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Streams of Silver: Streams of Silver, #1
Streams of Silver: Streams of Silver, #1
Streams of Silver: Streams of Silver, #1
Livre électronique495 pages5 heures

Streams of Silver: Streams of Silver, #1

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À propos de ce livre électronique

L'Amour avec un grand "A" peut-il déjouer les plans de la destinée ?

Découvrez l'histoire d'Isilda, 20 ans, une jeune Alcore se transformant en faucon.

Du jour au lendemain, toutes ses certitudes volent en éclats. Elle se retrouve propulsée dans un monde qui lui est tout à coup totalement inconnu.

Entre secrets de famille et secrets inavouables, Isilda va devoir démêler le vrai du faux.

Que pouvez-vous espérer quand tout le monde autour de vous ment ? À qui se fier quand vous êtes la seule personne a être honnête et à chercher la vérité ?

Bienvenue à Newytown, une ville pas comme les autres, située sur la côte sauvage du Nord de l'Angleterre !

 

L'histoire se déroule sur deux tomes. 

LangueFrançais
Date de sortie13 avr. 2024
ISBN9798224880805
Streams of Silver: Streams of Silver, #1

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    Aperçu du livre

    Streams of Silver - La Rose Noire

    STREAMS OF SILVER

    Tome 1

    La Rose Noire

    La Rose Noire

    Brissac-Quincé (Maine-et-Loire) – France

    Tous droits réservés © La Rose Noire, 2024

    Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

    « Le Code de la propriété intellectuelle et artistique n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alinéa 1er de l’article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. »

    Playlist

    Introduction : Never Dawn – Lacuna Coil

    Prologue : The Quest and The Cursed – Delain

    Flight on broken wings - Eyes set to kill

    See who I am - Within Temptation

    Walking in the air - Nightwish

    Kings and Queens - 30 Seconds to Mars

    A rose for Epona - Eluveitie

    Black Vultures - Halestorm

    Not gonna Die - Skillet

    4 шага - СЛОТ

    The dark of you - Breaking Benjamin

    What do you do ? - Papa Roach

    Coma white - Marilyn Manson

    You want a battle (Here's a war) - Bullet for my Valentine

    Not strong enough - Apocalyptica

    P.O.W. - Bullet for my Valentine

    Where is the edge - Within Temptation

    Army of dolls - Delain

    Tears don't fall part 2 - Bullet for my Valentine

    Torn in two - Breaking Benjamin

    Breathe today - Flyleaf

    Lost in Paradise - Evanescence

    Pieces - Icon for Hire

    While we sleep - Insomnium

    Ategnatos - Eluveitie

    Living life (on the edge of a knife) - Buller for my Valentine

    White dress – Halestorm

    I name you under our cult – Sakis Tolis

    Reach - Eyes Set to Kill

    Familiar taste of poison - Halestorm

    Shudder before the Beautiful – Nightwish

    The Legacy of Atlantis – Imperial Age

    Worship - Eluveitie

    Tight Rope XX – Lacuna Coil

    Prologue

    Un visage de femme se dévoila dans l’eau, au milieu de l’évier. L’elfe, s’apprêtant à y plonger les racines de son orchidée malade, manqua de lâcher le pot sur le carrelage de la cuisine, au moment où une voix pleine d’écho résonna avec autorité :  

    — Il est temps de mettre notre plan à exécution, Sonia.

    — Vous m’avez fait une de ces frayeurs !

    Les mains tremblantes et le cœur battant à tout rompre, elle se tourna pour poser la plante sur la table, avant de revenir près de l’étrange apparition.

    Celle-ci ne releva aucunement sa remarque.

    — Sa famille est sur le point de la trahir. Elle va bientôt être vulnérable et seule. C’est le moment idéal pour mettre un coup de pied dans la fourmilière. As-tu toujours le vieux grimoire que je t’ai donné lors de notre dernière rencontre ?

    La jeune femme brune disparut quelques secondes de la pièce. Lorsqu’elle fut de retour, elle tenait un gros livre entre ses mains. Sa couverture abîmée, faite de cuir ancien et épais, indiquait qu’il avait traversé les âges.

    — Oui, le voici.

    — Fort bien ! ouvre-le à présent.

    L’elfe s’exécuta.

    Un bout de papier blanc, moderne et déchiré, tomba sur le sol. Elle le ramassa, puis le lut.

    Il s’agissait d’une série de chiffres.

    — Qu’est-ce que c’est ?

    Sans réponse, elle jeta un coup d’œil aux pages du grimoire. Des schémas, ainsi que des listes d’ingrédients, plus mystérieux les uns que les autres, ornaient des écrits ressemblant à des recettes et à des incantations.

    — Transmets ce livre aux Fuméens et aux Tersors, accompagné de ces coordonnées, et explique-leur que ce sont celles du point de rencontre des Alcores et des Hiféins. C’est tout ce dont ils ont besoin pour pouvoir contourner les sortilèges de protection et d’illusion de leurs ennemis.

    Sonia replaça le bout de papier, puis referma l’ouvrage.

    Le visage disparut alors de l’eau. 

    Chapitre 1

    J’avançai lentement au bord du précipice, face à la mer agitée. Tournée vers l’horizon, je fermai les yeux et inspirai profondément.

    Une délicieuse odeur iodée chatouilla mes narines.

    Je rouvris les paupières et observai le dégradé de couleurs pastel du soleil levant transpercer le ciel lourd et orageux, là où les flots se terminaient.

    J’aimais cet endroit.

    Il m’apaisait.

    Les vagues déchaînées heurtaient avec force l’immense paroi rocheuse. Le vent, encore frais pour la saison, soufflait en rafales sur la côte.

    Pourtant, je n’étais aucunement déstabilisée.

    Bien au contraire, j’adorais me retrouver sur les falaises dans ces moments-là.

    Le chant des goélands retentissait au-dessus de moi. Mes mèches noir corbeau virevoltaient autour de mon visage, alors que le reste de mes cheveux était noué en couettes basses de chaque côté de mon crâne.

    L’odeur en provenance du large m’avait toujours fait cet effet. Enfant, ma grand-mère Elerinna m’emmenait sur les hauteurs. Chaque fois que je m’y rendais, mon cœur s’emplissait de nostalgie, avant de retrouver son calme habituel.

    J’avais l’impression de la retrouver. Cependant, ce n’était qu’une impression puisqu’elle était déjà décédée depuis de nombreuses années à présent.

    Je continuai d’avancer au bord de la falaise.

    Bientôt, j’effleurai le vide.

    Baissant les yeux, j’aperçus la brume en contrebas, au pied du piton rocheux. Par endroits, l’écume et les vagues s’écrasaient sur la roche aiguisée telle des lames acérées. Malgré mon incapacité à distinguer les rouleaux, je pouvais entendre leur lourd fracas.

    Face au ciel menaçant, je pris une longue inspiration et étendis mes bras sans peur. Les paupières à présent closes, je sautai dans le vide.

    Le souffle du vent sifflait dans mes oreilles et fouettait mes joues à mesure que je me rapprochais d’une mort inévitable.

    Toutefois, j’étais parfaitement détendue.

    Je ne craignais rien, tout se passerait sans douleur.

    Ma chute me procurait un sentiment d’ivresse.

    Tomber ainsi, sans rien pour me retenir, faisait naître en moi une puissante dose d’adrénaline.

    L’air ne parvenait plus à mes poumons, à cause de la vitesse. Il ressemblait à un mur invisible que je brisais avec force, les bras à présent rétractés le long de mon corps menu.

    Alors que m’écraser sur les rochers semblait inéluctable, je me transformai.

    Je sentis mes membres prendre de l’importance, ce qui déclencha une sensation de tiraillement un peu partout à l’intérieur de moi et de mes muscles.

    Mes os rétrécirent et s’amincirent, comme si on les compressait. Mon nez aquilin s’allongea, tout comme ma lèvre inférieure, pour former un bec sombre et crochu.

    Des plumes poussèrent sur ma peau, provoquant de nombreux picotements à la surface de mon épiderme.

    Elles composèrent bientôt mon plumage cendré.

    Mes jambes s’affinèrent et mes pieds se divisèrent pour se muer en de puissantes serres jaunes. Mes yeux grossirent. Mes iris firent place à deux billes noires opaques. Mon regard devint plus profond et ma vue se modifia, me rendant ainsi capable de transpercer l’épaisse couche de nuages qui se rapprochait dangereusement de moi.

    Je mis subitement fin à ma chute au niveau des vagues.

    Mes pattes se rétractèrent alors que j’étendais mes ailes. Ma respiration se bloqua à l’ouverture de mon envergure. Un choc puissant me tira tout à coup vers le haut, et je m’envolai.

    Le faucon s’était emparé de moi. Le souffle du vent frôlait mes plumes, parfois même s’engouffrait jusqu’à ma peau, me faisant frissonner.

    J’étais seule, libre, et en communion avec moi-même.

    Voler était le rêve d’Icare. Mes compères et moi, nous le réalisions.

    J’avais toujours aimé cette sensation unique de liberté, de voler où bon me semble, portée par les courants, dans le plus grand des anonymats.

    Ce n’était pas comme si je risquais ma vie de cette façon. J’étais bien plus en danger sur un champ de bataille. Sauter du haut des falaises, tôt le matin, me permettait de m’évader de mon quotidien, sans être vue par les humains.

    Mon animal de transformation me correspondait bien. Le faucon est vif quand il le veut, d’un grand calme le reste du temps, un peu à part chez les siens, et c’est un excellent chasseur. On retrouvait beaucoup de ces traits en moi.

    Fille du chef des Alcores, nom donné au clan des humains élémentaires de l’Air, j’étais une personne plutôt effacée et intégrée en société.

    Ainsi qu’une redoutable guerrière.

    L’élément que je maîtrisais allait lui aussi parfaitement avec mon caractère, plutôt solitaire et volontaire.

    Force tranquille, l’Air est a priori inoffensif... jusqu’à ce qu’il se déchaîne en tempête.

    Là, il fait des dégâts. Beaucoup de dégâts.

    Portée par le vent, vers le large par-delà la côte, je profitai de ce superbe spectacle que la nature m’offrait, frôlant de mes plumes l’eau mouvementée.

    Depuis plusieurs dizaines de minutes, je volais au-dessus de la mer. Je commençais à sentir des douleurs dans mes ailes. Il était temps que je me rapproche de la terre.

    Ma mission de surveillance devait se terminer, avant d’être localisée par un ennemi ou que mes capacités ne me lâchent brusquement.

    Je baissai la tête pour observer les flots défiler sous mes serres. L’eau agitée reflétait légèrement l’ombre du rapace que j’étais devenue. Puis je me dirigeai vers la forêt, non loin des immenses falaises rocheuses et abruptes.

    Au-dessus de la côte escarpée, une scène inhabituelle m’interpella.

    Quatre silhouettes se dessinèrent sur la plage.

    J’effectuai un virage pour me rapprocher d’elles, tout en faisant attention de ne pas être détectée.

    Je les observai et les reconnus immédiatement.

    Il s’agissait des Mac Lagen. Des personnes qui, comme moi et ma famille, avaient écrit l’histoire de cette ville, à travers la guerre ancestrale que nous nous vouions.

    Leur clan était ennemi du mien depuis mille ans. Ils se nommaient : les Fuméens. Leurs membres maîtrisaient aussi la magie élémentaire. Cependant, eux manipulaient le Feu. Ils se transformaient en félins de plus ou moins grandes tailles.

    J’arrivai dans la forêt de conifères à bout de souffle.

    Mes ailes me tiraillaient, un peu comme des crampes, et mes paupières se fermaient toutes seules.

    Restée trop longtemps au-dessus des vagues, j’en payais à présent le prix.

    Après avoir scanné les lieux de ma vision perçante, je me perchai sur une branche assez haute. Elle était suffisamment grosse pour supporter le poids d’un faucon, me permettant ainsi de me reposer. Il n’y avait aucun animal, ni même aucun bruit autour de moi.

    Pourtant, mon répit fut de courte durée.

    Mon regard se tourna vers le sol.

    Happé par un des rares rayons de soleil de la matinée, quelque chose de brillant retint mon attention.

    Je descendis de mon perchoir, sans méfiance, poussée par la curiosité, et atterris par terre.

    Vu de plus près, l’objet ressemblait à un bijou... Une boucle d’oreille peut-être... Mais je n’eus pas le temps de le vérifier. 

    Chapitre 2

    Une énorme masse sombre bondit sur moi pour me clouer au sol. Mes plumes se dressèrent sur mon corps alors qu’un sursaut se faisait sentir dans ma poitrine.

    Sur le dos, les ailes écartées, je ressentais le poids considérable de ce qui m’empêchait de bouger.

    Deux grands yeux argentés m’observaient intensément, comme s’ils voulaient me transpercer. Il me fallut quelques instants avant de comprendre ce qui se passait.

    La bête rugit, dévoilant ses longues canines étincelantes. Ses griffes, presque aussi grosses que des doigts, me bloquaient avec force sur l’herbe encore humide.

    Je tentai de me relever. En vain.

    Même si le prédateur errait régulièrement dans les alentours de Newytown, la ville ne correspondait pas à son habitat naturel.

    C’était un jaguar noir. Un félin quasi légendaire.

    Soudain, ce dernier se figea. Son corps se glaça brutalement. Il ne pouvait plus bouger.

    Je repris alors forme humaine.

    Mes os grandirent et grossirent. Les deux parties de mon bec se séparèrent pour redevenir des lèvres roses, laissant de nouveau passer l’air entre elles. Mon champ de vision diminuait à mesure que le blanc, puis le noir de mes iris, s’emparaient de mes yeux. Mes membres s’étirèrent pour retrouver leur taille humaine. Mon plumage se rétracta à l’intérieur de mon épiderme, me chatouillant au passage.

    Puis mes vêtements, disparus momentanément grâce à la potion ajoutée à notre lessive afin de nous permettre de ne pas avoir à nous déshabiller lors de notre métamorphose, réapparurent.

    Enfin, je sentis de nouveau ma chevelure ébène dans le creux de mon cou.

    Je me relevai rapidement et m’éloignai de mon ennemi. Deux de mes alliés m’attendaient à quelques mètres.

    — Eh bien ! Tu y as échappé bel, Isy !

    Simon arborait son habituel sourire narquois, alors que sa sœur Roxanne manifestait sa panique.

    — On devrait y aller, avant que Victor ne se réchauffe !

    J’acquiesçai.

    Cependant, il était déjà trop tard. Le Fuméen venait de se libérer de sa prison de glace et débutait sa transformation à son tour.

    Sa fourrure foncée, épaisse et parsemée de rosettes, disparut progressivement, laissant apparaître sa peau claire. Ses moustaches se rétractèrent au niveau de ses babines. Son corps et sa tête massifs, faits de muscles principalement, retrouvèrent la finesse des courbes humaines.

    En quelques secondes, un grand jeune homme aux cheveux longs et noirs se tenait devant nous. Il préparait déjà deux boules de feu entre ses mains.

    Je me mis en position de défense.

    Cependant, le combat ne s’engagea pas.

    Victor déclencha des flammes entre nous pour nous empêcher de le voir. Il s’éclipsa pendant que le feu se propageait.

    Roxanne avait déjà commencé à créer une masse d’eau au-dessus d’elle. Elle la termina, avant de la lancer pour éteindre l’incendie.

    — Un dimanche matin habituel à Newytown ! ironisa ma meilleure amie.

    Je me mis à rire en m’avançant vers elle pour lui faire une accolade afin de la saluer.

    J’étais heureuse de la voir.

    Nous avions eu une semaine chargée toutes les deux, ce qui nous avait empêchées de passer du temps ensemble, comme nous en avions l’habitude.

    Roxy et moi avions le même âge, même si nous n’étions pas nées la même année. À l’époque, nous pouvions encore nous qualifier de « meilleures amies du monde », bien que les choses aient déjà commencé à se dégrader entre nous.

    Notre complicité se ternissait de jour en jour, sans aucune réelle explication. Cependant, nous restions proches.

    Quant à Simon, il était son grand-frère et avait deux ans de plus qu’elle. C’était un allié, mais je ne pouvais pas réellement dire qu’il était mon ami. Nous avions grandi dans deux familles complices, c’est tout.

    — Alors, comment ça s’est passé là-haut ? me demanda mon amie pour changer de conversation.

    — Je n’ai pas vu grand-chose, si ce n’est les autres membres de la famille Mac Lagen sur la plage.

    Roxanne fronça les sourcils.

    — Ça explique la présence de Victor. R.A.S. de notre côté.

    — Vous ne trouvez pas ça bizarre, vous ? Les Fuméens détestent s’approcher de l’eau. Il n’y a que Victor qui est capable de le faire, alors pourquoi le reste de sa famille se serait rendue sur la plage ? s’enquit Simon.

    Je haussai les épaules.

    Était-ce une information importante ? J’en doutais.

    Cependant, il n’avait pas tort. C’était inhabituel.

    De plus, les trois enfants Mac Lagen étaient presque tous adultes et majeurs. Il devenait rare qu’ils se retrouvent en famille de cette manière.

    L’héritier des Hiféins interrompit ma réflexion :  

    — Mesdemoiselles, je ne voudrais pas vous affoler, mais Victor n’était visiblement pas seul. On ne devrait pas rester ici.  

    J’acquiesçai silencieusement.

    Les Mac Lagen était la famille à la tête du clan du Feu. Leurs pouvoirs étaient considérables. Même si nous étions nous-mêmes les enfants de nos deux dirigeants, nous ne faisions pas le poids face à eux.

    — Tu as raison ! Et je pense que mon père, comme le vôtre, attend avec impatience les résultats de notre tour de surveillance.

    Roxanne hocha également la tête en signe d’approbation. Nous partîmes donc tous les trois, avant de prendre chacun une direction différente pour ne pas attirer l’attention.

    Sur le trajet retour, alors que la brume disparaissait, tout comme les nuages d’orage, j’eus la désagréable impression que l’on m’observait.

    Anxieuse, je me retournai plusieurs fois.

    Personne.

    La forêt était silencieuse. Seul le vent brisait la tranquillité des lieux. Pourtant, je sentais la présence de quelqu’un ou de quelque chose près de moi... J’en étais persuadée.

    Je rejoignis l’endroit où j’avais laissé ma voiture, à une dizaine de mètres du bord de la falaise.

    Toujours seule en apparence, j’entrai dans mon véhicule et mis le contact. Avant de prendre la route en direction de la ville, je jetai un coup d’œil inquiet dans les rétroviseurs.

    Je secouai la tête.

    Quelle idiote !

    J’étais bel et bien seule. 

    Chapitre 3

    La merveilleuse odeur du thé, celle du café moulu et celle des crêpes, embaumaient toute la maison.

    Ma famille, c’est-à-dire mon père Philippe, ma mère Nathalia, mon grand frère Mickaël et mon frère cadet Jimmy, était attablée dans la cuisine et prenait le petit-déjeuner.

    Je m’assis avec eux.

    Tout était déjà servi ; plusieurs pots de confiture, coings, fraises et marmelade d’oranges amères, étaient ouverts avec une petite cuillère pour se servir dans chacun d’eux, la motte de beurre demi-sel ainsi que son couteau, et le thé noir que nous avions l’habitude de consommer.

    Je remplis une tasse et entamai une crêpe déposée dans l’assiette devant moi. Elle était délicieuse, avec une pointe de rhum pour rehausser son goût, comme le faisait ma grand-mère maternelle de son vivant.

    Ma mère, une femme d’une quarantaine d’années, assez petite, menue et élégante, portait des lunettes rectangulaires et avait des cheveux blonds mi-longs.

    Je me souviens encore aujourd’hui de son parfum : un mélange de roses et de diverses odeurs florales, toutes plus agréables les unes que les autres.

    Il lui correspondait bien, même si son caractère aurait mérité quelques nuances un peu plus épicées.

    Debout près des fourneaux, maman fut la première à me questionner sur mon tour de surveillance. Elle s’essuya les mains sur son tablier, avant de se tourner vers moi :  

    — Rien à signaler ?

    Je répondis après avoir fini ma bouche.

    — Rien de très passionnant ! Une attaque de Victor et j’ai vu le reste de la famille Mac Lagen près de l’eau.

    N’insistant pas sur le sujet, je continuai mon repas.

    — Quelqu’un me passe la marmelade ?

    Mon père leva la tête de son téléphone.

    Il n’avait pas encore touché à son assiette.

    — Tu veux dire les parents et tous les enfants ? Tu as vu autre chose ?

    Je bus une gorgée de thé en manquant de me brûler le palais et de tout recracher, avant de répondre de manière naturelle. Tout ça ne m’inquiétait guère. C’était inhabituel, mais nous avions l’habitude des choses inhabituelles dans cette ville.

    — Oui, c’est bien ça.

    Le chef des Alcores plongea ses yeux intenses dans les miens. Il m’observa longuement, comme s’il voulait lire à travers moi. Un frisson remonta le long de ma colonne vertébrale. Je détournai la tête après quelques instants.

    Je détestais quand il faisait ça.

    — Nous allons rester sur nos gardes.

    Sans plus insister, il retourna sur son écran. Ma mère le fusilla du regard en se raclant la gorge. Elle avait toujours instauré le petit-déjeuner à la française (héritage de nos lointaines origines) tous les dimanches matin en famille, et gare à celui qui ne respectait pas cette tradition !

    Papa, irrité par l’attitude de sa femme, posa brusquement son portable sur la toile cirée. C’était compliqué pour lui de ne pas penser à son entreprise ou à ses responsabilités vis-à-vis de notre clan. Quel que soit le jour de la semaine, ça n’avait aucune espèce d’importance. Il travaillait et dirigeait son peuple d’une main de fer, en toutes circonstances.

    Nous avions un grand respect pour cet homme.

    Pour être honnête, il nous faisait même un peu peur.

    Tout dans son attitude et son physique inspirait l’autorité.

    Sa carrure imposante en impressionnait plus d’un. Ses cheveux longs et blonds lui donnaient un air sage et ses épais sourcils marquaient une certaine sévérité sur son visage.

    Sa manière de s’habiller, en polo ou en chemisette suivant la saison, contribuait à accentuer son côté chic et inatteignable.

    L’ambiance dans la cuisine s’alourdit en un instant lorsque mon père interpella mon petit frère, de sa voix rauque et puissante. Maman, Mickaël et moi échangeâmes un regard inquiet. Une boule se forma dans ma gorge.

    Je reposai ma fourchette, en silence.

    — J’ai reçu un message de Madame Alphonse. Comment ça tu t’es battu en cours d’anglais ?

    Le chef de famille se grandit et releva le menton pour asseoir sa supériorité. Jimmy, devenu livide, baissa les yeux vers le carrelage.

    Bien qu’il eût l’habitude de se rebeller, il savait qu’on ne plaisantait pas avec les études. D’autant plus qu’il n’était en aucun cas un garçon studieux.

    — C’est pas ma faute pa’, c’est Maxens qui...

    — Je ne veux pas le savoir !

    Il tapa du poing, impassible.

    Nous sursautâmes. La table trembla sous la violence du coup et les couverts s’élevèrent brièvement pour retomber aussitôt.

    Rien ne justifiait une telle attitude dans un établissement scolaire pour le chef des Alcores ! Il nous le rabâchait depuis que nous étions entrés à l’école.

    Mon petit frère se leva d’un bond pour quitter la pièce.

    Maman, Mickaël et moi assistions à la scène sans intervenir, les yeux rivés sur nos assiettes respectives.

    Il ne valait mieux pas envenimer la situation.

    — Assieds-toi ! Cette discussion n’est pas terminée !

    Il y eut un bruit sec. Le mur de la cuisine chancela. Je sursautai sans prononcer le moindre mot, tout comme mon grand frère et ma mère.

    Jimmy n’avait pas pu sortir. Furieux, papa avait claqué la porte d’un geste de la main, en un courant d’air qu’il avait créé à l’aide de ses pouvoirs.

    J’aurais aimé quitter la pièce sans me faire remarquer, car l’atmosphère était devenue irrespirable. Bien que la colère de notre père ne fût en aucun cas dirigée vers moi, je n’osais faire le moindre mouvement par peur de l’irriter d’autant plus.

    Je restai donc stoïque, le regard fixé sur ma tasse de thé, jouant nerveusement avec ma bague.

    Jimmy se rassit lentement, tête baissée.

    Je posai ma main sur son bras en signe de compassion. Moi aussi j’avais essayé de me rebeller contre l’autorité du chef des Alcores, mais j’avais à présent compris que toute tentative était vaine.

    Mon petit frère se dégagea, pendant que mon père continua de l’accabler :  

    — Maintenant, explique-toi !

    Il ne répondit rien. 

    Mickaël reposa son mug après avoir bu une gorgée de café. Son air amusé et malicieux me fit comprendre qu’il n’avait aucune intention d’apaiser les tensions familiales.

    — C’est sûrement parce qu’il n’a toujours pas ses pouvoirs !

    Ses cheveux courts et blonds en bataille, ainsi que sa carrure liée à sa musculature développée, contrastaient beaucoup avec son côté joueur et espiègle. À côté de lui, notre petit frère avait l’air d’un vrai gringalet.

    Mickaël avait raison et, comme souvent, son intervention bouleversa maman. Elle se précipita sur son plus jeune fils et l’enlaça fort. Elle posa son menton sur ses cheveux raides et clairs.

    Irrité, Jimmy ne pouvait quasiment plus respirer. Il essaya de se dégager. Sans succès.

    — Arrêtez de vous moquer de lui !

    Notre mère continua d’enlacer son fils comme un bébé.

    Elle faisait toujours ça quand nous plaisantions sur le fait qu’il n’avait pas encore ses pouvoirs.

    C’est vrai, ce n’était pas très intelligent, mais cette petite taquinerie nous permettait de décompresser et l’attitude de maman nous amusait beaucoup.

    D’ailleurs, nous n’étions pas les seuls, puisque notre père prenait souvent part à nos bêtises.

    — Ne l’écoute pas, mon ours en peluche ! Tu sais bien qu’ils ne vont plus tarder à apparaître.

    Mickaël et moi, nous nous regardions en imitant notre mère de manière caricaturée.

    Papa nous fit alors un sourire en coin.

    Il trouvait que sa femme surprotégeait son cadet et se posait même la question si ses pouvoirs ne mettaient pas du temps à arriver à cause de son attitude trop étouffante.

    Dans notre clan, nous avions l’habitude de découvrir nos capacités d’élémentaire avant l’âge de douze ans. Jusqu’ici, il n’y avait jamais eu d’exception connue à cette règle.

    Jimmy avait quatorze ans, allait même en avoir quinze d’ici deux mois, et aucun don lié à l’Air ne se manifestait, en dehors de sa métamorphose.

    C’était d’ailleurs pour cette raison qu’au collège tout le monde se moquait de lui. En particulier, ses camarades appartenant aux deux clans ennemis du nôtre : les Fuméens et les Tersors, ceux maîtrisant respectivement le Feu et la Terre.

    La situation se compliquait de jour en jour, car il était une cible facile. Ce retard nous préoccupait beaucoup.

    Chapitre 4

    Le midi, après avoir terminé de déjeuner, je grimpai l’escalier menant à l’unique étage de la maison et entrai dans ma chambre.

    Sa décoration, choisie par ma mère à mes treize ans, était un peu kitch britannique, avec des fleurs multicolores, des couleurs pastel, de la moquette rose poudré et des coussins blancs en fausse fourrure.

    Je la détestais. Elle ne me correspondait absolument pas.

    Côté mobilier, rien de bien transcendant non plus : un petit bureau ivoire, un lit deux personnes surmonté d’un matelas épais, une armoire avec penderie, une commode pour ranger mes vêtements, ainsi que deux tables de nuit.

    Il y avait pourtant une touche personnelle au milieu de ce décor digne des plus grands magazines de mode ; une dizaine de photographies représentant ma famille et mes amis étaient accrochées sur la porte. On pouvait notamment reconnaître Roxanne et sa petite sœur Emily sur plusieurs d’entre-elles.

    Ma chambre n’avait pas beaucoup changé au fil des années. Il n’y avait jamais eu de posters de chanteur, ni même d’objets ramenés de voyage.

    En effet, comme n’importe quelle autre personne dotée de pouvoirs magiques, j’étais condamnée à vivre à jamais dans la région de Newytown.

    Pourtant, cette réalité ne me déplaisait guère. Élevée dans cette optique, on ne m’avait jamais caché cette facette de mon futur.

    Bien sûr, lors de mon adolescence, j’avais voulu échapper à cette prison dorée, au même titre qu’une grande partie des membres des clans.

    Cependant, en vieillissant, confrontés à la mort et aux combats au quotidien, nous considérions progressivement notre situation comme positive.

    L’un des avantages, et non des moindres, c’était qu’ici, nous nous protégions les uns les autres. Grâce à ça, je ne risquais rien quant à la découverte de mon identité par les humains, ou comme nous les appelions : les Neutres.

    Nos ancêtres les avaient nommés ainsi parce qu’ils vivaient dans l’ignorance de l’existence de notre monde impitoyable.

    Même si beaucoup d’habitants de notre région étaient humains, chaque clan possédait des membres à des postes stratégiques, tels que l’Hôtel de Ville, les journaux ou encore les hôpitaux.

    Il n’était pas rare que des faits curieux soient rapportés par les Neutres. Toutefois, les personnes présentes dans ces instances faisaient disparaître avec finesse, tout témoignage ou preuve pouvant attester de notre véritable nature.

    Et il y avait de quoi faire ! On ne comptait plus le nombre d’humains ayant croisé une panthère, un ours ou même un lion en ville ou en forêt.

    Fort heureusement, l’esprit des Neutres est facilement manipulable. Nous pouvions donc aisément leur faire croire ce que nous voulions pour expliquer la présence de tout phénomène étrange ; un animal égaré en provenance d’un cirque ou de chez un particulier était notre excuse préférée.

    Cependant, je dois avouer que depuis quelques mois, plusieurs humains influents ouvraient les yeux ; ils ne croyaient plus du tout en les discours officiels. Nous savions qu’ils menaient l’enquête discrètement et nous gardions un œil sur leur avancée.

    Je m’assis en tailleur sur mon lit et saisis mon ordinateur portable.

    L’après-midi ne faisait que commencer.

    J’avais révisé toute la matinée pour les partiels et je pensais à présent passer la seconde partie de mon dimanche sur Internet, à jouer à mon jeu favori : Become Fantastic.

    C’était un MMORPG[1] médiéval-fantasy à l’intérieur duquel j’incarnais depuis plusieurs années une jeune femme nommée Blackrosé, dans une guilde[2] plutôt bien placée dans le classement mondial.

    Après avoir joué plus de deux heures, je fis une pause et descendis dans la cuisine pour boire un verre d’eau.

    Les voix des personnes installées dans la salle à manger traversaient la fine paroi entre les deux pièces. Un peu plus tôt, j’avais entendu l’arrivée de Jacques et Simon Thomas.

    Je ne fis pas trop attention au sujet de la conversation, jusqu’au moment où mon nom fut prononcé.

    Interpellée et poussée par la curiosité, je me précipitai à l’extérieur de la cuisine pour les écouter discrètement.

    Je me dirigeai alors vers la double porte qui séparait l’entrée du salon-salle à manger :  

    — Comment lui faire accepter ça ? On la connaît tous, c’est un électron libre.

    Je pouvais sentir une certaine préoccupation dans le ton du père de Roxanne.

    — Simon, je compte sur toi pour t’en occuper. Tu as carte blanche ! Je te permets d’utiliser tous les stratagèmes pour y parvenir, intervint le chef des Alcores avec autorité.

    — Tous les stratagèmes ? demanda ma mère, inquiète.

    — Absolument tous les

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