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Le cri du cœur - Tome 1: Roman
Le cri du cœur - Tome 1: Roman
Le cri du cœur - Tome 1: Roman
Livre électronique307 pages4 heures

Le cri du cœur - Tome 1: Roman

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À propos de ce livre électronique

Quand Joséphine aperçoit Corentin sur le pas de sa porte, son monde s’effondre une fois de plus. Envahie par les souvenirs, elle n’est pas prête à lui pardonner. Pourquoi revenir après six ans d’absence ?

Coïncidence des plus étranges, depuis qu’il est réapparu, Joséphine reçoit de troublants colis anonymes. Simple admirateur secret ou dangereux prédateur ? Elle va devoir mener l’enquête, quitte à mettre ses proches et sa propre vie en danger.

À PROPOS DE L'AUTEURE

Yvanna Holonne signe son tout premier roman où elle mêle à la fois sa passion pour l’écriture et sa propre histoire. Elle nous emmène, grâce à son vécu, dans les difficultés du harcèlement scolaire, du premier amour et de la quête d’identité.


LangueFrançais
Date de sortie8 oct. 2021
ISBN9791037739490
Le cri du cœur - Tome 1: Roman

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    Aperçu du livre

    Le cri du cœur - Tome 1 - Yvanna Holonne

    Avant-propos

    Le Larousse définit le harcèlement moral comme des agissements malveillants et répétés à l’égard d’autrui, susceptibles notamment d’altérer sa santé physique ou mentale, de porter atteinte à ses droits ou à son avenir professionnel, ou, quand ils s’exercent à l’égard du conjoint ou concubin, par exemple, d’altérer ses conditions de vie.

    Pour ma part, il avait plusieurs visages et plusieurs conséquences. J’ai réussi à refaire surface, à dépasser tout ça et à en sortir plus forte. Mais j’ai eu de l’aide. De l’aide pour me relever quand j’étais incapable de le faire moi-même. Ça, tu ne le liras jamais sur Internet, tu ne trouveras pas l’aide dont tu as besoin en tapant le mot « harcèlement » sur un moteur de recherche. Peut-être que ce livre y contribuera. Peut-être pas. En tout cas, sache que tu n’es pas seul(e). Et que des supports bienveillants existent. Alors, n’abandonne pas. La vie est trop belle pour se laisser abattre par des cons.

    Numéro vert : 3020 services et appels gratuits.

    Chapitre 1

    Different worlds

    D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours craint l’eau. Je prenais mes douches en cinq minutes, montre en main. J’évitais les bains et j’avais en horreur les piscines. L’eau était, pour moi, synonyme de danger, d’abandon et de perte. Cependant, l’immensité de la mer m’a toujours fascinée. La mer en elle-même m’a toujours attirée. Elle pouvait être calme et sereine et la minute d’après, déchaînée et en colère. Elle était pleine de mystères. La pluie me faisait le même effet. J’adorais rester sous ses flots. J’avais l’impression qu’elle reflétait mon humeur. La pluie m’anesthésiait. Mais dès que l’orage arrivait, je sursautais et la pluie devenait mon ennemie. Elle m’effrayait et me rappelait trop de souvenirs angoissants. J’aimais pouvoir me dire que j’étais parfois comme la mer ou la pluie. Je pouvais être cette immensité calme et rassurante. Mais j’étais capable également de tout engloutir sur mon passage et de ne laisser que le silence derrière moi.

    J’avais profondément aimé deux hommes dans ma vie. Et comme l’océan que j’étais, je les avais avalés puis recrachés sans scrupules. Je ne savais pas trop ce que je faisais à l’époque. Enfin, si, plus ou moins. Je me cherchais. Mais c’était une quête qui avait laissé beaucoup de traces. Je pensais que toute la vie, on se bousculait, on s’explorait, afin d’y trouver un sens. Afin de pouvoir vivre pleinement, sans remords. Alors c’était ce que je faisais. Je vivais, je tombais amoureuse, je commettais des erreurs, je pardonnais. Et plus important encore, je me pardonnais.

    Joséphine

    Je travaillais à La Rose des Sables, un magasin de chocolats depuis un an maintenant. Je m’y plaisais et cela me permettait de payer mes études en communication et marketing. Mon appartement était situé dans un quartier calme au rez-de-chaussée et j’avais un adorable chat, Toulouse.

    Aujourd’hui, mon collègue Pierre, était très en forme ! J’avais donc passé une agréable journée et je rentrais chez moi d’excellente humeur. J’ouvris la porte de mon immeuble, puis la porte de mon appartement, beaucoup trop calme quand on savait que j’avais une coloc particulièrement bruyante. Toulouse miaula entre mes jambes et l’écho de mon « putain » résonna dans l’appartement maintenant vide. Ma coloc m’avait cambriolée. J’aurais dû m’y attendre. On se prenait la tête tout le temps en ce moment et elle n’était pas la personne la plus fiable que je connaissais.

    Elle était même partie avec les rideaux et les poubelles ! Je me mis à rire. Un rire hystérique et incrédule. Après le rire, les larmes se pointèrent.

    — Non Joséphine, tu ne pleureras pas. C’est juste un petit souci, tu vas t’en sortir.

    Je n’avais pas assez d’argent pour me racheter de nouveaux meubles, mais au moins elle m’avait laissé le lit et le canapé que j’avais achetés ! Ma sœur Laure profita de ce super moment de gloire pour passer me faire un coucou.

    — Merde, Jo, qu’est-ce qui s’est passé ?

    — Marion s’est tirée. Avec tous les meubles. Et les poubelles aussi d’ailleurs.

    — Ça va aller ? Et pourquoi elle a fait ça ? Je pensais que vous vous entendiez bien ?

    — En fait, pas tant que ça. C’était compliqué ces derniers temps…, soupirais-je.

    — Bon, donne à manger à Toulouse et remets ton manteau. On va boire un verre et oublier un peu ce début de soirée catastrophique.

    Je me suis donc laissé entraîner par ma petite sœur de vingt ans, étudiante infirmière, dans un bar appelé Dernier bar avant la fin du monde. Après quelques bières, je me sentais déjà mieux et j’avais retrouvé le sourire.

    — Alors, comment se passent tes cours, sœurette ?

    — Pour le moment, ça va ! J’ai juste une matière de première année à repasser à la fin du semestre. Mais ça me prend la tête.

    — Et les petits vieux dont tu t’occupes ?

    — Le week-end dernier, j’ai dû laver toute la chambre d’un charmant vieux monsieur. Il avait étalé toute sa merde partout. Il avait aussi arraché sa sonde. Rappelle-moi pourquoi je fais ça ?

    — Parce que tu aimes ton prochain ?

    — Je suis maso. Je ne vois que ça…

    Après la bière, nous sommes passées aux cocktails et nous avons continué à discuter de nos boulots respectifs en rigolant trop fort et en buvant beaucoup trop. Mais c’était une chouette soirée. J’annonçais à ma sœur que j’allais régler nos boissons et je me suis avancée vers le bar avec ma carte. J’ai dû crier pour me faire entendre par-dessus la musique et les voix trop fortes autour de moi.

    — Vos consommations ont déjà été réglées, m’annonce le barman.

    Étonnée, j’ouvrais et je fermais la bouche, un peu comme un poisson hors de l’eau.

    — Pouvez-vous me dire qui les a payées ?

    — Un jeune homme qui doit avoir votre âge. Il a dit qu’il vous connaissait.

    Il y en avait au moins pour une cinquantaine d’euros quand même… J’annonçais un vague merci au barman et allai rejoindre ma sœur qui m’attendait à notre table. Elle n’était plus seule. Trois mecs l’avaient rejointe et discutaient avec elle. Je souriais en la regardant. Laure était une jolie jeune femme et les hommes s’en rendaient tous compte. Elle était une brune d’un mètre soixante-dix, avec les mêmes yeux bleus que les miens, des taches de rousseur parsemaient son nez fin et deux fossettes agrémentaient son visage d’ange. Elle avait récemment ajouté une grosse mèche rouge sur ses cheveux. Les hommes, quant à eux, déchantaient rapidement quand ils l’entendaient les rembarrer. Elle avait un sale caractère, la famille s’en était accommodée. Les hommes un peu moins… Je ne savais pas ce qu’elle leur avait dit, mais ils étaient repartis à leur table avec un sourire penaud.

    — Quelqu’un a déjà réglé nos boissons.

    — Ah bon ? Qui ça ?

    — Bonne question, le barman n’en sait pas plus… Au fait, qu’as-tu dit aux mecs pour les faire fuir avant que j’arrive ?

    — Juste que je côtoyais souvent de la merde ces derniers temps et que je n’avais pas envie d’en côtoyer ce soir.

    J’explosai de rire, ce qui me valut quelques regards de la part des hommes en question.

    — Bon allez, viens madame la comique. J’ai commandé un Uber, il arrive.

    On prit la route, direction la sortie. Juste avant de franchir la porte, je sentis mes petits cheveux sur ma nuque se redresser. J’avais l’impression que l’on me fixait intensément. Je me retournai et ne vis personne à part une ombre s’éloignant entre les différents clients du bar. Je secouai la tête, confuse et entrai dans l’Uber à la suite de ma sœur. Arrivées à la maison, on se mit en pyjama et dormit d’une traite jusqu’au lendemain.

    ***

    Je sortis du lit un peu avant neuf heures avec une méchante gueule de bois. Je fronçai les sourcils quand je vis mes sacs-poubelle éventrés au milieu de la cuisine. Sans poubelles, Toulouse a pu se faire plaisir en éventrant les sacs et en jouant dans les ordures. Génial… Je ramassai les bêtises du chat et commençai à préparer le petit-déjeuner. Je fis donc du pain perdu et préparai deux tasses de thé. Laure entra en bâillant, vêtue d’un short et d’un débardeur.

    — Ça sent bon, miam !

    Elle s’installa sur le tabouret en face de l’îlot de la cuisine et se mit à siroter son thé tout en soufflant dessus. Enfin, elle partit au boulot.

    Je gémis quand je vis tout le foutoir à ranger suite au départ précipité de Marion. Première chose, je devais tout ordonner. Ensuite, tout laver et après appeler ma meilleure amie Mayana pour lui raconter ce qu’il s’était passé la veille. Après avoir fait tout ça, je me rendis chez mes parents pour leur passer le bonjour. Ils étaient géniaux. Mais genre vraiment. Ma mère était la femme la plus douce et la plus gentille sur cette Terre. Mon père prenait soin de sa famille mais avait un sale caractère. Quand j’étais ado, nous nous disputions tout le temps et nous n’étions d’accord sur presque rien. J’étais l’aînée d’une fratrie de six enfants et il n’était pas facile d’être à la hauteur. J’avais traversé une période difficile au lycée qui m’avait rendue méfiante, colérique et parfois atrabilaire. J’étais du coup souvent punie et privée de sorties. J’étais une boule nerf et de tensions qui adoraient le conflit et mettre son père en rogne. L’adolescente modèle quoi ! J’ai fini par me calmer en arrivant à la fac. J’étais un peu plus sereine. Cependant, être une grande sœur n’était pas toujours évident. Je devais calmer la relation tumultueuse qu’avait mon frère avec mon père et jouer mon rôle de protectrice avec mes petites sœurs. J’avais l’impression d’avoir constamment un poids sur les épaules. C’était épuisant… J’étais celle sur qui on se reposait. Un jour, j’ai demandé à mes sœurs pourquoi. Pourquoi était-ce toujours moi qui devais résoudre les conflits familiaux et autres problèmes ? Laure m’avait alors répondu : « parce que de nous toutes, tu es la plus forte, celle qui encaisse tout et qui ne se plaint jamais ». Je l’avais regardé en soupirant et en hochant vaguement la tête. Mais tout ce à quoi je pensais, c’était à quel point elle avait tort. Je n’étais pas forte, j’étais brisée. Je survivais. En un sens, c’était peut-être une forme de force… J’avais donc quatre sœurs et un frère. Ma famille nous a toujours dit que l’on fonctionnait comme des jumeaux. Laure et Alex étaient les deux sœurs les plus chiantes mais aussi les plus généreuses. Elles adoraient jurer, se mêler de la vie des autres et se moquer. Julie et Athéna étaient les plus sensibles et peut-être les moins proches de la famille. On aimait les taquiner en les appelant « Caliméro » car elles avaient tendance à se plaindre et à pleurnicher pour un rien. Mais on les aimait quand même ! Et pour finir, il y avait Julien et moi. On était connu pour être les plus sanguins, les plus rebelles. On ne mâchait pas nos mots et on disait les choses franchement. C’était mon petit frère et j’aurais fait n’importe quoi pour lui. Malheureusement, il avait la fâcheuse manie de se foutre dans des histoires qui sentaient mauvais et à attirer les personnes peu recommandables.

    J’étais donc toujours très heureuse de retrouver ma famille pour partager un repas et discuter des uns et des autres. Laure et Julie avaient leurs propres appartements et n’étaient donc pas forcément présentes quand moi-même j’y étais. Ce dimanche-là, elles n’étaient pas là. Laure était au travail, ce que je savais déjà, et Julie passait le week-end chez ses beaux-parents. J’ai pu donc profiter de cette après-midi pour discuter et prendre des nouvelles de mes parents. Mon papa était flic et adorait son boulot ! D’ailleurs, cela se reflétait dans notre éducation stricte. Plus il était sévère, plus j’étais désobéissante. J’adorais enfreindre les règles et cela m’avait valu des mois de sorties annulées. Ma mère, quant à elle, était une employée de bureau. Son poste lui convenait et elle effectuait ses missions avec le sourire et le charme qui la caractérisaient. Je chérissais ma famille. Elle n’était pas parfaite, mais comme on disait, la perfection, c’était chiant !

    En milieu de soirée, je décidais de prendre le métro pour rentrer chez moi. Au bout de la rue donnant sur mon immeuble, je commençai à chercher mes clés dans le fond de mes poches. J’ouvris la grande porte massive de la bâtisse comprenant seulement quatre appartements. Arrivée dans le hall d’entrée, je sursautai en voyant une ombre assise sur les marches. La main sur le cœur, je regardai bouche bée la personne se lever. Il faisait sombre, je ne voyais pas grand-chose. Je tendis donc la main vers l’interrupteur et reculai comme si on m’avait brûlée quand je reconnus la personne. La dernière fois que je l’avais vu, c’était il y a six ans. Il n’avait pas changé. Je restai comme figée, mon corps ne me répondait plus et j’avais soudain la nausée. J’étais redevenue la gamine effrayée de dix-sept ans observant son monde s’effondrer. Je lui avais peut-être brisé le cœur mais lui avait brisé mon âme. Et rien que pour cela, le voir me donnait une crise d’angoisse démentielle. Corentin était resté imperturbable. Dans le flou de mon cerveau, je crus l’entendre prononcer mon prénom plusieurs fois. C’était quand il me prit la main pour me rendre mes clés que j’avais lâchées au sol que je retrouvai la parole.

    — Ne me touche pas, fis-je en sifflant.

    Je fronçai les sourcils quand je le vis ouvrir ma porte et entrer chez moi. Je le suivis, hébétée.

    — Qu’est-ce que tu fais là, Corentin ? Comment as-tu su où j’habitais ?

    — Marion m’a donné ton adresse. Je t’ai croisée plusieurs fois ces derniers temps. J’avais besoin de te voir. Et de te parler…

    Il avança vers moi comme un prédateur abordant sa proie. Comme s’il craignait de m’effrayer et que je parte en courant. Il avait raison. Je pensais à une seule chose : prendre mes jambes à mon cou. Arrivé devant moi, il souleva sa main et l’arrêta juste avant de la poser sur ma joue. Le souffle coupé, je le regardai avec des yeux complètement écarquillés. Et je replongeai dans mon passé…

    Huit ans plus tôt…

    J’avais peur… Et si je ne me faisais pas d’amis ? Je venais d’arriver dans un nouveau lycée. Toutes mes copines avaient choisi d’aller dans un établissement public. Mes parents, eux, avaient opté pour le lycée privé le plus coté de la ville. Tous ces élèves bien habillés m’intimidaient. Je ne savais pas quoi faire de mes mains que je triturais sans cesse depuis que j’avais passé le portail de l’établissement. Pour intégrer tous les élèves, les profs avaient décidé d’effectuer des petits jeux pour notre premier jour de classe. Des jeux de confiance et de présentation. Grâce à cela, j’avais pu discuter avec Marta, une Polonaise très gentille qui est juste après moi dans la liste de classe par ordre alphabétique. À la suite de tous ces jeux, notre professeur référent avait organisé le plan de classe. Après m’avoir appelée, je m’assis à la place qu’elle m’avait attribuée et attendis ma future voisine. Les petites peaux autour de mes ongles étaient tellement fascinantes que je n’ai pas vu que j’avais un nouveau voisin.

    — Je peux t’emprunter ta gomme s’il te plaît ? J’ai oublié la mienne.

    Je la lui tendis en rougissant. Derrière moi, un garçon marmonnait quelque chose sur le fait de ne pas pouvoir choisir son voisin. Il était à côté d’une fille très timide et peu à son avantage malgré ses traits fins.

    — Ne fais pas attention à Quentin, il n’aime personne. Moi c’est Corentin, merci pour la gomme, me dit-il avec un petit sourire.

    C’est à ce moment précis que je suis tombée amoureuse de Corentin Nephesh. De tout mon cœur mais aussi, malheureusement, de toute mon âme.

    Je secouai la tête pour chasser ces souvenirs. Je sentais le bout de ses doigts frôler ma joue droite. Un gros frisson me parcourut et je reculai de quelques pas. Le revoir ici après autant de temps, dans mon havre de paix, m’affolait plus que de raison. Je ne savais pas quoi faire de mes émotions.

    — Corentin…

    J’avais murmuré son prénom sans réellement savoir pourquoi. En tout cas, il le prit comme un consentement pour me toucher de nouveau mais avec plus d’insistance. Il posa sa paume entière sur ma joue et caressait ma mâchoire avec son pouce. Sa main était froide, imposante, familière. Je fermai les yeux et laissai échapper un soupir tremblant. Je devais rêver. Un cauchemar dans lequel mon bourreau du lycée venait me hanter. C’était forcément ça, car je ne comprenais pas sa présence ici, dans la bulle de bien-être et de sécurité qu’était mon appartement. Je voulais qu’il parte et ne revienne jamais et, en même temps, je voulais lui tirer le bras pour le rapprocher de moi et l’embrasser. Je voulais me souvenir du toucher de ses lèvres sur les miennes. Une larme solitaire coula le long de ma joue. Il l’effaça à l’aide de son pouce. Il m’étourdissait et me désorientait.

    — Joséphine, on peut parler ?

    Plus personne ne m’appelait Joséphine à part mes parents. Dans sa bouche, j’avais l’impression qu’il appelait la Jo du lycée. Sauf que je n’étais plus la même. J’étais abîmée, plus dure et surtout, j’avais appris de mes erreurs.

    — Donne-moi une seule bonne raison de te parler et de remuer toute la merde du lycée.

    — Je veux tout réparer. Laisse-moi essayer.

    Sa voix douce et posée contrastait avec son froncement de sourcils. Cela lui donnait des rides sur le front.

    — Pourquoi maintenant, Corentin ?

    — J’ai mes raisons. Donne-moi une chance, Jo. Laisse-moi réapprendre à te connaître. Laisse-moi être ton ami.

    Je ne savais pas si c’était son regard suppliant ou l’envie subite de connaître les réponses à toutes les questions que je me posais depuis six ans mais je me suis entendue lui répondre :

    — Une chance, c’est tout ce que tu auras.

    ***

    Chapitre 2

    Time after time

    Je m’étais souvent demandé quelle réaction j’aurais le jour où je verrais à nouveau le premier garçon que j’avais aimé. Est-ce que je sourirais comme une idiote ? Est-ce que je le rouerais de coups pour m’avoir laissée ? Qu’est-ce que je ressentirais ? Un profond dégoût ? Une haine incommensurable ? Ou juste un vide ? Un vide béant causé par son absence trop longue. J’étais en réalité bien loin du compte.

    Joséphine

    En me réveillant ce matin, je me suis demandé si j’avais rêvé la dernière soirée. Cette rencontre était surréaliste, inattendue. Le message qu’il m’avait envoyé ce matin m’ancra de nouveau dans la réalité. À tête reposée, je me rendais compte que j’avais plein de questions restées sans réponses. Pourquoi revenir au bout d’autant de temps ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi vouloir redevenir mon ami ? Je ne connaissais plus Corentin, je ne savais pas ce qu’il était devenu et je ne savais pas si j’avais réellement envie de le revoir. Cependant, la curiosité avait été la plus forte.

    Ma journée au magasin passa à une vitesse hallucinante. Je rejoignis Corentin dans un salon de thé pas très loin, dans l’après-midi. Il m’avait prévenue par message qu’il était déjà à l’intérieur. Je rentrai donc et commandai un thé ananas-passion. En avançant vers la table, je l’observai. Il pianotait sur son téléphone en fronçant les sourcils. Il ne me vit donc pas arriver et leva la tête seulement quand je murmurais un timide « bonjour ». Voilà qu’il m’intimidait maintenant ! Il fallait que je me reprenne. Il m’adressa un faible sourire qui n’atteignit pas ses yeux. J’avais l’étrange sensation qu’il aurait voulu être n’importe où sauf ici. Bienvenue au club !

    — Je me suis pris un café, j’espère que tu ne m’en veux pas.

    — Non j’ai commandé un thé qui devrait arriver.

    La serveuse arriva à ce moment avec mon thé et je pus enfin faire quelque chose avec mes mains. Je pris ma tasse et y cachai mes lèvres tremblantes derrière. Je l’étudiais du coin de l’œil. Il était presque le même que dans mes souvenirs : grand, environ un mètre quatre-vingts, des cheveux dans les tons roux, des yeux noisette, des lèvres fines. Cependant, on pouvait apercevoir des muscles sous sa chemise et une fine cicatrice sur son front que je ne connaissais pas. Corentin tapa brièvement dans ses mains comme pour se motiver et engagea la conversation.

    — Je suis arrivé en ville il y a peu de temps. Je n’habite pas très loin d’un parc. Pour courir ou y pratiquer son sport, c’est sympa. Tu connais la rue Impasse des Dieux ?

    — Tu habites dans cette rue toi aussi ?

    Bordel, c’était quoi cette coïncidence ?

    — Oui, c’est calme et les gens sont sympas.

    — Comment tu m’as retrouvée Corentin ?

    — Marion. Je suis resté en contact avec elle. On se parlait souvent ces derniers temps. Mais depuis peu, je n’ai plus de nouvelles.

    Génial… Même partie, elle continuait à me pourrir la vie.

    — Elle s’est tirée avec ses affaires. Et avec les miennes par la même occasion. Alors, si tu cherches à la revoir, fais la queue. Quoique ce n’est probablement pas une bonne idée que je la croise à nouveau. Il se peut que je lui fasse bouffer ses doigts. Ou peut-être que je lui jetterais des assiettes à la tronche.

    Il a ri franchement et à gorge déployée mais j’étais (presque) sérieuse.

    — Si je la vois, je lui passerai le message.

    Son ton ironique ne m’échappa pas.

    Je lui parlais aussi de mes différents boulots. Du lundi au mercredi, et le samedi, je travaillais au magasin de chocolats avec Pierre. J’adorais mon boulot. Il m’avait permis de réellement savoir ce que je voulais faire de ma vie. J’aimais la communication, la création graphique et monter des projets, mais j’aimais encore plus le

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