince d’épée
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Livre électronique248 pages3 heures

Prince d’épée

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À propos de ce livre électronique

Turondin releva l’épée émoussée qu’il venait d’abaisser. Son bras se fatiguait, mais il devait se tenir prêt à combattre; Amalo le lui ordonnait. Exténué, il para l’attaque de son rival qui s’épuisait tout autant que lui. Il recula légèrement, observa les jambes lentes de son adversaire et se lança à l’attaque. Guidant son intuition, laissant danser son épée, il remporta le duel sous le regard intrigué de son mentor qui sourit en admirant le talent brut de son apprenti ; un talent qui n’avait d’égal que celui d’un jeune homme d’une autre époque...
LangueFrançais
Date de sortie3 juin 2014
ISBN9782896839926
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    Aperçu du livre

    Prince d’épée - Antoine Boulet

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    Fred

    Will

    En forêt, la cape est essentielle…Sans oublier les chemises bleues !

    Copyright © 2013 Antoine Boulet

    Copyright © 2013 SGNT Média Inc.

    Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit sans la permission écrite de l’éditeur, sauf dans le cas d’une critique littéraire.

    Révision linguistique : Maryse Faucher

    Correction d’épreuves : Nancy Coulombe, Catherine Vallée-Dumas

    Conception de la couverture : Paulo Salgueiro, Sylvie Valois

    Illustration de la couverture : © Thinkstock

    Illustration de l’épée : Marie-Noëlle Hébert

    Mise en pages : Sylvie Valois

    ISBN papier 978-2-89733-045-3

    ISBN PDF numérique 978-2-89683-991-9

    ISBN ePub 978-2-89683-992-6

    Première impression : 2013

    Dépôt légal : 2013

    Bibliothèque et Archives nationales du Québec

    Bibliothèque Nationale du Canada

    SGNT Média Inc.

    1385, boul. Lionel-Boulet

    Varennes, Québec, Canada, J3X 1P7

    Téléphone : 450-929-0296

    Télécopieur : 450-929-0220

    www.ada-inc.com

    info@ada-inc.com

    Diffusion

    Canada : Éditions AdA Inc.

    France : D.G. Diffusion

    Z.I. des Bogues

    31750 Escalquens — France

    Téléphone : 05.61.00.09.99

    Suisse : Transat — 23.42.77.40

    Belgique : D.G. Diffusion — 05.61.00.09.99

    Imprimé au Canada

    43599.png

    Participation de la SODEC.

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

    Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.

    Conversion au format ePub par:

    Lab Urbain

    www.laburbain.com

    PRINCE D’épée

    Lame certaine Ses coups sont justes Jamais il ne perd Si ce n’est prévu

    Esquive enchanteresse Estoc imprévu Son épée si belle Chante ses louanges

    Cœurs défaillants se lèvent sous son appel Les ténèbres fuient à son éveil Comme son talent semble éternel Il bataille avec merci

    Armé de Tornal Toujours vaillant pour sa patrie Il fut nommé le prince De l’espoir de vie

    Louange de Turondin, Prince par l’épée,texte d’Ermil

    166839.jpg167059.jpg167082.jpg167063.jpg

    I

    Ce n’est que le commencement

    U n été, un automne et un hiver passèrent. Donlurg n’avait toujours pas attaqué Rocòrt, et la population commença à s’en inquiéter. Les ruminations contre la décision d’Égard avaient cédé leur place, puisque la contestation de la mobilisation de l’armée, qui avait remplacé l’appréhension d’une guerre frappant aux portes du royaume, était maintenant détrônée par la crainte de l’arrivée d’une terrifiante armée s’approchant avec lenteur. Le travail de Miat et de ses fils en devint beaucoup moins compliqué, et le soulagement que cela engendra chez eux fut immense. Cela dit, Turondin et ses amis avaient pu reprendre leurs anciennes habitudes, et Pernel s’était retrouvé la plupart du temps à la table de ses camarades. Trois messages en provenance d’Égard avaient enfin été envoyés vers Cat-l-eau à chaque début de saison, mais leur contenu n’avait guère été réconfortant. Ils étaient tous destinés à mettre à jour l’état lamentable dans lequel se trouvait la cité de Rocòrt. L’entassement, l’appréhension, le rationnement, toutes ces complications eurent malheureusement tôt fait de réduire considérablement l’état de vigilance qui avait animé les défenseurs mobilisés depuis beaucoup trop longtemps. Pour couronner le tout, quelques cas de maladie, ressemblant fortement à celle qui avait décimé la population du royaume du Lússinen durant le règne de Ballard, avaient été répertoriés ; mais, comme il semblait s’agir là de cas isolés, la chose demeura dissimulée à tous pour éviter un mouvement de panique inopportun, qui aurait eu un effet dévastateur sur le moral de tous.

    D’une saveur plus joyeuse, de nombreuses gens avaient envoyé, ou étaient venus porter eux-mêmes, des écrits transmis de génération en génération, et Namé fut très heureux de constater que certains d’entre eux contenaient des informations nouvelles sur les mœurs des nains et leurs différentes lignées, la forme du continent à l’ouest des Sombralones et une multitude d’éclaircissements sur des sujets fort intéressants. Malgré le fait qu’ils étaient presque tous plus sommaires que détaillés, ces ouvrages eurent l’effet d’un baume sur le cœur brisé de Namé. Son empressement à toujours informer Diorn, Pernel et Turondin de tout ce qui était digne d’être enseigné dans ces traités se fit l’écho de cette guérison partielle de son âme.

    Durant cette année, Turondin n’avait pas trouvé le moyen de s’exercer à l’arc, mais le jeune homme, maintenant âgé de dix-sept ans, avait grandement amélioré sa technique à l’épée. Travaillant la majorité du temps avec Pernel, tous deux apprirent ensemble à se battre et développèrent des mouvements qu’eux seuls savaient maîtriser. Lorsque venait le temps de pratiquer leurs aptitudes dans un combat groupé, personne n’arrivait à arrêter ce duo à la cadence infernale et à la synchronisation presque parfaite. Leur coordination eut tôt fait d’impressionner et plut énormément à leur maître d’armes nommé Amalo, qui s’était avéré être un professeur strict, mais ô combien sympathique et jovial.

    D’un autre côté, les combats à la lance ne s’étaient pas révélés aussi plaisants que l’aurait cru Turondin. Il existait de nombreux et différents styles de maniement de cette arme, et il fallut beaucoup de temps et d’essais infructueux avant que son mentor désespéré ne lui proposât celui que peu de gens avaient réussi à comprendre. La posture du bâton, consistant à manier une lance courte comme si elle n’avait pas de lame tranchante en son bout, lui fut salutaire et vint l’empêcher d’abandonner l’idée d’utiliser cette arme. Comme il semblait que seules quelques personnes aux goûts particuliers s’étaient laissé séduire par cet objet encombrant et peu commode, Turondin se retrouva en compagnie d’inconnus et avait préféré demeurer solitaire durant ces périodes d’entraînement. Étant donné le fait que les séances à l’épée et à la lance avaient lieu presque systématiquement aux mêmes heures, il passa beaucoup plus de temps libre qu’il l’eut cru et négligea grandement les périodes de temps où il aurait dû travailler sa technique à la lance. Il agit donc de la sorte jusqu’au jour où cela devint un fardeau et où il décida finalement de laisser complètement tomber la lance afin de s’entraîner exclusivement à l’épée. Ce jour étant la veille de celui où il décida de trouver un moyen de se dénicher arc et flèches.

    Ses amis, quant à eux, ne furent pas déçus de leurs décisions. Bien qu’ils ne pussent passer autant de temps qu’avant tous ensemble, les expéditions en forêt ne furent jamais délaissées ; même d’autres gens avaient décidé de se joindre à eux. Ou plutôt, ce fut le groupe d’amis qui les invitèrent. Quoi qu’il en soit, lorsqu’elles eurent lieu, Turondin se retrouva souvent en compagnie de Sangret, Diorn, Pernel, Fréric, Todin, Aròs et Jacielle. Cálina, quant à elle, avait manifesté son désir de les rejoindre dans leurs activités d’explorateurs et d’aventuriers, mais elle ne put trouver assez de temps et dut se soustraire à leur compagnie, puisque les tâches d’apprentie guérisseuse dont elle avait hérité en choisissant cette profession ne lui allouèrent qu’un très infime laps de temps libre quotidien. Elle avait d’ailleurs complètement abandonné l’art de la guerre, malgré son talent certain en la matière, puisque le rôle qu’elle avait endossé requérait une expertise et un don de soi immenses.

    Malgré tous ces mois passés avec ses amis, Turondin n’arrivait que très difficilement à laisser de côté le fait qu’Orgon ne vint plus jamais lui parler. Le temps seul réussit à apaiser la déception et la tristesse qui l’accablaient, mais jamais il ne parvint à oublier l’amitié si spéciale qui les avait autrefois liés. Jamais, non plus, il ne se pardonna tout ce qui avait causé la rupture de ce lien. Au moins, croyait-il, Orgon semblait heureux en compagnie de Gaki qui, de son côté, ne s’avérait pas aussi mesquin qu’avant. Peut-être la chose était-elle due à sa complaisance relativement à la popularité grandissante qu’il gagnait auprès de ceux qui étaient infidèles au trône ; il n’en demeurait pas moins que Turondin et ses amis se sentirent soulagés du répit accordé par celui qu’ils avaient presque tous toujours détesté. De plus, sa bourse étant vide, il lui fut impossible de communiquer avec Miance, pour son plus grand malheur car, chaque jour passant, il se demandait avec un peu plus de certitude si cette époque passée avec Miance était plutôt le rêve d’une vie meilleure. Avec l’entraînement intensif qu’il suivait, il lui était impossible de la rejoindre en personne, et aucune occasion de relâche ne s’était présentée depuis un an ; c’était cette distance trop grande et ce temps perdu qui furent le plus difficile à accepter, car elle lui manquait terriblement. Pernel, de son côté, avait eu beau chercher un moyen de la faire venir au château, il n’avait toujours rien trouvé et n’avait pas même su dénicher des pièces qui auraient pu servir à Turondin devenu incapable de payer les messagers : sa mère refusait de lui prêter le moindre sou. Toutes les ressources avaient été mobilisées par Égard à Rocòrt, qui cherchait désespérément des sources d’approvisionnement, et par les coûts entraînés lorsque le temps de récompenser les loyaux services des nombreux domestiques de la cité arrivait. L’esclavage n’étant, et n’ayant jamais été pratiqué, fort heureusement, au royaume du Lússinen, la possibilité de diminuer les compensations plutôt faibles de tous ces gens ne fut en aucun cas envisagée. Ainsi, l’abondance de la nourriture lors des festins quotidiens diminua, puisque cette dépense extravagante s’avérait la plus superflue.

    Depuis le printemps de cette année-là, la pluie n’avait eu de cesse de tomber. Elle tombait dru, forte et inlassable, sur les terres du roi Tur-Égard, présente à chaque lever d’un indiscernable soleil. Semer le grain devint par conséquent une tâche impossible à réaliser, puisque les champs demeurèrent bien longtemps inondés après la fonte des neiges, même sur les collines de l’Elaran, une région plus montagneuse de l’Éroc située loin au nord. Aussi, le vent ne vint plus que de l’ouest, et plusieurs parvinrent à déceler les odeurs de pourriture des tréfonds d’Urgnatel qu’il recelait.

    Ce jour-là, Amalo et tous les autres maîtres d’armes avaient décidé d’accorder un peu de répit à leurs apprentis, non pas parce qu’ils désiraient se montrer cléments envers leurs élèves ; Amalo était beaucoup trop rigoureux au sujet de l’assiduité dans l’entraînement pour cela. Simplement, le terrain était recouvert de boue et il était devenu presque impossible d’y manœuvrer librement. Certains domestiques avaient donc été dépêchés dans le but de nettoyer tant bien que mal les lieux, et personne ne put s’entraîner à cet endroit jusqu’à ce que leur travail fût complété.

    Les jeunes amis se retrouvèrent assis à leur table habituelle beaucoup plus tard qu’à l’ordinaire. La noirceur des cieux étant omniprésente depuis déjà plusieurs semaines, toutes les torches du château flambaient afin de parvenir à l’éclairer car, autrement, il demeurait en intégralité baigné de ténèbres. Alors qu’ils avaient désespéré de ne jamais revoir la lumière du soleil, ils s’étaient rendus dans le réfectoire afin d’y prendre un fugace déjeuner, puisque la nourriture qui commençait déjà à se faire rare avant le printemps devenait de plus en plus réduite à l’essentiel.

    — J’en ai plus qu’assez de cette maudite pluie ! maugréa Sangret. Il pleut le matin ! Il pleut le soir ! Il pleut le jour ! Il pleut la nuit ! rechigna-t-il.

    — On ne peut même plus aller s’entraîner maintenant, et la nourriture va bientôt nous manquer. Stupide pluie ! s’accabla Pernel.

    — Je suis persuadé que c’est Donlurg ! ­s’exclama Diorn. Je suis convaincu qu’il s’approche avec son armée. J’espère bien qu’Égard se tient prêt. Les dernières nouvelles nous étant parvenues de Rocòrt ne laissent rien présager de bon.

    — Il me semble que ce n’est pas la première fois que nous disons cela, constata Sangret.

    — Peut-être bien, mais il n’en demeure pas moins qu’il pleut sans arrêt et que cela nous mine le moral à tous, ajouta Turondin. Endurer cette pluie est une chose, mais rechigner contre elle en est une autre. Et tout aussi désagréable, ajouta-t-il.

    La tension dans la forteresse augmentait chaque jour et les vociférations se multipliaient sans cesse. Turondin n’en pouvait plus de supporter les paroles d’exaspération de chaque personne croisée à l’intérieur. Il avait d’ailleurs la très ferme intention de trouver le moyen de s’entraîner à l’arc une bonne fois pour toutes, car il n’avait que trop tardé à le faire. Plutôt que de perdre son temps à maudire une pluie venue de l’ouest et déjà maudite, il préférait user de ce sursis pour mener à bien une quête qui n’avait que trop tardé.

    — Maudite pluie ! ronchonna encore une fois Sangret.

    — Je sors, le coupa sèchement Turondin. J’ai besoin de marcher un peu.

    Personne ne se proposa pour le suivre, et Turondin en fut soulagé. Il avait besoin d’être seul et, surtout, de ne plus entendre le mot pluie ; il quitta la pièce en laissant ses amis pester à tour de rôle. Il se dirigea d’abord vers sa chambre, y prit sa cape afin de se protéger de la pluie le plus longtemps possible, puis sortit du château.

    Sous le vrombissement du tonnerre, bravant une soudaine rafale venue s’engouffrer à l’intérieur du château, il franchit le seuil de la porte en serrant son capuchon sur sa tête ; il quitta la protection que lui offrit fugacement l’arche et descendit les deux marches. Comme il ne connaissait pas de meilleur endroit pour se dénicher un arc et des flèches, il se précipita vers l’armurerie avec espoir. Peut-être trouverait­-il le moyen d’en subtiliser sans être vu en cette journée exécrable ? Le sol mouillé produisait, sur son passage, des sons qui auraient pu attirer l’attention des gardes de la cour, mais personne ne put discerner ce faible bruit : la pluie martelant la cité entière et le vent hurlant entre les maisons et les boutiques assourdissaient tout autre son de moindre envergure. Il pénétra discrètement dans le bâtiment vide de gens, invisible aux gardes qui surveillaient l’entrée du portail menant à la Haute-Ville.

    Par une fenêtre donnant sur la cour inondée, une fois parvenu à l’intérieur de l’armurerie, il vit que le travail de nettoyage avait été entamé et que personne ne regardait dans sa direction. Il y avait effectivement une quantité impressionnante d’eau sur le terrain, et les domestiques chargés de cette corvée tentaient tant bien que mal de repousser toute cette masse de liquide malvenue vers le bas de la ville. Bien qu’il eût répugné à la reine d’avoir dû ordonner une telle chose, aucune autre solution s’offrant à elle ne s’était avérée préférable. Plutôt que d’envoyer toute cette eau vers la Haute-Ville et, éventuellement, la Basse-Ville, il aurait été possible de creuser une rigole près de la muraille extérieure du château. Cependant, cela aurait eu tôt fait d’affaiblir sa solidité, et Namé avait insisté pour que cette manœuvre ne soit plus jamais même envisagée. Il avait d’ailleurs expressément expliqué que la cour d’entraînement devait être nettoyée de toute cette eau pour éviter qu’une catastrophe reliée à un effondrement ne se produise au plus inopiné moment. Ainsi, la seule solution avait été de porter toute cette eau dans de grands tonneaux vers le portail, afin de la laisser s’écouler vers la mer. De toute manière, malgré tous les efforts de ceux plus paresseux cherchant tout de même à aménager de petites brèches dans le mur séparant la cour de la Haute-Ville, la pierre lisse et dure dont était composée toute la cité rendait impossible cette entreprise, car les fondations de Cat-l-eau étaient beaucoup trop profondes.

    Turondin chercha les arcs des yeux. Il les trouva bien vite et se hâta de les inspecter afin de n’en choisir qu’un. Il prit celui lui convenant le plus : il était long, fait d’un bois pâle à la teinte roussie, et sa corde semblait avoir été changée il y a peu. Il était particulièrement beau et, malgré la réticence qu’il ressentit à l’idée de prendre le plus bel arc de cette armurerie de fortune, Turondin ne put se résigner à l’abandonner là. Mais, lorsqu’il se retourna, comme sa vigilance était passablement éhontée, il sursauta : il n’était plus seul à cet endroit.

    — Eh bien, eh bien, le taquina Cálina, qui voilà ?

    Turondin ne trouva rien à dire qui aurait pu justifier ses agissements. Il était si convaincu que personne ne viendrait le surprendre par un temps pareil qu’il en avait même oublié d’élaborer une excuse valable.

    — Je te prends la main dans le sac ! ­s’exclama-t-elle, fière de son coup.

    — En fait, elle n’est pas dans un sac, rétorqua Turondin pour tenter de s’en tirer.

    — N’essaie pas de changer de sujet, trancha Cálina. Je sais bien que tu es venu te procurer un arc, parce que j’étais moi-même venue tenter de dénicher des flèches pour celui que je me suis procuré il y a quelques mois, dit-elle en mettant fin à son supplice.

    Turondin poussa un bref soupir et se détendit.

    — Tu t’entraînes à l’arc ? demanda-t-il, soudainement bien intrigué.

    — Et toi ? rétorqua-t-elle.

    — J’avais l’intention de commencer, comme tu peux le voir.

    — Eh bien, tu ne trouveras pas la moindre flèche ici. Le truc, continua-t-elle, c’est de fouiller dans le grand sac que tu vois dehors, derrière les domestiques qui travaillent. Il est rempli de flèches oubliées sur le terrain d’entraînement, mais il y a également des lames brisées et toutes sortes d’objets qui risqueraient de nous blesser. Il faut être très prudents dans nos recherches, et surtout s’assurer que les travailleurs ne nous voient pas, lui expliqua-t-elle.

    — Tu sembles avoir de l’expérience en la matière, lui dit-il.

    — Comme je viens tout juste de te le dire, je suis moi-même venue chercher un arc il y a quelques mois de cela. Tu m’aides à récupérer des flèches, et je te montre l’endroit parfait pour s’entraîner ? poursuivit-elle.

    Turondin ne prit que quelques secondes pour réfléchir à la question ; cette proposition était plus qu’acceptable.

    — Marché conclu.

    Turondin ouvrit la porte sur un signe de Cálina qui surveillait dehors. Il sortit aussitôt et alla se poster de manière à voir sans être vu, derrière un amoncellement de tonneaux situé tout près, sur sa droite. Il signifia à son tour que personne ne regardait en leur direction, et son amie sortit en refermant doucement la porte, pour ensuite venir le rejoindre. La place étant fortement limitée à cet endroit, ils durent se coller l’un contre l’autre lorsqu’un domestique releva la tête et se retourna en leur direction.

    — Tu crois qu’il regarde encore par ici ? demanda Cálina.

    Turondin se retourna très lentement et vit que tous semblaient bien concentrés sur la tâche qu’ils accomplissaient ; il en fit part à son amie.

    — Alors, approchons-nous, décida-t-elle.

    Ils avancèrent ainsi à petits pas, en demeurant dissimulés autant que possible, jusqu’au moment où ils parvinrent enfin à portée du sac, tout près de gens qui, eux, étaient désormais à portée de voix.

    Comme ils en avaient convenu avant de partir, Cálina se positionna pour faire le guet, tandis que Turondin courut en silence vers le fameux sac. Elle lança une pierre, qu’elle avait ramassée au loin pour détourner l’attention, et Turondin s’empressa de trouver des flèches. Il se coupa à deux reprises, tandis que Cálina surveillait ses arrières en lançant de nouvelles pierres, bien loin, dans la mare d’eau qui remuait légèrement, en attisant la curiosité des domestiques.

    Turondin parvint finalement à en regrouper six, non sans peine, avant de revenir en toute hâte vers son amie.

    — Fichons le camp d’ici, lui dit-il.

    Ils s’empressèrent de rentrer à l’armurerie sans être vus. C’est du moins ce qu’ils crurent tous deux. En fait, durant leur course vers l’entrepôt d’armes, l’un des travailleurs avait relevé la tête, mais ne leur avait pas accordé plus d’attention qu’il n’en fallait ; il s’était bien vite remis au travail. Pourquoi aurait-il dû les interpeller alors

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