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Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52: Devenir père: entre imaginaire, symbolique et réel
Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52: Devenir père: entre imaginaire, symbolique et réel
Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52: Devenir père: entre imaginaire, symbolique et réel
Livre électronique239 pages3 heures

Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52: Devenir père: entre imaginaire, symbolique et réel

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À propos de ce livre électronique

"La Revue de Psychanalyse et Clinique Médicale" est une publication semestrielle assurée par le RPH-École de psychanalyse. Elle rassemble les actes des colloques et journées d’étude organisés par le RPH, ainsi que des articles aux contenus variés : articles théoriques, articulations théorico-cliniques, études de cas cliniques, articles de recherche.

Le "52e numéro" de la revue aborde les questions soulevées au colloque du printemps 2023 "Devenir père : entre Imaginaire, Symbolique et Réel". Qu’implique de devenir père au regard des registres Imaginaire, Symbolique et Réel développés par Jacques Lacan ? Quels en sont les enjeux ? Devenir père ne se réduit pas à l’acte biologique de reproduction, cela concerne la position qu’occupe l’homme auprès de son enfant et de la mère. L’enseignement freudo-lacanien nous apprend combien cette position de tiers possède une fonction séparatrice fondamentale pour la structuration psychique de l’enfant. Le discours des patients et psychanalysants engagés à devenir père témoigne combien leur tâche éducative et sociale est d’envergure.

Depuis cette détresse que ces moments peuvent susciter, comment la psychanalyse permet-elle à l’être de sexe masculin d’accueillir l’expérience de manière apaisée ? Qu’est-ce que la clinique psychanalytique enseigne à ce propos ? Les interventions et articles de ce numéro proposent d’étudier, d’élaborer, enfin de théoriser le devenir père.






LangueFrançais
ÉditeurPublishroom
Date de sortie14 déc. 2023
ISBN9782384548781
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    Aperçu du livre

    Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52 - RPH École de psychanalyse

    RPH-Revue-COUV-3.jpg

    Actes du XLIVe colloque du RPH

    Devenir père :

    entre Imaginaire, Symbolique et Réel

    Salle Vinci – 75002 Paris

    Samedi 26 novembre 2022

    Ouverture

    Marine Bontemps, psychothérapeute, doctorante à l’Université Sorbonne – Paris Nord, membre du RPH-École de psychanalyse, 93, rue de Maubeuge, Paris Xe, 06.32.24.89.50,

    marine.l.bontemps@gmail.com

    Une dame, reçue à ma consultation, a pu déplier de cette manière le marasme dont elle peine à se dégager : à 42 ans, cette dame veut un enfant. Elle a, dit-elle, « fait le deuil de rencontrer un homme qui pourrait être le père… » mais pas le deuil d’avoir un enfant. La loi ne vient-elle pas de ratifier qu’il lui est possible de faire un enfant seule ? Un parcours de Procréation Médicalement Assistée (PMA) est d’ailleurs débuté, mais elle trouve cela laborieux et peu romantique. Une demande d’adoption est aussi en cours. L’homme avec qui elle est en relation amoureuse ne veut pas d’enfant, sans pour autant s’opposer à ces démarches. Un ancien compagnon, quant à lui, se propose gentiment d’être donneur, mais pas père pour autant, de cet enfant à qui elle aurait alors, tout de même, une histoire à raconter… Des hommes donc mais pas de père, c’est bien ça ? « Exactement ». Cette femme qui, au seuil de cette décision, a fait le choix de venir rencontrer un clinicien pour dénouer l’angoisse qui maintenant la saisit amène avec elle la question qui nous réunit aujourd’hui : après tout, qu’est-ce qu’un père ? Faire un enfant sans faire un père n’est pas sans comporter une franche contradiction que l’angoisse de madame met en relief. Mais cela reste néanmoins un des possibles que notre modernité, et notre pays, autorisent. Nous pouvons y voir une confirmation d’un inéluctable déclin du père, de sa dissolution même, ou nous pouvons nous saisir de ces questions, peut-être pas si nouvelles, pour réfléchir ensemble à cette fonction paternelle ainsi qu’à l’expérience que les pères – ceux bien vivants comme le dit l’argument de notre journée – traversent aujourd’hui, dans cette modernité. C’est ce que notre colloque propose de discuter : comment les hommes deviennent-ils père ? À quelle fonction sont-ils appelés et comment occupent-ils cette fonction qui convoque les registres lacaniens de l’Imaginaire, du Symbolique et du Réel ?

    Depuis qu’elle existe, la psychanalyse n’a pu faire autrement que de s’intéresser au rôle du père, à son poids dans la structuration psychique d’un être, aux effets de ses expressions comme de ses manquements. La question du père parcourt l’œuvre de Sigmund Freud. En vérité, nous la trouvons partout : que ce soit dans l’élaboration du complexe d’Œdipe et dans la formation de l’appareil psychique qui en découle ; dans la lecture des cas cliniques, et notamment des cinq principaux que Freud a légués¹ ; dans l’édification mythique qu’il propose, depuis le père de Totem et Tabou², celui de la horde, jusqu’à la figure du père dans un de ses derniers écrits, ceux de l’exil, L’homme Moïse et la religion monothéiste³.

    L’inventeur de la psychanalyse a fait de la question du père et de sa loi un pivot de sa théorie en lui reconnaissant le rôle de séparateur, d’opérateur de l’intervention fondamentale qu’est la castration. Le père est celui qui interdit à l’enfant la fusion, la jouissance, le désir à l’endroit de la mère.

    Est-ce là le tout de sa fonction ?

    Jacques Lacan, à la suite, a enrichi l’édification freudienne en spécifiant en quoi la fonction paternelle ne visait pas tant l’enfant expressément…que sa mère : « (…) la fonction paternelle a ceci de décisif qu’elle pose la barre de la négativation de la jouissance sur la mère, ce qui aura des conséquences sur l’enfant »⁴.

    Lacan a pu, pour travailler la complexité de la question du père, se servir de la tripartition Imaginaire, Symbolique, Réel qu’il a introduite dans son enseignement à l’aube des années 50⁵ et qui sera dépliée aujourd’hui. En s’émancipant d’une thèse décliniste somme toute accablante pour le père – thèse qu’il avait pu soutenir encore dans les années 30⁶ – il a remanié ses vues pour ne plus faire de la carence ou de l’absence du père, l’élément pathogène des conditions de souffrances rencontrées dans la clinique et a replacé notre attention sur la fonction – signifiante – en jeu, plutôt que sur la seule personne censée l’incarner.

    Cette fonction paternelle, que désigne-t-elle ? Le terme même de fonction désigne une « activité déterminée dévolue à un élément d’un ensemble ou à l’ensemble lui-même »⁷. Nous repérons là, déjà, qu’il va être question de structure. Et que nul ne peut prétendre avoir de fonction d’être seul. Cela vient très justement dire la fonction paternelle : le père n’est jamais père seul, il lui faut la reconnaissance de la mère. Ce qui ne vaut pas à l’inverse⁸. Et le père n’est jamais père seul car sa fonction s’inscrit dans un ensemble, un registre – symbolique – auquel

    lui-même, en tant qu’être parlant, est assujetti.

    Pour saisir ce que recouvre la fonction paternelle, j’emprunterai au psychanalyste Joël Dor la métaphore qu’il formulait à partir de l’enseignement de Lacan. Le père réel, le père concret, le père de la réalité familiale est tel un ambassadeur. En cette qualité, il représente un gouvernement, celui du père symbolique, et a à « assumer la délégation de cette autorité auprès de la communauté étrangère mère-enfant »⁹. Le père n’est donc ni détenteur ni fondateur de la fonction symbolique : il en est le vecteur¹⁰. De ce père il est attendu beaucoup, il est attendu qu’il fasse valoir la loi, l’interdit – celui de l’inceste –, qu’il prescrive la castration, nécessaire à mettre de l’ordre dans le champ de la jouissance comme dans celui du désir de l’être, un ordre qui tienne compte de la reconnaissance de la différence des sexes et des générations. En somme il est attendu, je cite Lacan, que le père assume et représente « dans toute sa plénitude la valeur symbolique, incarnée, cristallisée dans sa fonction »¹¹ là où pourtant, concrètement,

    « (…) ce recouvrement du symbolique et du réel est absolument insaisissable, et qu’au moins dans une structure sociale telle que la nôtre le père est toujours, par quelque côté, un père discordant par rapport à sa fonction, un père carrent, un père humilié comme dirait monsieur Claudel, et il y a toujours une discordance extrêmement nette entre ce qui est perçu par le sujet sur le plan du réel et cette fonction symbolique »¹².

    C’est ce que nous montre et nous démontre, au quotidien, la clinique : nous y entendons les achoppements, les embuches et les désertions dans l’opération. Et cela parce que l’Imaginaire vient la contaminer immanquablement.

    Écoutons un peu cette clinique des pères en devenir et des jeunes pères.

    Il y a par exemple monsieur A., venu consulter pour des crises d’angoisses inédites dans sa vie – enfin presque. Il ne comprend pas car tout va bien pour lui, peut-être quelques inquiétudes quant à sa reconversion professionnelle. Rien de plus. Après deux ou trois séances, il est amené, par ses associations, à parler de tout autre chose : lui et sa compagne sont dans un projet de PMA, à l’étranger. C’est une « super nouvelle » pour lui, je le cite, mais, je le cite aussi, « c’est peut-être ça qui me stresse ». Le symptôme qui aujourd’hui l’a poussé à consulter était déjà advenu, très furtivement, deux fois dans le passé. Une première fois dans son enfance et il l’associe à la mésentente de ses parents. La seconde occurrence de ce symptôme est apparue lorsqu’il était au lycée ; il l’associe à la décompensation psychotique de son père. Aujourd’hui, le symptôme advient concurremment au projet de devenir père. C’est alors qu’il peut, sur le divan, reconnaître dans sa peur voire son désir que ce projet n’aboutisse pas : « Y’a une part de moi qui a peur de devenir comme mon père. L’angoisse de ne pas pouvoir être père, c’est l’angoisse de devenir le même père que le mien. »

    Il y a aussi monsieur B., un patient, père depuis quelques mois, qui, au moment où j’écrivais ces lignes, dépliait justement en séance : « J’ai eu une éducation très rigide, ma mère était très rigide. D’ordinaire, mon père l’était moins. Mais quand il disait non, c’était non négociable. Quand j’ai voulu aller faire mes études dans une autre région, il a dit non. Pas de discussion possible. Mon frère, il s’était opposé à mon père, très durement, c’était violent. Moi je voulais pas reproduire la même chose. Je me suis tu, et après j’ai fui, de plus en plus loin. À Paris d’abord, puis en Afghanistan, et après à Taïwan. J’ai mis une immense distance physique, mais en fait, son jugement, il est avec moi, moralement, dans mes pensées, tout le temps. Je ne l’ai pas affronté mon père, et ça me revient aujourd’hui où je suis à cette place de père vis-à-vis de mon fils. »

    Que nous disent ces deux hommes, et d’autres avec eux ? Que dans les étapes qu’ils traversent s’invite une figure qu’ils aimeraient à tout prix éloigner, éviter, détruire peut-être, défigurer au moins : celle de leur propre père. Une figure à laquelle ils s’identifient pourtant, faute d’avoir pu la laisser, pourrait-on dire, reposer en paix. C’est, ainsi, le père imaginaire de leur propre Œdipe qui contamine la fonction paternelle dont ils ont à se faire les ambassadeurs.

    Quelle difficulté pour un père de donner la castration – pour reprendre un mot cher à Françoise Dolto¹³ –, entendre la castration symbolique, lorsqu’il se trouve encore aux prises, imaginaires, avec celui censé la lui avoir prescrite ? Les tentatives pour faire régner l’ordre et pour endosser la fonction seront bien laborieuses pour celui qui voudrait, en quelque sorte, faire passer un message sans s’être reconnu, lui-même, tout à fait concerné par sa portée. En restera une dimension de semblant. Alors, difficulté pour certains de supporter agressivité, haine et envie qu’ils reçoivent en retour de leurs actions ; et excessivité pour d’autres qui, en cherchant à donner la preuve de leur statut par des démonstrations de pouvoir confinant à la toute-puissance, récusent par là même la castration et « conteste[nt] la dimension du manque pour [leur] propre compte »¹⁴.

    À nous d’étudier maintenant comment la psychanalyse et concrètement comment la conduite des cures peuvent amener à ce que se conjoignent ces registres. Il me tarde d’écouter mes collègues que je remercie de s’être proposés pour intervenir aujourd’hui. Et je vous remercie d’être venus avec l’idée de sortir enseignés de ces interventions et du discours – psychanalytique – qui les peuple. Que nos discussions soient riches et animées. Je nous souhaite un excellent travail.

    Références bibliographiques

    Ouvrages

    Dolto, F. Séminaire de psychanalyse d’enfants II, Paris, Seuil, 1985.

    Dor, J. (1989). Le père et sa fonction en psychanalyse, Toulouse, Érès, 2012.

    Freud, S. (1905-14). Cinq psychanalyses : Dora, Le petit Hans, L’homme aux rats, Le président Schreber, L’homme aux Loups, Paris, Payot, 2017.

    Freud, S. (1912). « Totem et Tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, 2009, pp. 189-383.

    Freud, S. (1937). « L’homme Moïse et la religion monothéiste »,

    in Œuvres Complètes, Vol. XX, Paris, PUF, 1989, pp. 75-217.

    Lacan, J. (1953). « Fonction et champ de la parole et du langage », in Écrits, Paris, Seuil, 1966, pp. 237-321.

    Article de périodique

    Izcovich, L. « Du Nom-du-Père au père qui nomme ». Champ lacanien, 2006, vol. 3, no 1, pp. 23-31.

    Liens internet

    Lacan, J. (1938). Les complexes familiaux en pathologie, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1938-03-00.pdf

    Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1953-00-00.pdf

    Trésor de la Langue Française informatisé, Fonction, https://www.cnrtl.fr/definition/fonction


    1 Freud, S. (1905-14). Cinq psychanalyses : Dora, Le petit Hans, L’homme aux rats, Le président Schreber, L’homme aux Loups, Paris, Payot, 2017.

    2 Freud, S. (1912). « Totem et Tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, 2009, pp.189-383.

    3 Freud, S. (1937). « L’homme Moïse et la religion monothéiste », in Œuvres Complètes, Vol. XX, Paris, PUF, 1989, pp. 75-217.

    4 Izcovich, L. « Du Nom-du-Père au père qui nomme ». Champ lacanien, 2006, vol. 3, no 1, p. 24.

    5 Lacan, J. (1953). « Fonction et champ de la parole et du langage », in Écrits, Paris, Seuil, 1966, pp. 237-321.

    6 Lacan, J. (1938). Les complexes familiaux en pathologie, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1938-03-00.pdf

    7 Trésor de la Langue Française informatisé. Entrée « Fonction », https://www.cnrtl.fr/definition/fonction

    8 Puisque la mère est le « pôle qui représente le facteur naturel, ce à quoi le sujet est lié par un lien, lui, incontestablement naturel », in Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1953-00-00.pdf

    9 Dor, J. (1989). Le père et sa fonction en psychanalyse, Toulouse, Érès, 2012, p. 17.

    10 Ibid., p. 12.

    11 Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, op. cit.

    12 Ibid.

    13 Dolto, F. Séminaire de psychanalyse d’enfants II, Paris, Seuil, 1985, p. 11.

    14 Dor, J. Op. cit., p. 75.

    Devenir père : qu’est-ce que ça veut dire ?

    Ouarda Ferlicot, psychanalyste, doctorante au CRPMS, 72 rue Maurice Thorez, 92000 Nanterre, 06.22.79.39.34,

    ouardanm@gmail.com

    Résumé : Devenir père commence tout d’abord par un désir d’être père. Qu’est-ce que ce désir produit comme difficulté ? Est-ce que devenir père s’inscrit de la même manière pour un homme que la question du devenir mère pour une femme ? Ce désir d’être père peut relever de l’impossible. C’est ce que monsieur C. témoigne dans son discours. Il rend compte de l’articulation du désir de devenir père avec le complexe d’Œdipe dont il est la tâche d’une psychanalyse d’en permettre la traversée.

    Mots-clés : père biologique – père symbolique – fonction paternelle – père mort – signifiant du Nom-du-Père.

    Est-ce que l’homme devient père avant la grossesse ? Pendant le processus de grossesse ? Devient-il père à la naissance de l’enfant ? Ou alors se construit-il sa position de père au fur et à mesure que l’enfant grandit ? La question du devenir père se pose-t-elle à un homme de la même manière que celle du devenir mère ?

    Je n’ai pas rencontré d’homme venu en première consultation avec cette plainte ou cette difficulté d’être père. Je me suis donc arrêtée sur ce constat de ne pas rencontrer dans ma clinique des hommes qui viennent avec cette souffrance : « Je souffre de ne pas réussir à devenir père » ou « J’ai des difficultés dans mon rôle de père ». C’est plutôt la question de l’impossible à le devenir qui s’est présentée. De ce constat, me vient alors la question : qu’est-ce qui ne répond pas dans le devenir père à la question du devenir mère ? Autrement dit, comment s’inscrit cette question dans le trajet d’un homme et de quelle manière ?

    Un père est important dans la vie d’un homme et dans la vie d’une femme. D’abord, c’est lui qui ouvre au champ du désir, de la culture, de la différence et de l’Autre du langage. Puis, plus largement, il permet l’inscription de la métaphore paternelle, régulatrice des pulsions, de la reconnaissance de l’autorité de l’Ⱥutre barré, du manque qu’il institue avec l’instauration du circuit de la dette symbolique.

    Ainsi, la fonction paternelle et ce qui en découle, l’inscription du signifiant du Nom-du-Père, sont nécessaires pour rendre possible l’amour, la rencontre avec l’autre, l’échange et le partage. Ce signifiant vient en lieu et place du désir de la mère qui est refoulé, obligeant le sujet à faire reconnaître son désir propre au moyen de sa propre parole. Ainsi, la paternité rencontre la question de la métaphore paternelle et de la mise en place du signifiant du Nom-du-Père dans la chaîne signifiante. Celle-ci rend effective la fonction de symbolisation et de médiation pour un être parlant.

    Dans les cures, qu’il soit présent, absent, défaillant, aimé ou haï, psychanalysants et psychanalysantes parlent de leur père, ou plutôt de l’imago paternelle, preuve qu’un père est aussi important dans la vie d’un homme que dans la vie d’une femme. Mais alors de quel père parlons-nous ? Du père biologique ? Du « père de cœur » comme le nommait un psychanalysant ? Du père adoptif ? Sigmund Freud

    rappelle que « le fait de l’engendrement par le père n’a pas, en effet, d’importance psychologique pour l’enfant »¹⁵. Autrement dit, cela ne laisse-t-il pas la chance à n’importe qui d’occuper cette position ? Je pense aux beaux-pères qui endossent très bien ce rôle et prennent assez simplement la place de père symbolique à côté du père biologique.

    En 1938, dans son texte Les complexes familiaux dans la formation de l’individu, Lacan évoque le « déclin social de l’imago du père »¹⁶. La montée de la religion apparaît comme l’un de ses effets, tout comme semble l’être le multipartisme dans la vie politique, ou même cette relation nouvelle au travail où ce qui se dessine est une logique du moindre effort au profit d’une logique partisane du bien-être comme dû. C’est ainsi l’inversement du circuit de la dette qui est à l’œuvre et par conséquent l’absence de reconnaissance d’un Ⱥutre barré, celui de la castration.

    En 1912, avec Totem et tabou¹⁷, Freud démontre comment s’institue le triomphe du père, en s’appuyant sur le mythe de la horde primitive. En effet, les fils du père, envieux et jaloux de voir celui-ci posséder à lui seul toutes les femmes, se liguent contre lui pour le tuer et le manger. C’est ainsi que s’instaure une identification au père mort, du fait de l’ambivalence de sentiment à l’égard du père, à la fois rival et modèle. En effet, après avoir réalisé le crime commis, les

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